Alter1fo vous propose de (re)découvrir la scène musicale rennaise à travers une chronique, hebdomadaire le plus souvent. Des talents émergent, d’autres confirment sur la scène locale. Certains les soutiennent, sortent leurs disques, d’autres leur proposent des lieux de concert, de répétition… Alter1fo donne un coup de projecteur à ces artistes, labels, lieux ou assos qui œuvrent d’arrache-pied pour que la scène locale existe. Permettre aux acteurs et aux publics de se rencontrer, donner la parole à ceux qui font la vie rennaise, tels sont nos buts avoués. Chaque semaine, vous retrouverez donc un ou plusieurs focus sur l’un de ces acteurs…
Malgré son patronyme faussement hollywoodien, You’ll Brynner ne fait pas dans la musique pour péplum à paillettes ou western de tueurs à gages… Non, le trio guitare-basse-batterie mené par Guillaume Duchemin, Giuseppe Zappia et Mathieu Cotton navigue sur les rivages d’un post-rock plutôt atmosphérique qui donne le temps aux ambiances de se développer tout en laissant parfois les morceaux se durcir. Un premier ep, St Peter’s Church, a vu le jour en automne dernier avec cinq titres qui semblent influencés tout autant par June of 44, Shipping News que par le math-rock des Suisses d’Honey for Petzi. On profite du fait que les You’ll Brynner seront en concert le 23 mai à la Bascule et le 31 mai à la Paillotte pour en savoir un peu plus sur le trio rennais. Rencontre.
Alter1fo : Si vous deviez vous présenter en quelques mots ou quelques lignes, que diriez-vous ?
You’ll Brynner : Nous sommes un power trio orienté noise/rock ou même noise/pop, pourquoi pas. Guillaume est le guitariste/chanteur, Gio le bassiste et Mathieu le batteur. Bien que le groupe soit assez récent, nous avons chacun eu des expériences musicales très différentes ce qui se ressent dans nos compos.
Comment en êtes-vous arrivés à ce projet ? Avez-vous joué dans d’autres groupes avant ? Jouez vous dans d’autres formations en parallèle ? Quelle est la genèse de You’ll Brynner ?
Au départ, c’est Mathieu et Guillaume, qui se connaissaient déjà, qui ont décidé de créer ce groupe. Guillaume avait pas mal d’idées de morceaux et on s’est mis au boulot dès la première répèt. Sans passer par la case « reprise »… Après quelques mois la présence d’un bassiste s’est révélée indispensable. On a pas mal galéré avant de rencontrer Gio par annonce. Et là You’ll Brynner est né !
Mat : Avant de vivre à Rennes, j’étais batteur d’un groupe de la scène montréalaise, Feed The Ghost. Nous avions sorti un ep I think therefore I factorize et tourné surtout au Québec et à Toronto, de 2005 à 2009. J’ai aussi joué de la batterie pour la tournée québécoise du groupe belge Marble Sounds.
Gio : Avant You’ll Brynner, j’ai fait partie de deux groupes rock/prog en Italie, qui malhereusement n’existent plus, où j’ai eu la possibilité de jouer de la basse, mais aussi des claviers, aspect qui est enrichissant pour un musicien et un passionné de musique.
Guillaume : Un premier groupe sur Paris il y a 10 ans : LEIK[shore]. Un projet post rock instrumental, 2 EP autoproduits, très peu de concerts mais la chance de jouer avec de très bons musiciens. J’avais laissé depuis ma gratte au grenier jusqu’à ce que je croise Mathieu.
Quand on écoute votre premier ep, on entend des influences comme June of 44 ou Shipping News, notamment dans votre façon de poser les ambiances. Vous êtes d’accord ? Quelles influences revendiqueriez-vous de votre côté ?
Mat : C’est exactement ça ! Ce sont deux grosses influences pour Guillaume et moi. Il y a aussi, sans tous les citer, Sonic Youth, Blonde Redhead, Dianogah, Rodan ou encore Shannon Wright. Mais You’ll Brynner, c’est surtout la rencontre d’univers différents : plus prog/rock pour Gio, math rock et noise rock pour Guillaume et indie et funk rock pour moi. Nous avons bien sûr des fils conducteurs, des goûts communs, mais beaucoup d’influences propres à chacun. La meilleure recette pour créer du neuf.
Gio : Vous avez bien ciblé la nature de notre son… En particulier, pour les influences de Mathieu et Guillaume. Etant donné que j’écoute beaucoup de musique en dehors de mon univers progrock, le math et le noise rock n’étaient pas des sonorités méconnues à mes oreilles, donc j’ai aimé tout de suite les mélodies proposées par Guillaume pendant la phase de composition.
