L’album Digital du trio rennais Silencio est une des plus belles surprises musicales de cette rentrée scolaire 2018. Comme sortis des brumes, ces dix titres sont venus hanter nos oreilles avec une fascination grandissante. Nous avons donc posé quelques questions au trio, histoire de lever (un peu) le mystère de ces dix beautés rêveuses et fantomatiques.
Derrière le projet Silencio, on retrouve trois artistes locaux dont nous suivons très attentivement les aventures depuis déjà quelques temps. Le trio est ainsi composé de Johan Le Velly (à la voix, guitare, basse et claviers), de Sandreen (à la voix, guitare et claviers) et d’Oscar Philéas (à la batterie, percussions, basse). On avait déjà adoré leur projet Profondo Rosso ou My Sleeping Doll et nous avions donc de hautes attentes sur cette collaboration. Le résultat les dépasse toutes. On a donc voulu en savoir plus sur les arcanes de cette magnifique alchimie et nous avons posé quelques questions à Johan Le Velly.
alter1fo : Vous avez déjà tous les trois joué dans d’autres formations. Comment s’est passée la rencontre ? Est-ce que vous vous connaissiez avant ? Sur quelles envies ou références s’est formé Silencio ?
Johan Le Velly : On se connait avec Oscar Philéas depuis les années 90 à Lamballe, notre ville d’origine où nous jouions chacun dans un groupe, ensuite je l’ai accompagné à la guitare pour son projet de chansons françaises Tralala. Depuis son retour de Paris et la fin du groupe Profondo Rosso, je lui ai proposé de jouer dans ce nouveau projet musical que je voulais en langue française pour Jawsmusic, c’est devenu Silencio. Nous nous sommes rencontrés avec Sandreen à un concert de Møller Plesset à Rennes en octobre 2017 par l’intermédiaire d’une amie commune de l’association K-FUEL. J’avais donc les idées musicales et quelques textes puis d’autres musiques sont nées de la rencontre et du travail commun et chacun a pu contribuer à des textes.
D’où vient ce patronyme qui sied si bien à votre musique ?
Sandreen a proposé le nom de Silencio. C’est aussi un titre de Profondo Rosso en référence à un western italien (NdR Le Grand Silence, chef d’œuvre glaçant de Sergio Corbucci), ce qui crée un lien qui résonne très bien en « o »!
Nous avons été étonnés par le nombre et le côté très abouti des morceaux que vous avez mis en ligne. Quand un groupe se forme, on a plus souvent d’abord droit à deux ou trois titres. Qu’est-ce qui a fait que votre rencontre ait si vite été fructueuse ?
Nous avons d’abord diffusé deux titres en juillet, histoire de donner un aperçu. Je travaillais sur les morceaux depuis plusieurs mois déjà dans l’optique d’un album en français et nous avions quasiment posé toutes les bases avec Oscar Philéas. Il se trouve que les choses se sont bien déroulées dans le travail, Sandreen ayant beaucoup apporté dans les créations vocales et l’écriture des textes.
Où et comment s’est passé l’enregistrement des dix titres ?
Nous avons surtout enregistré à Rennes dans mon petit studio, mais aussi durant les répétitions au Jardin Moderne et au studio Dingé Son chez Oscar Philéas. Nous avons souhaité maitriser la production du début à la fin, de la composition au mixage.
Est-ce que ce sont des versions « définitives » ou est-ce que vous aimeriez les retravailler ?
Je pense que ce sont les versions définitives; je serais plutôt tenté par des remix personnellement, mais rien n’est commencé à ce niveau-là.
Sandreen chantait jusque là surtout en anglais, comment s’est porté finalement le choix du français ? On adore la façon dont sa voix « se pose » dans notre langue. Y a-t-il eu un travail particulier sur ce point ?
L’idée de « Digital » était de faire un album avec des influences de musique anglaise (new wave, trip hop) chanté en français, dans notre langue natale. Ça a été très intéressant à faire, ainsi que les chœurs qui rappellent aussi Ennio Morricone. Nous sommes davantage allés dans du « posé », parlé, plus que vraiment chanté.
Vous avez tous les trois écrit des textes. Comment est venue cette répartition ? Quel est la place des textes dans votre façon de composer ?
La place des textes a été très importante dans l’élaboration thématique de l’album. Il fallait une cohérence dans l’ensemble; un lien entre la terre et l’espace, la naissance et la fin, la physique et la métaphysique. Je n’avais pas tous les textes à l’avance donc chacun a apporté des idées. Nous avons posé les voix sur les musiques préexistantes.
Le fait que l’album s‘appelle Digital exclut-il toute possibilité de sortie physique du disque ?
Nous avons réalisé un cdr à cent exemplaires. le projet reste une autoproduction avec des moyens limités.
Comment s’est déroulée la collaboration avec Gilles Trotin de Møller Plesset pour les visuels de l’album ?
Il avait fait une exposition très aboutie au Jardin moderne un an auparavant. Il se trouve que Sandreen avait eu la même idée pour son projet My Sleeping Doll. Nous nous sommes vus avec Gilles et les choses se sont passées très simplement, ses visuels existaient déjà et correspondaient exactement à l’idée de l’album dans la forme et la démarche créatrice.
Quels changements ou différences ressens-tu dans Silencio par rapport à tes projets précédents ?
Avec ce projet « Digital » je voulais revenir à mes premières influences, aux groupes qui m’ont vraiment donné envie de jouer, d’apprendre un instrument de musique; il se trouve que nous nous sommes tous les trois retrouvés sur cette longueur d’onde: les références aux années quatre-vingt, anglo-saxonnes, et aussi l’influence très grande du trip hop. Au niveau formel je ne vois pas vraiment de différences car nous sommes dans le même mode de fonctionnement que Jawsmusic ou Profondo Rosso, la même envie de faire les choses par nous-mêmes à notre rythme et à notre façon, l’idée étant de garder la liberté et le contrôle de notre musique.
Le mixage du son est une phase prépondérante et au fil du temps on se rend bien compte que ça peut avoir presque autant d’importance que les morceaux eux-mêmes. La technologie permet de faire beaucoup de choses aujourd’hui et le traitement du son peut être compliqué à réaliser, c’est donc un travail de fourmi assez fastidieux mais le résultat peut s’avérer stimulant, surtout lorsqu’on a peu de moyen pour faire un disque.
Pourra-t-on un jour entendre ces titres jouer sur scène ? Est-ce que vous travaillez sur d’autres compositions ?
Nous n’avons pas encore de projet scénique, à voir avec le temps; un autre projet d’enregistrement est en cours…
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