Seconde rencontre avec la chouette bande des Fat Supper au complet pour la sortie de leur second album, le vibrant et indomptable : Academic Sausage. Pas avares en secret de fabrication, nous avons longuement causé avec eux des passionnantes arcanes de la création de ce si singulier disque.
C’est en fin d’après-midi au Jardin Moderne que nous retrouvons les Fat Supper attablés au soleil hivernal et disputant une partie de belote endiablée. Il viennent de finir leur balance pour leur fastueuse carte blanche. La troupe est au complet : Léo Prud’homme (guitare et chant), fondateur de Leo88man et clavier de Bed ou The Enchanted Wood, André Rubeillon (guitare et basse) également fondateur de Moon Palace et co-compositeur de Leo88man, Yoann Buffeteau (guitare baryton, claviers, cocktail drums) également graphiste de talent, et enfin Pierre Marolleau (batterie et chant), batteur des feux Fordamage, Ladylike Lilly ou The Enchanted Wood…
Alter1fo : Comment décririez vous l’évolution musicale du groupe depuis le premier album ?
Léo : Depuis le premier album, Yoann a intégré le groupe. L’EP 4 titres qui est sorti entre les deux albums était justement fait pour marquer le coup.
L’évolution est aussi dans le travail sur les morceaux. On ne fait plus les choses de la même façon puisqu’on a pu tester un tiers de l’album en live pendant la tournée de l’EP. Une partie des morceaux a donc été élaboré pendant les concerts. Et les deux autres tiers ont été bossés pendant quinze jours dans notre local de répèt’. Quand on a enregistré, on avait déjà tout. Sur les dix morceaux de l’album, un seul morceau a été composé lors de l’enregistrement en studio. C’est la grosse différence avec le premier album qui avait été composé et enregistré dans la foulée, en 4-5 jours. Là il y a un travail en amont, ce qui nous permettait d’avoir tout le temps qu’on voulait sur la production, le son.
Et la troisième différence, c’est qu’on avait fait notre premier album tout seul, comme l’EP. Alors qu’Academic Sausage a été réalisé avec un ingé-son, Antoine Lacoste, qui nous accompagnait déjà sur les lives.
Quels étaient vos envies sur ce second album ?
Pierre : Le premier disque était une carte de visite pour présenter le groupe, avec quelque chose de plus classique dans la composition. Avec l’arrivée de Yoann, on est rapidement parti sur l’envie de faire du rock, avec un large éventail de tout ce qu’on aime. Avec Academic Sausage, on n’a pas décidé de faire un disque de tel style. On a composé des morceaux avec comme objectif que cela plaise à nous quatre. Ça peut partir dans tous les sens, ça ne nous dérange pas.
Vous avez bien craqué sur cette pochette riche en détails et en couleurs (rires). Racontez-nous la conception de ce triptyque déserto-chevalo-saucissesque.
Yoann : Les deux personnages, Cheval et Saucisse, figuraient déjà sur l’EP, et Cheval était déjà présent sur le premier album. Je trouvais ça drôle de reprendre Cheval, en mauvais état sur le premier album, et qui se retrouve plus musclé sur cet album : je trouvais que ça collait bien avec le changement musical, plus musclé lui aussi.
Léo : il y a aussi tout le décor. Il n’y avait pas de fond sur les deux premiers : il y a deux fonds sur Academic Sausage, qui représentent deux ambiances phares par rapport à notre style. Un côté ricain avec le désert, la bagnole de flics et un côté plus ensoleillé. Une winner side et une loser side, comme un petit clin d’œil aux différentes ambiances de l’album.
Yoann : Un disque recto-verso, que tu peux retourner indifféremment, en fonction de ton humeur du jour, en win ou en loose.
Léo : Quand le matin, tu te cognes le petit orteil dans la table basse, tu mets l’album en loose side (rires).
Le disque s’ouvre sur l’enjôleur Clutter (désordre). Il y a un côté midtempo et un chant très suave et pourtant, un peu en retrait quelques signes annonciateurs de la fureur qui va suivre. Vous l’avez choisi pour son côté programmatique ? Le choix du 1er morceau, et du trackilisting en général, a-t-il été difficile ?
