After Travelling à l’Ubu: petite bafouille avec Rémy Kolpa Kopoul, DJ

RKKphoto5À l’occasion de Travelling Rio, l’Ubu, comme chaque année maintenant, propose des afters (23h/5H) avec des mixs en lien avec la ville invitée. Cette année, ce sont les deejays Tom B (Avenida Brasil) et Rémy Kolpa Kopoul qui s’y collent pendant trois jours. Quelques questions à l’éclairé RKK, légendaire animateur radio (Nova), critique musical et DJ, spécialiste des musiques du Brésil:

Alter1fo: On a proposé une discographie de 10 disques de la ville de Rio sur notre site: tu aurais des disques à rajouter?

Rémy Kolpa Kopoul (RKK): Bonne liste, diagonale pertinente et argumentée sur les époques et les genres. Parfait.
J’y ajouterais…

João Bosco : Obrigado gente (ao vivo). Le chroniqueur espiègle des rues cariocas, samba et bien plus, onomatopées afro et dribbles avec les mots. Un album live en guise de florilèges.

Chico Buarque : Quando o Carnaval chegar. « La » conscience du Brésil dans ses sombres années de dictature, quand la poésie faisait la nique à la censure. Depuis plus de 40 ans, le pays entier chante le Chico Buarque des joies, des peines, du foot et, dans ce cas, du Carnaval.

Caetano Veloso : « Cinema Transcendental ». Un titre d’album approprié au festival, par ce fou de cinoche, dans sa jeunesse critique de films qu’est Caetano Veloso. Avec, notamment « Menino do Rio », qui fleure bon le sable chaud des plages de la Cidade Maravilha. cinema-transcendental

Vinicius Cantuaria : Samba carioca. Derrière un feeling doux-amer, un groove minimal mais implacable. Vinicius, New Yorkais depuis trois décennies, regarde »son » Rio dans le rétroviseur, la distance n’efface pas les sentiments, et ses chansons exhalent l’humus tropical d’après la pluie d’orage

Fernanda Abreu : Raio X. Le funk, pas le bal funk, mais celui de l’autre Amérique, en version tropicale. Avec la chanson « Rio 40 graus » et son texte implacable : « Rio 40°, ville merveilleuse, purgatoire de la beauté et du chaos, capitale du sang chaud du meilleur et du pire du Brésil ».

​​- Compilation : More Favela Booty Beats. Les bals funk qui agitent des millions de jeune cariocas tous les week ends, avec les MCs posant leur flow sur les méga basses des DJs, héritées de Miami. Ca sent la sueur et le sexe, ce défouloir aux tempos frénétiques cartonne aux USA (Diplo, MIA) et à Berlin. Une autre image de Rio, trash et survitaminée.

On te connaît spécialiste des sons brésiliens (entre autres), as-tu aussi tes coups de coeur cinéma brésilien, puisque ce festival lui est dédié?

« Limite » de Mario Peixoto : Chef d’œuvre absolu et visionnaire du cinéma muet, images bluffantes d’une avant-garde planétaire et pourtant bien brésilienne, en 1930.

« Dieu Noir et Diable Blond », de Glauber Rocha. Le 1° film du cinéma novo​​ que j’ai découvert en 1967, roots et baroque, tropicaliste avant le tropicalisme.

« Macunaima » de Joaquim Pedro de Andrade, film anthropophage, courant littéraire des années 20 dont une plume foisonnante était tenue par Mario de Andrade, autour de ce « Macunaima ». Truculent et foldingue.

Bahia« Jubiaba (Bahia de Tous les Saints) » de Nelson Pereira dos Santos, d’après le livre de Jorge Amado, pas forcément un chef d’œuvre de ce géant du cinéma brésilien, mais comme j’y tiens un -tout petit- rôle, donnant la réplique à… Julien Guyomar…

« Shooting » de Juliana Reis. Dans les films récents où se reflète l’âme de Rio, plutôt que le rouleau compresseur « Tropa de Elite », un petit film autour d’un accident qui dégénère. Les nuits cariocas ne sont pas toujours fréquentables mais gardent leur charme.

« Saravah » de Pierre Barouh, un DVD indispensable en ce qu’un Français traque les sons anthologiques de Maria Bethânia, Pixinguinha, Baden Powell, Paulinho da Viola. Une balade sans but qui fait vivre un pan décisif de l’histoire de la musique

La musique brésilienne de ces dernières années te passionne-t-elle toujours autant où y vois-tu un appauvrissement?

Appauvrissement ? Je ne verse pas dans le « saudosime », la culture de la nostalgie, le Brésil a le don d’indéfiniment propulser​​ de nouveaux artistes, les derniers en date, Meta Meta, trio afro-psyché de São Paulo que je programme le 31 mars dans ma soirée « Lundi c’est Rémy » au Comedy Club de Jamel Debbouze, à Paris. Ceci dit, cela fait 35 ans que je termine ainsi toutes mes écritures sur Caetano Veloso : « S’il n’en reste qu’un (au monde)… »

Quel est le menu pour ces appétissantes soirées à l’Ubu? Surprise du chef?

La réponse est dans la question : surprise ! Pas compliqué dans un pays aux influences si variées. Il faut juste parler au cœur et aux pieds​​.

Le festival est chaque année dédié à une ville différente. Pour quelle autre ville du monde souhaiterais-tu mixer, une autre année?

​Là où je peux assurer sur au moins une soirée : Buenos Aires, Bucarest, Alger​, Tokyo, Bogota, Bamako, La Havane, Dakar…

Merci RKK! et à demain!

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27, 28 février et 1er mars, 23h-5H, 5eur (membres ADMIT), 10 euros (plein tarif). Ubu Club, rue Saint-Hélier

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