Trois disques sans lesquels vous ne pourriez vivre ?
Mat : Pour moi, il y en a un en particulier, c’est Winter Hymn Country Hymn Secret Hymn de Do Make Say Think. Pour les deux autres… c’est vraiment dur. Je ne me lasserai jamais de Blood Sugar Sex Magic des Red Hot Chilli Peppers ou de Third de Portishead. Voilà, ça fait trois ! Mais bon, je dois aussi absolument mentionner Spiderland de Slint, qui est juste un monument.
Gio : La passion et l’amour sont difficiles à partager… C’est comme demander à un père de choisir parmi ses petits… En tous cas, j’en ai trois en particulier : Misplaced Childhood de Marillion, Achtung Baby de U2 et The Wall de Pink Floyd… Mais bon, j’en aurais encore au moins une centaine!
Guillaume: Over the sun de Shannon Wright ; Four great points de June of 44 ; Low birth weight de Piano magic.
Vous avez réalisé un premier ep, St Peter’s Church. Quelles étaient vos envies avec l’enregistrement de ce disque ?
On voulait surtout mettre à plat ce que l’on avait bossé ensemble. Gio venait d’arriver dans le groupe et on espérait passer 2-3 morceaux. Finalement, on a pu en enregistrer six dont cinq se retrouvent sur le ep. On voulait surtout pouvoir faire écouter notre musique et en faire la promotion… Et nous sommes très fiers du résultat. Ça nous a permis d’affirmer notre identité ou plutôt, de la trouver.
Comment composez-vous ? Vous improvisez ? Chacun fait ses propres chansons, ou bien l’un d’entre vous arrive avec une partie que vous retravaillez ensemble ?
Mat : C’est Guillaume qui vient avec la mélodie, la partie guitare, les samples… A partir de là, Gio et moi essayons de comprendre ce que Guillaume a voulu faire, littéralement. En fait, c’est la phase qui permet au groupe de s’approprier le morceau. Les paroles sont quasiment toutes l’œuvre du quatrième membre du groupe : Manuel. Il nous fournit les textes et nous laisse la liberté de les poser comme on veut. Et ça marche !
Où avez-vous enregistré votre ep ? En studio, à la maison ? Comment cela s’est-il passé ?
En Normandie, au studio Chaudelande (www.myspace.com/studiochaudelande). Nous sommes restés trois jours dans un cadre idyllique, à la campagne, dans la meilleure atmosphère imaginable. Nous avions trois jours, pas un de plus, donc, on a enregistré les morceaux en condition live les deux premiers jours et les voix le dernier jour. On s’est mis en situation d’urgence, on espérait vraiment enregistrer tous les morceaux aboutis, et ça a été le cas. On a appris sur nos limites et sur la viabilité du groupe. Au final, c’était le meilleur test pour nous, et on l’a réussi mieux que l’on ne l’espérait.
Guillaume : J’ai la chance d’avoir un frangin très impliqué dans la musique sur Cherbourg (Betrand Duchemin) Le studio lui appartient, ça aide ! Il nous a vraiment soutenu dans le projet et s’est beaucoup investi avec Manuel Lafleach pour la réalisation et le mix final. Le résultat, c’est à eux qu’on le doit !
D’où vient l’artwork de votre ep ? Qui l’a réalisé ?
Le « cabanon rouge » qui est sur la couverture c’est le lieu de création de Alice Dourlen (www.myspace.com/chicaloyoh) qui est d’ailleurs l’auteure de la photo.
Cette image symbolise l’expérience que l’on a vécue au studio Chaudelande. Alice met en scène son atelier dans lequel elle peint et compose. Le cabanon se situe d’ailleurs dans le jardin du studio. Cette photo traduit parfaitement l’atmosphère de la session d’enregistrement : nous nous sommes retrouvés tous les trois, dans le studio, à la campagne, avec un même objectif et on se retrouve maintenant spectateur/auditeur de cette réunion éphémère.
Malgré les apparences, une banale cabane peut accueillir les plus ambitieuses des créations. L’artwork en tant que tel est l’œuvre de notre parolier / photographe / cameraman/ pote/ réalisateur/ graphiste Manuel, encore une fois.
Et le titre, d’où vient-il ?
Tout simplement de la localisation du studio Chaudelande : Saint-Pierre-Eglise, dans la Manche. Encore et toujours un hommage à notre lieu d’enregistrement.
