Après l’apéritif à la Nouvelle Vague, la Route du Rock commence véritablement ce jeudi 14 août, avec au programme, une déferlante garage de la puissance d’un tsunami qui devrait sacrément secouer la soirée au Fort St Père. Revue en détail de la programmation de la journée, des plages malouines l’après-midi au Fort St Père jusqu’au (quasi) bout de la nuit.
Vous le savez, la Route du Rock, ce n’est pas qu’un lieu et qu’une seule scène. Depuis longtemps déjà, le festival malouin commence sous le soleil (ou les embruns) de la cité corsaire les pieds sur le sable pour se poursuivre dès 18h00 dans l’enceinte du Fort St Père à quelques kilomètres de là. Là, les festivaliers peuvent déambuler entre deux scènes, la scène des Remparts (la plus petite) et la scène du Fort (la plus grande). Et comme la Route du Rock fait bien les choses, les concerts s’enchaînent les uns après les autres pour vous laisser le temps de tout voir et ne pas vous obliger à faire des choix cornéliens. Alors quelle programmation pour ce jeudi 14 août ?
La scène du Fort St Père jusqu’à minuit
Le jeudi, on aura l’ineffable bonheur de retrouver une formation qui éclate crânement le garage et en repousse les murs à chaque prestation. En interview pour The Drone, le blondinet Ty Segall disait tout leur devoir et leur vouer une admiration sans borne. Et on comprend pourquoi tant les bourricots de Thee Oh Sees ont essaimé bien au-delà des collines de San Francisco les graines d’un garage espiègle, jouissif et rageur. Tout aussi prolifique que le gamin de Californie, les Thee Oh Sees ont déjà une carrière longue comme le Golden Gate aller-retour derrière eux, avec, déjà, plusieurs changements de noms (OC’s, The OhSees, The Ohsees, entre autres) et pas loin d’une trentaine de galettes (lps, eps, ou autres compilations de singles confondus) dans leur besace. Faisant suite à l’impeccable brûlot Putrifiers II et au tout aussi excellent Floatin Coffin leur dernier né, Drop (avril 2014) remet une nouvelle fois le couvert malgré une interruption annoncée en décembre. Et on gage que la prestation du combo de la Bay Area à la Route du Rock vous laissera bien plus échevelé qu’un ride aggripé à la barre d’un cable car, tant les lives de la bande à John Dwyer sont connus pour inverser irrémédiablement les connexions entre vos deux lobes cérébraux à coup d’énergie furibarde. Et avec un charisme de malades, tenez-le vous pour dit.
Scène du Fort à 22h50
Le même soir on retrouvera Kurt Vile and the Violators, projet solo de l’Américain, joué à plusieurs sur scène. Auteur de cinq albums de folk qui flirtent parfois avec le psyché, parfois avec une écriture plus classique à l’américaine (le garçon cite Neil Young, Lou Reed ou Dylan en tête, notamment pour leur diction particulière qui devient partie intégrante de leur univers), mais qui ont progressivement quitté les rivages lo-fi des premiers albums (Constant Hitmaker -2008- et God Is Saying This To You… -2009) pour une écriture parfois plus incisive et tranchée (sur Childish Prodigy en 2009 ou Smoke Ring For My Halo en 2011 qui lui ouvrent une plus grande reconnaissance critique), Kurt Vile cultive arrangements à la fois nonchalants et racés, notamment sur son cinquième long format Wakin On A Pretty Daze (2013). N’hésitant pas, qui plus est, à étirer les formats de la sacro-sainte chanson pop (plusieurs titres dépassent les 7-8 minutes). Nul doute que sous les derniers rayons de soleil, la magie devrait prendre sur la scène du Fort.
Scène du Fort à 20h50
Juste avant, ce sont The War on Drugs qui auront l’honneur d’inaugurer la même scène pour ce premier jour de festival. L’ancien groupe de Kurt Vile (le garçon avait en effet accompagné son copain Adam Granduciel aux débuts de War on Drugs avant de quitter la formation en 2008) en est déjà à son troisième essai de folk aussi touffu qu’épique avec Lost in the Dream après Slave Ambient en 2011 et Wagonwheel Blues en 2008. Une bonne dose d’americana, voire de classic rock (trop?) viennent colorer les chansons folk du combo de Philadelphie, le tout emballé par une production tirée à 4 épingles qui met la voix de son chanteur en avant (sur ce dernier lp en date). De la belle ouvrage qui devrait en ravir plus d’un en ce tout début de soirée.
