Notre ballade dans la foisonnante programmation du festival nous mène ce coup-ci à l’opéra de Rennes. Loin des fastes de la salle principale, c’est par des couloirs bas de plafond que l’on arrive à la modeste salle Pierre Nougaro (Pierre ?¹).
Boris Billier nous accueille avec des recommandations malicieuses. Puis il joue les ouvreuses pour nous mener à un des cinq groupes de quatre fauteuils, répartis dans une salle plongée dans le noir dont on ne verra pour l’instant que le parquet. Je m’allonge consciencieusement sur un des confortables futons disposés au sol et décide de fermer les yeux. Tricher et zieuter discrètement le dispositif est tout à fait possible, puisque les lumières de sécurité restent inflexibles, mais je pressens que le jeu vaut la peine d’être joué à fond.
S’en suivent quelques minutes d’attente légèrement fébriles où la partie sonore est assurée par les murmures, les rires, voire les gargouillis stomacaux des voisins… et puis ça démarre.
L’artiste nous immerge en douceur dans un étonnant et délicat mélange d’enregistrements diffusés par haut-parleurs mais aussi de bruits produits en direct sur place. Voix déformées ou parlant des idiomes peu identifiables, bruits d’aéroports se mêlent donc avec bonheur au doux cliquetis de bicyclettes ou a de liquides percussions. L’expérience est troublante. L’isolement créé par la pénombre, nous prive des habituelles réactions collectives du public et nous laisse seul avec nos réactions et nos sentiments. Pour autant, et contrairement à ce que l’avertissement du programme : «Déconseillé aux claustrophobes» pouvait laisser présager, l’ensemble n’est pas du tout anxiogène. Bien au contraire.
Quand doucement la lumière s’allume, dévoilant enfin les bricolages insensés qui nous ont transporté lors de ce voyage sonore, je me demande vraiment s’il s’est réellement écoulé les cinquante minutes annoncées.
Heureusement pour ceux qui voudraient du rab’, il est alors possible de flâner dans la salle pour regarder de plus près les milles ingéniosités permettant d’aboutir à cette performance. Les plus audacieux pourront même causer avec l’artiste.
L’installation est donc hautement conseillée à tous, et tout particulièrement à ceux qui ont fermé les yeux, pour apprécier le set de Tim Hecker à la soirée Nuit américaine de la semaine dernière.
Aux dernières nouvelles toutes les séances n’étaient pas encore complètes, mais avec seulement vingt spectateurs par séance, il est plus que fortement conseillé d’appeler au 06 15 81 88 33 pour vérifier s’il reste des places et réserver.
Mardi 12 à 18h et 20h30
Mercredi 13 à 18h et 20h30
Tarif plein : 5€ – Tarif réduit : 3€
(1) : Pierre Nougaro était un chanteur lyrique baryton français, père de Claude, qui fit aussi l’acteur dans de nombreux téléfilms et chez Chabrol ou Berry.
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WAHHHHHHHH super chronique et sublimes dessins, Mr B… Ca donne carrément envie !
C’est le but. J’ai serré les poings pour résister à l’envie de faire des photos de l’extraordinaire bric à brac de la salle, histoire de préserver le mystère, et du coup, ça donne ça à la place. Content que ça te plaise.