Lusaka et région de Copperbelt, Zambie, 1975. Une poignée d’activistes branchés sur Jimi Hendrix et le son le plus saturé des sorties anglo-saxonnes des années précédentes se procurent les inaccessibles accessoires d’un combo rock classique et créent un son unique, réédité en quelques précieux disques par le label Now Again, il y a quelques mois. Ils ont pour nom Paul Ngozi, Emmanuel « Jagari » Chanda ou Rikki Ililonga. Rennes, décembre 2012: le projet ZamRock associe deux d’entre eux au groupe funk allemand Karl Hector & the Malcouns pour une première, samedi, salle de la Cité.
Il y a quelques mois, « Jagari » Chanda lançait, via la presse et le label Now Again, ce message: « Je tiens à lancer un appel aux producteurs: si quelqu’un me trouve des dates de concert, je peux facilement remonter un groupe pour venir montrer la puissance du zamrock en Europe ». Il semble donc qu’il ait été écouté. Et nous, veinards, d’en avoir la primeur.
Si l’histoire devenait belle pour ce projet, on pourra dire que le Zamrock et ses acteurs reviennent de loin. Pensez-donc: alors que le succès des groupes de rock zambiens s’estompe, au moment où naissent les Trans, à l’aube des années 80, leur génération est implacablement frappée par le VIH. Nombre de musiciens y succombent en même temps qu’une grande partie de la population zambienne. Paul Ngozi, l’une des stars de Lusaka, mais aussi la plupart des membres du combo WITCH, figurent parmi les victimes. Jagari, lui, en réchappe. Surnommé ainsi pour la ressemblance de son chant à celui de Jagger, il officiait au sein de WITCH, dont l’opus « Lazy Bones!!! » a fait plus d’un émule, depuis son heureuse réédition.
Une dizaine d’années après l’indépendance, Jagari avait, comme toute la Zambie, les oreilles bien branchées sur la radio anglaise. Rikki Ililonga, lui, qui partageait avec WITCH le haut des affiches de l’époque, explique que la colonisation anglaise fut si brimante qu’il lui était naturel de chanter en anglais, à défaut des langues Bantoues.
Dans le zamrock, pas de gimmicks afrobeat, pas de stylisation à outrance, comme chez les grands orchestres d’état en Afrique de l’Ouest à la même époque, pas de métissage aux sons indigènes: le rock de Zambie était le seul d’Afrique à se limiter à un son rock, gavé de solos de guitare saturée, de batteries puissantes et de chant en anglais.
On peut s’en rendre compte à l’écoute du brûlot de WITCH « Lazy Bones !!! », de 1975, réédité en cd (Now Again), ou, plus récemment avec l’ensemble du coffret « We intend to cause Havoc » (Now Again) des mêmes WITCH.
Le Zamrock Project présenté samedi soir, pour les Transmusicales, salle de la Cité à Rennes, associera deux stars du Zamrock, Jagari Chanda et Rikki Ililonga, avec la formation allemande Karl Hector & the Malcouns, pour une première européenne.