Il est 18h30, le soleil tape sur le Fort. Out les bottes et les cirés pour cette nouvelle édition de la Route du Rock Collection été, place aux bermudas fleuris (on vous explique) et aux lunettes de soleil. Tout le monde a chaud, transpire et dégouline… Mais tout festivalier venu l’an dernier qui s’est pris l’équivalent de trois mois de pluie sur une soirée et a pratiqué assidument brasses et dos crawlés dans la boue du Fort St Père a l’humilité de ne pas se plaindre. On est tous heureux de retrouver le Fort sous le soleil. Surtout que la programmation de ce soir sera (quasiment) un sans-faute. Compte-rendu.
La soirée commence sur la petite Scène de la Tour, contrairement aux années précédentes, afin de donner plus de convivialité aux artistes et au public pour le premier concert. Les premiers arrivés font nombre devant la petite scène et évitent, comme les années passées, ce moment un peu flottant où le premier groupe jouait devant un public clairsemé du fait de l’immensité de la scène et de l’heure. François Floret nous avait expliqué que la scène serait plus haute que l’an dernier. La Scène de la Tour est certes réhaussée, mais si cela suffit pour la première prestation devant un public encore peu nombreux, les limites de sa (petite) hauteur se feront plus cruellement sentir quand tous les festivaliers passeront de la Grande Scène à la Petite à minuit et demi. Massés, compactés.
YETI LANE
Mais là, il est encore tôt, les premiers arrivés s’amassent progressivement devant la scène en savourant un bon verre glacé de liquide houblonné devant le concert de Yeti Lane. Ses membres ne sont pas des inconnus des (vieux) festivaliers puisqu’on avait pu les voir dans leur précédente formation, Cyann & Ben il y a quelques années. Depuis, les deux garçons ont un peu bifurqué de voie. Ils nous proposent aujourd’hui une sorte de mélange entre krautrock délicat et pop évaporée. On avait pour notre part particulièrement apprécié leur prestation à l’Ubu il y a quelques années, à la sortie de leur premier album et on était curieux de savoir quelles directions le groupe avait prises avec son dernier album en date, The Echo Show (2012).
Sur scène, Ben Pleng alterne entre guitares (jazzmaster et jaguar) et claviers, tandis que Charlie assure la batterie et les machines. Tout ça couplé avec une multitude de pédales d’effets qui donnent le ton de cette pop atmosphérique. Relativement minimalistes, marquées par une batterie assez martiale (les rythmiques sont essentiellement kraut), les compositions du duo s’envolent néanmoins avec légèreté.
On apprécie justement ce tour de force de sonner aussi aérien avec une rythmique aussi martiale ; c’est sûrement dû à la voix -celle de Ben Pleng- qui nous rappelle parfois Jason Lytle (Grandaddy), à ces mélodies tricotées n douceur à la guitare et aux machines qui ne sont jamais utilisées pour alourdir et « engraisser » le son mais plutôt pour lui donner encore plus de hauteur. On apprécie aussi particulièrement la manière dont le groupe gère son set en donnant progressivement davantage d’épaisseur et d’ampleur à ses ambiances. C’est comme si leur son avait une dimension spatiale et remplissait petit à petit davantage l’espace. Le duo finit d’ailleurs par un Analog Wheel progressif à souhait et véritable tube en puissance qui vient clore cette lente montée avec brio.
ALT-J
A peine le temps d’applaudir la fin du set des Parisiens que déjà, les suivants enchaînent sur la Grande Scène. Les suivants, c’est Alt-J. Et autant dire qu’ils sont attendus quand on voit le monde qui est déjà là. C’est assez rare que le Fort soit aussi plein à 19h15 ! Cela dit, on n’est pas très surpris tant le quatuor anglais Δ (le symbole mathématique delta, mais à prononcer Alt-J, du nom du raccourci clavier permettant de l’afficher sur un clavier Mac anglo-saxon, histoire de simplifier les choses) a affolé la presse musicale et la blogosphère en sortant en mai dernier le très réussi An Awesome Wave. L’enthousiasme pour leurs 13 ritournelles est unanime et l’accueil que le Fort réserve à ces quatre gamins n’est pas là pour le démentir.
