Ma cité va craquer !

Dans le cadre des Etats Généraux de la culture, une réunion publique était organisée par la ville de rennes pour nous interroger sur le devenir de la salle de la cité, salle emblématique de l’identité rennaise.  Maison du peuple dans les années 20, lieu de convergence de nombreuses luttes syndicales et sociales, la salle de la Cité deviendra le poumon sonore des soirées rock  à partir des années 80 avec l’organisation de concerts qui aidèrent à construire cette obsolète légende de « Rennes, ville Rock ».

Aujourd’hui, après moultes réglementations dont le décret anti-bruit de 1998, des travaux de rénovation pendant plus d’un an, un voisinage procédurier(1), la mystérieuse Cité dort sur ses lauriers et tourne au ralenti. Avec l’aménagement de la place Saint-Anne, la création d’un nouvel équipement de quartier à la Maison du Peuple et l’ouverture du futur centre des congrès, tout semble bouger autour de la rue d’échange, sauf elle. Il était donc utile de se pencher sur son avenir  !

© Édouard Hue

Jeudi 25 juin, 20h. 

Première impression arrivé sur place : seule une petite trentaine de personnes se sont déplacées, la plupart des chaises resteront vides. Une nouvelle fois, les Etats Généraux ne semblent toujours pas convaincre ou motiver les rennais à y participer. Quelques jours auparavant, le café culturel citoyen organisé autour de l’Antipode avait lui aussi été boudé et n’avait rassemblé qu’une quinzaine d’usagers de la salle.

Deuxième impression et pas des moindres, une grande majorité semble se connaitre. Ça se salue, ça prend des nouvelles ou ça se cale des rendez-vous. Pour une personne lambda, c’est assez excluant et favorise ce sentiment de « petite caste culturo-rennaise ». D’ailleurs, au cours des échanges, Benoit Careil qui mène les débats de la soirée avec Patricia Goutte (responsable du service Manifestations et Espaces Culturels à la DG  de la Culture) n’hésitera pas à nommer explicitement les prénoms des uns et des autres dans le public venus lui poser des questions.

Plus concrètement, quels sont les faits et que pouvons-nous retenir de cette soirée ?

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  1. L’arrêt des concerts de musique amplifiée est confirmé.

« L’arrêt des concerts est une décision politique. Les concerts de musique amplifiée créent des nuisances sonores. Les voisins subissent ces nuisances et ont le droit de porter plainte… s’ils portent plainte, ils sont assurés de gagner. » Benoit Careil(3)

On regrettera une nouvelle fois l’utilisation du terme de « nuisances sonores » pour évoquer la diffusion de musique vivante mais les faits sont là. Seule, une dizaine de concerts pourrait être encore programmée chaque année en soirée, avec une limitation horaire prévue à minuit trente au plus tard. Par contre, ceux ne dépassant pas les 89 décibels(2) au lieu des 95 à 105 Db habituels comme des concerts acoustique ou de la chanson type cabaret pourront toujours etre accueillis.

Autre contrainte majeure dans l’éventualité d’une programmation régulière, la salle semble obsolète en terme d’infrastructure pour accueillir dans de bonnes conditions artistes et professionnels de la musique. Selon Benoit Careil, « les loges, l’accès scène pour les backlines sont inadaptés et nécessiteraient de gros investissements ». D’ailleurs, en 2006, un projet pour réhabiliter les lieux avait à l’époque été abandonné car il nécessitait de refaire les fondations. Quand on voit qu’à 50 mètres de là, un ancien couvent est suspendu uniquement sur pilotis, certaines fondations sont plus problématiques que d’autres.

  • Une programmation existante mais peu visible.

La Salle de la Cité est une salle municipale, gérée en régie directe et peut également être louée pour diverses manifestations culturelles, sociales, politiques, syndicales et commerciales. Malgré la fin des concerts, la salle reçoit encore  entre 50 et 100 manifestations (concerts en journée, spectacle, festival, résidences, répétitions…). La municipalité affirme sa volonté de répondre favorablement au plus grand nombre des demandes reçues :

« La salle est faite en priorité pour les associations culturelles, pour le spectacle vivant. Entre une conférence ou une proposition de spectacle théâtrale sur la même date , on privilégiera plutôt le théâtre. » Benoit Careil

Or, qui sait aujourd’hui ce qu’il s’y passe ? Cruel constat face à la faible communication autour de la programmation. La cité est d’ailleurs une des rares salles à ne pas avoir de site internet dédié. La ville prend acte sur la nécessité de mieux communiquer.

