Les Embellies 2015 : la programmation en détails

visuel Embellies 2015 - Yoann BuffeteauGrâce à une programmation riche et des plus soignées, entre découvertes, soutien à la scène locale et artistes confirmés, cette 17ème édition des Embellies viendra conforter une fois encore du 3 au 8 mars la place devenue incontournable que tient le festival dans l’agenda culturel rennais. C’est intelligent, malin, pointu, ouvert et surtout diablement excitant ! On vous présente.

Vous avez sans doute vu fleurir les superbes affiches de Yoann Buffeteau annonçant la prochaine édition des Embellies qui se tiendra ces prochains jours dans les rues de Rennes. A l’image de son visuel, volcanique, éruptive et colorée, mais surtout bigrement vivante, la programmation de cette année se révèle une nouvelle fois particulièrement alléchante avec une palanquée de propositions immanquables.

June, le retour. Par Mansfield.TYA

Ça commencera par le Graal (rien de moins) le mardi 3 mars à la Salle de la Cité avec notre duo préféré Mansfield.TYA. Julia Lanoë (voix, claviers, guitare, batterie et sushis explosifs) et Carla Pallone (violon, guitare, claviers et Vacarme de cordes à se damner) viendront présenter leur premier album… sorti en 2005. La tournée (joyeusement nommée) June, Ten years after accompagne en effet la réédition du premier long format de l’émouvant et facétieux duo, June, en format vinyle de 500 exemplaires sur le label Kshantu, avec un nouvel artwork, classe et sobre réalisé par l’imprimerie Trace et Benjamin Boré en série limitée. Le disque, épuisé, offre désormais de nouveau ses sillons au saphir de nos platines et se découvrira intégralement en version acoustique et lo-fi sur la scène de la salle de la Cité.

Mansfield.TYA - Photo presse © Rico Forhan

On imagine la joie de Stéphanie Cadeau, la programmatrice des Embellies qui rêvait depuis toujours de faire jouer les Mansfield.TYA. On ne vous cachera pas non plus la nôtre, tant on aime d’amour la musique des deux jeunes femmes. La faute à des disques à la beauté baroque et à la personnalité assumée. June en 2006, puis Seules au bout de 23 secondes en 2009, à la fois déglingués et lyriques, mélancoliques et violents, tendres et désespérés, nous avaient déjà bien entamés. On y avait souvent été remué par ces bouquets de nerfs offerts à fleurs de peau, ces fleurs du mal tout autant vénéneuses qu’apaisantes. Nyx, du nom de la déesse de l’obscurité, leur troisième album (Vicious Circle, 2011) autour du thème de la nuit, angoissante et apaisante, déchirée et tendre, a fini de saper totalement nos bases, fondant les univers de Julia Lanoé et Carla Pallone dans un équilibre magistral entre légèreté et pesanteur, humour et tendresse, obscurité et clarté. La faute aussi à des prestations intenses et belles, toujours justes, entre moments qui serrent la gorge et rires irrésistibles. On est souvent resté happé, le regard tendu sur le fil de leur complicité. Il risque d’en être de même ce mardi. Et pas que pour nous.

Carte Blanche à Fat Supper

L’an dernier, les Embellies avaient eu l’excellente idée de confier une carte blanche à Lætitia Shériff avant la sortie de l’essentiel Pandemonium, Solace and Stars (chronique là). Deux soirées qui se révélèrent juste exceptionnelles (voir le compte-rendu là) et qui auront marqué les esprits au fer rouge. Cette année, c’est à un autre (excellent) groupe rennais que le festival donne carte blanche : les Fat Supper ont ainsi concocté une alléchante soirée au Jardin Moderne samedi 7 mars. Composé du duo de feu Leo88man formé par Léo Prud’homme et André Rubeillon, rejoint par le batteur Pierre Marolleau (Fordamage, We Only Said, …) et Yoann Buffeteau (Montgomery), les Fat Supper avaient déjà joué aux Embellies l’an dernier, mais à Laval, au 6 par 4 (compte-rendu là). Cette année, Les Fat Supper ont été invités en résidence de création entre le Jardin Moderne à Rennes et l’Excelsior à Allonnes pour préparer la version live de leur nouvel album sorti en février dernier Academic Sausage (Les disques Normal). Épaulé par Mathieu Fisson désormais au son et par le collectif Grand Géant pour une création lumières, le groupe présentera donc le résultat de son travail ce samedi aux Embellies.