Tout jeunes, les quatre Anglais s’installent en ligne sur la scène. Le batteur tout à droite. Le claviériste tout à gauche. Et le guitariste et bassite/guitariste au centre. L’un en bermuda à fleurs (qui produit son effet de stupeur), l’autre, casquette Paris fixée sur sa mèche blonde peroxydée et chemise hawaïenne raccord avec le bermuda de son voisin. Pourtant, c’est avec tout ce qu’il faut de classe que les mélodies des jeunes gens nous scotchent immédiatement. Minutieuses, précises, leurs irrésistibles harmonies vocales fondées sur le contraste entre la voix nasillarde mais habitée de Joe Newman et les chœurs de Gus Unger-Hamilton et Gwil Sainsbury nous renversent en deux secondes. Choeurs bouches fermées, à deux ou trois voix, et parfois sur des breaks totalement a capella nous envoient très vite au tapis.
A côté de nous, un groupe de fans s’est peint des Δ sur tout le corps et fait le signe du triangle en levant les bras pendant tout le concert. Mais ils ne sont manifestement pas les seuls ravis comme on peut en juger par les acclamations qui accompagnent les Tesselate, Brezzeblocks totalement irrésistible, Taro, Ms ou Mathilda. Outre des chœurs délicats réalisés à la perfection, le groupe peut aussi compter sur l’intelligence de ses compositions, petits bijoux tout en arrangements subtils pour finir de nous enchanter. On apprécie particulièrement que le batteur ait remplacé sa charley par une cloche (qu’il utilise de la même manière) sur tous les temps et contre-temps et qui donne cette petite touche un peu dansante à leurs chansons. Et tant qu’on est sur le batteur, quelle bonne idée que de proposer des timbres un peu différents avec cette cloche donc, mais aussi ces bongos, ces clochettes ou cette serviette éponge sur un tom pour étouffer légèrement les sonorités !
C’est surtout ça qui nous aura plu avec Alt-J : cette inventivité et cette créativité dans la composition. Que ce soit dans les détails, parfois infimes (jouer de la guitare avec un rouleau de scotch) ou dans le nombre d’idées qui s’accumulent pour faire bifurquer constamment leurs chansons. Et tout ça, sans jamais jouer les effets de manche facile et le tape-à l’oeil. D’autant que c’est exécuté dans un quasi sans faute. Alors certes, les petits gars sont un peu jeunes et manquent un peu de charisme sur la (très) grande scène du Fort et livrent un set un peu monocorde, manquant un peu de relief sur la longueur. Mais quel talent tout de même !
PATRICK WATSON
Il fait encore jour et soleil lorsque Patrick Watson et son groupe montent à leur tour sur la scène. Découvert d’abord sur un album de Cinematic Orchestra, le Montrélais à la voix d’or nous avait littéralement stupéfaits lors de son premier passage à la Route du Rock au Palais du Grand Large pour la sortie de Close to Paradise. Un instant réellement magique et intime. Du coup, on craignait que la grande scène du Fort ne permette un juste rendu de cette légèreté délicate. Mais ce soir, ce n’est pas tout à fait à la même ambiance que nous allons avoir droit. Les quatre musiciens (Mishka Stein à la basse, Robbie Kuster à la batterie, Simon Angell aux guitares et Patrick Watson donc au piano droit -sympa d’ailleurs d’entendre un « vrai » piano sur scène et à la voix) sont accompagnés par une violoniste (Mélanie Belair qui assure aussi les choeurs) et un trompettiste (David Carbonneau) : le groupe vient en nombre. Il joue en festival, en plein air. Et surtout a maintenant une multitude de tournées dans le monde entier derrière lui. Exit, donc, la fragilité magique qui nous avait ravis au Palais.
Pourtant, si le set est moins fragile et apparaît millimétré, au cordeau, on ne peut pas dire que l’émotion et les sentiments en soit absents. D’abord parce qu’il y a ce piano droit, qui résonne dans le Fort, et puis surtout la voix de Patrick Watson, sublime et habitée, qui caresse et remplit l’espace, parfois accompagnée par une pédale delay pour lui donner encore plus de résonnance et de profondeur.
Le concert commence sur un magnifique Lighthouse qui prend toute son ampleur avec l’arrivée de la trompette. Les musiciens sont loin d’être des manches et tout est plein de subtilité, qu’il s’agisse du guitariste ou du jeu du batteur qui varie les timbres sur chaque morceaux. Car, en plus d’être portées par cette exceptionnelle voix , les chansons de Patrick Watson le sont par des arrangements plein de délicatesse et de finesse. On applaudit l’apport des chordes et des cuivres, les jeux sur les choeurs, la richesse des instrumentations, des sonorités. Tout autant que le charisme du bonhomme et ses pairs qui s’amusent de différents jeux de scène (impossible à décrire ce moment où rassemblés à 5 au centre de la scène, ils avancent et reculent en décalage pour assurer les choeurs au dessus de mélodies à la guitare acoustique) et éprouvent manifestement beaucoup de plaisir à jouer tous ensemble. Au final, c’est parfait. Trop, peut-être.
