Ce jeudi 06 avril, le furieux blues-rock de The Legendary Tigerman aura permis d’atténuer dans les grandes largeurs la déception Timber Timbre.
Les musiciens de Timber Timbre venait ce jeudi 06 avril nous présenter Sincerely, Future Pollution, leur tout nouvel album, quelques jours avant sa parution. Un album marqué par une coloration eighties, mais dans les tons froids, avec l’ajout inédit de synthétiseurs découverts lors des sessions d’enregistrement au studio du Château de la Frette en région parisienne. Une évolution musicale naturelle pour ceux qui avaient exploré des sonorités 50’s avec leur premier album Timber Timbre en 2009 jusqu’aux profondeurs psychédéliques et sombres des seventies (Hot Dreams en 2014). C’est avec cet album que nous les avions découverts sur scène en 2015 à la Route du Rock, pour l’une de nos plus grosses déceptions : ils avaient tenté de muscler leurs mélodies, en vain. On s’était promis de les revoir dans une ambiance plus intime, propre à la mise en valeur de leurs mélodies. Autant dire que le Cabaret Botanique semblait le lieu rêvé pour y apprécier pleinement Sincerely, Future Pollution. Hélas, les canadiens nous ont une nouvelle fois déçus : très rapidement, on constate que le son est massif, brouillon et flingue toutes les subtilités de l’enchainement introductif Sincerely, Future Pollution / Sewer Blues.
On devine la tentative d’imager le pessimisme du propos de l’album avec des lumières froides et un son glaçant, mais il ne ressort finalement qu’une mélasse sonore indigeste. On reprend espoir avec la jolie ballade Velvet Gloves and Spit, sur laquelle le sublime timbre de voix de Taylor Kirk prend enfin le dessus. Les arrangements sont réussis avec notamment cette petite basse plus sautillante en live. Moment s’emballe à la faveur du petit riff de guitare répétitif et s’avère plus abouti sur scène que sur galette. On se dit que le groupe va prendre enfin toute sa dimension scénique lorsque résonnent les premières notes du magnifique Hot Dreams. Tout y est : la voix de crooner de Taylor, les choeurs délicats, et patatras, le saxophone de Colin Stetson sur album est remplacé en live par un ersatz joué au synthé… L’embellie aura été de courte durée, et les quelques passages remarquables (une jolie version de Curtains, le délicieusement funky Grifting) ne suffiront pas à relever le niveau d’ensemble du set. On aurait finalement préféré voir le groupe jouer l’instrumental Skin Tone plutôt que le raté Bleu Nuit (comment peut-on utiliser le vocodeur quand on a la voix de Taylor Kirk ?). On finit tout de même avec une touche positive, Trouble Comes Knocking, qui nous rappelle le talent de Timber Timbre pour trousser de belles compositions. Mais, une fois de plus, ils n’auront pas réussi à retranscrire la tension feutrée de leurs mélodies.
(Pas de photos de leur concert, Timber Timbre ayant refusé la présence des photographes)
C’est peu dire que l’on attendait une prestation de feu de Paulo Furtado aka The Legendary Tigerman pour sauver notre soirée. Mais on ne s’attendait pas à se prendre l’un des plus grosses claques musicales de cette 21ème édition de Mythos. On avait découvert le leader de Wraygunn en solo au Forum de la Passerelle lors du festival Art Rock en 2011 et on avait pris en pleine poire son show époustouflant de one man band. Derrière sa batterie, le bluesman n’hésitait pas à lorgner du côté du rock, triturant sa six-cordes avec un son sec et dépouillé. Après une nouvelle échappée collective avec Wraygunn en 2012, il revient à ses amours en solo avec True.
Il débarque sur scène tout de noir vêtu, à l’exception de chaussures blanches, avec sa seule guitare en main : après un impeccable blues roots (Gonna Shoot my Woman) en ouverture, il est rejoint par un batteur et un saxophoniste pour le protéiforme Wild Beast, tiré de son nouvel album True.
Il enchaine avec Storm Over Paradise, épuré à l’os, avec cette superbe ligne de basse jouée au saxo (frissons garantis). Un set qui va crescendo, puisant largement dans les quatre albums de The Legendary Tigerman, avec deux inédits prometteurs, à paraître dans un nouvel album. Paulo passe allègrement d’un blues crasseux et urbain (Gone) à une nouvelle compo aux allures de ska (Child of Lust), tout en revisitant les tréfonds du rock’n’roll sixties (Twenty First Century Rock’n’Roll). Pour notre plus grand plaisir, les frontières entre les styles sont ténues : Walkin’ Downtown joué en live nous apparaît comme l’une des plus belles définitions du blues-rock. Les vidéos projetées derrière le trio illustrent en noir et banc quelques uns des morceaux, notamment les titres extraits de Femina (vidéos réalisées par Paulo Furtado lui-même) : A day at the riding school est l’un de nos courts-métrages préféré, imageant la reprise de Nancy Sinatra, This Boots are made for Walkin’ (en duo avec Maria de Medeiros sur Femina).
Mais le plus réjouissant lors de concert mémorable est de voir Paulo Furtado en trio : lorsqu’on l’avait découvert en format one man band, on devinait l’énergie contenue et contrainte par l’harmonica, la guitare et la batterie. Libéré de ses entraves instrumentales, il se révèle être une vraie bête de scène, notamment lors d’un final dantesque. La doublette Dance Craze / 21st Century Rock’n’roll devient furieusement punk : Paulo n’hésite pas à fendre le public pour mieux hurler, micro dans la bouche, « rock’n’roll », avant de se mettre debout sur la grosse caisse, littéralement habité. LA grosse dérouillée de la soirée : Rock’n’roll !
Diaporama (photos : Yann)
Retrouvez tous nos articles sur Mythos 2017