Léo : Pour l’ouverture, ça s’est fait de manière empirique : on s’est rendu compte que chacun des dix titres fonctionnait en ouverture. On avait tous des idées de set-lists et elles fonctionnaient toutes.
Pierre : Clutter s’est souvent retrouvé en deuxième position de nos propositions. L’un de nous a proposé de le mettre en premier, et ça nous a finalement semblé évident.
André : Comme tu le disais, ça permet d’ouvrir l’album en douceur. Ça colle bien pour rentrer dans le disque.
Léo : Clutter a le même rôle sur l’album qu’en live. On changera peut-être à l’avenir, mais notre nouveau live commence avec Clutter, probablement pour la même raison.
En second, c’est Grotorro et son joyeux chaos introductif avant sa suite tout en puissance. Un morceau à la fois alambiqué et pourtant hyper jouissif dans le côté headbanging. Comment vous avez travaillé cette équilibre entre un côté très immédiat et un truc un peu tordu quand même ?
Léo : De temps en temps, on a plusieurs idées, inintéressantes seules : on sélectionne deux, voire trois idées de riffs, d’ambiance… Il reste juste le travail pour les lier ensemble. Sur Grotorro, il n’y a pas tant de trucs que ça : c’est plus au niveau de la structure du morceau. Il n’y a qu’une seule note, peu d’accords et pas de grille mélodique.
Pierre : Le but dans les morceaux de Fat Supper est de faire un morceau simple avec plein de petits trucs. Comme tu le dis, ça peux paraître un peu tordu, mais au final, c’est un morceau de rock. Mais on essaie toujours de caler pleins de petits agréments, de petits pièges pour le rendre un peu plus particulier.
Léo : parfois on cherche à lier tous les éléments dans le morceau pour que tout coule. Et parfois on essaie de faire tenir le morceau en « cutant », pour donner l’impression d’essayer d’arrêter le morceau en vain. J’avais parlé de krautrock à l’époque de la sortie de Grotorro : ce n’est pas un morceau krautrock, mais c’est l’idée : une machine qui déraille de temps en temps mais qui grossit.
Dans ce morceau, il y a très peu de texte, resserré sur deux passages. On préférait que ce soit très instrumental, avec seulement deux petits blocs chantés : le propos n’est pas dans les textes, enfin pas sur ce morceau. Sa place sur le disque permet d’ouvrir sur le reste de l’album, avec une fin très orchestrale. C’est la même idée que Surrogate sur l’EP, qui finit de manière très orchestrée.
Vient ensuite Smell et sa basse langoureuse magnifié par le son à la fois brut, un peu abrasif et pourtant hyper précis de l’album.
Léo : Academic Sausage, le titre de l’album vient des paroles de Smell. La chanson parle de tous les changements qui ont eu lieu dans la bouffe sur les dix dernières années. Toute cette chimie, tout ce qui est devenu absurde et alambiqué dans la société de consommation. C’est un des seuls morceaux qui ne parle pas de cul. (Rires).
Vous avez enregistré le disque avec Antoine Lacoste, votre ingé son live, au Corner Box studio en juillet 2014.
Pierre : Il était notre ingé son live sur la quasi totalité des 40 dates précédentes, entre décembre 2013 et juillet 2014.
Vous l’avez choisi pour garder un son live ?
Pierre : C’était logique, puisqu’il connaissait les morceaux joués, on lui faisait écouter les maquettes des répets. André et Léo ont proposé qu’il enchaîne sur le disque, assez logiquement.
Comment s’est passé l’enregistrement ? Y a-t-il eu un gros travail d’affinage derrière ?
Léo : Antoine a d’abord travaillé seul pour obtenir la production qu’il avait en tête, gérer les volumes, etc… pour avoir quelque chose à nous proposer avant les trois sessions de mix.
Pierre : c’est avant tout un disque de live, il n’y a pas de prod, pas de rajouts : du mix pour les équilibres, on met quelques effets, Léo a fait trois parties de claviers… Le but était d’avoir un disque qui sonne live.
Après c’est le fluctuant et orageux Narvana. Il y a vos deux voix, comme sur Smell. Comment c’est venu ?
