Low revient à la Route du Rock ce samedi 13 août. Le trio du Minesotta qui a pour manifeste lenteur et simplicité et vous file des frissons d’émotions à chaque écoute viendra remplir le Fort St Père de ses mélodies arrache-cœur. Avec Low, la rage se dissimule dans la douceur, la colère dans des harmonies vocales étincelantes. Et le public de la Route du Rock pourrait bien s’en trouver tout retourné…
Tout a commencé un jour de vacances, à Bordeaux. Exactement à Total Heaven (LE disquaire indie de la région bordelaise). On leur a demandé s’il y avait des concerts intéressants dans la soirée. Sans hésitation, ils nous ont conseillé Low, « il ne faut vraiment pas les louper ». On ne connaissait pas. Vu comme les deux disquaires nous ont vendu le truc, on s’est promis d’aller écouter. Nous voilà donc devant une petite porte défoncée avec le nom de la salle juste écrit sur l’interphone. D’après la bordelaise d’entre nous, la salle a déjà changé de nom plusieurs fois les derniers mois. On pénètre dans une longue pièce enfumée (et oui, à cette époque…), un bar sur le côté et on descend des escaliers abrupts qui nous emmènent dans une sorte de cave carrelée. On a quasiment l’impression d’être dans une sorte de salle illégale. Au bout de cette (petite) salle toute en longueur, une mini-estrade surélevée de quelques centimètres par rapport au sol. On accroche très vite au post-rock du groupe qui assure la première partie. Les musiciens (làs, on ne s’est jamais rappelé le nom du groupe) semblent sous amphèt’ et débordent d’énergie. Dans nos souvenirs enfumés, on se souvient qu’Alan Sparhawk vient jouer un (quelques ?) morceau(x) avec eux à la fin du set.
Et puis, vient la suite. Le concert proprement dit : Low. Dire qu’on ne s’y attendait pas serait un euphémisme. On ne savait même pas qu’ils étaient trois : Alan Sparhawk à la guitare et à la voix, sa femme Mimi Parker aux percussions (entendez un tom de batterie qu’elle frappe régulièrement avec une mailloche ou des ballets) et à la voix (et oh my lord, quelle voix !) et à l’époque Zak Sally à la basse. On n’imaginait pas non plus que leur nom était déjà un manifeste. On a même dû être étonné les premières secondes par l’arrivée de Mimi, si loin des attitudes et des apparences rock habituelles et même interloqué par l’absence d’une « vraie batterie ».
Oui, mais quand ils se sont mis à jouer, et surtout à chanter, on a eu tous les poils dressés d’un seul coup. La voix grave d’Alan Sparhawk, le temps qu’il prend pour laisser vivre notes et accords, cette sorte de mouvement lent (non, pas hypnotique) qui balance dans la musique de Low nous a rapidement envoûté. On s’est ensuite demandé pourquoi on avait noté l’absence d’une batterie « complète » . Cette mailloche et ce tom sourd suffisent. La musique dans nos oreilles n’a besoin de rien de plus. Juste cette chaleur, cette intimité avec ces voix. La proximité avec l’aridité maîtrisée de la guitare et cette basse douce et pleine. Low n’en fait pas des tonnes. Juste ce qu’il faut. La note au bon moment, le son qui vous transperce ou vous enveloppe le cœur dans un même morceau. Et puis leurs voix, surtout, belles à pleurer, belles à se damner. Les chœurs de Mimi adouciraient une troupe de mercenaires. Et pourtant, Low n’est pas que douceur. Derrière ces voiles de lenteur, dans cette intimité donnée au public, on entend la hargne, l’aridité. Mais qui prennent d’autres médias que le cri et les accords violents. Non c’est exactement l’inverse : la rage se dissimule dans la douceur, la colère dans des harmonies vocales étincelantes.
Après, forcément, on sortira ravi d’avoir un nouveau continent musical à découvrir : Low existe déjà depuis 1993 et a déjà plusieurs albums derrière lui. Trois albums sortis chez Vernon Yard, I could live in hope (1994), Long Division (1995) et The curtain hits the cast (1996) posent les bases de la musique du trio du Minestota. Low, leur nom, est un manifeste : jouer lentement, bas, laisser les ambiances se développer autour de thèmes minimalistes. Sur la scène de Duluth en pleine vague grunge et post-punk, le contraste est saisissant. Les critiques acclament le travail des trois musiciens et Over the ocean pourtant, loin des canons de l’époque, devient même un hit sur les College Radio US. Low tourne énormément et agrandit constamment une base de fans fidèles.