  • Zéro budget + zéro projet = ?

« Actuellement, la municipalité n’a aucun projet pour cette salle autre que le système de fonctionnement actuel. Jusqu’à la fin du mandat, aucun investissement n’est prévu sauf quelques travaux d’entretien. » Benoit Careil

En résumé, la municipalité n’a pas de budget pour réinvestir ce lieu et ainsi lui redonner un souffle nouveau. Difficile donc de demander l’avis des rennais avec toutes ces contraintes…même avec une grande imagination. Surtout que tout pourra être remis en cause avec la prochaine équipe municipale en 2020 si rien n’est acté avant. Patricia Goutte le confirme d’ailleurs elle-même : « De toute façon, les possibilités ne sont pas énormes non plus, il n’y aura pas de rénovations permettant d’en faire une salle de concert de musiques actuelles ».

Bref, l’ambiance en sortie de réunion est plutôt morose et peu rassurante. 

« Il faudra d’autres réunions sur le projet de la Cité et nous en mènerons d’autres, je le souhaite en tout casNous pouvons envisager de l’ouvrir encore un peu plus pour créer de l’activité mais cela reste une question de budget. Le coût de la location de la salle ne couvre pas tous les frais, il y a une provision dans le budget de la ville destinée à couvrir son ouverture à des tarifs très intéressants pour les associations. Cette enveloppe est limitée et malheureusement le contexte n’est pas favorable à l’augmentation des budgets. Les Etats Généraux sont aussi là pour redéployer le budget de la culture en fonction des priorités que l’on se sera donné… » Benoit Careil

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(1) « Malheureusement, on ne peut plus y organiser de concerts en soirée, suite à de nombreuses plaintes du voisinage » – Benoit Careil, Ouest France 05/09/2014

(2) seuil de conformité de la salle

(3) Propos recueillis lors de la réunion

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Accéder à la page de présentation de la frise chronologique et du dossier historique.

À Rennes, la mystérieuse Cité dort (Libération)

4 commentaires sur “Ma cité va craquer !

  1. Saillard

    Plus de bruit, plus de dépassement, plus de musique, plus de…, à force de tout aseptiser nous serons vite remplacer par des machines dans un monde uniforme. Privilégions le collectif, les arts, les élan créatifs, les fêtes .. Que ceux qui sont génésiques par le bruit aillent vivre dans les zones désertifiées… Ça suffit de tout rétrécir, brider, borner. Une bordelaise ex rennaise.

  2. Malo

    Bonjour, très triste que cette salle mythique meurt comme cela sans sortir par la grande porte, aujourd’hui on ne discute plus on va porter plainte les voisins connaissaient l’histhoire de la Cité. Ils savaient que les semaines seraient ponctuées de meetings et concerts festifs.
    Je le dis tout haut l’Histoire de Rennes va finir droit dans les oubliettes or en ne connaissant pas leur passé les rennais vont finir asseptisés.

  3. Inforennes

    Triste, très triste ! Que dire de d’autre…?
    Une salle chargée d’histoire à laquelle on ne prête même pas la moindre attention. Je crois que le plus dur dans cette histoire, c’est d’entendre que la municipalité n’a même pas envisagé un seul projet de rénovation, réhabilitation ou autre. Si on comprend bien, cette salle, ils s’en foutent mais n’imaginent pas encore la détruire.

  4. Gzav

    Moi ce que je ne comprends pas ce sont les riverains, si tu veux être tranquille et au calme il faut aller vivre à la campagne ou dans des quartiers résidentiels mais pas en centre-ville. Rennes perd son âme et l’un des derniers espaces de culture populaire tombe dans l’oubli laissant place à des projets commerciaux où le citoyen n’est plus qu’un produit ou un consommateur.

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