Léo : on chantait déjà tous les deux, mais de manière classique, avec un lead et un chœur ou voix doublée. Ce côté classique nous a vite soûlé. Pierre chante aussi facilement que moi tout en jouant de la batterie, donc ça permet d’avoir deux leads. On a commencé à le tester sur cet album, sous la forme d’un partage de couplets. Cet album nous a permis de commencer ce travail là.
Pierre : Ça amène une autre couleur.
Léo : C’est beaucoup plus vivant en live. On revient toujours à des choix rattachés au live. Tant qu’on enregistrera les albums en prise live à quatre, ce sont des tentatives qu’on reproduira. Si Pierre peut chanter en jouant de la batterie sur l’album, il peut le faire en live. Ce n’est pas un choix de studio que tu ne peux pas reproduire ensuite.
La voix de Pierre permet un contrepoint plus aérien avec la voix grave de Leo ?
Pierre : Ça dépend. Sur Grotorro, on a chacun notre part qu’on a doublée : en live, je fais la première partie en voix perchée et la deuxième en voix basse. On peut tous les deux assurer les deux types de voix.
Léo : Pierre écoute pas mal de hip-hop et de rap, et pour le chant, ce n’était pas quelque chose d’inné pour moi d’avoir ce phrasé, ce flow. Alors que Pierre a des choses en tête qui lui permette de proposer des choses différentes. C’est quelque chose de nouveau sur cet album, même si on l’avait tenté sur l’EP. Bien entendu, hip-hop/rap entre guillemets, mais il y a ce flow dans Smell, Odd Box. C’est Pierre qui m’a donné des pistes pour obtenir ça.
Pierre : c’est toujours dans cet esprit de varier les choses. Au début de Fat Supper, on n’aurait pas pu imaginer qu’on rapperait sur des morceaux. C’est arrivé sur Smell, ou Clutter peut-être…
Vous l’aviez déjà fait sur Back To The Flesh sur l’EP ?
Pierre : oui, c’est effectivement Back To The Flesh qui a amorcé ça.
Léo : Pour ce morceau, j’étais quasiment venu avec une maquette. Comme le morceau venait de moi, il y avait forcément 50% de blues (rires). Pour moi, c’était un violent effort d’arriver à faire autre chose, je me sentais enfermé avec ce jeu blues-folk. Et Fat Supper, dans l’idée, c’est tout sauf ça : avec Academic Sausage, on s’est tous retrouvé à faire des parts qui ne correspondent pas à ce qu’on sait jouer. C’est pour ça qu’on a une excitation commune au sein de ce projet. Le passage de Leo88man à Fat Supper vient aussi de là : je jouais ce que je savais jouer, alors qu’avec Fat Supper, je joue des trucs que je ne sais pas jouer et pour lesquels je dois bosser. On joue tous à un moment une partie qu’on ne sait pas jouer, mais qu’on doit apprendre parce qu’elle sert le morceau.
D’où vient le jeu de mots du titre sur Nirvana ?
Pierre : On avait fait ça en bœuf tous les deux au local. On a jammé pendant deux ou trois heures et on a enregistré à l’arrache. C’était l’idée de l’explosion, de revenir tout petit. Après, on a trouvé le plan du milieu.
Léo : On avait aussi cherché des son de grattes plus grunge, plus garage. Je crois que c’est Pierre qui a trouvé le nom.
Pierre : Oui, je me disais qu’il fallait le penser grunge, le penser Nirvana, sur les explosions comme sur le passage un peu « branleur » du milieu, sur un côté un peu 90’s, noisy pop de ce morceau.
Y a-t-il d’autres influences qui vous ont sautés aux oreilles quand vous avez écouté vos maquettes ?
Léo : Moi, je suis bien resté bloqué sur The Fall en fait. Notamment un de leurs albums qui s’appelle Your Future, Our Clutter (le 28ème de leur démente discographie!). C’est de là que j’ai piqué le nom du premier titre d’ailleurs. C’est un mot anglais que je ne connaissais pas et qui m’a plu pour son côté très british. Je ne connaissais pas The Fall et j’ai bloqué sur ce disque. Je l’ai écouté pendant un an et demi. Pour moi, la ligne de basse sur Smell, des explosions… tout ça vient d’albums de The Fall. Tu m’avais parlé d’un autre groupe Yoann ?
