Rennes, ville (de moins en moins) rock ?

Celles et ceux qui rendent la vie musicale rennaise si foisonnante, ces associations qui, avec passion et pugnacité font vibrer tout au long de l’année notre bonne vieille ville sont inquiètes et en colère. Une bonne cinquantaine de ces acteurs et actrices s’est regroupée pour publier une tribune virulente dénonçant un faisceau de décisions risquant d’entrainer une dégradation inéluctable de toute cette formidable vivacité.

 

Cela fait maintenant un bout de temps que les petits organisateurs de concerts rennais constatent et discutent d’une dégradation et d’une complication des conditions d’organisations d’événements dans les bars et les petits lieux locaux.

En 2010, un texte au titre sans équivoque « Rennes, ville Rock, dernier rappel ? » et signé par de nombreux acteurs locaux (dont l’adjoint à la culture, Benoît Careil) s’inquiétait déjà de la « disparition progressive des cafés-concerts et des équipements publics de proximité dans certains quartiers » et de « la gentrification de la place Saint-Anne ».

Dix ans plus tard, le constat reste amer et décourageant : raréfaction des lieux, absence d’une salle de taille intermédiaire, normes sonores de plus en plus drastiques, voisinage intolérant et procédurier, complications légales et administratives (interdiction d’installation à moins de 50 mètres d’un autre établissement et gel des créations de licence IV), propriétaires de bars de moins en moins nombreux mais de plus en plus avides, projet aussi inquiétant que flou pour la salle de la Cité, lieu pourtant si « emblématique de notre ville rock, de notre ville belle et rebelle » comme l’affirmait Nathalie Appéré lors de son discours de clôture des États Généraux de la culture

Les obstacles semblent s’accumuler et les quelques tentatives de trouver des solutions ne semblent pas porter leurs fruits. Doit-on pour autant se résoudre à la lente extinction de ce qui fait la vraie richesse des scènes musicales rennaises ?

Alors que la mairie annonce en grandes pompes la construction d’un Zénith au coût astronomique de 70 millions d’euros et à la gestion encore indéterminée, alors que la ville accueille de nombreux festivals « hors-sols » (Politikos, collection Pinault…), les 57 signataires de la tribune regroupés sous le nom « collectif Rennes Concerts en Danger » ne s’y résolvent pas et lancent un appel vigoureux pour que vive encore longtemps l’état d’esprit frondeur et tapageur qui sauve encore Rennes de la triste aseptisation qui semble inexorablement envahir les centres-villes.

Dans trois mois, ce sont les élections municipales. Cette tribune risque probablement de faire bouger les lignes de quelques programmes (ou pas), quitte à être récupérée. Peu importe, l’essentiel est ailleurs. La place de la culture ne se définit pas tous les 6 ans. Elle se construit jour après jour… et surtout, nuit après nuit.

La tribune publiée vendredi 20 décembre 2019 :

Nous, organisateur.rice.s de concerts amateurs, musicien.ne.s et spectateurs.rice.s, nous sommes les utilisateur.rice.s au quotidien des bistrots et cafés-concerts. Pour avoir une scène musicale vivante, il faut disposer de tout le panel : de la salle à grande capacité jusqu’à l’arrière-salle de bistrot en passant par la salle intermédiaire. Comme dans toute chaîne, si l’un des maillons disparaît, c’est l’ensemble qui s’effondre ou, du moins, perd son sens.

Aujourd’hui ces petits lieux sont menacés et c’est tout l’écosystème musical qu’on appelle « scènes locales » qui est par conséquent menacé. Quand Rennes brandit la démocratie culturelle et se gargarise d’être une « ville-rock » pour faire joli dans ses dépliants destinés aux parisien.ne.s, en réalité, elle entreprend un travail méthodique de destruction culturelle et de muséification de son centre-ville. Alors que les fermetures de ces petits lieux se sont multipliées ces dernières années, que des décisions préfectorales et municipales, cachées sous le faux-nez de la légalité, imposent des mises aux normes impossibles, que les poursuites pour nuisances ont opportunément explosé, que des rumeurs inquiétantes de listes d’établissements à nettoyer se font de plus en plus insistantes, nous souhaitons tirer la sonnette d’alarme !

