« Blueland » : Nouvel EP de Ladylike Lily @ Interview

Difficile de ne pas se laisser embarquer par l’univers de Ladylike Lily… L’écouter, c’est la laisser nous prendre par la main et traverser avec elle les différentes atmosphères de ses chansons. Sa voix, au timbre si particulier, flotte et navigue sur une musique que l’on qualifierait « trop rapidement » de pop folk et aux arrangements soignés. Ladylike Lily est une artiste qui se livre, se dévoile et qui nous raconte : tantôt douce, tantôt mélancolique, mais à chaque fois, c’est un nouvel appel à l’évasion.

Riche d’un EP et d’un premier album aux critiques sacrément élogieuses, Ladylike Lily réussit l’exploit de s’imposer sur la scène musicale française à sa manière, au fur et à mesure, assumant clairement ses choix artistiques, signe déjà d’une grande maturité malgré ses frêles épaules. Car oui, la demoiselle aurait pu se laisser bercer à ses débuts par les sirènes de grosses maisons de disques, avides de « coups de pub, de tubes éphémères ou autre produits jetables ». Mais, Orianne de son vrai prénom, a préféré grandir à son rythme, s’entourant et travaillant uniquement avec des gens de confiance, n’hésitant pas à repousser la sortie d’un disque pour être certaine de constituer son « équipe », comme une seconde famille. Et le résultat est là.

Ladylike Lily nous revient donc aujourd’hui avec un  nouvel EP « BlueLand« , toujours en « auto-prod » et toujours enregistré avec son compère Damien Tillaut.  Finis la noirceur et le côté mystique de « Get Your Soul Washed », Ladylike Lily a changé et la douce mélancolie qui transpirait dans ses anciens morceaux a laissé la place à l’énergie, à la luminosité d’une pop plus affirmée et aux arrangements électriques décomplexés. Hyperactive dans la vie, musicienne accomplie (même si elle est trop modeste pour l’avouer), acharnée de travail (elle commence même une formation dans le chant en parallèle de la sortie du disque), Ladylike Lily signe ici un retour soigné, tout comme l’artwork et la pochette de l’EP. On regrettera juste le format choisi : 4 titres, c’est décidément trop court.

Sur scène, oubliez la formule solo «  guitare/voix », la formule « en groupe », dorénavant LadyLike Lily se lance un nouveau défi et se produit en duo avec Stéphane Fromentin (qu’on ne présente plus : Trunks, We only said, Ruby Red Gun qui joue d’ailleurs ce soir lundi 24 au Mondo…). Le pire dans tout ça, c’est qu’elle risque une nouvelle fois de nous surprendre de la meilleure manière qui soit tant son talent n’a d’égal que sa créativité et son sens de l’esthétisme.

A (re)-découvrir absolument  mercredi 26 à l’antipode en première partie d’Émilie Loizeau (pour les veinard(e)s qui ont déjà leurs billets, car c’est, hélas, déjà, complet !!!) ou au Jardin Moderne début Avril !

En attendant, petite entrevue  dans un café où  le blanc demi-sec semble inconnu au bataillon…

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INTERVIEW

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► Bonjour Ladylike Lily, nous venons à ta rencontre pour parler de la sortie de ton nouvel EP « Blueland ». Déjà, pourquoi avoir choisi ce format d’un  « 4 titres » ? 

Ladylike Lily : D’abord, pour une raison artistique. Je ressens rapidement l’envie de créer de nouvelles choses et je me lasse assez rapidement de jouer les mêmes titres. J’ai toujours besoin d’être en création et que les choses soient en mouvement. Cela faisait longtemps que je défendais les titres de l’album. J’avais vraiment envie de passer à un son différent et de raconter d’autres histoires. Et puis surtout très envie de repartir sur la route. L’écriture, c’est une chose, la tournée, c’en est une autre.  J’ai besoin des deux pour me sentir en équilibre.

► Effectivement, tu retrouves la scène dès la fin du mois à l’Antipode, et puis au Jardin Moderne le 04 Avril mais dans une configuration différente : tu es en duo à présent avec Stéphane Fromentin. Comment s’est passée cette collaboration ? 

