C’était LA soirée nordique du Grand Soufflet édition 2019 : trois propositions du Grand Nord pour les curieux de musique qui n’ont pas cours sous nos latitudes. Entre la chamane Olena Uutai, les énergiques Suistamon Sähkö et les vikings de Steve’N’Seagulls, nos oreilles ont voyagé loin samedi soir.
Crédits photos : Loewen photographie qui a gentiment accepté d’illustrer notre article. Encore merci !
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Nature sibérienne et sons chamaniques
Olena Uutai était sans conteste l’artiste à découvrir lors de cette édition du Grand Soufflet 2019. Le coup de coeur d’Etienne Grandjean, le programmateur du festival. Une artiste étonnante, virtuose de la guimbarde khomus, cette harpe à mâchoires qu’elle pratique depuis son enfance.
C’est par cet instrument qu’elle démarre son concert, toute auréolée de fourrures et de bijoux. Entre les sons, son souffle et sa respiration se laissent entendre. Les vibrations et sons distordus occupent le chapiteau et tout l’espace phonique. Une entrée en matière surprenante pour nos oreilles peu habituées à ces sonorités. Un chant de purification nous apprendra Olena Uutai par l’intermédiaire de sa traductrice. Car l’artiste d’inspiration chamanique est très pédagogue et parle au public entre chaque morceau, désireuse probablement de nous éclairer et nous guider dans ces chants de remerciements à Mère Nature.
Sa voix puissante se fait hululement de la chouette, croassements des corbeaux, vocalisation des oiseaux, henissement du cheval, hurlement du loup… Sa dextérité à reproduire les bruits des animaux est tout à fait impressionnante. Tantôt elle produit des sons extrêmement aigus, tantôt sa voix semble être celle d’un Golum venu des profondeurs terrestres. Elle fait preuve d’une maîtrise absolue des possibilités de la voix humaine.
On se serait volontiers laisser emporter par cette énergie liant êtres humains et esprits de la nature mais l’ajout de sons électrifiés type techno nous a déconcertés. On aurait préféré un concert « a capella », sans artifices musicaux « contre-nature ». Mais c’est un ressenti très personnel, qui n’enlève rien à la dextérité de l’artiste et à sa prestation. Ce n’est sans doute pas ce qu’a ressenti une large majorité du public, sous le charme d’Olena Uutai et de sa transe chamanique, vibrant et oscillant les yeux fermés, sourire aux lèvres. Un public enclin à produire toutes sortes de sons et de mouvements pour accompagner Olena Uutai dans son cheminement chamanique et devenir, au final, de vrais yakoutes, dresseurs de chevaux fiers et paresseux.
Une expérience musicale venue de Sibérie lointaine grandeur nature donc !
Vous reprendrez bien un peu d’Artic Ethnotechno ?
Place ensuite à Suistamon Sähkö. Quatre musiciens finlandais, de la province de la Carélie. Energie et originalité pourraient être leur deuxième nom de groupe ! Ils enchaînent en effet les morceaux avec une énergie folle, dansant, chantant, levant les poings. Avec l’accordéon de Anne-Mari Kivimäki en fil rouge, comme une mélopée lancinante, qui n’a rien à envier aux sons hypnotiques des basses techno.
Les morceaux du 2è album, Etkot PectopaH Ja Etnoteknoa, sorti en 2018 chez Nordic Notes, s’enchaînent : l’hypnotique Jyskyjärven Kautta, l’envoûtant Kalman Laulu, l’énergique Hummani Hei, l’étonnant Suojärvi-kuume… Certains accents hip-hop de leurs morceaux nous font penser à Che Sudaka, ce groupe qui avait retourné le chapiteau du Grand Soufflet en 2015.
Le morceau, Suistamon Sähkö, sorti sur leur premier album Suistamo Electricity, leur permet d’entraîner le public dans une grande ritournelle et de lui apprendre à prononcer correctement le nom finnois du groupe. Gros succès auprès du public qui aura le droit à un rappel échevelé avec Silkkiä Vaan !
Suistamon Sähkö, c’est une musique énergique et enjouée, moins traditionnelle que ce qu’on aurait pu attendre (et qui ne nous aurait pas déplu au fond). Mais des artistes engagés pour l’histoire de leur pays et de leur province, que la barrière de la langue nous a malheureusement empêché d’apprécier (mais lisez cet article en anglais et vous comprendrez).
Tous à l’apprentissage du finnois et merci au Grand Soufflet de nous faire découvrir ces artistes dont on n’aurait jamais connu l’existence.
Quand la reprise de tubes n’est plus synonyme de fainéantise musicale
Les cinq vikings de Steve’N’Seagulls sont des orfèvres quand il s’agit de faire des reprises de chansons en mode décomplexé. Ils arrivent sur la musique de Retour vers le futur, affublés de marcels, de salopettes de travail, de chapeaux en feutre et de coiffe en peau de renard. Sérieusement ? sérieusement.
Et ils vont égrener des standards du rock, du métal et de la folk à leur sauce country banjo-guitare-accordéon-contrebasse pendant plus d’une heure ! Tout y passe : de Paradise City des Guns N’Roses revisité en mode americana country à Are you gonna go my way de Lenny Kravitz à l’accordéon en passant par Black Dog de Led Zeppelin ou Give me all your lovin’ de Led Zeppelin ZZ Top (merci pour la correction mister Goussard, cf commentaire). Banjo (par the faster man in the world), guitare, accordéon virevoltent et la contrebasse volent même dans les airs… Ces garçons ne sont pas sérieux mais ça leur réussit !
Une très étonnante (et réussie !) reprise d’Antisocial de Trust à la contrebasse, interprétée, en français s’il vous plaît, par Jamppa. Et deux reprises d’AC/DC, You shock me all night long et le célébrissime Thunderstruck finiront de transformer cette grande kermesse musicale en démonstration de maîtrise absolue de la reprise et d’instruments ordinairement dévoyés à de toutes autres sonorités musicales.
Y’a pas à dire, les Vikings savent s’amuser et entraîner leur public avec eux !
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« Give me all your lovin’ de Led Zeppelin » ? Non, de ZZ Top. Il y eu aussi du Deep Purple (« Burn »), du Iron Maiden (« aces high » et « the trooper »), du Metallica (« seek and destroy ») et du Steppenwolf (superbe reprise de « born to be wild »). Super son, de l’inventivité dans les reprises (c’est écrit dans l’article) et une vraie joie d’être sur scène (c’est aussi écrit)…
Merci pour la correction de l’erreur. Et pour les ajouts. Je dois avouer ma méconnaissance totale du répertoire métal…