Ce mercredi 12 février la Route du Rock collection hiver ouvrait les hostilités en douceur à l’Antipode avec la pop lo-fi de Jason Lytle avant de durcir le ton avec Wall of Death et JC Satan. Compte-rendu.
JASON LYTLE
Mercredi 13 février 2013, 21h précises (il exige en général de ne pas jouer après cette heure-là) : Jason Lytle entre sur scène seul, vêtu de l’une de ses éternelles chemises à carreaux et d’un bonnet bleu ciel. Pour ce concert, il semble que l’Américain n’ait pas misé sur les décors et la scénographie pour convaincre son public. C’est plus qu’épuré. La scène semble nue : le musicien, quelques instruments (claviers, guitares), son acolyte qui le rejoint à partir du 2ème morceau et c’est tout. Lytle n’accompagne pas sa prestation de vidéos comme il avait l’habitude de le faire avec son groupe Grandaddy ; vidéos qui avaient davantage pour fonction de détourner le regard des spectateurs de lui, qui aime si peu se produire en public, que d’illustrer ses chansons. Ici, ni vidéos, ni décors, ni recherche au niveau des lumières. Les techniciens avaient pour consigne de ne presque pas varier l’éclairage.
La prestation de Jason Lytle a été à l’image de la mise en scène : dépouillée, ce qui peut parfois être un atout lorsque l’artiste parvient à créer une atmosphère intimiste où l’émotion est réellement au rendez-vous. Jason Lytle et son musicien délivrent un set d’une heure, pas une minute de plus, ne cèdent pas à la demande de rappel du public pourtant chaleureux et bienveillant envers lui. Il faut dire que beaucoup de spectateurs se sont déplacés pour lui, les fans de Grandaddy de la grande époque qui sont restés fidèles à Jason Lytle lorsqu’il a poursuivi sa carrière en solo marquée par deux albums Yours Truly, The Commuter en 2009 et Dept. Of Disappearance, paru en octobre dernier et dont il assure en ce moment la « promotion » en faisant cette tournée réduite (quatre dates en France seulement).
De cet album, Jason Lytle nous aura délivré les incontournables morceaux Willow Wand Willow Wand, Final Setting Sun, Matterhorn et Get Up And Go dans des versions très jolies mais toujours mélancoliques à l’image de tout le concert. Alors qu’on aurait apprécié de retrouver l’énergie pop voire rock de certains morceaux comme le classique Now It’s On de Grandaddy avec lequel il a ouvert son set. De nombreux morceaux auraient vraiment gagné à connaître un traitement plus électrique et le soutien enthousiaste d’un groupe.
De plus, l’artiste s’est montré particulièrement peu communicatif et n’aura gratifié le public que de deux ou trois mercis ne décrochant qu’un léger sourire. Ce grand timide use même d’un stratagème pour réduire au minimum ses interventions entre les morceaux (Hi. My name is Jason Lytle. I come from California-Montana, US), il diffuse en effet de petits interludes alternant de douces berceuses de Chopin avec des enregistrements plus rock. C’est dire à quel point il lui difficile de s’adresser à un public. Vous ne serez donc pas étonnés d’apprendre que Jason Lytle a refusé toutes les demandes d’interviews.
Tout ça colle bien avec le parcours de ce Californien, qui vivait très mal la vie de tournée avec le groupe Grandaddy et a choisi de s’exiler dans le Montana où il prend plaisir à profiter de la nature lors de randonnées à pied ou à ski et à enregistrer des disques seul dans son home-studio. Au moins, il nous fait profiter de son attachement pour cette vie simple à travers ses morceaux. Dommage qu’il n’arrive pas davantage à partager cette émotion sur scène.
Au final, les spectateurs ne connaissant pas bien Grandaddy et Jason Lytle se sont beaucoup ennuyés mais les fans auront apprécié cette plongée nostalgique et mélancolique dans un passé pas si lointain tout en restant un peu sur leur faim. Ils auront retrouvé l’émotion de certains sublimes morceaux à travers les mélodies de ce musicien bricolo et sa voix vacillante, qui nous touche et n’est pas sans rappeler à quel point Vic Chesnutt nous manque, lui qui nous touchait droit au cœur sans aucun artifice… [Pour mieux cerner le personnage et sa difficulté à vivre une vie de musicien, on peut lire cette interview (en anglais) sur le site de STEREOGUM]
WALL OF DEATH
La soirée se poursuit avec Wall Of Death et c’est une bien belle surprise que ce trio (guitare, clavier batterie) de jeunes Français, ravis d’être là, eux, et de jouer pour la première fois à Rennes. Nul doute que trois jeunes Parisiens ont été biberonnés aux albums de Pink Floyd, du Velvet… tant ils nous délivrent un rock psyché aux influences aussi bien américaines qu’anglaises bien digérées avec une alternance de morceaux planants et d’autres à grands renforts de guitare et de batterie énervées.
Du rock psyché mélodieux de qualité qui donnera envie à certains de retourner faire un tour dans leur discothèque et de remettre certains bons vieux vinyles sur la platine voire d’acheter l’album de Wall Of Death, Main Obsessions. Le seul petit bémol reste le chant pas encore tout à fait convaincant mais les Wall Of Death demeurent un groupe à suivre… D’ailleurs leurs parrains, les Black Angels ne s’y sont pas trompés.
La soirée monte crescendo, en terme d’énergie et de décibels tout au moins, car ce sont ensuite les JC Satan qui investissent la scène de l’Antipode.
Ce quintette mixte et franco-italien s’était produit à l’Aire Libre lors des Transmusicales 2012. Et autant dire qu’il n’est pas venu pour enfiler des perles. Les JC Satan ont bien l’intention de remuer la salle avec leur rock garage bien énervé.
Une prestation de rock garage pleine d’énergie grâce notamment à la charismatique chanteuse italienne. Malheureusement, le son et le chant trop « brouillons » ont quelque peu gâché la performance.
Photos : Caro