Yoann : Uncle Wiggly. Je ne sais pas si vous connaissez ça. C’est un groupe canadien du début des années 90. J’avais trouvé ça chez un disquaire à Montréal. Le disque avait une belle pochette. Il était à 2 dollars donc je l’ai pris. Je l’avais acheté juste pour la pochette et finalement je l’ai écouté en boucle. C’est un pur disque même s’ils n’ont pas eu grand succès. Je ne pense même pas qu’ils soient arrivés jusqu’en Europe d’ailleurs. Pour moi, il y a des passages, notamment sur Narvana qui sont nettement influencés par ce groupe.
Est ce qu’il y a des références qui vous ont surpris dans les chroniques du disque ?
Léo : Non, pas sur Academic Sausage.
Pierre : Ce qui est bien dans les chroniques qu’on a eu, c’est que la plupart ont bien capté où on voulait en venir. Le fait de mélanger plein de trucs, plein de sons pour arriver à un truc à nous. Le travail sur la répartition des sons de grattes, dont on nous parle souvent après les concerts. Du coup, on nous référence assez peu. On peut dire tel morceau ressemble un peu à ça mais sur les chroniques, je n’en ai pas de souvenir.
Léo : Il y a aussi qu’on n’a pas communiqué de la même façon sur ce disque. On a réécrit la bio. Il faut bien dire que la plupart du temps dans les papiers, le texte de la bio est repris tel quel en copier/coller. Donc si tu merdes sur ta bio, pendant un an tu as des chroniques avec les mêmes influences que tu as mis toi-même et que tu regrettes parce que c’est un peu réducteur. On a donc fait plus gaffe.
Pierre : On a juste cité quatre groupes, assez connus mais aussi très différents. On a mis : Deerhoof, Eels, Pavement et Nick Cave.
Léo : ça a pu aider mais je crois que c’est surtout un truc d’écoute. Sur Academic Sausage, notre message est plus mûr, plus clair. Quand tu écoutes tout l’album, tu captes vite que tous les morceaux sont très différents
Encore une intro assez fabuleuse tout en roulement de Pierre avec Sandcastle. Quelle est justement la place de la rythmique dans la composition des morceaux ?
Pierre : Déjà sur la manière de composer sur cet album là, on a beaucoup amorcé de morceaux à deux avec Léo. C’était plus simple que de boeufer à quatre. On amenait chacun des squelettes de morceaux soit à partir de la guitare de, Léo soit de mes rythmiques.
Léo : (Il compte) Il y a eu six titres où on est parti de la batterie seule. André a enregistré des idées de base de Pierre. On les a écoutées et on a composé le morceau en rajoutant de la gratte dessus à partir de la batterie. C’est bizarre comme façon de composer. La rythmique est donc au fondement de pas mal de morceaux. Sandcastle en fait partie. Il y avait une rythmique super complexe et j’ai juste rajouté deux notes de guitare super simples par dessus. Sandcastle c’était le morceau ou, même au sein de Fat Supper je voulais réussir à placer la voix comme on le faisait avant, sans que ça fasse penser à Léo 88 man. Il y avait donc cette batterie nue, super complexe, hyper tribale et je me suis dit que là dessus on pourrait réussir à revenir sans que ça s’entende trop à des choses comme on peut entendre sur Natural Decline de Smog (sur l’album Rain On Lens) où Bill Calahan fait une espèce de kraut-folk très épuré.
André : On amorce le truc à deux et après on construit le morceau à quatre. Au moins sur cet album on a fait comme ça. Pour les prochains, on verra.
Léo : Il y a aussi le fait que Yoann soit aussi batteur donc quand on passe à quatre, la rythmique a toujours une place particulière dans la construction du morceau.
André : Et puis tous les quatre, on kiffe bien une batterie bien présente dans les morceaux. C’est donc naturel pour nous que ce soit un peu alambiqué et qu’il se passe des choses importantes à ce niveau là dans nos morceaux.
