Inmybed met tout le monde dans son lit

Pour célébrer dignement la sortie de leur excellente compilation Embedded, le label rennais Inmybed organisait, samedi 26 octobre au Jardin Moderne, une somptueuse soirée avec pas moins de 12 concerts avec la quasi-totalité des groupes présents sur le vinyle. Retour sur un superbe festin musical, riche en bonheurs Rock’n’Roll, mais surtout embelli par une réjouissante complicité.

Embedded: vente de disques

Si vous avez déjà acheté un des disques ou un des livres sortis par le label Inmybed, vous savez que ce sont des gens ayant à cœur de faire les choses bien, aussi bien artistiquement qu’esthétiquement. Logiquement, quand ils s’agit de célébrer la sortie d’Embedded leur superbe compilation regroupant 13 groupes présentant leur réjouissante vision d’une certaine scène locale, ils ne pouvaient pas faire les choses à moitié. Ils nous donnaient donc rendez-vous au Jardin Moderne, samedi 26 octobre, avec un savoureux marathon de 12 concerts. Tous les groupes présents sur le disque (sauf Saïtam, alias Mathias, qui en tant que régisseur du Jardin a couru toute la soirée pour rendre tous ça possible) avaient répondu à l’appel. Incapables de choisir dans une telle abondance de talents, nous nous sommes donc livrés à un délicieux et vertigineux jeu de ping-pong entre scène du bar et salle de concert. Les prestations s’enchaîneront sans répit, avec une impressionnante fluidité et surtout une ponctualité remarquable. Les habitués des salles de concert vont avoir du mal à le croire, mais au fil de la soirée ce sera avec un décalage d’à peine une quinzaine de minutes par rapport au planning prévu, que s’enquilleront les prestations.

MozzarrelasFuneralParlor@JardinModerne-alter1fo (1)

Le redoutable honneur d’ouvrir le bal revenait à Lilian, échappé de Formica pour son Mozzarrela’s Funeral Parlor. Pour cette historique première (et unique?) prestation, il est accompagné de Gilles Papillon à la batterie et de son cousin d’Olivier Bresteau à la seconde guitare. Le concert est aussi bref que touchant. On retrouve avec délice la nonchalance et le côté brut de ces «chutes» de compositions de Formica. A peine quatre courts morceaux, dont l’imparable hymne : Lose is the rule, et c’est déjà le final avec en classieux bonus une reprise de la machine à frissons : Fade Into You de Mazzy Star. Comme pour chacun des concerts de la soirée, on aurait volontiers prolongé le plaisir mais timing très serré oblige, il faut faire dans l’intense et le concis. Une ouverture parfaite, malgré la tension visible du trio, toute en sensibilité abrasive, où la fausse indolence sait se parer de larsens vivifiants.

Lonely Tunes @ Jardin Moderne - alter1fo (13)

Direction la grande scène, pour un second temps d’ouverture parfaitement raccord avec le premier. Le trio Lonely Tunes joue une poignée de morceaux aux charmes slack-rock tout à fait plaisants. On a bien sûr droit au pétillant Winter Comes du vinyle (leur premier morceau gravé sur disque). On sent encore un peu de fébrilité et de jeunesse, par exemple quand ils demandent, un peu inquiets, combien de chansons ils doivent encore jouer, mais à nouveau la séduction opère. Pour conclure en beauté le set, la bande dégaine un autre savoureux cover : l’irrésistible indy-tube  friend de QuickSpace. Choix parfait pour une soirée où on pressent bien qu’au-delà d’une sensibilité indy-rock, c’est surtout une histoire de famille et d’amitié qui fait le lien entre tous ces gens.

Chatterbox@JardinModerne-alter1fo (1)

On reste dans la délicatesse avec le duo Chatterbox. Camille et Jéremie (encore de l’omniprésente mafia Formica) jouent face à face, elle au clavier, lui à la guitare. Ils chantent tous les deux. La voix rauque et râpeuse de la demoiselle s’allie joliment aux accents nasillards du monsieur. Leurs morceaux sont brefs et d’une simplicité à nouveau pleine de charme. Avec à peine une vingtaine de minutes, c’est encore un concert qui passe trop vite mais on commence à se faire à l’idée.

DowntownCuckoo@JardinModerne-alter1fo (6)

Les choses vont se durcir ensuite avec l’arrivée sur la scène de la salle de concert des Downtown Cuckoo. Le quatuor est visiblement là pour en découdre. Ils ont sept morceaux pour tout donner et ils ne vont pas s’en priver. Ils dégainent d’emblée leur terrible Djeraba qui nous met tout de suite en condition. Basse suave et tordue, batterie ensorcelante, guitare incisive et phrasé impérial, tout est en place pour une démonstration jouissive d’efficacité post-punk. On savoure avec délice l’imparable Sensitive File ainsi qu’une longue version instrumentale du In search of lost time de la compilation. Une très belle décharge haute tension qui nous rappelle que la suite ne devraient pas manquer de monter en puissance.