Pour leurs albums suivants, le trio de Duluth quitte son label pour signer chez un petit label indépendant de Chicago : Kranky. De nouveaux, trois albums sortiront sur la structure indépendante : Secret Name en 1999, Things we lost in fire (2001) et Trust en 2002. Les deux premiers d’entre eux sont enregistrés par le producteur d’Electrical Audio Steve Albini (mais aussi membre de Big Black, Rapeman ou Shellac…). Reconnu pour savoir capturer la force des prestations lives dans ses enregistrements et travailler les diamants bruts plutôt que les pierres déjà polies, le producteur de Chicago amplifie la proximité de l’auditeur avec la musique de Low. On y retrouve cette intimité qu’on ressent lors des prestations scéniques du groupe.
En 2005, de nouveau, Low change de label et signe chez Sub Pop. Virage plus pop, plus rock, peut-être, disent les critiques avec la sortie de The Great Destroyer en 2005. Nous, on serait plutôt d’accord avec Thomas Burgel dans les Inrocks de l’époque : « The Great Destroyer, septième album du groupe de Duluth, est acclamé comme l’épiphanie rock de Low. Comme si Trust, ou les précédents, n’étaient pas déjà rock. Fallait-il le hurler pour que le monde saisisse que sous les drapés lents et les voiles tristes se cachaient hargne et colère ? » Low n’est pas plus rock, non, il l’était déjà. La musique du groupe est en revanche peut-être davantage sortie de ses gonds. Les poings serrés, la violence toujours rentrée sonne de manière un peu plus ample. D’aucuns de s’écrier que c’est le travail de Dave Fridmann qui est responsable de ces nouvelles triturations soniques (pas si nouvelles, tout de même, on en avait déjà entendu avant chez Low).
L’album suivant, Drums & Guns, continue dans cette écriture plus accessible peut-être, mais tournée vers le monde. Écrit en réaction à la guerre en Irak, ou même pourrait-on dire à toutes les guerres, qu’elles soient intimes ou à coups de tanks et de snipers, Drums & Guns est un disque sanglant à sa manière. Entre aridité et intimité, le trio fait la part belle aux sonorités électroniques dont les arrangements s’accordent étonnamment parfaitement à leur songwriting. Mais Low reste Low, et les principaux ingrédients du trio restent présents, notamment ces voix qui s’entremêlent et vous filent des sanglots dans la gorge. Alan Sparhawk l’explique simplement à propos de sa femme : « avec ses harmonies, elle rend ces chansons tristes plus belles » . Dont acte.
Quatre ans s’étant écoulés depuis ce dernier brûlot de lenteur et d’émotion exacerbée, on attendait avec impatience la nouvelle livraison du trio. Et aussi un peu d’inquiétude en apprenant que Matt Beckley (Avril Lavigne, Katy Perry…) serait co-producteur. C’mon, sorti une nouvelle fois chez Sub Pop au printemps, a pourtant très vite conquis notre platine. « J’ai pensé que ce serait intéressant de voir ce qu’un gars comme lui ferait avec un groupe comme nous. Je sais comment on sonne. Je voulais entendre comment on sonnerait avec quelqu’un d’inattendu, pour faire quelque chose d’intéressant » explique Alan Sparhawk. Plus chaud, plus ample, le son de l’album est donc aussi plus accessible.
Mais revient aussi à une intimité, à une certaine introspection. « Avec les deux derniers albums, on a débattu avec quelque chose en dehors de nous-mêmes. Celui-ci est plus comme ‘oh, oublions tout ça. Maintenant, je te regarde dans les yeux : trouvons un moyen pour traverser cet instant jusqu’au suivant, ensemble, en tant qu’être humain’ » . Ce retour sur eux-mêmes, cette intimité sonnent comme une prière, un appel. Un morceau, chanté par Mimi, sert d’ancre à l’album entier. Especially me, du dire-même des musiciens, est emblématique de l’esprit de l’album. Et on doit l’avouer, à chaque écoute de ce titre, on a la gorge qui se serre et on est complètement retourné. On attend donc la venue de Low (déjà passé il y a quelques années pour une collection hiver) sur la scène de la Route du Rock. Avec tout de même un peu d’appréhension. Il n’est pas toujours évident de jouer la carte de l’intimité sur une scène de festival, encore moins en plein air. On fait néanmoins confiance à Low pour faire montre de son honnêteté écorchée pleine de douceur devant le public du Fort St Père. Et qui sait, peut-être, vous sentirez-vous comme nous dans la cave enfumée. Émus. Ensorcelés. Et peut-être même les yeux un peu humides. Et ce ne sera pas à cause de la fumée…
Retrouvez notre dossier spécial Route du Rock 2011
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Low sera en concert à la Route du Rock collection été au Fort St Père samedi 13 août 2011 (heure de passage prévue : 20h25)
Le site de Low : http://chairkickers.com/
Le site de la Route du Rock : http://laroutedurock.com/wordpress/
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