Mardi 17 novembre aura lieu au 1988 Live Club une soirée atypique, étrange et aventureuse exactement comme on les aime. L’arc électrique vous convie sur la dalle du Colombier pour y entendre les chanson noisy du duo nancéens Filiamosta accompagné par le grand G.W. Sok, la pop atmosphérique de Mellanoiscape et les chansons indomptables et déglinguées de Jean-Louis Costes. Trois formations et trois façons différentes de jubilatoirement pousser mélodies et compositions dans leurs retranchements.
Si le lieu est désormais bien entré dans nos habitudes rennaises et que les efforts d’aménagement ont porté leurs fruits, le fait d’aller voir des concerts dans une boîte de nuit comme le Pym’s garde un certain parfum d’étrangeté. Cette petite touche surréaliste est cependant loin d’être déplaisante surtout quand elle viendra pimenter une soirée déjà audacieuse dans sa composition. Les trois formations invitées au 1998 Live Club par l’Arc Électrique le mardi 17 novembre vont ainsi composer un ensemble qui devrait ravir les amateurs de musiques frondeuses.
Pour cause de souvenirs étoilés et de nouvel album tout simplement splendide, nous attendions de pied ferme le retour sur Rennes des Filiamotsa. Merci donc à L’arc électrique d’avoir exaucé aussi rapidement nos vœux pieux. Depuis huit ans déjà, le groupe n’a eu de cesse de se réinventer sous les formes les plus diverses. Auparavant duo composé d’Emilie Weber (au violon amplifié) et d’Anthony Daguerre (à la batterie) le groupe de Nancy s’est adjoint les services d’un troisième homme (violon, claviers) pour donner plus de possibilités, une plus grande ouverture à ses recherches soniques. Le projet Filiamotsa soufflant Rhodes, relecture des morceaux du groupe avec un clavier Rhodes et une section de cuivres leur a montré que la formule à deux limitait les expérimentations. L’apport de nouveaux timbres tout comme la possibilité d’aller vers de nouvelles harmonies, expérimentés avec ce projet, les a convaincus de poursuivre l’aventure avec un troisième membre. La majorité de leur troisième album, Sentier des Roches, sorti en 2012, a ainsi été composée à trois. On y retrouvait même de très chouettes collaborations, l’une avec G.W. Sok de The Ex, excusez du peu, qui prête sa voix au trio sur 4QSO, un autre avec l’Archipel Nocturne (excellent collectif mêlant cordes et percussions, proche des musiques improvisées et/ou savantes) sur Montroyal, titre qui nous a déjà filé une belle déculottée sur le split ep, la troisième, enfin, avec Chapelier Fou sur La Porte de la Fontaine, qui est une nouvelle fois une franche réussite. Nous les avions découverts avec l’excellent split EP Rosemary K’s Diaries #3 qu’ils partageaient avec les Rennais de Trunks. C’est d’ailleurs grâce à ce disque que l’idée d’une tournée d’est en ouest Trunks/Filiamostsa avait vu le jour et que les deux formations nous avaient collé une mémorable déculottée au Jardin Moderne en février 2013. Formidable confirmation que, sur scène, leur noise à violon aux idées larges, est aussi inventive que percutante sur disque.
Voilà qu’en plus de tout ça, Filiamotsa ressurgit sur nos radars avec Like It Is, un quatrième LP qui n’est rien de moins que l’un des disques les plus excitants du moment. Pour ce surprenant nouvel album, notre duo s’attaque avec un appétit d’ogre au format chanson. Pour ce faire, ils réinvitent non seulement l’intégralité de leurs collaborateurs précédents mais y ajoutent aussi le quatuor à cordes BruXello, le guitariste bien connu des Rennais, Olivier Mellano et à nouveau Jos Kleij alias G.W. Sok qui ne cesse de multiplier les collaborations de haute volée (Cannibales & Vahinés, The And ou encore Oiseaux Tempête). Le disque est une réussite éblouissante. On y retrouve bien sûr le goût pour les sons abrasifs et les envolées psychédéliques du duo mais mis en second plan derrière une immédiateté mélodique remarquable et un chant de GW Sok en totale apesanteur. Un disque d’une grande variété émotionnelle et d’une richesse telle qu’il n’en finit pas de se révéler au fil des écoutes.
Autant dire que nous bouillonnons à grand feu d’impatience de savourer cette merveille en live, surtout qu’en plus du chanteur et grâce à leur tournée conjointe, Olivier Mellano sera bien là pour jouer les très inspirées et électrifiantes ambiances à la six cordes qu’il a amenées sur l’album.