SantaCruz@JardinModerne-alter1fo (4)

Santa Cruz par Yann :
Pierre-Vital nous avait confié : « On ne sera pas au complet, mais on sera là ! » C’est donc en trio que Santa Cruz s’installe sur la scène du Café Culturel. On avait eu la chance de les voir en trio acoustique aux Champs Libres en mars dernier, mais les compostions ont pris ce soir des atours électriques. Avec un duo rythmique composé de Jacques Auvergne à la basse et Alex Tual à la batterie, et Pierre-Vital Gerard au chant et à la guitare électrique. Ça commence fort avec le classique Before The Rain qui donne le ton : un (trop court) set électrique, qui fait ensuite la part belle au dernier album Elvis in Acapulco. La douceur de Sesame Noodles contraste avec la tension de The Way It Is et l’énergique You Never Know. En acoustique ou en électrique, les magnifiques compositions du dernier album bénéficient d’arrangements ciselés. Avec forcément un clin d’œil à la compilation Embedded, et le magnifique Sad and Lonely et son refrain aux accents Beatles. En pleine tournée acoustique, le groupe s’est offert un intermède électrique réjouissant.

13thHole@JardinModerne-alter1fo (8)

Nous avouons que nous avions un peu perdu de vue les 13th Hole. Leur redoutable Catch de Ferry, placé sournoisement en seconde position de la face A d’Embedded, nous avait rappelé à quel point nous avions eu tort. Nous étions donc très impatients de nous faire remettre les pendules à l’heure par le combo franco-italien. Ça n’a heureusement pas manqué. La rayonnante de charisme Isa Valenti, au chant, est toujours entourée de sa belle bande : Hervé L’hostis et Pascal Jollivet aux guitares, Loïc Geffroy à la basse et Stéphan Le Scouarnec à la batterie. Après 20 ans de service et Magic Number, leur sixième album arrivant très prochainement, le groupe ne semble avoir rien perdu de sa complicité, de son énergie et de ses envies. Leur rock abrasif parfaitement maîtrisé est une vivifiante bouffée d’adrénaline qui galvanise un public nombreux et sous le charme. Un des grands moments de cette soirée assurément.
Nous ne sommes pas des grands spécialistes de leur discographie, mais ils nous a semblé surtout entendre des morceaux nouveaux. Ça laisse augurer du meilleur pour leur prochaine galette.

ProsperiBuri@JardinModerne-alter1fo (5)

Retour à la famille avec Renaud, alias Prosperi Buri, qui joue sur la petite scène du bar, accompagné d’Hélène à la basse, de Joffrey (ex Formica) à la batterie et de son cousin Matthieu (de Formica encore, et qui gagnera haut la main la palme du plus présent sur scène ce soir là) en seconde guitare. On retrouve avec beaucoup de plaisir le songwriting nonchalant et la voix fausse, juste ce qu’il faut, du monsieur. Pour s’inscrire dans le mouvement général, le set est assez électrique et ils s’en donnent à cœur joie dans les larsens et les rugissements de guitares. Une musique directe et simple, dans le bon sens du terme, qui va à l’essentiel avec une élégance certaine.

SuddenDeathofStars@JardinModerne (7)

On délaisse momentanément les terres indy-rock-lo-fi pour les espaces hallucinogènes des Sudden Death of Stars. Après le dépouillement des Prosperi buri, ça fait son petit effet de voir installer sur scène 7 musiciens dont un spectaculaire sitar électrifié et une guitare douze cordes. Comment se distinguer dans la masse du revival psyché-rock actuel ? C’est simple, il «suffit» d’avoir de bonnes compos, et ces gars (et fille) en ont à revendre. On ne sait pas si c’est le format court imposé par la soirée ou un pied de cymbale taquin qui les gènent mais on les sent un peu nerveux, alors que leur prestation est pourtant plus que convaincante. C’est certain que sur ce genre de musique, il faudrait un poil plus de marge pour se laisser emporter complètement mais leur set confirmera au moins qu’il faudra guetter avec la plus grande attention leur second album qui sortira en mars 2014, chez les anglais d’Ample Play Records.

LaetitiaShériff@JardinModerne (13)

On attendait beaucoup de la prestation de Laetitia Shériff mais, si ce fut indubitablement un temps fort, ce fut aussi la pire frustration de la soirée. La dame n’interprétera en effet que trois petits morceaux. Reste que même sur un temps aussi court, elle sait se montrer toujours aussi impressionnante. Accompagnée du diabolique jeu de batterie de Régis Boulard, elle donne instantanément son maximum. Voix fiévreuse, jeu de guitare puissant et atmosphérique à la fois, c’est à nouveau le grand frisson. Surtout quand l’inévitable Matthieu vient la rejoindre pour conclure ce splendide orage par un Big Sur terrassant de fureur et de beauté. On reste un peu abasourdi que ça s’arrête aussi brusquement mais Laetitia nous a préparé quelques petites surprises qui nous consoleront largement par la suite.

