Littérature jeunesse : c’est pas du gâteau !

Vous aimez les chats. Obligé. Non ? Alors eux vous aiment. Non ? Alors on vous a envoyé des vidéos de félins mignons qui font des pattes et des pattes pour entrer dans un carton trop petit. Non ? Alors dans votre entourage une ado a des oreilles trop kawaï sur la capuche de son sweat. Toujours pas ? Et si les matous sont juste dans un livre, sans miaou ni fffsssshhh, sans poils à aspirer, sans litières à changer, sans puces ni griffes… Et qu’ils ont de grands yeux très expressifs… Oui ? Bien.

Vous aimez les gâteaux. Oh oui. Beaucoup. Parfait !

© Terkel Risbjerg / La Palissade / 2015

Eux aussi. Le p’tit rouquin et le joli noireaud sont invités par leur ami tout blanc à partager un gâteau d’anniversaire. Les deux gourmands s’empressent, ravis, mais le sort est contre eux… le vélo est crevé, le réservoir de l’auto est vide, le bus vient de partir, ainsi que le train, quant à l’avion, c’est bien trop cher…

A chaque fois, la scène se rejoue, on se lèche les babines, on y croit, on y va, on est immensément désappointé jusqu’à ce qu’une autre idée… Ces deux-là finissent, on ne vous dit pas comment, par arriver à la bonne adresse, mais derrière la porte il y a… chut ! à vous le plaisir de le découvrir.

Sans autre texte que son titre, sa dédicace et la prime sonnerie d’un antique téléphone à cadran qui tourne, mais plein de bulles illustrées à répétitions tamponnées, ce petit album se laisse raconter à loisir par n’importe quelle taille de lecteur (on a testé pour vous du 78cm au 184cm, ça marche aussi bien !). L’un bruitera avec délices et onomatopées, l’autre produira des phrases plus ou moins rimées, celui-ci prénommera les chatons (Laurel ? Hardy ? Funès ? Buffo ?) et celle-là tournera et retournera encore les pages dans un silence aussi concentré (et sucré !) que le lait du même nom.

© Terkel Risbjerg / La Palissade / 2015

Rien que les bouilles des chats valent le détour, traduisant comme du vécu l’enthousiasme et le désespoir intenses, que peuvent ressentir (et exprimer ! voire très légèrement surjouer) plusieurs fois en très peu de temps, notamment pour des trucs sucrés et festifs, des enfants qui auraient entre 1 et … 11 ans ? (on n’a pas dit 43… bon ok, on l’a pensé). Encre, aquarelle et trait fin de feutre noir (qu’on croit, on peut se tromper) s’associent avec bonheur sous la patte de Terkel Risbjerg. L’histoire est simple mais tellement bien rendue que c’en est magistral. La théâtralité est concentrée sur les deux pantomimes à moustaches, les décors réduits les servent ou les « desservent » avec brio (quand l’escalier semble de plus en plus raide à remonter), réduits certes mais plutôt joliment étudiés : du détail du véhicule récalcitrant aux immeubles ascensionnels en passant par l’ambiance gare désertée. Quant au contenu des phylactères, le jeu avec l’état du gâteau imaginé par les deux compères (surtout le joli noireaud) à chacun de leur déboire est particulièrement savoureux.

Voilà une occasion délicieuse de découvrir l’éditeur jeunesse La Palissade qui colle des oreilles de chat déterminé à son article bien défini et qui, du haut de son jeune catalogue rochelais, imprime en France et en PEFC, ce qui nous sied dès le bac de librairie, même s’il reste des traces de pattes roses de crème de gâteau entre la première, la dernière et leurs pages de garde respectives.

Cher Terkel Risbjerg, on a les crocs, donnez-nous encore à manger !!!

Gâteau ! Terkel Risbjerg, La Palissade, 2015, 10€50.

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