A la Maison des Associations, la création originale [Extended], version enrichie du magnifique Ô Lake, aura permis d’inaugurer en beauté cette édition du festival des Embellies. Et de mettre en lumière le précieux travail d’accompagnement de l’association Patchrock.

Avant d’investir le Théatre du Vieux Saint-Etienne, le festival des Embellies nous proposait une soirée inaugurale à la Maison des Associations ce mardi 20 mars. On découvre une très jolie salle surplombant une scène sur laquelle sont disposés les deux violoncelles de Juliette Divry. Nous avons déjà eu l’occasion de la voir avec Mermonte ou encore The Last Morning Soundtrack, mais elle se présente seule ce soir avec son projet solo astucieusement appelé Suuij. Une découverte (quasi) complète pour nous puisqu’un seul titre est disponible sur la toile pour le moment : elle commence avec une composition d’inspiration classique, qui soudainement s’emballe de manière réjouissante. Juliette explore toutes les possibilités offertes par son violoncelle (jeu avec archet, picking), même les plus surprenantes, lorsqu’elle glisse son archet sur la caisse de résonnance. Elle s’accompagne avec un chant particulier, expiré comme dans un souffle, et qui donne une couleur pop aux mélodies. Le Souffle Nu, que l’on avait eu l’occasion de découvrir sur son soundcloud, nous semble presque familier tant il surprend par son immédiateté. Juliette utilise avec parcimonie et élégance les boucles de son violoncelle et de sa voix pour enrichir les orchestrations de ses compos. Un de ses tous premiers concerts qui, on l’espère, sera suivi d’un enregistrement.

Une courte pause puis les 6 musiciens d’[Extended] s’installent derrière leurs instruments respectifs. [Extended], comme son nom l’indique, est une version élargie à six musiciens du projet Ô Lake de Sylvain Texier. Lors du Dimanche Embellies aux Champs Libres qui inaugurait l’édition 2017 du festival, Ô Lake était tout simplement apparu comme notre coup de cœur du festival. Ce projet, mêlant astucieusement claviers et machines, délivre une musique instrumentale et cinématographique teintée de mélancolie, entre piano solo et subtile electronica, et qui s’enrichit de multiples évènements sonores. On avait vécu un pur moment de bonheur suspendu, à double titre : suspendu aux notes délicates des claviers de Sylvain Texier et de Gérald Crinon Rogez, en apesanteur au dessus des toits de la ville (au sixième étage des Champs Libres), nous avions savouré chaque moment de ce concert au casque. Depuis ce concert inoubliable, les deux titres disponibles sur la toile (l’épuré The Leftovers et le poétique Portrait of Solitude) n’ont fait qu’attiser notre curiosité, décuplée par la publication récente de la vidéo de November, 17^th, magnifique composition annonçant [Extended].

Dans cette formule, Sylvain et Gérald sont accompagnés par Federico Climovich (batterie, percussions), Goulven Kervizic (violoncelle), Morgane Houdemont (violon) et Julie Mellaert (alto). Sans oublier Glenn Besnard au son et Thibaut Galmiche aux lumières (Bumpkin Island). Ce groupe exceptionnel a bénéficié d’une double résidence (Ubu et Vip à St Nazaire) pour créer ce tout nouveau set. Un set sublime de bout en bout, alternant instants retenus et montées post-folk savamment dosées : les arrangements sont subtils et évitent l’écueil du « trop ». En effet, les compositions conservent leur caractère épuré, car le trio de cordes et les percussions distillent avec parcimonie leurs drapés musicaux. [Extended] offre un nouvel éclairage au répertoire d’Ô Lake sans dénaturer son propos. On a ainsi pu apprécier pleinement le jeu sur les textures sonores réalisées en direct par Federico: mention spéciale pour le son ciselé au millimètre qui nous aura permis d’apprécier pleinement ces évènements sonores. Et que dire du remarquable jeu de lumières parfaitement synchronisé avec le son, mettant en valeur la disposition scénique.

Au milieu du set, les musiciens laissent Sylvain seul derrière son piano pour un interlude solo tendre et mélancolique (Silhouette, Morning), qui souligne une fois de plus le talent d’écriture de ce musicien sensible. Le set s’achève sur November, 17^th, parfaite synthèse de cette formule : les cordes et la batterie viennent progressivement enrichir la ligne mélodique jouée au clavier, avec une montée sonore toute en retenue. Sylvain Texier jouera ensuite un tout dernier morceau, visiblement ému par l’accueil chaleureux (et amplement mérité) des spectateurs venus nombreux. En duo intimiste ou en version plus orchestrée, Ô Lake nous offre des petits bijoux de poésie mélancolique. Si vous avez manqué ce concert, sachez qu’[Extended] ne se limitera pas à une seule représentation : il serait vraiment dommage de se priver de l’occasion de (re)découvrir Ô Lake sous un jour nouveau.

Site d’Ô Lake

Soundcloud de Suuij

Site du festival des Embellies