Scène du Fort à 19h25
Sous les Remparts
Cette année, ils l’ont promis : les embouteillages autour de la scène des Remparts et cette impression de s’y retrouver comme en plein milieu de La Guerre des Mondes seront résolus. Si on restait en effet un peu circonspect sur le manque d’anticipation des difficultés de circulation et d’accès à la scène l’an dernier, on avait en revanche apprécié la taille et la hauteur beaucoup plus confortables que pour l’ancienne « scène de la tour ».
Les organisateurs ont a priori bien pris conscience des limites de ce nouveau dispositif et ont tenté de changer les choses comme l’a expliqué François Floret aux copains de Pop is On fire ici : « Nous sommes conscients que l’accès à la scène des remparts n’était pas idéal l’an dernier. Nous ne nous attendions pas à ce qu’il y ait autant de monde à vouloir y aller : elle est prévue pour accueillir 3.000 ou 3.500 spectateurs, pas l’ensemble des festivaliers. Nous allons donc essayer d’améliorer l’aménagement. Cette année, la scène sera dans la même zone, mais orientée différemment, tournée vers l’entrée du fort. Nous allons également déplacer les bars et la restauration pour dégager l’espace, décaler la tour régie et surélever la scène. » Dont acte.
Et c’est tant mieux puisque cette année encore, pour rythmer non seulement l’arrivée des festivaliers mais aussi les petits coups de mous de la soirée, ce sont 3 groupes qui se donneront le tour.
On commencera le jeudi avec la folk inspirée de la jeune Angel Olsen, pas nian-nian pour deux sous, n’hésitant pas à durcir le ton ou à sortir les fantômes du placard. L’ancienne choriste de Bonnie Prince Billy l’a en effet prouvé dans son dernier album en date Burn your fire for no witness (2014) avec 11 titres qui vont de la folk la plus dépouillée et envoûtante (White Fire, Enemy) aux guitares en power chords (avec même un petit côté Pixies) –Forgiven/Forgotten-, en passant par la bossa nova voilée et pervertie de Iota.
Scène des Remparts à 18h30
On poursuivra le même soir avec la pop des Real Estate, parfaite pour accompagner les couchers de soleil des soirs d’été. Guitares claires qui s’entremêlent devant la voix de Martin Courtney, compositions délicates et lumineuses, le combo indie du New Jersey a réalisé un troisième album Atlas aux climats aériens et cotonneux. Une bonne façon de regarder le soleil fondre entre les pierres du Fort St Père, avec pourquoi pas, une boisson houblonnée à la main (ou tout autre de votre choix).
Scène des Remparts à 21h55
Changement radical pour clore la soirée sur la scène des Remparts avec les sales gosses de The Fat White Family, un rien plus hirsutes et dépravés. La preuve : un frontman qui finit certains concerts nu comme un ver, un refus des Franz Ferdinand de les avoir comme première partie pour un concert dans le Sommerset, ou une banderole qu’ils auraient tendu chez eux le jour de la mort de Margaret Thatcher « The Bitch is Dead ». Bref, une réputation de dézingués sans foi(e) ni loi précède le sextet cockney auteur d’un Champagne Holocaust à la pochette iconoclaste. Le groupe idéal pour ne pas s’endormir.
Scène des Remparts à 00h05
La nuit sur le Dance-Fort
François Floret l’avait dit après les difficultés de 2012, la Route du Rock se devait d’avoir une « programmation sexy » pour les fins de soirée afin de faire revenir les jeunes pour danser jusqu’au bout de la nuit. Un groupe ou un dj set électro en fin de soirée, ce n’est pas pourtant pas une nouveauté à la Route du Rock, mais cette année, les 5 artistes ou groupes choisis devraient rallier le plus grand nombre. Et surtout nous faire danser jusqu’aux dernières (ou quasi) heures de la nuit…
Pour le jeudi donc ? Doublé gagnant avec d’un côté le retour de Caribou (venu à quatre reprises à la Route du Rock), et de l’autre la venue des épatants Darkside.