Léo : On parle toujours de mélodie rythmique. Pour nous ce n’est donc pas juste un beat qui vient juste maintenir l’édifice en place. Il y a des changements de vitesse, des intentions de jeu. Chez nous, c’est la batterie qui dirige les chevaux, qui est le chef d’orchestre.
André : Il y a aussi qu’on aime bien qu’en plus la batterie raconte des choses.
Ensuite on est ravi de retrouver l’excellent Surrogate (substitut) qui nous avait déjà conquis sur le EP. Une version un peu déstabilisante pour ceux qui l’ont écouté en boucle sur l’EP…
Pierre : Nous aussi, ça nous a un peu surpris et déstabilisé (Rires). Ça n’a pas été le morceau le plus facile pour se mettre d’accord sur le mix. On a eu du mal à trouver l’intérêt de cette version là ou de notre jeu dessus. Ce qui a libéré le morceau, ce sont les re-re que Léo a amené au clavier.
Léo : Dans le studio, il y avait un pur orgue Hammond des années 80. Pas le beau modèle tout en bois, un truc un peu plus chelou (Rires). Quand tu connais un peu ce genre de clavier avec trois boutons, tu peux avoir le son des Ethiopiques, du jazz éthiopien des années 70. Le riff de Surrogate, c’est la ligne de basse que l’on retrouve chez Mulatu Astatke ou d’autres (Il la chante) en version accélérée. Quand j’ai branché l’orgue, j’ai su que c’était ça qu’il nous fallait. A l’origine je suis pianiste/organiste. La guitare, c’est venu après. Donc cet orgue, c’était un énorme kiff pour moi et j’ai cherché sur quel morceau on pouvait en mettre. On fait des prises live mais on s’autorise parfois un re-re de larsens ou d’enregistrer ensuite les voix parce que c’est trop compliqué au niveau son. L’orgue avait du sens sur Surrogate par rapport à ce riff. En plus, on lui a un peu tordu le cou en ajoutant un autre riff qui dialoguait avec le premier. Un riff très proche mais qui déstabilise bien l’oreille quand tu as le morceau dans le crâne.
Et paradoxalement, la fin du morceau correspond plus au live.
Léo : Tout à fait. Vous verrez ce soir en live, on a même encore accentué ce final. C’est vraiment un morceau fait pour le live. Comme Grotorro, ce sont deux morceaux qui sont vraiment cool à jouer sur scène. Tu as l’impression d’avoir une orchestre symphonique de grattes débiles derrière toi ou c’est comme quand ton chat te fait un petit câlin et que juste après il t’arrache les cuisses avec ses griffes (Il mime avec délectation).
Pourquoi avez-vous tenu à mettre des nouvelles versions d’anciens morceaux ?
Léo : C’était l’idée qu’on l’avait fait un peu évolué en live. Et puis Surrogate n’était que sur l’Ep qui a été tiré à 300 exemplaires. Comme c’est un des morceaux où l’on avait eu des retours très sympas au niveau de l’ambiance dans les concerts. C’était donc une façon d’en remettre une couche et comme il trouvait bien sa place au milieu des autres morceaux.
A ce moment là, ça fait une demi-heure qu’on cause et on nous rappelle que Léo doit aller causer sur Canal B dans quinze minutes. Nous passons donc la surmultipliée pour arriver au bout du disque.
Le rythme s’adoucit avec le suave Butter bed. Dans toute cette variété il y avait besoin de respiration ?
Léo : Dès le début, on avait envie de réussir un morceau un peu down, un peu ballade. Ça venait plus d’une chanson de Pavement qu’on kiffe : We Dance.
Léo : Donc on essayé de faire un truc comme ça et… on n’a pas réussi (rires). Ça a fait Butter Bed. Comme on était aussi sur des choses proches de Eels et notamment de Souljacker, mon album préféré du groupe que je connais par cœur. Donc quand on parlait ensemble de faire Pavement, ce que je faisais sonnait comme Eels (Rires)!
Pierre : C’est aussi ton côté blues une fois encore. On savait que l’album serait assez fourni. Au milieu de tout ça, ça nous semblait bien d’avoir un morceau assez simple : couplet-refrain, couplet-refrain… Une sorte de petite pause dans l’album.
