Durant deux nuits à suivre, Electroni[k] va à la rencontre de nouveaux talents « qui façonnent l’avenir de la musique électronique (…) et interrogent le futur de la techno » . Après une première soirée à l’Ubu, c’est à l’Antipode que nous retrouverons quatre artistes emblématiques d’une recherche actuelle, qui parle tout autant à la tête qu’aux jambes. Venez danser toute la nuit sur un futur en train de s’écrire…
On retrouvera avec plaisir Erwan Castex aka Rone (autrefois R.One), pour un live audio-visuel avec le collectif de designers graphiques Studio Fünf. Mis en avant par Agoria sur la compilation At the Controls (2007), Rone a ensuite logiquement signé sur Infiné pour un premier maxi, Bora (2008), remarqué notamment à cause de la voix d’Alain Damasio, écrivain de La Horde du contrevent, sur le titre Bora Vocal. Le musicien a en effet récupéré le journal intime que l’auteur tenait pendant l’écriture du roman sur son dictaphone et dans lequel on l’entend se parler à lui-même, s’engueuler, s’encourager. Cette voix qui prend conscience de la création sur ce mélange de techno minimale et d’electronica soyeuse (un peu de Border Community, un peu de Dial… et surtout beaucoup de Rone) apparaît totalement à l’opposé d’une electro française 2.0, monnaie courante à cette période. Beaucoup adhèrent.
Frustré de mettre de côté les morceaux qui étaient jugés trop calmes ou trop mélodiques pour ce maxi vinyl, Rone se voit offrir la possibilité par Infiné de partir de ces titres pour réaliser un album. L’homme s’y retrouve (et nous avec !), profitant de davantage de liberté pour naviguer d’une humeur à l’autre et changer de ton(s). Au final c’est une réussite puisque Spanish Breakfast (avril 2009) est contrasté, tour à tour lunaire, jovial, mélancolique, calme ou dancefloor. « A l’image de la vie » , conclut son auteur.
L’homme sort ensuite un maxi de « transition » So so so, passerelle entre son premier album et son second long format, pour lequel Studio Fünf réalise un clip vidéo, fait avec trois bouts de ficelle, peu de moyens, mais une vraie envie. Conséquence : le collectif allemand qui rassemble quelques uns des meilleurs amis du musicien, participe à une création audiovisuelle inédite avec l’artiste d’Infiné, qui coincide avec la sortie de Tohu Bohu (15 octobre 2012). Du travail de Studio Fünf sur So so so, Erwan Castex disait : « je pense que ça donne une nouvelle dimension à ma musique. J’ai même parfois l’impression que ça la transforme un peu, parce que les images ne sont pas de moi et qu’elles proposent un sens auquel je ne n’avais pas forcément pensé en faisant le morceau. Finalement, c’est l’inverse d’une bande son, qui va ajouter du sens aux images d’un film… C’est la bande-image du morceau quoi! » On imagine donc que la collaboration pour ce live audiovisuel a été fructueuse et on a hâte de la découvrir.
On attend également beaucoup de l’improbable trio berlinois Brandt Brauer Frick (deux aux machines, un aux baguettes) qui mêle samples acoustiques dans une jazzistique marmite electro-house tout aussi ambitieuse que dansante. Fusion de musique classique contemporaine, de techno minimaliste et de structures jazz, les compositions du trio berlinois formé en 2008 trouvent aussi bien leur place au Berghain qu’au Coachella ou au Centre Pompidou. Cravates fines, chemises ajustées, Daniel Brandt, Jan Brauer et Paul Frick proposent un live totalement irrésistible à mi chemin entre sonorités analogiques et éléctroniques, réhaussé par une batterie jouée en direct sur scène. Mais surtout le trio ne sacrifie jamais l’efficacité de ses morceaux au profit d’un certain élitisme musical. C’est intelligent, racé et malin, oui. Mais c’est d’abord totalement jouissif pour les jambes.
