Article : Marine
Le festival Retour d’image a encore frappé… Un débat « Handicap et sexualité » a suivi la projection de Yo También, long métrage d’Alvaro Pastor et d’Antonio Naharro, au ciné-TNB, dimanche dernier.
« Aimer, c’est prendre le risque de perdre », déclare Véronique Gendry, psychologue au service de l’APF (Association des Paralysés de France), après avoir visionné Yo también. En effet, le film tourne autour de la relation entre Daniel, un homme trisomique de 34 ans, et Laura, une femme indépendante et marginale. Ils travaillent tous les deux dans un centre social à Séville. Ensemble, ils vont partager des moments émotionnellement intenses et développer une amitié que leur entourage ne semble pas comprendre. Jusqu’au jour où Daniel tombe amoureux de sa collègue…
Si Véronique Gendry insiste sur la notion de risque, c’est parce que « souvent on interdit aux personnes handicapées la prise de risque. Mais sans cette prise de risque, je ne sais pas si on peut se sentir vivant ». Et le film le montre bien. Fous d’amour l’un pour l’autre, Luisa et Pedro, tous deux atteints de trisomie, vont s’enfuir pour se délivrer de la protection maternelle. « Autant vous dire que lorsqu’un enfant a un handicap, la question de la sexualité passe très très loin après tout le reste. L’enfant reste un sujet de soin et pas un objet de désir », explique la psychologue. La surprotection et l’infantilisation sont alors mis en avant à travers le rapport entre Luisa et sa mère. Une mère qui ne peut envisager que sa fille soit aimée pour ce qu’elle est.
« Oser, ne pas oser »
C’est ici que réside la problématique puisque l’entourage de Daniel va s’efforcer de lui faire comprendre qu’une personne valide ne peut s’intéresser à lui. « Aucune femme avec 47 chromosomes ne tombera amoureuse de toi », lui dit son frère. Mais Daniel est différent. Etant enfant, il a eu une éducation très poussée, sa mère allant jusqu’à faire un scandale pour qu’il soit admis à l’école. Il incarne presque une personne valide dans le corps d’un trisomique, « comme si son handicap n’était que physique ». Diane Maroger, productrice du festival, atteinte de nanisme, avoue s’identifier à lui: « J’ai retrouvé les stades de ma propre évolution. Oser, ne pas oser. L’attente qu’on vous dise Yo también (Moi aussi). La peur qu’on ne vous réponde pas Yo También justement ».
Le film montre donc les difficultés rencontrées par les personnes handicapées dans les relations amoureuses et sexuelles. Mais un spectateur pointe du doigt le fait que Laura, pourtant personne valide, n’y parvient pas non plus. « J’ai été touché par le handicap de Laura, qui est profondément blessée dans tout son être, qui est en grande souffrance, qui jusque là n’est jamais arrivé à aimer un homme. Et l‘amour que Daniel lui porte l’aide à commencer à guérir », déclare-t-il.