On peut les considérer comme complètement barrés ou génieusement inventifs : les artistes belges de la Clinic Orgasm Society ont secoué le public de l’Aire Libre ce jeudi lors du festival Mythos. Entre rires et consternation, Si tu me survis… n’a pas laissé indiférent !
Assister à une représentation de Si tu me survis…, c’est voir pêle-mêle, dans l’ordre et le désordre :
– la naissance de Superman dans un sac ikéa géant
– des chips – ou permachips – poussant sur les arbres
– un autel à chiens
– une femme en combinaison blanche moulante dont le visage est truffé de Gummibärchen
– une version recyclage de Terminator
– un alambic du futur
– un homme à tête de seau à tête de chien
– une jeune ingénue à couronne fleurie racontant des verions trash de Blanche-Neige
– un gâteau d’anniversaire qui prend feu
– une BarbaMama audacieuse
– un(e) Harpagon(e) aux accents marseillais
– un McEnroe pas très doué
– une chorégraphie revue et corrigée de Thriller
– une sensuelle muse des bois vêtue de brindilles d’herbe se mouvant langoureusement sur Cure
– (…)
Décontenançant ? c’est peu dire. Mais joyeusement inventif et barré à notre avis (plusieurs personnes ont quitté la salle durant la représentation). Ils sont un peu dingues, ils expériementent et nous laissent pantois. Et c’est tant mieux. Nous, on a beaucoup ri de ces facéties. Et comme le dit le Tarmac (théâtre entièrement dédié à la création contemporaine francophone) en parlant de la Clinic Orgasm Society :
« Les titres des spectacles de la Clinic Orgasm Society n’ont à première vue pas de lien direct et explicite avec leur contenu. C’est au spectateur d’inventer, de projeter du sens, de réagir avec son vécu. La Clinic Orgasm Society ne lui mâchera pas cette besogne. Elle se contente juste de lui donner envie de la faire. La Clinic Orgasm Society aborde la scène de façon délibérément brute, décomplexée, expérimentale, populaire et festive. Elle crée et explore des univers ludiques et apparemment bordéliques, plein d’imperfections, de ratés, de scories et d’accidents, qui sont en fait réglés avec la précision d’un mécanisme d’horlogerie. »
Ils expérimentent effectivement ici le rapport au temps, jonglant sans cesse d’une époque à l’autre, confrontant les Mathilde et Ludo de maintenant à ceux qu’ils seront devenus en 2046. Ils les confrontent également à leur travail de création artistique : « écrire la fin d’un spectacle, c’est écrire la fin de sa vie »… Ambiance !
Et pour créer « cette incontinence de souvenirs », tous les moyens sont bons : jeux de lumière, maquillage, costumes délirants, procédés sonores et visuels… La scène où Mathilde, en bord de mer, lit et se remémore ses souvenirs, aidée par 2 ventilos qui lui tourne les pages du livre est un beau moment apaisé dans ce tourbillon.
Mais on rit de cette avalanche d’incongruités à laquelle on est exposé 1h30 durant. Parce que Cure nous rappelle quelque chose, parce que les génériques télés nous renvoient à nos propres souvenirs, parce que le petit garçon de Sardou fait partie, qu’on le veuille ou non, de cette culture collective à laquelle nous appartenons…
« Moralité : ne jamais commencer de collection de tortues ». Et ce sera le mot de la fin, celui d’un épisode de la représentation. Rien à voir avec le schmilblick ? et pourquoi pas après tout…
Photos : Catherine Gaffiero – La Vie Invisible