Rouge Gorge @ Musiq’Alambic #3 : entre désinvolture, légèreté et résonance macabre

Nous avons tellement adoré les deux premières éditions du gouleyant festival Musiq’Alambic, la programmation fastueuse de l’opus 2014 nous a si surexcités, que nous avons décidé de vous en détailler la carte des vins par le menu. Troisième étape avec le faussement facétieux Rouge Gorge qui sous ses allures désinvoltes fait preuve d’un sens mélodique racé (et parfois bouleversant).

MusiqAlambicaff3On avait rencontré Rouge Gorge avant sa première partie de Sexy Sushi à l’Antipode à l’automne dernier. Devant une foule survoltée, attendant le chaos dans une excitation palpable, le garçon avait réussi l’exploit de faire patienter les pieds et seins nus trépidants prêts à en découdre avec ses mélodies electro-pop ayant bien plus à voir avec la frange möderne fenchy des eigthies et ses homologues d’outre-Rhin qu’on ne l’aurait naïvement cru au départ. Ce qui était déjà un sacré exploit en soi. Rencontre avec un drôle d’oiseau surfant sur la minimal wave frenchy, cultivant avec talent l’ambiguïté entre désinvolture, légèreté et résonance macabre.

2013-10-antipode -rouge_gorge-alter1fo 3 Alter1fo : « Rouge Gorge » : pourquoi avoir choisi ce nom qui reste assez imagé ?

Rouge Gorge : Le nom date de mes années lycées, quand j’ai découvert la MAO. C’est juste une traduction de « Robin », en français. Plus tard, j’ai lâché l’ordinateur, pour le live tout du moins… et le nom est resté. Peut être que l’ambiguïté entre l’oiseau mignon et la résonance macabre du nom (gorge rouge) me plaisait.

Comment est né ce projet solo « Rouge Gorge » ?

Le projet tel qu’il existe actuellement est né d’une envie de sortir de la composition à partir du logiciel de MAO « Reason ». Je voulais donner plus de place à la voix et aussi avoir le sentiment de créer de la musique en direct pendant mes concerts. Avant, je me sentais un peu frustré de rester spectateur de mes propres fichiers « Reason » en live.

J’ai profité d’un séjour de 6 mois à Dresde en Allemagne et des contraintes que cela apportait au niveau du matériel, car tout devait rentrer dans une valise pour refondre le projet, sur des bases beaucoup plus minimales et plus simples, afin d’être capable de tout rejouer et sampler en live.

Le son du projet vient du mini-clavier que j’avais amené là-bas : un petit Casio jouet mais plutôt récent, avec des chouettes sons de synthés et trois mini-pads de batterie bien musclés.

Comment définirais-tu ta musique?

C’est assez difficile de définir un projet perso qui est en même temps solo. Je manque un peu de recul mais la base reste le format « chanson/pop » travaillé avec différentes influences. Niveau style, on retrouve un peu de tout ce qui a pu me marquer en musique.

Il est indiqué que l’EP a été composé entre Dresde et Rennes, tu voyages entre ces deux villes ou tu es posé sur Rennes dorénavant ?

Non non, je suis pour l’instant sur Rennes.

Tu as peut être joué dans d’autres formations avant ?

Oui, j’avais un duo avec Clémentine Blondeau: « Maasaï« . On appelait ça de la « naïve wave », on était deux, sur une base synthé/guitare/chant et différents dispositifs comme des samples, un circuit bending, et des percus.

Avec Clémentine, on a aussi eu un trio avec Julien Moinel à la guitare. « Cardinal Ratzinger » que cela s’appelait, notre premier groupe d’impro libre à tous les trois.

J’ai fait également un autre duo avec Antoine Garrec (actuel Garçon Machin), une sorte de variété/pop parfois bizarre aux synthés avec deux voix:

Sinon, j’ai remplacé et chanté pour certaines occasions dans divers groupes rennais (Les Spadassins pour une tournée en Belgique, Superdrugz…) et j’ai fait deux projets d’études live quand j’étais étudiant au conservatoire: un sur le Krautrock et un autre sur New York fin 70’s/début 80’s.

Par quel instrument as-tu commencé la musique ?

J’ai commencé par le chant, j’ai toujours aimé ça, je crois. Quand j’étais à Vitré, je faisais du chant lyrique au conservatoire municipal.

2013-10-antipode -rouge_gorge-alter1fo 2Comment composes-tu?

Je compose seul, plutôt à l’instinct, je n’écris pas la musique. Je joue des trucs et j’enregistre beaucoup les idées qui me viennent. Et puis quand j’ai du temps, je reviens dessus. Ça peut aller très vite, comme plus lentement, ça dépend de comment me viennent également les paroles. J’ai aussi quelques textes qui ne sont pas de moi : un ami, Charles Bénéat m’a écrit « Milf & Milk » et « Les Primevères » est en partie un texte que ma mère avait écrit, il y a quelques temps.

Quelles sont tes influences musicales ?

Je suis assez client des libertés prises au début des années 80 par la scène « punk/dada/pop » en Europe (Allemagne, Belgique, France, Angleterre…) mais j’ai aussi été touché par d’autres familles musicales comme le hip hop, l’improvisation libre, le lyrique, la musique électronique (Warp…) et la house, la minimale allemande, la new wave, la variété/l’Italo, la noise, la no wave et le krautrock ou encore la musique des vieux Lucasarts…

2013-10-antipode -rouge_gorge-alter1fo 1Peux tu me citer quelques disques que tu aimes écouter ?