DOMINIQUE A
Parfait, c’est aussi ce qu’on pourrait dire du concert qui va suivre. Et qu’on loupera en grande partie du fait d’une interview à l’espace presse au même moment. Heureusement, Mr B. était là pour nous raconter…
Dominique A par Monsieur B. :
Nous avions été hypnotisés par l’imposante présence scénique et la classe du grand Dominique A, seul sur scène, et arc bouté sur sa guitare et son clavier en 2009.
Changement radical de braquet pour cette nouvelle prestation. L’ampleur est le maître mot du concert. Le bonhomme revient accompagné de la splendide équipe dont on vous a déjà loué les qualités. Le dispositif est impressionnant : dix sur scène, splendidement mis en valeur par un jeu de lumières subtil et contrasté qui va doucement monter en puissance au fur et à mesure que la nuit se fera.
Ampleur et générosité pour la setlist également. Le festival a eu le bon goût de laisser tout le temps nécessaire à l’artiste pour interpréter la quasi intégralité de son splendide Vers Les Lueurs. Festival en extérieur oblige, deux des morceaux les plus calmes du disque manqueront à l’appel, mais seront remplacés par deux excellents inédits dont un Mainstream doucement ironique pour un artiste rencontrant enfin avec sérénité un certain succès.
Le public conquis accueille plus que chaleureusement les versions toutes guitares dehors des titres. Comme d’habitude, Dominique A rend au centuple ce qu’on lui donne et sa prestation est un bonheur de magnétisme animal et de générosité. Dom est décidément un grand et ses complices se livrent avec la même fougue pour notre plus grand bonheur.
Le concert conclue donc magnifiquement la tournée avec cette formation. Les heureux chanceux qui seront au Palais du grand Large ce samedi pourront encore prolonger le plaisir avec la revisitation inspirée de l’essentiel La Fossette.
SPIRITUALIZED
C’est ensuite au tour de Jason Pierce et sa bande de monter sur la scène. Le leader de Spiritualized est très attendu par une grande partie du Fort. 7 albums de pop cabossée un peu psychée au compteur y sont pour beaucoup. Formé en 1990 sur les cendres encore fumantes de Spacemen3, Spiritualized est surtout le projet de Jason Pierce, compositeur, musicien et chanteur, qui contre vents et marées, continue de mener la barque. Contre vents et marées, parce que l’homme dont on murmure à demi-mots les excès passés, a bien failli ne pas revoir le rivage. Pneumonie et maladie du foie l’auraient par deux fois envoyé au tapis. Peu importe, l’homme s’est relevé, toujours. Et si, récemment encore, il suivait une chimiothérapie expérimentale alors qu’il enregistrait son denier opus Sweet Heart Sweet Light (2012), Jason Pierce revient pourtant musicalement à sa meilleure forme depuis des lustres.Ou tout au moins sa meilleure forme depuis 1997. C’est en effet de cette époque que date Ladies and Gentlemen we are floating in space, 3ème album du groupe, qui marqua son époque et fut unanimement salué (même si parfois après coup !) comme un grand chef d’oeuvre de pop psychédélique dépressif. Et depuis ? Des disques en demi-teinte, parfois inspiré par les expériences de la maladie et de la mort comme sur Songs in A&E, album de pop malade et effondrée, mais dont d’aucuns s’accordent à dire qu’ils n’ont pas les splendeurs d’antan. Jusqu’à ce dernier, Sweet Heart Sweet Light donc, qui semble remettre les pendules à l’heure.
C’est d’ailleurs avec l’un des titres de ce nouvel opus, que Spiritualized, ouvre magistralement le concert. Hey Jane, longue épopée à tiroirs (avec cette fausse fin au milieu) lance les hostilités de fort belle manière. Sur scène, la formation est en arc de cercle. Jason Pierce à la guitare, pantalon blanc, t-shirt rock et lunettes de soleil est à l’extrêmité droite de la scène et à côtés de deux choristes (elles aussi toute de blanc vêtues), qui viennent donner un contrepoint soul et groovy au timbre rock de Jason Pierce. A côté d’eux, un claviériste, un bassiste, un batteur et un second guitariste.
