S’il y a bien un nom qui nous a particulièrement ravi dans cette programmation de l’édition 2013, c’est bien celui de Godspeed You ! Black Emperor. L’annonce de la venue de cette splendide et mythique bande de québécois a immédiatement déclenché dans l’équipe d’Alter1fo, une danse de joie frénétique. Retour sur l’aventure de ce groupe singulier et essentiel des années 2000.
Le parcours du groupe Godspeed You ! Black Emperor est difficilement dissociable de celui de leur label Constellation. Tout commence en 1995 à Montréal, quand deux musiciens : Ian Llavsky (Sofa) et Don Wilkie, écœurés par les difficultés à trouver des salles où jouer dans des conditions correctes, décident de créer leur propre lieu avec scène, studio et salles de répétition. Ils n’obtiendront jamais les autorisations officielles, mais pourtant les concerts auront bien lieu. Les plus explosifs ont lieu dans le loft d’un des deux gars (dont font partie ceux des Godspeed You…), alors que les plus intimistes se passent dans un plus petit appartement sous la délicate et superbe appellation «Musiques Fragiles». De l’envie d’enregistrer des groupes se produisant en ces lieux naîtra le label Constellation. Un label à la démarche radicale, inspirée par celle des grands labels indés des années 90 (Dischord, Touch n Go ou Thrill Jockey…) privilégiant le Do It Yourself (le « fais le toi même » des punks hardcore américain) et la liberté totale pour les artistes. Encore aujourd’hui, ils continuent de sortir des disques sans qu’aucun contrat ne soit signé.
Cette démarche militante et farouchement indépendante des circuits habituels, sied parfaitement au groupe Godspeed You ! Black Emperor. Né en 1994 de l’initiative d’Efrim Menuck (guitare), Mike Moya (guitare), et Mauro Pezzente (basse), le groupe devient rapidement, après quelques concerts et une première cassette enregistrée, une sorte d’auberge québécoise où n’importe quel musicien peut venir, apporter sa touche et en repartir comme si de rien était. Le nom du groupe vient d’un documentaire japonais retraçant la vie d’un gang de motards tokyoïtes que les plus anciens et cinéphiles d’entre vous ont pu peut être voir à l’édition 1998 du festival Travelling. Finalement après avoir compté jusqu’à 15 membres, le groupe se stabilise à une dizaine personnes (en gros 3 guitares, 1 violon/violoncelle, 2 basses, 2 batteries… et un vidéaste projetant des boucles de film sur scène) après la sortie en 1997 de leur premier album F♯ A♯ ∞. C’est le troisième disque sorti par le label Constellation. Dès ce premier opus, le talent de la bande est éclatant. Brodant de longues plages fascinantes où se mêlent bruitages, explosions dissonantes et instants de pures grâces, le groupe réussit l’exploit d’étirer, de tordre, de dissoudre les structures des morceaux rock classiques en préservant une énergie et une intensité de chaque instant qui laisse rêveur.
Viendront ensuite le EP Slow Riot for New Zerø Kanada en1999, le second album Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven en 2000 et un troisième Yanqui U.X.O. en 2002. Tous font partie des classiques indispensables à toute discothèque qui se respecte. Le groupe connaît ensuite une période de flottement entre la gestion délicate d’un succès grandissant et les différents autres projets de la plupart des musiciens de la bande (Thee Silver Mt. Zion…, Fly Pan Am, HṚṢṬA, Esmerine ou Set Fire to Flames). Ils décident finalement en 2003 de mettre Godspeed You… en suspens pour une durée indéterminée.
Il faudra attendre 10 ans, et ignorer de nombreuses rumeurs de splits définitifs, avant que le groupe ne retrouve le besoin de rejouer ensemble. En 2011, ils retournent dans l’appartement studio de Montréal où tout avait commencé. L’excellent album ‘Allelujah! Don’t Bend! Ascend! sort en 2012 et le groupe reprend le chemin de la scène pour notre plus grande joie avec un line-up presqu’inchangé.
Les prestations scéniques du groupe sont totalement à l’image de leur musique : à la fois intime et intense, pleines de colère mais aussi de joie, généreuse et douloureuse. Comme le groupe a toujours été très permissif sur les enregistrements de leurs lives, on en trouve très facilement, et de très bonne qualité, sur le net qui vous donnerons un petit aperçu de ce qui vous attend le vendredi 16 août sur la scène du Fort Saint-Père.
Nous les retrouverons en tout cas avec une jubilation non dissimulée. Nous vous invitons le plus chaleureusement du monde à venir partager ce moment avec un groupe qui, par son talent, sa colère intacte et son féroce souci d’indépendance, a conquis une place toute particulière dans notre petit panthéon personnel.
Vendredi 16 août-Scène du Fort, Le Fort Saint-Père-23h00
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