Vous enchaînez avec Odd Box avec un chouette phrasé rapé. Quels sont les artistes hip hop que vous aimez et qui vous inspirent ?
Pierre : J’ai surtout écouté toute la clique du collectif Odd Future : Earl Sweatshirt, Tyler The Creator… ou des trucs comme Clipping. J’ai toujours écouté pas mal de Hip Hop. Ce morceau c’est surtout le seul que l’on a fait en studio. On avait une autre morceau, un des tout premiers que l’on avait composé pour l’album et finalement on arrivait jamais à être totalement convaincu par ce titre.
Léo : le morceau s’appelle Foggy garden. On l’a pourtant joué plein de fois en live mais une fois en studio… On n’arrivait pas à le remanier, à l’emmener quelque part où ça nous plaisait dans le local de répét’. Du coup en studio, le morceau ne nous plaisait plus trop et on a tout refait. Même les paroles. On avait des bouts de textes qu’on gardait dans un coin.
Pierre : De Foggy Garden, on a juste garder les différences d’ambiance entre couplet et refrain. Le refrain très appuyé avec la voix rappée et le clavier de Yoann qui apporte totalement autre chose. C’est un peu le morceau OVNI du disque, du moins à mes oreilles. Il est venu comme ça, en studio. C’était la dernière journée et il fallait absolument qu’on fasse ce morceau. On a enregistré plein de trucs qu’on a réécouté et à chaque fois on changeait et rajoutait des trucs avant de finir par un solo d’André à la Pavement. C’est cool de passer par toutes ses ambiances. C’est vraiment un morceau bizarre (Rires) mais je l’aime bien.
On reste sur une rythmique assez chaloupée avec Gonogo. Pourquoi des titres aussi farfelus ?
Léo : Les titres, faut pas trop chercher. Pour Gonogo la petite histoire c’est dans une usine où on travaille à la chaîne, il y a des tapis roulants sur lesquels défilent des circuits imprimés. Quand ils passent devant toi, tu descends une machine qui teste le circuit. Si la circuit fonctionne, il y a une loupiote verte qui te met : GO. Si ça ne marche pas, ça s’affiche en rouge NO GO. Le texte parle du type qui m’a raconté ça. Gonogo, Grotorro… ça va bien ensemble. C’est un titre qui qu’il faut écouter en ayant Wilco en tête.
Pierre : La plupart des titres parlent des textes de Léo. Sinon, comme pour Narvana ou Grotorro, c’est juste comme ça pour mettre un titre.
L’album se conclut sur le très électrique et dissonant Basement (autre reprise du 1er album). Comment avez-vous choisi cette ultime morceau ?
André : Ce morceau pour l’anecdote, ça fait très longtemps qu’il existe. Il était sur le premier album de Léo 88 man. On le joue donc depuis très longtemps et on l’a remanié X fois.
Léo : En dix ans, il y a eu au moins dix versions de ce titre.
André : Comme on le maîtrise plutôt bien, on s’est dit que pour gagner en fun, on allait l’enregistrer un soir mais après avoir pris pas mal d’apéro (Rires).
Léo : On l’a enregistré très très tard et très très bourré (Rires).
André : Du coup, il se passe des trucs que l’on avait pas calculé et c’est très bien comme ça. Finir par une sorte d’explosion de ce style, ça nous faisait bien marrer.
Pierre : Léo ne se souvenait pas d’avoir fait les prises de voix le lendemain (Rires). On jouait aux palets et on l’entendait tout envoyer en une seule prise.
Le morceau est vraiment méconnaissable par rapport à sa version du premier album.
Pierre : C’est aussi quelque chose qu’on aime bien. Quand un morceau ou un passage nous saoulent, pas de problème on tape dedans, on change. Pour le morceau Nobody qui est sur le premier album et le quatre titres, on a cherché une nouvelle intro de batterie parce qu’on avait marre du morceau comme ça… et au final on a tout changé. Il reste juste les textes et un bout de riff (Rires).
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Le bandcamp pour écouter Academic Sausage à loisir et plus si affinités