Møller Plesset@jardinModerne-alter1fo (20)

Au jeu des pronostics du meilleur concert de la soirée, les Møller Plesset avaient une côte d’enfer dans l’équipe d’alter. Ça n’aura pas manqué. En à peine 5 morceaux, le quatuor va livrer une prestation saisissante de bout en bout. Ça démarre plein pot avec le tapping diabolique d’I hear, suivi de l’accélération enivrante de Love Affair in Chemitz. C’est au troisième morceau avec l’arrivée d’Isa valenti venue interpréter la version du morceau Megavix où elle était invitée en guest sur le second album du combo, que l’on comprend à quel point ça va être bon. Le plaisir de retrouver en live le superbe duo/duel de voix est immense, surtout qu’on se doute à se moment là qu’Isa ne sera pas la seule présence féminine à accompagner les Møller. Le temps de se prendre en pleine face le furieux My Job qui embrase la face B de la compilation, et on a la joie de voir monter sur scène Lætitia Shériff. La seconde invitée vocale de The Pertubation Theory vient donc les retrouver pour interpréter la superbe version du terrible Purple Rape. A nouveau, c’est un pur moment d’extase. Les voix de Gilles Trotin et de Lætitia s’emmêlent et s’entrechoquent dans un titanesque et fraternel chaos. Pour nous, ce fut l’apothéose d’une soirée pourtant très riche en moments forts et en prestation de grande classe.
Trop court bien sûr, mais trop bon.

MistressBombH@JardinModerne (3)

Comment enchaîner derrière ça ? Les rusés organisateurs avaient bien préparé leur coup en jouant la rupture de ton totale avec Mistress Bomb H. La transition se fera en finesse avec la présence à nouveau de Laetitia Sheriff tenant la basse pour l’épatant Money Shit qui nous a tant plu sur la compilation. Cette excellente introduction passée, la capuche tombe et la Miss peut se lâcher totalement. Elle ne va pas s’en priver. Des beats indus froids et galvanisants, et des infra-basses telluriques vont rapidement remplir la salle du bar. La demoiselle Bombe H plaque là dessus son flow acide et langoureux avec fureur, malice et surtout un entrain spectaculaire et communicatif. Un set totalement à contrepied du cours de la soirée, mais qui aura apporté une belle bouffée d’énergie punk au moment où les jambes commençaient à se faire lourdes.

Formica@jardinModerne-alter1fo (4)

Nous voici donc déjà au bout de ce superbe samedi. Il est 1h30 et on n’a pas vu une seule seconde passer. En piliers du label Inmybed, les Formica s’étaient réservés le privilège de conclure le feu d’artifice. Place d’honneur, pas si sûr, puisque chaque retard accumulé sur le déroulement, leur réduisait d’autant leur temps de jeu. Heureusement tout le monde a joué le jeu et les gars vont avoir un temps (trop bref forcément) mais raisonnable pour boucler le tout. C’est l’occasion de découvrir la frappe puissante de Bertrand le nouveau batteur qui aura été gâté pour son premier concert avec le groupe. Ils nous livrent pour notre plus grand plaisir un joli paquet de nouvelles compos (y compris évidemment le tube True/Wrong qui ouvre fièrement la compilation) et concluent en beauté sur le tonitruant My Story. Ce ne fut sûrement pas le concert le plus énergique d’eux qu’on ait vu, on sent que l’organisation de la soirée les a bien occupés, mais certainement un des plus touchants, tant leur joie d’avoir mené le projet jusque là est communicative.

Formica@jardinModerne-alter1fo (9)

Merci donc Jérémie, Lilian, Matthieu et tous les autres participants au label Inmybed pour ce superbe disque et cette généreuse soirée où le public aura largement répondu présent. La phrase qui aura été le plus été prononcée sur scène aura été «Merci Inmybed», juste derrière «Ceci est le titre de la compil». Merci au Studio ZF et au Jardin Moderne d’avoir fait les propositions qui ont tout rendu possible. Merci à tous les groupes d’avoir joué le jeu. Bravo aux techniciens d’avoir tenu un roulement de groupes aussi fluide malgré le nombre hors-normes de concerts.

Au-delà des liens musicaux et artistiques qui relient cette belle bande de gens, la compilation comme la soirée ont surtout montré que si le disque et les concerts ont été aussi réussis, c’est surtout grâce à l’amitié, la complicité et la fidélité qui soudent tout ce beau monde. Pour partager un peu de ces choses précieuses, il vous suffit simplement d’acquérir le vinyle Embedded. Allez-y, ça vous fera un bien fou.

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Retrouvez toutes les interviews dans notre dossier Embedded.

1 commentaires sur “Inmybed met tout le monde dans son lit

  1. Inmybed

    Et merci à Alter1fo pour le gros travail réalisé à l’occasion de la sortie de cette compilation et pour ce superbe article final.

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