Droit vers le soleil – Stephane Grangier

Armor

Quand j’ai croisé Stéphane Grangier au salon du polar de Larmor-Plage, le bien nommé, « Larmor aux trousses », il m’avait grandement mis en garde à propos de certaines nouvelles qui pouvaient choquer. En bon Punk qui se respecte et qui se nourrit exclusivement des immondices de l’humanité, j’avais juste répondu par un haussement d’épaule en disant que je n’étais quand même pas né de la dernière pluie. A postériori, je comprends un peu mieux les recommandations averties de Stéphane Grangier et le moins qu’on puisse dire, c’est que j’en ai pris pour mon matricule.

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Néanmoins, pour rassurer les âmes les plus sensibles, et malgré les notes finales, seule la nouvelle, « Remugles », qui porte bien son nom, mérite amplement le label « réservé à un public (très) averti ». En effet ce texte, comme une madeleine avariée, m’a ramené directement à mes 17 ans quand je dévorais les œuvres complètes de Donatien Alphonse François de Sade, le divin marquis. La nouvelle dont le sous-tire aurait pu être « Les prospérités du vice » pour garder la filiation Sadienne, décrit une histoire d’amour dans une banlieue Costarmoricaine propre et chic. Le protagoniste principal, bien établi parmi les notables locaux, jouit en cachette de ses vices cachés (meurtres, nécrophilie, cannibalisme, etc). Quand il recueille une SDF qu’il épargne et avec laquelle, il finit par s’établir, l’histoire s’accélère. « Highway To Hell » aurait pu chanter un groupe électrifié australien.

Mais tout n’est pas si terrible dans ce recueil. La nouvelle de tête, « Amarrées Noires » qui se passe entre Lorient et Larmor-Plage nous emmène dans l’esprit torturé et assombri par l’alcool d’un Lieutenant de Police, placardisé par sa hiérarchie. Une nouvelle descente aux enfers qui conformément aux canons en vigueur comportera son lot de sexe, de sang et d’alcool (la drogue des Bretons). En d’autres termes, jouissif et indispensable.

« Chiens dans la nuit » est un conte qui navigue entre le fantastique et le cauchemar éveillé. Il y a peut être quelque chose (une créature?) qui rode dans la nuit à Bruz et qui nous mène d’une boite de nuit aux studios de la Radio « Canal B » puis au fond du lit d’une petite fille. Le cauchemar s’étire toute la nuit, mais résistera t-il aux premières lueurs du jour ?

Grangier_Stiff

« Stiff Little Fingers » est mon petit chouchou de cette sélection et pas uniquement à cause du titre, tiré du nom d’un de mes groupes préférés (Stiff Little Fingers est l’un des premiers groupes de Punk d’Irlande du nord avec les Undertones). La nouvelle est une version moderne des contes Bretons, ce genre sauvé de l’oubli par Anatole Le Braz. Dans les contes bretons, la passion des hommes est exacerbée. Tout y contribue, l’alcool bien sur, le vent, celui qui jamais ne cesse et qui rend fou et enfin la religion omniprésente qui tiraille les hommes, leur rappelant jour après jour la noirceur de leurs âmes. Dans cette nouvelle, un couple discret débarque à Ouessant avec le flot de touristes. Quand il sera l’heure de repartir, la météo viendra jouer les trouble-fête, obligeant les insulaires à héberger les continentaux. Mais les contes bretons ne finissent jamais bien. Le poids des consciences et leurs cortèges de vieux souvenirs y seront certainement pour quelque chose.

Enfin, le livre se clôture sur la 5ème nouvelle « Droit vers le soleil » qui donne son nom au recueil. L’action débute un après midi dans la campagne Landévantaise où 2 adolescents flirtent assez innocemment pour la première (et dernière?) fois. Dans la soirée, ils décident, aidés d’un comparse, d’aller visiter un château désert des environs. Le hic, il y en a toujours un, c’est que le jeune garçon, qui est un nouveau venu à Landevant, s’est déjà attiré les foudres de quelques uns, et qu’ils ont bien décidé de lui faire regretter le jour où sa mère l’a mis au monde….

En résumé, si Stéphane Grangier est un gentil garçon, ses écrits le sont nettement moins, mais ç’est aussi ce qui fait son piment. Si vous ne vous sentez pas le cœur de tout lire d’un coup, sachez que les 5 nouvelles sont sorties aussi séparément dans un mini format fort sympathique. De mon coté je vais m’empresser de me procurer ses autres écrits, toujours aux Editions de la rue Nantaise.

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Droit vers le soleil – Stephane Grangier – Editions de la rue Nantaise : ISBN 978-2-919265-31-2 – Mai 2012
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Liens :
Les éditions de la rue Nantaise

1 commentaires sur “Droit vers le soleil – Stephane Grangier

  1. StefG

    Merci Thomas. Content que ça t’ait plu.

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