[Chapitre 1] – Photographe culinaire… Bien plus qu’un simple travail alimentaire !

A chaque fois, c’est pareil ! Pour tester un nouveau restaurant, on écoute les recommandations de nos proches ou bien on lit les différents commentaires d’internautes sur la toile. Cette première sélection faîte, on s’en va vérifier les menus sur les sites web des lieux ayant recueilli le plus d’avis positifs. Dès lors, si de chouettes photos présentent les plats de la maison, ni une ni deux, notre ventre crie famine et nous voilà déjà en train de réserver une table.

Assurément, ′donner envie′ ou ′mettre l’eau à la bouche′ passe aussi par un visuel réfléchi et peaufiné. Et ça, c’est un travail à part entière. Surtout à l’ère du numérique et de la toute-puissance de l’image ! Les professionnel·le·s de la restauration l’ont d’ailleurs bien assimilé : une mauvaise photo peut avoir un impact désastreux sur les client·e·s(1). C’est pourquoi beaucoup font appel aux services de photographes culinaires dont le métier est de pouvoir sublimer tout ce qui touche à la filière du manger.

© Bière-PierreLesayec

D’archéologue à la nature morte

C’est par un froid humide et matinal de décembre que nous avons rencontré Pierre Le Sayec, installé à Rennes depuis seulement quelques années. Autour d’une boisson chaude bien à propos, ce dernier nous raconte avoir lâché son dernier job pour se lancer lui aussi dans l’aventure de la photographie culinaire.

Ancien archéologue, Pierre travaillait pour l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP). Parti au Canada pour des raisons personnelles, il en a profité pour se former aux techniques de la photo : « Mon travail d’archéologue m’amenait à prendre beaucoup de photos. Je voulais améliorer ma technique d’où cette envie de suivre une formation. Finalement, je me suis décidé à poursuivre professionnellement dans le domaine de la photographie. » Des vieilles pierres aux plats traditionnels et gastronomiques, il n’y aurait donc qu’un clic de déclencheur ? « Quand j’ai débuté, j’étais attiré par le genre artistique de la nature morte. J’aime avoir le contrôle sur mon environnement… pouvoir tourner tranquillement autour de mon sujet, prendre mon temps. Naturellement, cela m’a amené vers la photographie culinaire. »

Pour Pierre, une photo réussie passe avant tout par la mise en valeur du sujet grâce au décor, à la lumière et à la mise en scène. Ce dernier avoue passer du temps à visualiser mentalement et à imaginer la photo finale  : « Prendre la photo n’est qu’une partie infime du job. Je passe du temps à soigner la mise en place, que ce soit chez le client ou chez moi. Et après, je retouche la photo pour obtenir le meilleur résultat possible. »

©Glace-PierreLesayec

Rennes, capitale du bon goût ?

Depuis quelques années, la capitale bretonne se mue et connait un nouvel élan gastronomique(2). L’ouverture de nouvelles adresses redessine complétement la morphologie de la ville. Il n’y a qu’à voir ce qu’est devenu le mail Mitterrand(3) avec ses enseignes comme Les Grands Gamins, Oh My Biche ou l’épicerie fine du Mail. Et même s’il y a encore du travail pour tout le monde, il n’est pas facile de se démarquer  notamment avec l’émergence du Pornfood. Ce phénomène consiste à dégainer son smartphone plus vite que sa fourchette pour photographier tout ce que l’on mange et à le diffuser sur les Internets !

Du coup, entre la dizaine de photographes culinaires basé·e·s à Rennes, certain·e·s privilégient le produit brut sans s’aider de subterfuges, comme nous l’explique le photographe talentueux et expérimenté Franck Hamel (voir ci dessous), d’autres collaborent avec des stylistes alimentaires pour obtenir un résultat plus artistique. D’ailleurs, la mention ′Suggestion de présentation des emballages alimentaires indique clairement que l’illustration qui y figure ne représente pas forcément la réalité du produit emballé (NDLR : histoire d’éviter toute action judiciaire pour publicité mensongère, par exemple… )

En tout cas, Pierre poursuit sa route gourmande. En pleine phase de prospection, il se laisse quelques années pour constituer son réseau : « Je démarche mes futur·e·s client·e·s, je tente de me faire connaitre. A côté, j’ai un travail alimentaire qui me permet de voir venir et de démarrer sereinement et tranquillement mon activité. »

Et qui sait, peut-être qu’un jour ce sera grâce à l’une de ses photos que nous réserverons dans un nouveau restau. C’est tout ce qu’on lui souhaite sinon un bon appétit, bien sûr !

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|Pour aller plus loin : 3 questions à… Franck Hamel|

Franck Hamel est photographe culinaire ayant une solide expérience dans le domaine. Talentueux, il multiplie les collaborations et fait de la lumière naturelle sa marque de fabrique, mais aussi son engagement pour une photo sans triche où le produit est seul maître à bord et où le photographe est au service de la lumière et du produit.

Crédit photo portrait : ©Julien Mota

Comment définiriez-vous le métier de photographe culinaire ?

L’objectif majeur du photographe culinaire est de sublimer tout ce qui en rapport avec la filière du manger : les produits, les recettes, les chefs, les entreprises agroalimentaires, les producteurs, les artisans… C’est un métier qui a évolué depuis quelques années avec l’arrivée du numérique et le regard sur les images a changé. Nous sommes moins dans la ′triche′ comme il y a quelques années, nous respectons un peu plus le produit et avons moins recours à des subterfuges, il y a beaucoup moins de gaspillage.

Quelle qualité principale doit faire preuve un photographe culinaire ?

Pour moi, la qualité principale, hormis le fait de maitriser la technique photographique, est la passion pour la gastronomie. Il faut aimer cuisiner, c’est un univers particulier avec des codes qu’il faut apprendre surtout lorsque l’on travaille avec des chefs.

Quelle serait la photo la plus difficile que vous ayez réalisée ?

Tout dépend ce que l’on entend par difficile, si c’est difficile d’un point de vue technique ou par la complexité de trouver le produit à photographier. Nous sommes très souvent en décalage dans notre métier avec la saisonnalité des produits. Pour moi c’est une des plus grandes difficultés notamment d’un point de vue éthique car je suis moi-même un consommateur très sensible aux produits locaux et de saison. Il m’est arrivé de devoir par exemple photographier des petits pois frais en plein hiver….

 


|Plus d’infos|

Le site de Pierre Le Sayec https://pierrelesayecphotographie.com/  
► Contact Mail : pls.photographie [ @ ] yahoo.com

► Le site de Franck Hamel  http://www.photographe-culinaire.net/about
► Contact Mail : franck[@]photographe-culinaire.net


(1)  cf. Maud Argaïbi, photographe culinaire

(2)  cf. Olivier Marie

(3) Le parking du mail appelé à disparaître

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