Santa Cruz et l’Orchestre de Bretagne offrent un magistral Director’s Cut

Director's Cut

Dans le cadre des Concerts d’Eté sous la Halle du Triangle, l’Orchestre de Bretagne et La Station Service proposaient au public le projet Director’s Cut pour la première fois. La recette de Director’s Cut, ce sont des titres de Santa Cruz arrangés par Joseph Racaille, et joués par le groupe et l’Orchestre de Bretagne. Pierre-Vital et Goulven nous ont récemment parlé de ce projet en interview (ici), et leur enthousiasme avait fait naître chez nous une bonne dose d’attente.

On aime beaucoup ce groupe et ces magnifiques compositions ; Mais être accompagné par un orchestre de 27 musiciens peut  rapidement se révéler périlleux. Or le souhait du groupe était justement d’éviter des arrangements classiques avec de grosses nappes de cordes : et ils nous confiaient avoir été agréablement surpris par les arrangements audacieux et décalés de Joseph Racaille. D’où notre attente. Et autant vous le dire tout de suite, on s’est pris une gigantesque claque musicale. Cet inhabituel combo Santa Cruz / Orchestre de Bretagne, servi par des arrangements subtils, nous a bluffés : C’était surprenant, inventif, doux, puissant, émouvant… Petite tentative d’explication.

Santa Cruz

Les rangs de la Halle du triangle se remplissent très rapidement et le discours d’introduction se fait devant un public nombreux et de tous âges, preuve que cette formule des Concerts d’Eté a pour principal mérite de permettre à l’Orchestre de s’ouvrir à un plus large public. Puis le groupe et l’orchestre arrivent ensemble sur scène. Après la traditionnelle mise en place de l’Orchestre, Santa Cruz nous propose 4 titres de son répertoire afin de découvrir l’univers du groupe avant de présenter le projet Director’s Cut. Ce mini-concert nous confirme tout le bien qu’on pensait de ce groupe sur album : les chansons, extraites du dernier album A Beautiful Life, sont ciselées à merveille. Le sextet nous propose en quatre titres toute la palette musicale qui est la sienne : entre douceur rock (Happy and Safe et ses riffs tranchants), pop mélancolique (Pretty Orphans) et ballade réjouissante (Rain is Coming Harder), on se promène dans l’univers particulier de Santa Cruz avec bonheur, et les musiciens de l’orchestre en sont les premiers spectateurs attentifs.

Cette palette musicale variée n’est pas le fruit du hasard : les variations musicales s’appuient sur différents instruments. Vassili alterne pedal steel et banjo, Jacques délaisse sa basse pour une contrebasse sur les titres plus doux. Et quand le groupe entame Ashes, Alex, à la batterie, passe aux balais, et le clavier de Thomas devient piano sur ce très joli titre qu’on ne connaissait pas (probablement l’un des nouveaux titres du prochain album).

A la fin de ce dernier titre très doux, on ne peut s’empêcher d’essayer d’imaginer quelle va être la transition : comment fait-on pour jouer à six puis brusquement à 33 ?

Orchestre de Bretagne

Joseph Racaille a trouvé la solution, puisque sans transition aucune, l’orchestre se met à jouer ce qui pourrait être le début d’un générique de film, sur lequel le groupe enchaîne Alcohol, Sprits And Wine, dans une version épique qu’on n’imaginait pas pour ce morceau. L’arrangeur a donné à ce titre un souffle grandiose et les cuivres associés à la guitare saturée de Goulven s’abattent comme un orage… et hop, une pirouette musicale avec un petit intermède drôle et décalé joué par l’orchestre avant la reprise de l’orage sonore. Pour une entrée, on est servis ! Et les morceaux, alternant douceur et montées en puissance, vont s’enchainer sans perdre un seul instant en intensité. Il y a plusieurs raisons à cela :

Il y a tout d’abord les titres de Santa Cruz : Jospeh Racaille et le groupe ont choisi  des morceaux qui figurent dans tous les albums du groupe, ce qui offre un set d’une variété et d’une richesse musicale importantes. Et puis ces titres sont des petits bijoux de composition, et ce, quels que soient les albums (de I Hate You à Before The Rain en passant par The Abel and The Cain…). Et si les arrangements réinventent certains morceaux, il reste ces mélodies imparables, la superbe voix de Pierre et la virtuosité des six musiciens.