Les Honneymoon Killers – Les tueurs de la lune de miel,

Nacht und Nebel – Beats of Love,

Siouxie & The Banshees – Juju,

Sean Nicholas Savage – Mutual Feelings Of Respect And Admiration,

Philippe Katerine – Les Créatures

Kendrick Lamar – Good Kid M.A.A.D City

Sur la scène rennaise, comment te situes-tu ?

Dernièrement un peu à Brest…

Es-tu en contact avec d’autres artistes Rennais ?

Mises à part les connaissances via la musique et les bars que je peux fréquenter, j’ai participé il y a quelques années à la programmation du festival « Roulements de Tambour! ». Du coup, je garde quelques contacts de cette expérience. Sinon j’aime bien ce que fait TONDEUSE.

Comment analyses-tu la scène musicale rennaise : mise à dispos de salle, possibilité d’effectuer des résidences, salles de répétition, obtenir un suivi dans un projet, etc..?

Je ne suis pas un pro des institutions mais je dirais qu’il y a régulièrement pénurie de locaux pour répéter. Le Jardin Moderne c’est chouette mais c’est souvent complet et plutôt excentré

Les groupes ont tendance à trouver des locaux de répét’ en campagne il me semble, moi j’ai pas le permis.

Il y a énormément d’assos qui programment dans tous les styles, c’est bien, et même si certaines chapelles ont du mal à se croiser, on peut régulièrement voir de beaux concerts dans des lieux accessibles (tant au niveau du PAF que de l’ambiance).

Pourquoi avoir conservé ce nom Dresden sur le titre de l’EP ?

Il s’agit de morceaux qui ont environ 2 ans, tous créés là-bas. C’est aussi à Dresde que j’ai fait la première scène de ce projet, qui le finalisa.

2013-10-antipode -rouge_gorge-alter1fo 4 Comment résumer l’influence de ta vie passée à Dresde ?

Je ne suis pas parti à Dresde par hasard, je me sentais très proche d’une certaine scène allemande… ça m’a rendu curieux.

Dresde est vraiment prégnante, c’est con mais il y a certaines villes qui semblent avoir une âme. Je n’ai pas vécu dans beaucoup de villes différentes mais celle-ci a une histoire assez riche, sur fond de déclin et renaissance : elle fut la capitale des rois de Saxe puis il y a eu une période de déclin, puis est venu l’ère de l’industrialisation, stoppée par la destruction des bombes. Vient ensuite la reconstruction par les soviétiques, puis la guerre froide etc… Et toute cette histoire est plutôt palpable. Il y avait du matériel pour faire de la coldwave.

D’où t’es venu l’idée de cette pochette de l’EP ? Que souhaites-tu faire passer finalement comme message ?

La pochette est faite sur Kid Pix. C’est une vieille photo d’un anniversaire où j’avais reçu cette boule à facette. Ça ressemblait à une remise de prix, j’aimais bien le côté ironique du « jeune premier ».

De quand datent les morceaux ? Ou as-tu enregistré, mixe et mastérisé ?

J’ai enregistré et mixé à Dresde, directement dans l’appart’ où je vivais. Je venais de choper le logiciel « Logic ». Je voulais quelque chose de simple, le projet était encore en élaboration. Beaucoup de morceaux ont d’ailleurs été créé pendant l’enregistrement. Il n’y a pas eu de mastering.

Qu’aimerais tu que l’on te dise une fois que l’on a fini d’écouter tes morceaux ?

Qu’il n’y avait pas assez de morceaux !…

Tu as fais la première partie de Sexy Suhi, comment as-tu été contacté pour cette date?

Par l’Antipode tout simplement et par téléphone.

Comment as tu appréhendé ce live, as-tu déjà joué sur une grande scène auparavant ?

Non, finalement. J’ai juste joué au Jardin Moderne (…) pour le Marché Noir #2, avec « Mein Sohn william« . Je suis content de faire la première partie de Sexy Sushi, j’aimais bien quand j’étais au Lycée et à la Fac. J’ai peu écouté leur dernier album mais j’ai entendu un ou deux bon titres sur internet. Ça a l’air d’être la grosse machine sur scène. Il parait que c’est bon signe d’avoir du stress avant un concert alors je me dis que ce sera bien… (…)

Passer de la scène de l’Antipode à un espace plus intime comme celui d’un bar, tu le gères comment finalement ?

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Tu préfères la scène ou l’enregistrement studio ou peu importe ?

Je ne fais pas vraiment du studio, plutôt du home studio. Du coup les deux sont mêlés, je répète et je compose parfois dans les mêmes moments.

(…)

Merci!

Vendredi 23 mai – Le Jardin Moderne, 11 rue du Manoir de Servigné, Rennes – 20h30 – 10 €
Réservations : musiqualambic[at]gmail.com

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Plus d’1fos sur le site de Musiq’Alambic
La page facebook de l’événement

Retrouvez nos articles sur la programmation :
ARLT et Thomas Bonvalet
Eshôl Pamtais
Rouge Gorge
L’Oeillère
La Terre Tremble !!!
Entre les groupes et en after: DJ Black Sabboum

 Rouge Gorge

Le Bandcamp de Rouge Gorge : http://rouggorg.bandcamp.com/

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