Frédéric Bourcier est l’adjoint au maire de Rennes en charge de l’urbanisme et de l’aménagement. Il est également conseiller communautaire de Rennes Métropole. Pour Alter1fo, il revient sur le chantier de la rue de l’Alma et sur la rénovation de l’avenue Henri Fréville, la prochaine nouvelle entrée de ville sud qui reliera le centre-ville à la porte de Nantes. Mais aussi sur l’idée d’une ville pour tous.
Alter1fo : Qu’est-ce qui a motivé l’immense chantier qui s’étend sur la rue de l’Alma et l’avenue Fréville ?
Frédéric Bourcier : La ZAC Alma est destinée à faciliter l’entrée dans la ville. La rue de l’Alma va être remise à double sens, c’est un axe structurant de la ville grâce au métro, aux bus et à la proximité de la gare. Depuis 1983, la ville exerce son droit de préemption et rachète les immeubles et les maisons mis en vente, dans le cadre d’une opération d’intérêt public. Une opération d’intérêt public permet à la ville une maîtrise totale de l’opération en dehors des logiques du marché privé. De fait, la mise en œuvre de la ZAC est une opération d’intérêt public, on peut aller jusqu’à l’expulsion s’il le faut.
Les habitants qui restent encore et dont les propriétés sont destinées à être détruites pour permettre la réalisation des nouveaux bâtiments parlent d’expulsion.
Il n’y a pas eu d’expulsion. Je ne dis pas que les gens sont contents de partir mais on essaye toujours de trouver les meilleures solutions. Nous savons qu’il y a des gens impactés et que c’est souvent très douloureux mais à un moment, lorsque sur l’espace occupé par deux familles, on pourrait en loger soixante, il faut se placer du côté de l’intérêt public. Je le répète: il n’y a pas eu pour l’instant d’expulsion. D’ailleurs la véritable singularité de cette ZAC, c’est que l’acquisition du foncier représente deux tiers des dépenses. C’est un ratio extrêmement important sur ce genre de projet.
Rennes semble à l’étroit dans les limites de la rocade. Comment peut-on imaginer construire encore ?
Il est évident que désormais Rennes est une ville qui se reconstruit sur elle-même. Mais son ambition est avant tout de rester attractive. Et d’abord attractive économiquement : il s’agit donc de favoriser son accessibilité mais aussi que les gens soient logés près du centre-ville. La dimension sociale ne peut être oubliée et les offres de services, la culture, l’éducation doivent suivre la même croissance. Rennes Métropole investit entre 40 et 50 millions d’euros chaque année dans le logement, il y a très peu d’équivalent en France. Mais nous sommes conscients qu’il faut loger tout le monde à Rennes.
Les prix du mètre carré sur la ZAC Alma vont être très élevés (on parle de 3300 euros le m² dans l’accession privée).
Ce n’est pas nous qui fixons les tarifs. Chaque année, les magazines aiment faire leur une sur les villes les plus chères en France. Ça ne veut pas dire grand-chose : il n’y a aucune commune mesure entre le prix du mètre carré en ZUP sud et celui du centre-ville. Mais Rennes Métropole suit le Programme Local de l’Habitat : à l’échelle de l’agglomération nous devons livrer 1000 logements par an dont 25% consacré au logement social. A Rennes, il y a 29% de logement sociaux et une des singularités rennaises est que ces logements sociaux restent dans la ville centre, Rennes.
Une ville qui se reconstruit sur elle-même doit forcément construire des immeubles, des tours peut-être. Sont-ce des lieux où il fait bon vivre ?
Pour être une ville qui appartient à tout le monde, il faut que tout le monde puisse s’y loger, pauvres et plus riches. En ce qui concerne la possible réapparition de tours à Rennes, il s’agit de rester pragmatique : le rapport de l’immeuble au sol, à l’existant est donc prédominant. La hauteur de la tour, évidemment, c’est important mais il faut savoir comment on la construit et comment on l’habite. Dans le monde entier, il existe des tours qui disposent de jardins tous les quatre étages, qui sont aérées, éclairées, etc. Et puis, ça dépend également comment on habite son appartement, quelle est la relation entre sphère publique et sphère privée. Tout ça demande une vaste réflexion.
Cet immense chantier de la ZAC Alma est géré par la société Territoires. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est Territoire ?
Pour une collectivité locale, il est possible d’aménager une ZAC en direct, grâce aux services de la municipalité par exemple, ou par une concession d’aménagement passée avec un acteur privé ou une société publique d’aménagement. Territoires et Développements est une société anonyme d’économie mixte, ses principaux actionnaires sont la ville de Rennes et Rennes Métropole. Elle travaille actuellement dans de nombreuses communes de l’agglomération. Sur la ZAC Alma, la logique, c’était de ne pas laisser faire le marché : des études à la réalisation, tout est sous maîtrise publique, c’est la ville qui gère.
Freddy ou l’affairisme à justification sociale…
« sur l’espace occupé par deux familles, on pourrait en loger soixante »
Il va falloir se serrer très très fort !
Comment est-ce possible avec des immeubles R+6 ???