Sous l’effet conjugué du désengagement de l’État et des efforts supplémentaires imposés par la dernière loi de finances, les collectivités locales voient leurs marges budgétaires fondre comme neige au soleil caniculaire. Face à cette équation de plus en plus intenable, elles scrutent désormais leurs dépenses à la loupe, quitte à procéder à des coupes franches. Conséquence à Rennes, la Métropole a serré la vis en juin dernier et a fait le choix de baisser ses dépenses de fonctionnement de près de 3 M€ et d’investissement de 13 M€. Ambiance.
Dans ce climat où chaque euro compte, on pourrait trouver absurde qu’une offre publique soit retoquée parce qu’elle est jugée… « Trop basse ». Et pourtant, c’est la règle : le code de la commande publique interdit de retenir une proposition anormalement sous-évaluée, au risque de voir le chantier partir en vrille. Un principe de précaution pas si théorique que ça dans une ville où les retards et galères de nombreux chantiers restent dans les mémoires : de la salle de l’Antipode à la ligne B du métro, de l’Usine de Valorisation Énergétique de Villejean à l’école de La Courrouze, etc.

Le projet « Porte de Tizé », piloté par Rennes Métropole, est un projet de développement urbain, qui consiste à réaliser une zone d’activité sur un périmètre opérationnel de près de 25 hectares, sous forme d’une zone d’aménagement à Thorigné-Fouillard. « Ce sera sans doute la dernière extension industrielle et artisanale intra-rocade et 100 % sur le territoire de la commune. », indiquait Gaël Lefeuvre, maire de ladite commune. Récemment, ce projet vient de connaître un épisode judiciaire assez original. En cause : l’attribution du lot n°2, consacré à l’assainissement des eaux usées.
En effet, une société de travaux publics, basée à Bourgbarré, a déposé une offre face à six autres entreprises. Mais sa proposition, d’un montant autour de 600 000 € HT, a été jugée « anormalement basse » par Rennes Métropole, car bien en dessous de l’estimation du maître d’ouvrage équivalente à 864 242 € (soit plus de 30 % inférieure), et de la moyenne pondérée des autres offres valables reçues équivalente à 856 415 € (soit près de 25 % inférieure).
Invitée en conséquence à fournir des justifications techniques sur le niveau global de son offre, l’entreprise a mis en avant des conditions exceptionnellement favorables dont elle bénéficierait pour exécuter les travaux, liées à l’utilisation de ses propres engins et matériels de chantier, à sa proximité géographique « lui permettant d’obtenir des tarifs préférentiels de la part des fournisseurs », mais aussi de « la possibilité d’évacuer des déblais à prix réduit du fait d’une communauté de dirigeant avec une autre société » basée au Rheu. Malgré certaines justifications satisfaisantes, Rennes Métropole n’a cependant pas jugé assez solide l’ensemble de l’argumentaire expliquant un tel écart. Son offre alors écartée, le marché a finalement été attribué à une société concurrente pour un montant de 805 435 € HT.
Contestant cette décision, l’entreprise de Bourgbarré a naturellement saisi le juge administratif, estimant que son éviction n’était pas suffisamment motivée. Le jour de l’audience, début aout, celle-ci s’est d’ailleurs ému que « les motifs réels du rejet de l’offre aient été communiqués seulement la veille de l’audience » tout en faisant observer que « Rennes Métropole est finalement revenue sur environ 75 % de ce qui a fondé le rejet de l’offre. »
Mais la justice a bien confirmé la position de Rennes Métropole qui, selon les magistrat·es, n’a commis aucune « erreur manifeste d’appréciation en écartant l’offre en raison de son caractère anormalement bas. »
+ d’1fos (ou pas) : à l’heure où nous publions ces lignes, il n’est pas encore établi si un appel sera interjeté.

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