Fat Supper - Tournée des Trans 2013 @ l'UBUAprès un déjà très bon premier album (Fat Supper, 2013) et un ep (Flat Supper, 2013) tout aussi intéressant, la dernière livraison du quatuor rennais enfonce le clou avec un disque enregistré chez leur ingé son live d’alors, Antoine Lacoste, qui les a parfois aiguillés sur certains choix artistiques, et qui est parvenu à rendre leur énergie live sur galette. Cet Academic Sausage joue ainsi les montagnes russes, entre tensions et accalmies, mais toujours avec une âpreté de velours. Rock, mais ouvert aux influences, avec une lichette de noise, de garage, de guitares crades, des voix rocailleuse et/ou sensuelle, mais surtout des trouvailles rythmiques et harmoniques toujours au service d’une efficacité redoutable. Si vous ajoutez en plus une sacrée prestance en live, vous comprendrez qu’il ne faut pas les manquer ce samedi.

PneuPour cette soirée dont ils ont les clefs, les Rennais ont également invité les extra-terrestres Pneu qui, à chacune de leur prestation par ici, ont la bonne idée de nous envoyer au tapis à coup d’uppercuts sonores du meilleur aloi (qu’ils soient en duo ou avec leurs copains de la Colonie de Vacances). Le duo tourangeau (une vieille interview de 2011 ici) joue par terre, entouré du public et envoie le bois. Ça tricote, décoche, riposte et percute à une telle vitesse que vous risquez d’en perdre le souffle. D’autant plus si vous vous rapprochez de l’épicentre sismique formé par le duo.

Lignes de guitare haute tension, batterie à la puissance nucléaire, Pneu ne fait rien à moitié et allie énergie dévastatrice et complexités rythmiques tout en finesse. Leur dernier album en date (Destination Qualité, Head Records, janvier 2015) se révèle tout aussi burné que les précédents et dézingue 9 titres à la vitesse supersonique (avec l’apparition de Pete Simonelli -Enablers- et son extraordianire voix grave sur Hinges). On risque donc encore de se prendre une déflagration de math noise direct dans les gencives samedi, et d’en redemander.

On sera également ravi de retrouver les sacrément facétieux Gablé (une autre vieille interview de 2011 ici) pour un concert qu’on imagine une nouvelle fois en total décalage contrôlé. Cela fait maintenant bien plus de dix ans que le trio Gablé, formé de Gaëlle, Mathieu et Thomas, ne cesse de surprendre et d’étonner son public par cette musique bidouillée, bricolée, pianotée sans se soucier des carcans et des structures classiques. Les maîtres ès lo-fi et bidouillages soniques sont toujours formidables en live et ne sonnent jamais tout droit, pour notre plus grand plaisir. Les trublions caennais adeptes du bricolage musical et véritables ovnis de la scène indé n’auront pas de tout nouvel album sous le coude (l’hybride et bien barré MuRDeD date de mars 2013) ce samedi, mais ont dans leur besace une tripotée de titres à tiroirs et virages, assemblés depuis plus d’une dizaine d’années avec un art d’orfèvre halluciné, dans lequel ils piocheront avec bonheur. Et qui sait, peut-être nous donneront-ils à entendre quelques uns des morceaux qu’on pourra découvrir dans leur nouvel album prévu pour cette année. Il faudra y être pour le savoir !

