« Dans le sud le rock balance ». C’est cette jolie ritournelle qui m’a sauté au ciboulot quand j’ai commencé le recueil de Sergei Dounovetz. Ca tombe bien, l’auteur et la mélopée viennent tout deux de Montpellier, l’autre patrie du Rock. Si ce recueil de nouvelles, n’est pas stricto sensu un livre de rock, il en épouse néanmoins les frontières. En effet, nous avons déjà eu l’occasion de parler de Sergei Dounovetz, pour sa participation remarquée aux ouvrages collectifs de nouvelles sur les Ramones ou La Souris Déglinguée. De toute manière, les nouvelles sont le support littéraire rock par excellence. C’est court, on enlève tout le gras, ça frappe les esprits et si ça ne fonctionne pas eh bien on zappe, tout simplement.
Ici, Sergei, nous brosse une belle galerie de déjantés en tout genre. Comme toujours, c’est le style inimitable, ce gout de la langue qui nous fait vibrer chez Sergei Dounovetz, à mi chemin entre un Frédéric Dard, mais moins cul, et un Tarantino Rock.
Dans la galerie des personnages joliment déglingués, on délivre une mention spéciale à Rock, le mal nommé qui collectionne les femmes nues sur des cahiers d’écolier et son histoire d’amour vouée à l’échec avec sa jolie voisine.
« Rock prit une douche rapide et se planta devant le miroir. Il avait une gueule épouvantable, la gaule tendue et douloureuse. La rousse l’attendait dans le salon pour aller bouffer. Et lui n’avait qu’une envie, bouffer son cul. Pourquoi tous ces faux-semblants ? »
Il y a aussi Mathias et Marie-Lyze, des « Sailor et Lula » Montpelliérains dans leur ultime cavale.
« Mathias .. l’embrassa goulûment d’une façon plus conventionnelle, relisant toutes les parties de son corps en braille. Il était à deux doigts de lui faire un enfant sur place, quand un coup de sifflet déchira le silence de la garrigue…. Le visage cramoisi, le chef des matons gesticulait en levant son poing.
– Saloperie de vérole ! Tu peux pas aller tringler ta pute ailleurs ?
..
– Les matons ! Trop lâches pour le casse-pipe, et trop cons pour la circulation ! »
Et que dire de cette Rita qui entraine son julot dans le casse très particulier d’une cafét (qui donne son nom à l’ouvrage) où tous les protagonistes vont se retrouver nus comme au premier jour.
« Rita, la bombe, comme oriflamme, et le Smith & Wesson comme argument. Elle gueule :
– Tout le monde à poil ! C’est un hold-up !
..
Et elle montre l’exemple en faisant glisser sa jupe et le reste de ses fringues au sol. Il se décompose mais, grâce au bas de soie, aucun morceau ne se détache. »
Le Rock n’est pas en reste, la dernière nouvelle « Poème japonais » rappelle étrangement une « Brigitte Bardot Cambodgienne » croisée dans un recueil sur la Souris Déglinguée. « P’tit Bob », lui est un hommage au plus grand rocker havrais, Little Bob et est à mon avis la nouvelle la plus réussie de ce bel opus.
Ce nouveau recueil de nouvelles de Sergei Dounovetz est édité chez AAARG ! Editions, qui publie le journal du même nom, spécialisé dans la bande dessinée et les cultures populaires que l’on peut trouver dans toutes les bonnes librairies. Ce n’est donc pas une surprise de le trouver ici, son style coïncidant parfaitement avec l’esprit du journal. Sergei est aussi l’un des troteurs de l’écurie du Dilettante‘, ce qui nous fait dire que s’il ne choisit pas les maisons d’édition les plus prestigieuses, il choisit par contre les plus cools !