Depuis qu’on côtoie la musique d’Olivier Mellano, de collaborations fertiles en projets à plusieurs têtes tout aussi chercheuses (allons de Mobiil à Bed -si vous ne connaissez d’ailleurs pas la pop à couper le souffle de Bed, on ne saura que vous conseiller à genoux d’aller l’écouter dès janvier en live-, de Lætitia Shériff à Psykick Lyrikah, de Dominique A au dantesque How We tried… présenté aux TransMusicales en 2012 justement qui donna le tournis à pas mal d’entre nous, en passant par La Chair des Anges, le ciné-concert Duel, la lecture du Cahier d’un retour au pays natal avec Arm et on en passe), on a pris des habitudes de vertige tant le musicien a baladé nos oreilles d’univers complexes en galaxies fécondes bien souvent in-ouies.
Il y a environ un an, Olivier Mellano a eu envie de se ré-inventer une nouvelle fois avec un projet solo Mellanoisescape. Après des collaborations parfois pharaoniques (How we Tried avec ses pas moins de 17 guitares et un orchestre au complet en est un chouette exemple), le choix de recentrer sa musique sur des envies plus personnelles a ainsi donné le jour à un nouvel album, à mi-chemin entre noise et pop, particulièrement réussi. « J’ai voulu monter un projet uniquement musical, très électrique autour de la noise/rock. C’est une musique que j’écoute beaucoup mais que j’avais mise de côté à cause de mes autres projets comme le théâtre, les ciné-concerts ou bien avec l’orchestre de Bretagne. Je souhaitais aussi retrouver une certaine tension et l’énergie de mes premiers groupes… J’ai donc arrêté un peu toutes ces formations pour me consacrer à mes projets persos » expliquait Olivier à Alter1fo en mars dernier (lire la très chouette interview par Politistution).
Le point de départ : une invitation de K-Fuel pour un concert improvisé avec le groupe The Conformists. De ce set expérimental naîtront les premières ébauches de ce qui deviendra Mellanoisescape. Au départ, plutôt bruitiste, mais que cet amoureux de la mélancolie brésilienne (version bossa bova) ou baroque de Blonde Redhead, irriguera progressivement de contours pop, le chant venant progressivement prendre une place plus assurée. Entrelacs électriques, boucles qui progressivement se mêlent, créant une mer sonique (Sea of Noise), allant de descentes vertigineuses en tendres accalmies, les onze titres de ce Mellanoisescape nous ont progressivement immergés dans un océan de sons aux crêtes scintillantes et au roulis hypnotique.
Après sa tournée marathon à bord d’une petite camionnette aux dernières Trans Musicales, nous sommes ravis de revoir le projet dans le coin surtout à l’occasion de cette tournée conjointe avec Filiamotsa.
En plus de cette double dose de bonheur, vous aurez en plus ce soir là l’occasion de revoir ou de découvrir un des plus sauvages et des plus beaux animaux de la scène française. Depuis le milieu des années 80, Jean-Louis Costes construit avec une frénésie intacte une œuvre protéiforme et hors norme. Après des études d’architecture, Costes laisse tout tomber pour se consacrer uniquement à la musique. Il conçoit des performances scéniques d’une crudité et d’une violence (envers lui même) dépassant souvent largement le soutenable. Il crée des opéras « porno-sociaux » dont la fureur et les excès explosent toutes les limites de la bienséance et du bon goût avec rage et jubilation. Il a également écrit un nombre important de textes, romans, BD dont « Mon Grand-Père », biographie hallucinée de son grand-père cosaque-légionnaire-bagnard et collabo. Il a participé ou réalisé lui-même pléthore de films tout aussi haut en couleur. Virginie Despentes et Gaspard Noé l’ont invité à participer respectivement à Baise-Moi et Irréversible. Expérience qui le laisseront d’ailleurs plus que dubitatif et dont il a tiré un épatant texte au vitriol. On notera d’ailleurs la folle imagination des réalisateurs français qui invitent un performer hardcore pour jouer… des rôles ultra trash.
Depuis quelques années, cet incroyable bonhomme se produit sur scène seul au piano (ou accompagné de jazzmen ou des musiciens électro-pop Krisha ?). Il continue d’enchainer les disques sur un rythme frénétique mais il a délaissé les sévices corporels et la nudité pour se consacrer à des compositions à la poésie crue et déjantée. Les sonorités abrasives, le jeu de piano totalement libre et les textes grattant jusqu’à l’os là où ça fait mal ont remplacé les larmes, le sang et le foutre.
Point d’orgue probable de cette folle soirée, la prestation de Jean-Louis Costes devrait donc danser ivre en équilibre sur le mur fort peu épais séparant le sublime et le grotesque.
Mardi 17 Novembre – 1988 Live Club, 27 place du Colombier, Rennes – 20h – 8€ réduits / 12€ sur place
Plus d’1fos sur :
la page Facebook de l’événement