Gablé - Photo Marco

En plus de ces trois concerts, les Fat Supper ont eu la donne idée de proposer au Collectif Vitrine en Cours de réaliser des projections (habillage d’espace avec des projections de diapositives et film 8 ou 16mm que les artistes manipulent, superposent pour nous immerger dans leur univers) durant la soirée, ainsi que de mettre en avant le talentueux Eric Mahé qui proposera un atelier de sérigraphie. « Ramenez votre t-shirt, serviette, suaire ou slip kangourou, Fat Supper et Eric Mahé embelliront vos tissus avec un visuel spécial pour l’occasion » nous promet-on. La soirée donnera également l’occasion au plus grand nombre de découvrir l’expo en cours : Nicolas David présente en effet son exposition Photo en cours depuis le 19 février sur les murs du Jardin Moderne et ce sera quasi l’ultime occasion pour la découvrir. Enfin, pour mettre tout le monde dans l’ambiance Dj EXP alternera entre K7 et vinyles, voire expérimentations en tout genre. Et vu sa maison d’origine (Impersonal Freedom), on ne peut qu’en attendre du très bon.

Centenaire, pour une clôture hyper classe

On attend également, curieusement avec impatience, le dernier jour du festival. Non qu’on ait véritablement envie que ce soit fini, mais le dimanche en fin d’après-midi, ce sont les Centenaire que l’équipe des Embellies a eu envie d’inviter au Jardin Moderne pour clore le festival. Et ça, les amis, c’est plus qu’une excellente nouvelle. Formé en 2006, l’autrefois (puis de nouveau) trio parisien est de ceux dont vous apprenez à attendre chaque album avec une indéfectible fébrilité. Au départ mené par Damien Mingus aka My Jazzy Child, Aurélien Potier et Axel Monneau aka Orval Carlos Sibelius, Centenaire avait pour envie de débrancher ses instruments et de partir sur un tout acoustique aux oreilles chercheuses. Avec l’arrivée de Stéphane Laporte (Domotic), d’un mini-kit de batterie et d’un orgue électrique, les Centenaire ont encore élargi leur palette et leur prog-folk initial a progressivement évolué. Après un premier album sans nom en 2007 et la sortie de l’indispensable The Enemy (Chief Inspector / Clapping Music – 2009), merveille de pop alambiquée à l’intelligence redoutable, Axel Monneau a quitté ses comparses pour réactiver Orval Carlos Sibelius (dont on vous a souvent ici chanté les louanges).

CENTENAIRE-©-Miguel-Constantino

Redevenu trio Centenaire a alors planché sur un ep (Ste Croix) sorti à l’été 2014, prémisse à un nouvel album paru à l’automne, Somewhere Safe. On y a retrouvé avec le même bonheur une science de la composition toujours de haute voltige, à la différence près que le groupe, sans renier les mélodies pour autant, a cradossé ses guitares et sali ses sonorités à coup de fuzz et de perturbations sonores loin de nous déplaire. Désormais qualifiée par son label (Clapping Music) de « prog garage », la musique des Centenaire reste pour autant toujours aussi passionnante. On sait que parfois, les Centenaire sont rejoints par un second batteur sur scène. On ne sait ce qu’il en sera ce dimanche, mais en trio ou en quatuor, on a tout autant envie de se laisser happer par les développements imparables des Centenaire. Immanquables.

Retour du ciné-concert et de Lætitia Shériff… mais pas toute seule

Le ballon Rouge Albert LamorisseLe vendredi 6 mars, c’est la bibliothèque Lucien Rose qui se fera l’écrin d’un début de soirée enchanteur. L’équipe des Embellies nous convie en  effet à assister à un ciné-concert autour du film Le ballon Rouge, moyen métrage réalisé par Albert Lamorisse, sorti en 1956.