On est d’emblée touché par la fragilité du bonhomme, dont pourtant, au contraire des festivaliers, on doit l’avouer, on n’attendait pas grand chose. Plus brindille que monument, Jason Pierce livre une prestation aussi émouvante que carrée, mêlant orchestrations épiques et confessions intimes. Les morceaux s’enchaînent et Spiritualized nous fait le cadeau de jouer le bigrement émouvant Ladies and Gentlemen we are floating in space. On apprécie également que le set trouve un peu de relief lors d’une acalmie menée sur des choeurs à deux voix, avant une montée progressive qui se fera des plus poignantes. Après un final marqué par un long solo de guitare et une batterie martelée, la bande de Jason Pierce laisse la place sur une impression fort honorable.
CIVIL CIVIC
Pour ne pas s’endormir, la petite scène de la Tour reprend du service. On l’a dit, on apprécie fortement cet enchaînement qui permet de rythmer la fin de soirée et de nous mener plus facilement jusqu’au bout de la nuit. On ne doit pas être les seuls vu la manière dont nous sommes immédiatement compactés contre les barrières. Concassés, même, devrait-on dire. A moins que ce ne soit de la faute de Civil Civic ! Le groupe compte nombre fans et on doit l’avouer, on en fait partie. On avait couru les voir à l’Antipode en novembre dernier tant on est inconditionnel de leur premier album. Civil Civic, en fait, c’est un peu comme si toutes nos amours d’adolescence étaient réunies en un seul groupe : la cold wave de Cure, la pop des Smiths, les guitares noisy de Sonic Youth, les sons crades de My bloody et l’évidence mélodique des Pixies. Alors certes, ils avait livré une prestation un peu en-dedans à l’Antipode (pas facile de jouer en premier, nous ont-ils expliqué), mais on était plus qu’heureux de les retrouver dans la programmation de la soirée.
Et autant le dire, ça pogote dur dès l’entrée en matière. Et de ce fait, même si le son est bon au centre, nous sommes obligés de reculer, ce qui à comme désavantage de nous plonger dans une sorte de bouillie sonore. On n’entend plus vraiment la basse et la guitare du duo, mais seulement The Box, leur boîte à rythmes, troisième membre à part entière de leur formation. Et c’est dommage. Malgré tout, on entend le bassiste régulièrement s’époumonner d’un « ça va les meufs et les mecs ? » avec son accent australien.
Le concert est brouillon, les enchaînements sont loin d’être fluides, pourtant, on reste toujours aussi attaché aux morceaux du duo, à leur mélancolie dissimulée à coup de disto. On aime cette tension entre mélodie et agressivité, cette façon de danser bourré avec tristesse. Alors certes, le concert gratte et dissonne, se prend des pains et crache un peu, mais quel bonheur d’entendre ces murs shoegaze à la My Bloody qui déboulent à la sortie d’une ligne droite à la guitare claire à la Cure et d’une basse nerveuse et mélodique à la Joy Division ! Comment ne pas se laisser dégommer par ces guitares noisy à la Sonic Youth qui débutent Run overdrive ou par l’énergie post-punk d’un Grey nurse. On se damnerait tout autant pour ces trois notes au synthé d’ Airspray, magistral. Bien sûr, le concert nous laissera (encore) un goût d’inachevé, mais qu’est ce qu’on aime ces morceaux !
THE SOFT MOON
Si l’approximation était l’un des maîtres mots du concert précédent, autant dire qu’il est à bannir du vocabulaire du chroniqueur du concert de The Soft Moon. On sait que les programmateurs de la Route du Rock avaient consenti à des efforts financiers importants (notamment leur payer les billets d’avion jusque là, le groupe n’étant pas en tournée en ce moment) pour les voir jouer au Fort St Père. La faute à un album sans titre en 2010 qui, en 11 titres rageurs, plaçait directement The Soft Moon dans le haut du panier des groupes du revival cold wave. Bon alors déjà, autant vous dire que vous pouvez oublier tous les autres revivalistes. The Soft Moon est ailleurs, plus haut, bien plus haut. Très honnêtement, pour notre part, l’un des groupes qu’on attendait le plus sur toute l’édition.
Et on n’a pas été déçu. Le trio déboule avec un son massif qui nous renvoie dans nos longueurs. Un batteur métronomyque qui joue sur des toms et un pad électronique, puissant, racé et implacable. Un bassiste mono-expressif qui ne bouge pas un sourcil sous sa frange coupée droite au millimètre, qui tricote, impassible, les lourdes cordes de son instrument assymétrique. Et au milieu, un guitariste qui crie comme un beau diable et chante le désespoir du monde avec une voix paradoxalement aussi désincarnée qu’habitée et lance quelques notes sur un synthé tout aussi glacé. Lourdes fumées et lumières plombantes ajoutent encore à cette ambiance d’apocalypse inerte et désespérée.