Idéologiques, politiques et économiques : tous les éléments concourent à la disparition prochaine de la scène rennaise.
Idéologiques car certains de ces lieux abritent parmi les derniers vrais espaces de dialogue, d’hétérodoxie, de contestation que beaucoup aimeraient voir disparaître au profit de lieux stérilisés et compatibles avec notre pourtant déjà bien moisie « start-up nation ».

Politiques car ces endroits font tache dans le processus de gentrification du centre-ville en général, et de la place Ste Anne en particulier appuyé par l’interdiction d’installation à moins de 50 mètres d’un autre établissement et le gel des créations de licence IV.
Économiques car la concentration de la quasi-totalité des établissements aux mains de quelques entrepreneur.euse.s qui spéculent à la hausse, ajoutée aux interdictions légales de nouvelles installations et à l’explosion des tarifs immobiliers se conjuguent pour, au final, venir à bout des derniers endroits du centre-ville qui accueillent nos scènes artistiques.

Si nos lieux disparaissent, nous serons toujours là, n’en déplaise à certain.e.s, avec la même envie féroce et irrépressible de concerts alors, question : Faut-il réoccuper la Maison du Peuple? Faut-il rouvrir les squats ? Faut-il organiser une free party place Ste Anne ?

 

Les signataires du texte :

ALK recordings
Astral Tofu
Beast Records
BreakBoost
Brume
Capital Taboulé
Carnival Of Sound
Casa Bonita
Chevreuil
Club Z1Z1
Comme Ça
Consternation
Damaged Good
Des Pies Chicaillent
Dream’in Noise
Erato
FTTT
Ideal Crash
In My Bed
Kepler
Kerviniou Recordz
Kfuel
Klub Del Krash
La Choze
L’Alambik
La Fleur au Fusil
La Tangente
La Villa Diodati
L’Effroyable Association Sataniste des Soviétiques de l’Ouest
Les Disques Anonymes
Les Enlaidies
LENA
Les Bottines
Le Twist Komintern
Lost Dogs
Match Festival
Merci
Midi Deux
Mikrokosm
Motif
Mourir Vite
Musique Sans Lendemain
Ô Oui
ÖND
Osmoz
PassageFaune
Percept
Poch Records
Pulse Msc
Prix Libre Records
Rituel111
Silent Kraft
Symbol
Tripalium
Tek Hilarant
Troglodisques
Turtle Corp

4 commentaires sur “Rennes, ville (de moins en moins) rock ?

  1. Aux Arbres citoyens Rennes

    Rennes Ville rauque…
    Trop de dissemblance, d’anachronismes, entre l’expression populaire et la diaspora capitaliste de cette majorité rennaise.
    Faire place nette, Place publique de ce système Hervé, a bout de souffle?

  2. Falkor

    Je trouve l’atmosphère et les groupes Rock’n’roll Rennais parfaitement nuls ! Entre les Jeudis soirs ou la place Sainte Anne est virulente d’alcoolo et ces baragouinages imposés en anglais on en peux plus…
    Il y a aucun boulot derrière et c’est chiant ! Moi je m’ennuie profondément ! À vous.!

  3. Blapui

    Bonsoir,
    les régisseurs du milieu technique rennais, pour certains, sont dérisoires !!!!!!!!
    Il est difficile de voir de gens s’offrir les droits d’intermittents sans une once de bagage scolaire étudié. C’est d’un niveau qui me rend fou de nervosité, moi qui aimait voir la fibre théâtrale ou l’expressivité musicale portée …
    Je n’en peux plus !
    salut. C’est honteux ( c’est pareil partout )…

  4. Merlin Pimpin

    La scène musicale rennaise ? C’te blague !
    La plupart des musiciens pensent plutôt à leurs tenues de scènes qu’à apprendre leur instrument ; Des textes braillés dans un anglais pourri, sans parler des  » Sondiers  » Qui s’improvisent ingés-son juste parce qu’ils se sont fait offrir une console pour leurs étrennes…
    Et ils osent faire payer l’entrée des bars pour leurs flatulences amplifiées, ces sagouins !
    Quelques bons groupes ont néanmoins émergé ces dernières années, mais ils ont vite pris la direction des festivals et tournent à l’étranger. Les autres continuent leur pollution sonore.

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