Director's Cut

La mise en scène joue aussi un rôle important dans la réussite de ce projet : faire jouer l’ochestre à côté du groupe et non derrière le groupe, a renforcé l’idée de deux univers qui se rencontrent. On a remarqué à plusieurs reprises les membres de Santa Cruz, et notamment le batteur, regardant le chef d’orchestre au moment de lancer les morceaux. Et cette disposition permet aussi aux acteurs de faire part de leur enthousiasme, avec en tête les flûtistes et les clarinettistes qui se sont lancés dans une chorégraphie soul sur Waiting For a Change.

Et puis quelle excellente idée de faire venir au devant de la scène les musiciens de l’orchestre : solo de trompette sur I Hate You, quatuor de cuivres sur Wainting For a Change. Et le jeu en boucles répétitives de la clarinette basse sur The Abel and The Cain qui apporte une profondeur au morceau, là où on pouvait craindre des envolées un peu trop sucrées.

Le tout réuni donne des petits joyaux, parfois très différents des titres originaux, avec des morceaux qui prennent une dimension nouvelle. Ceci grâce aux superbes arrangements de Joseph Racaille. Les cuivres donnent par exemple une coloration très jazzy sur A beautiful Life. Goulven et Pierre nous avaient confié être surpris par le choix étonnant de la mise en avant de certains instruments de l’orchestre : et on était effectivement loin d’imaginer un solo de xylophone sur Before The Rain, ou bien la mise en avant des grosses cymbales (Walking in the Snow) et de la clarinette basse (The Abel and The Cain). Ce qui fait qu’on était à mille lieues des nappes de cordes  dans cet exercice périlleux, ces cordes soulignant au contraire la rythmique très régulièrement.

Joseph Racaille s’est aussi offert le luxe d’étirer en longueur certaines compositions, mais avec ce talent qui fait qu’à aucun moment cela ne ressemble à un artifice. Il apporte sa vision du morceau, et à voir la réaction du public, il semble qu’il ait vu juste ! Il y a le magnifique Last Man on Earth, une perle sur le dernier album, que l’arrangeur a poli à sa façon, pour en faire un autre bijou : à l’origine, une rythmique délicate à la contrebasse et à la guitare dobro et la voix profonde de Pierre. Et là, dans les moments de silences, la puissance des violons et des cuivres, une déflagration éléctrique à la guitare, quelques notes au clavier, la douceur des flûtes traversières… Le parfait mélange entre douceur et puissance musicale.

Director's Cut

Et puis que dire de Falling at Least : on connaissait ce morceau qui débute tout doucement pour finir sur une montée en puissance sonore et électrique. La montée jouée avec l’orchestre est particulièrement réussie, mais on ne s’attendait pas à ce moment très particulier au milieu du titre, où l’arrangeur semble avoir offert un coup de projecteur à chaque section composant l’orchestre. Les soli s’enchaînent, clarinette basse, clarinettes, violons, alti, flûtes traversières… Le tout sur la rythmique jouée par les membres de Santa Cruz, spectateurs réjouis de ce moment réussi.

Et au final, le plus réjouissant était de voir l’admiration réciproque entre les différents musiciens, rock et classique, et le plaisir évident de jouer ensemble. Le tout sous la direction d’un chef d’orchestre, il est vrai, très rock’n’roll, et avec des arrangements exceptionnels de Joseph Racaille. Santa Cruz, avec ses merveilleuses compositions et ses musiciens talentueux, est un groupe classe, vraiment classe …

Et quand on voit le public resté nombreux, debout sur le rappel, on se dit que le groupe a probablement donné à un certain nombre de spectateurs présents l’envie de les revoir en concert, avec ou sans orchestre. Et puis l’accueil réservé à ce nouveau morceau, Waiting for A Change, nous rend encore plus impatients de découvrir le nouvel album des rennais, prévu au printemps prochain ! Un seul regret : attendre la mi-janvier pour (re)découvrir ce merveilleux projet, auquel on souhaite une très longue vie. Pour patienter quelques mois, il vous reste la captation vidéo que vous pouvez retrouver sur le site de TV Rennes (ici).

Santa Cruz sur Myspace et Bandcamp.

Director’s Cut au Diapason le 18 janvier 2012 (site de La Station Service)

Le site de l‘Orchestre de Bretagne

Photos : Caro, Marc et Solène


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