C’est d’abord Caribou qui viendra présenter son nouvel album à paraître à l’automne, Our Love. On n’en a encore rien entendu, mais l’on suit le Canadien depuis Manitoba déjà, donc autant le dire, on ne s’attend pas à être déçu. Le projet de Daniel Snaith, en plusieurs sorties discographiques racées et stylées, a en effet souvent squatté nos platines sans relâche. Qu’il s’agisse de son électro-pop sautillante fabriquée à partir de sons vintages, de samples, mêlant les influences les plus diverses et de rythmiques parfois disco, parfois krautrock, parfois electronica (notamment sur l’excitant The Milk of Human Kindness, 2005 et sur l’addictif Andorra –2007-, gorgé de soleil) ou d’une électro d’abord pensée en tant que structure rythmique pour danser (après la découverte de Border Community), quitte à ce qu’elle s’assombrisse et gagne davantage d’épaisseur avec une retenue toute mélancolique sur l’indispensable Swim (2010). [Depuis, l’homme a également travaillé sous le pseudonyme de Daphni]. Derrière sa batterie, avec ses compagnons de scène (car l’homme sur scène produit une musique peut-être plus organique avec de « vrais » musiciens, contrairement à ses albums sur lesquels il est souvent seul à officier), Dan Snaith devrait nous parler tout autant à nos oreilles qu’à nos jambes. Un petit Odessa pour la route ?
Scène du Fort à 00h55
Darkside nous accompagnera ensuite jusqu’aux plus profondes heures de la nuit. Et autant le dire, on exulte. Car l’électro lente et sexy du duo new yorkais d’adoption est une véritable odyssée déglinguée, entre craquètements et souffles, textures élimées et basses hypnotiques au groove malsain (Psychic, 2013). Formé du minot prodige Nicolas Jaar (Space is the only noise en 2011, mais aussi de nombreux lives extatiques ont forgé la réputation de cet americano-chilien) et de Dave Harrington, le guitariste-bassiste qu’il engage pour jouer Space is the Only Noise (« Il ajoutait des sons et de l’intensité à mes morceaux, se souvient Nicolas Jaar. Ça partait dans une direction rock que je n’avais jamais imaginée pour ma musique. Dave et moi avons rapidement construit un vocabulaire singulier sur scène” expliquait le gamin aux Inrocks), Darkside se fait d’abord connaître avec un ep 3 titres (Darkside ep, 2011) sacrément bien reçu par la critique, mais également en juin 2013 avec un long remix iconoclaste et détraqué du dernier album des Daft Punk (Random Access Memories) sous le pseudonyme de DaftSide. Avant la sortie du premier véritable long format du duo, petit bijou d’electro spatiale lente et funky donc. A voir sur scène.
Scène du Fort à 02h40
Eux aussi au Fort, les djs des Magnetic Friends auront également une nouvelle fois en charge de réchauffer l’ambiance entre les concerts.
Et sur la plage ?
Si vous êtes plutôt lève-tôt (et oui, 14h30, c’est plutôt tôt en langage festivalier), vous pourrez commencer la journée par une petite découverte musicale sur la plage Bon-Secours avec des dj sets mettant en avant trois labels français indépendants dès 15h00, puis dès 16h, poursuivre avec le live d’un artiste issu de leur catalogue. Le jeudi, c’est La Station Radar qui ouvrira le festival.
Et pour le live, on commencera le jeudi 14 août avec Johnny Hawaï. Les organisateurs l’ont dit, le programmer sur la plage, c’était une évidence. Sur son dernier 4 titres dont l’artwork aux palmiers vous met déjà dans l’ambiance, Southern Lights (septembre 2013), les vagues vous accueillent en effet en douceur pour 40 minutes de rêverie de pop lo-fi instrumentale et décalée. On gage qu’il n’y aura pas mieux pour accompagner vos pensées vagabondes sur les ondes iodées.
Sur la Plage Bon Secours à 16h00
Retrouvez tous nos articles sur La Route du Rock, avant, pendant et après le festival ici.
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La Route du Rock Collection Eté 2014 du mercredi 13 août au samedi 16 août.
Plus d’1fos : http://www.laroutedurock.com/