Daniel Brandt et Jan Brauer,venus de Wiesbaden, composaient des tracks d’électro jazz (sous le nom de Scott), lorsque Paul Frick, étudiant en musique moderne et classique à la Universität der Künste berlinoise (ce dernier expliquait d’ailleurs au Tagesspiegel qu’il avait dû étudier la composition classique pendant huit ans avant d’apprécier la techno) les a rejoints. On est en 2008 et l’alchimie est déjà là. Repéré par le label !K7 en 2009, le trio sort assez rapidement un premier album You Make Me Real reposant sur la question très simple : que se passe-t-il lorsqu’on mélange de la techno, de la musique classique contemporaine et du jazz ? Ils y ont également produit tous les sons à l’aide d’instruments analogiques. Les lignes de basse, par exemple, ne viennent pas d’un Roland-303, mais d’un tuba. Ils poursuivent cette direction avec la sortie d’un second Lp, Mr Machine en 2011, cette fois-ci réalisé par dix musiciens « classiques » , sous le nom de The Brandt Brauer Frick Ensemble avec du violon, de la harpe, du violoncelle, du tuba, du trombone… et on en passe. Le résultat est épatant, d’autant qu’ils ajoutent des voix sur certains titres (Pretend, addictif en diable !) et que leur art des montées est toujours aussi maîtrisé. C’est néanmoins sous la version trio que nous les retrouverons à l’Antipode pour un live qu’on vous promet irrésistible !
Les New-Yorkais Logan Takahashi et Nick Weiss, aka Teengirl Fantasy, ne partent pour leur part ni du jazz ni de la musique contemporaine, mais s’attaquent plutôt à la deep house et au shoegaze. Qu’ils détricotent et transforment en une électronica onirique. Leur premier album 7am, leur a permis de tourner en première partie de Crystal Castles. Et surtout de se faire repérer par le label R&S (James Blake, Lone…) qui décide de sortir leur second grand format. Sur leur second Lp, Tracer (2012), on retrouve Panda Bear, Romanthony ou Laurel Halo aux vocaux sur certains titres, avec toujours cette envie de la part des deux New Yorkais de triturer le vieux pour en faire une house novatrice, quitte à abuser de flûte de pan synthétique. Sur le papier et sur disque, on doit avouer que ce n’est pas trop notre came. Mais on leur laisse la possibilité de nous faire changer d’avis en live.
On avoue qu’on préfère l’électro aérienne et subtile de Subarys, jeune musicien rennais d’adoption, qui a d’ailleurs prêté un de ses morceaux pour la réalisation du teaser de Cultures Electroni[k]. Auteur d’un premier ep, Harpies, sur le label Inlab Recordings, basé à Aix-en-Provence, Subarys navigue sur une electronica soyeuse, assez proche d’une certaine house progressive à la Border Community, via Nathan Fake (ces petits cliquetis rythmiques sur Disable) ou James Holden. On en est sûr, une excellent manière de commencer la soirée.
Lone, le producteur britannique à la house joyeuse parfois teintée de réminiscences acid et rave (du moins sur son dernier album, Galaxy Garden, mai 2012), et Redshape, l’homme au masque rouge qui affole la planète techno depuis Berlin avec sa techno racée et exigeante, seront quant à eux programmés lors de la Nuit Electronique 1 qui se déroulera la veille à l’Ubu. On y retrouvera également Low Jack, auteur d’un très récent (24 septembre) premier ep sur Get The Curse, Slow the dance (qu’on a pu entendre en ouverture du Fabriclive de Brodinski) et Théo Müller, l’un des cofondateurs de Midi Deux, amateur d’un dub techno des plus pointus, avec une lichette d’acid et de house du meilleur aloi. Un beau line-up pour une nuit immanquable !
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Cultures Electroni[k] présente la Nuit Electronique 2 avec Rone & Studio Fünf, Brandt Brauer Frick, Teengirl Fantasy, Subarys et des installations d’Avoka à l’Antipode MJC (2 rue André Trasbot, Rennes) le samedi 13 octobre 2012 de minuit à 6h.
Tarifs – sur place : 18 euros ; en prévente : 15 euros ; membres Antipode-Ubu et tarif réduit : 13 euros – Sortir ! : 4 euros.
Cultures Electroni[k] a lieu du 8 au 14 octobre 2012 à Rennes. Plus d’infos sur le site de Cultures Electroni[k].