En avril dernier, vous avez eu la très bonne idée de proposer des versions live filmées (en mars) de vos morceaux. Comment ça s’est passé ? Comment et pourquoi avez vous eu cette envie ?
Notre parolier Manu est surtout un excellent photographe. Il avait envie de nous filmer et de monter un dvd de notre premier concert en s’inspirant des sessions live de Nigel Godrich From the basement. On a accepté sans hésitation. Le résultat est fabuleux, surtout avec les moyens dont il disposait (et le peu de sommeil de Manu qui venait juste d’être papa).
C’était aussi l’occasion de montrer ce dont on est capable sur scène… et de faire parler de nous. Pari réussi !
Vous serez en concert à la Bascule le 23 mai et à la Paillotte le 31 mai prochain. Comment s’articule pour vous le passage de l’enregistrement au live ?
Etant donné que l’on a enregistré en live, la transition est assez facile. L’ajout des différentes pistes de guitare était déjà présent en répèt : elle se fait via l’enregistrement live de boucles. Ça s’est pour le côté technique.
Pour ce qui est du set en lui-même, nous allons bien sûr jouer plus que 5 morceaux. On doit donc « raconter » une histoire différente de celle de l’ep et chambouler les enchaînements présents sur le CD.
Sur la scène rennaise, comment vous situez vous ? Êtes vous en contact avec d’autres groupes ou artistes rennais ? Desquels vous sentez vous proches ?
Plutôt sensible à ce qui se passe sur la scène noise, indie rock, (Fago.Sepia, La Terre Tremble !!!, Korkoj, We are van Peebles... ) même si on suit ça d’un peu loin. Depuis quelques mois on essaye de se faire une place au milieu de tout ce beau monde. C’est vrai que notre manque d’expérience scénique à Rennes et de contacts complique un peu la tâche. Nous sommes quand même en lien avec quelques groupes, comme We are Van Peebles (que l’on félicite encore d’avoir gagné le tremplin Label Mozaïc !) et bien sûr Gigot Mazout avec qui nous partageons la scène à la Paillote.
Après ces concerts à la Bascule et la Paillotte, quels sont vos projets, vos actualités ?
Pour l’heure pas d’autres concerts de prévus donc on va continuer à démarcher et à chercher des contacts. Le but est vraiment de faire tourner le set en live. A bon entendeur !
En parallèle on devrait retourner en studio en juin si le calendrier de Studio Chaudelande nous le permet. On a vraiment envie de mettre sur piste les nouveaux morceaux et de prendre du bon temps à la campagne !
Votre nom de groupe nous a bien fait rire. Il faut quand même qu’on vous demande. C’est pour les 7 mercenaires ou pour les 10 commandements ? (ou bien ça n’a rien à voir avec l’acteur !)
Ni l’un ni l’autre ! En fait, nous étions à la recherche d’un nom qui en impose, qui soit charismatique. Au jeu de l’écriture automatique, Yul Brynner est apparu comme une évidence. Ensuite, Yul se transforme en « You’ll» et notre nom sonne comme un « charismatique projet d’avenir ». Mais c’était quand même un excellent acteur !
Retrouvez toutes nos interviews-focus sur la scène rennaise ici
(Santa Cruz, La Terre Tremble !!!, Lady Jane, Fago.Sepia, Band of Ghosts, le pôle musiques actuelles du CRIJB, Manceau, Nola’s noise, Wesson Maespro, Get Flavor Records, Idwet, les Disques Normal, Mekah, Dj Netik, La Corda, Eat your toys, Théo Gravil, Simba, Shtok, Spash Wave, Monkey & Bear, Mess Zero, Regïs Boulard, Le Bocal, We only said, Deejay Ober, Makassy, Skap’1, I&A, The Last Morning Soundtrack, Alee, Garbo, Russian Sextoys, Ladylike Lily, Missing Girl, Zaïba, Homecooking, Psykick Lyrikah, RCR, Bumpkin Island, Wonderboy, Micronologie, ReDeYe, Colin Linkoln, Sudden Death of Stars, Juveniles, Alexel, Güz II, The Enchanted Wood, James Legalize, The Missing Season, RezO, Bunch of Crows, Our Name is a Fake, Heskis’, Vortex, Users, Nola#, Mermonte, Mekah, Superets, We are Van Peebles, Korkoj, Twinztrack…)
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You’ll Brynner sera en concert à la Bascule le 23 mai avec Moteor Sharki à partir de 21h et à la Paillotte avec Gigot Mazout le 31 mai.
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