Comme disait Mr B., c’est sec comme un coup de trique et le trio dégage une ténébreuse énergie. On applaudit des deux mains, capuche sur la tête, complètement immergé dans la noirceur vénéneuse de leurs morceaux, l’importance maniaque que le trio a accordé à son son. On le prend en pleine face, massif et on en redemande. Le public, comme nous, semble habité par cette musique, et bouge lentement autour de nous, pour la plupart happé. The Soft Moon livre un concert essentiel dont on ne voudrait jamais qu’il s’arrête (quitte à les faire venir, on aurait peut-être pu les faire jouer tous les soirs !) tant leur musique est à ce point devenue indispensable en à peine quelques dizaines de minutes. Notre claque de la soirée.
SQUAREPUSHER
L’année dernière, le festival était extrêmement heureux d’accueillir Richard D. James, entendez Aphex Twin, légende vivante de la planète électro, pour une fin de soirée à coups de beats concassés, souvent malades et explosifs. Cette année, c’est Squarepusher, une autre figure essentielle de la musique électronique qui termine la première nuit au Fort St Père. Au même titre qu’Afx, le musicien britannique a participé aux heures les plus glorieuses de Warp (fin des 90’s, début 2000) et compte dans sa discographie parmi les albums les plus essentiels du sous-genre qu’on a curieusement appelé IDM (Intelligent Dance Music – le reste c’est pour les cons ?). Disques proposant un mélange assez explosif entre virtuosité et sonorités jazz, constructions alambiquées, rythmes disloqués et totalement fêlés, les premières sorties du Britannique font l’unanimité. Le souci, c’est que sur les albums qui suivent, Squarepusher convainc moins et déçoit parfois avec des titres aux ambitions moindres quant à la recherche et à l’originalité. Cependant, sa dernière sortie, Ufabulum (Warp, 2012), semblait pour beaucoup renouer avec le Squarepusher des débuts. On attendait donc sa prestation avec confiance.
Après de longues minutes de sonorités dissonantes, Tom Jenkinson arrive sur la scène avec un casque à la Daft Punk (mais qui fait de jolies lumières qui clignotent). Derrière et devant lui, deux écrans lumineux sur lesquels un show visuel époustouflant (parfois éprouvant, épileptiques, méfiez-vous) va accompagner chacune de ses rythmiques. Des lignes lumineuses s’entrecroisent, se découpent, en parfaite synchronicité avec la musique. C’est visuellement très réussi et donne une profondeur sensorielle à chaque circonvolution rythmique (et autant le dire il y en a), à chaque beat massif.
Malheureusement, le début du set du musicien est loin d’être à la hauteur de nos espérances, ni même du show visuel. Si l’on ferme les yeux et qu’on fait abstraction du jeu lumineux sur les écrans, la musique perd beaucoup en énergie et en profondeur. On attendait que Tom Jenkinson y breake les rythmiques et livre un set bruitiste, complexe, entrecoupé d’ambient céleste, d’accalmies jazz et de lourdes basses telluriques. Làs, si les rythmiques sont bien breakées, elles sont accompagnées de nappes synthétiques qui nous rappellent les pires heures des années 80.
On souffle cependant avec un passage d’accalmie accompagné par des taches lumineuses bleues et roses qui nous semblent plus audibles, et une suite de set plus dense et rythmique. Suit un plutôt bon moment… Même si on a l’impression d’avoir les oreilles qui clignotent comme le show sur l’écran, tant le son est fort malgré nos bouchons. Squarepusher se saisit ensuite de sa basse (l’homme est bassiste de formation et pas manche sur l’instrument) qu’il fait passer par une multitude d’effets. C’est désormais en jouant de son instrument qu’il envoie ses stridences soniques. Si l’on doit reconnaître que c’est une bonne idée pour animer le show (c’est toujours difficile de proposer un show live quand on fait de la musique électronique, on est souvent coincé derrière ses machines), on soupire tout de même… Tout ça pour ça… On quitte le Fort donc le Fort avant la toute fin du set, éprouvé physiquement par ce set qui nous aura laissé un sentiment en demi-teinte…
PHOTOS : Caro, Solène, Mr. B., Yann
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La Route du Rock a lieu du 10 au 12 août 2012.
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OK pour quasi tous les commentaires sauf concernant Spiritualized: c’était vraiment daté, de la brit-pop à l’ancienne (argh,avec des choristes!): quelconque et ennuyeux au possible. J’avais déjà trouvé ça baillant en 1998 sur la même scène. Faut dire que le Jason a lui même l’air de bien s’emmerder, même Hope Sandoval a parlé plus que lui, c’est dire…