Aimée a 18 ans et son père, se disait-elle, « vieillissait trop vite ». C’est un mariage arrangé qui se dessine, malgré les remarques de Claude. Le père avait été très clair : « Je ne t’obligerai pas à épouser cet homme mais je t’obligerai à épouser un homme bon et il est le meilleur d’entre tous ». « Ne détourne pas les yeux quand je te parle, insiste t-il ». 

Sa demeure

Seule en sa demeure ne compose pas non seulement une fiction, mais installe une atmosphère bien particulière, celle du Domaine Marchère, dans laquelle les personnages vont chercher leur place. Aimée se plie au charme froid du riche propriétaire du Jura, Candre Marchère, auquel elle a été mariée. Un paysage après la brume, un théâtre de silence où les cris perçants des oiseaux et chaque description du décor invitent le lecteur à s’imprégner de la sensibilité des acteurs.

Ainsi Cécile Coulon ajoute : « Les arbres chuchotèrent jusqu’à l’aube, car tout se passe toujours la nuit, les grands événements se cachent des lumières vives, craignant d ‘être brûlés. »

L’écriture de Cécile Coulon, s’incruste dans votre esprit sans violence, à pas comptés, la tension monte et se glisse comme les plantes grimpantes dans les petits détails. Elle suggère et peu à peu les indices qui précèdent un drame devenu inéluctable, une impasse dans laquelle la vie d’Aimée risque de glisser. Le lecteur sera sensible à la mise en harmonie des paysages et des odeurs qui changent selon l’humeur des personnages, ou à la sensualité qu’Aimée cherche à définir et à comprendre, selon les humeurs de Candre ou d’Henria la servante dévouée à son maître.

Les personnages

Pour mieux comprendre le roman :

Pour quel destin ?

Ce roman est un livre sur le sens de la vie ; le deuil et la mort sont présents, mais comme en écho, ce livre parle d’espoir. Les deux options possibles sur lesquelles les pensées d’Aimée se fracassent. Le lecteur voit émerger deux mondes qui se dressent : les espaces hantés, les deuils, les blessures, et de l’autre l’amour, la compréhension.

Le monde de la peur est celui de Candre, d’Amand le père d’Aimée, d’Henria la servante, des hommes des bois au service du domaine Marchère. Le monde bienveillant rassemble Claude, Émeline la professeur de musique, et l’énigmatique Angelin, fils d’Henria. Entre ces deux mondes, Henria veille sur son fils adoptif Candre le propriétaire, et sur Angelin l’enfant biologique, le propre fils de Henria. Élevé au sein de la famille Deville, Claude est un jeune plein de vie et de talent mais il partira trop vite vers son métier de soldat.

En ces temps de Covid et de pandémie, Cécile Coulon a peut-être voulu nous transmettre un message ? Comment se réveiller quand tout devient menaçant ? Comment percevoir ceux qui vous poussent vers la vie de ceux qui vous persuadent que la mort rôde ? Comment la vérité appartient-elle à cet homme bon mais glacial ? La religion est-elle du côté des endeuillés ou de ceux qui obéissent ou de ceux qui sont prêt à faire le mal pour punir toute désobéissance ou encore de ceux qui punissent sans discernement ?

Étrange et envoûtant, ce roman vous laissera peut être comme un goût d’inachevé. Car on s’attache souvent à certains personnages, comme à Aimée, jeune fille aux multiples qualités qui suscite douceur, tendresse et sympathie. La fin est peut être la réponse de Cécile Coulon à ceux qui recherchent la liberté autant que le bonheur.

Seule en sa Demeure / Cécile Coulon
Edition L’Iconoclaste (19 août 2021)
EAN : 9782378802400
333 pages
19€