Dans le Paris des années 50, dans les rues de Ménilmontant, un petit garçon escalade un lampadaire pour délivrer un ballon rouge avec qui il va nouer une étonnante amitié (on ne vous en dit pas plus). Le film, récompensé par une palme d’or, sera ce vendredi soir mis en musique par un trio : en plus de Lætitia Shériff (interview de l’an dernier ici) qui s’était déjà essayée avec une classe insondable à l’exercice du ciné-concert (report là), on retrouvera François Ripoche à la batterie et le guitariste Stéphane Louvain (French Cowboy, Little Rabbits, I’m7teen, …). Et autant dire qu’on a hâte de découvrir ce que les trois magiciens ont pu concocter.

A noter : la projection du film sera précédée par une introduction visuelle/prélude de l’artiste Pierre Guffet.

Folktronica à l’Antipode MJC

Le jeudi soir (5 mars) ce sera direction l’Antipode pour (re)découvrir trois artistes dans la mouvance « folktronica » . On y retrouvera Gérald Kurdian (qu’on avait déjà pu croiser sous l’alias This is Hello Monster ! et sur un premier album sorti en 2010) et sa pop électro épurée, basée sur des claviers, des samples et la voix de son auteur, en français pour ce qu’on a pu en entendre. Mais également une autre artiste repérée par le Fair qui en est aujourd’hui à son second album, Mina Tindle et qu’on a déjà pu entendre sur Rennes. La jeune femme, lancée sur scène, sur la foi de premiers retours positifs autour de ses premières démos, par les Eurockéennes où elle avait auparavant travaillé au service presse (pour la petite histoire) a depuis sorti un premier album Taranta (2012) pour lequel elle avait confié les manettes à JP Nataf, puis un second, donc, Parades, en 2014, qui s’affiche encore plus décomplexé. Pour les amateurs de pop féminine à la Ladylike Lily.

FolktronicaOn est pour notre part carrément impatient de retrouver Louis Warynski aka Chapelier Fou. Après deux albums au compteur, le poétique 613 en 2011 puis Invisible en 2012, qui creuse encore de nouvelles directions, ainsi que quatre eps tout aussi recommandables, l’homme au pseudonyme Lewis Carollien a cristallisé son approche sur un troisième album particulièrement réussi, Deltas. Le Messin construit ses morceaux à coups de boucles superposées, judicieux mélange de samples rythmiques aux reflets presque organiques, de nappes de synthé, de mélodies tout aussi accrocheuses que raffinées, de riffs à l’alto ou à la guitare… Son utilisation de sonorités acoustiques, notamment sur 613, donne à la fois à ses morceaux une atmosphère onirique et un sentiment de proximité. Si Invisible se fait parfois plus électronique dans ses sonorités, il ne perd en rien de sa capacité à vous émouvoir en quelques mesures (Fritz Lang, en tête). Avec Deltas, les approches organiques et électroniques continuent de se télescoper mais semblent trouver leur plein équilibre (on pense par exemple à l’excellent Tea, tea, tea). Le jongleur de samples à l’alto semble encore avoir franchi un pas dans la maîtrise de ses explorations. Autre excellente nouvelle : Chapelier Fou se produira sur scène accompagné d’un violoncelle, d’un alto et d’une clarinette. On vous (se) promet un chouette moment.

Chanson pop en français avec La Féline

Et puis si vous n’en avez pas encore assez, rendez-vous vendredi 6 mars pour une ambiance plus intimiste au Sablier avec la chanteuse et guitariste Agnès Gayraud aka La Féline pour de la chanson pop en français. Voix délicate, résolument tournée vers la dreampop, la Féline a sorti un premier album Adieu l’Enfance en 2014 mais réalise aussi des ciné-concerts pour les tout-petits. Au Sablier, ce sera plutôt la version chanson pop que vous pourrez découvrir.

LA-FELINE-©-Alexandre-Guirkinger

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Les Embellies auront lieu du 3 au 8 mars 2015 à Rennes.

Plus d’1fos sur le site des Embellies : http://festival-lesembellies.com/

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