Cela fait à peu près un an que Stéphane a intégré le groupe en remplacement de Loïg Nguyen. Je n’aime pas figer mes morceaux, et naturellement, l’écriture de nouveaux titres impliquait de changer le live. Il n’y a pas une formule qui me corresponde plus qu’une autre, mais j’avais envie d’aller explorer de nouvelles choses. Le fait d’être à deux me permettait aussi de me replonger dans le côté aérien des boucles, j’avais le sentiment de ne pas être allée au bout de cette possibilité en tournant en solo. Parallèlement à ça, il faut avoir en tête  le fait que l’on se situe dans un contexte économique de plus en plus difficile. Cela nous force clairement à réfléchir différemment lorsqu’on anticipe la tournée. Concrètement, c’est devenu compliqué d’être un groupe en développement et de tourner en nombre. Et d’en vivre en ne faisant que ça, n’en parlons même pas. (ndlr : Lire Stéphane Fromentin parlant de sa collaboration au projet de Ladylike Lily à la fin de l’article)

► Tu as toujours déclaré aimer tout « contrôler » ? 

Il est vrai que jusqu’à maintenant, j’ai eu du mal à lâcher prise sur tout ce que j’entreprenais. J’arrive difficilement à déléguer des tâches aux autres dans le travail. Il y a ce côté DIY qui me plaît beaucoup et qui me correspond, mais il m’est devenu impératif de laisser les gens faire à ma place. Pour ce qui est de la musique et de l’écriture du disque, j’ai laissé Stéphane emmener les morceaux dans une autre direction, et les tordre un peu un peu plus à sa manière. A l’inverse du premier album, où certains morceaux étaient parfois très arrangés en arrivant au studio, j’ai  laissé plus de place à l’écriture en commun cette fois-ci. J’ai vu les titres évoluer en les jouant avec Stéphane.

► Comment pouvons-nous du coup décrire cet EP ? 

L’EP est plus lumineux et plus électrique que l’album. C’est un moment de vie bien différent du long format précédent. Je me suis nourrie de plein de rencontres et de lives que j’ai pu voir, notamment sur des festivals où on était programmés. Je pense notamment aux Rockomotives où je retourne chaque année pour me laisser surprendre par la programmation. Je n’anticipe pas ce que je vais voir et je me laisse porter. Il y a toujours de bonnes surprises. Idem pour le Festival «  Nouvelles scènes » à Niort, un super endroit pour faire de belles découvertes. J’en reviens toujours  avec pleins d’idées. Et puis, on ne créé jamais dans l’absolu, on intègre des choses, on les digère et on en fait sa petite tambouille. A chaque sortie de disque, j’assume toujours pleinement les choix pris en studio. Chaque disque est un peu comme un nouveau bébé que je défends comme une louve. Le disque n’est qu’un instantané, et une possibilité d’arrangement. Je sais d’avance que lorsque je réécouterai « Blueland » d’ici quelques années, je me dirai que je le ferais différemment si je le faisais aujourd’hui. Cela arrive déjà quand je réécoute l’album.

► Et en revenant même plus en arrière, genre ton premier disque, quelle serait pour toi une grosse différence dans la manière de composer ou de produire ? 

Pour l’EP, j’avais pris le temps de maquetter plusieurs fois chez moi avant d’entrer en studio du (ndlr : ex-regretté) Passage à Niveau. Je savais exactement ce que je voulais, et puis ce n’est pas trop compliqué quand il s’agit d’un « guitare/voix ».

► Tu évoquais tout à l’heure un « contexte économique difficile », n’est-il pas risqué de sortir un EP en cette période de marché un peu « moribond » du disque ?

Oui, c’est un peu un non-sens en matière économique. Mais je m’en fiche un peu puisque ma première impulsion est d’abord artistique. Comme j’envisage le disque comme le cliché d’un instant particulier, je le vois plus comme une période de vie, avec un son qui accompagne ce moment là, et une esthétique que l’on défend à cet instant précis. On réfléchit en ce moment même à une cohérence entre les nouveaux morceaux, les visuels, le live, le décor de scène que j’ai confié aux Rennais Grands Géants.

Je me dis qu’il faut mettre le contexte économique de côté, continuer à créer le plus possible et réfléchir à d’autres moyens de vivre de sa musique.

► Toujours en « auto production », cela ne change pas ? 

Oui, c’est ma troisième « auto prod », mais  j’ai bien en tête les formalités pour sortir un disque maintenant. On est rôdés à force. Je travaille désormais avec Stéphanie Cadeau (programmatrice du Festival Les Embellies). Elle est à la base ma tourneuse et l’association Patchrock qu’elle a créée est devenu mon label (depuis l’album). En plus de trouver des dates, Stéphanie assume tout ce qui concerne l’administratif concernant le disque, la tournée. Nous nous concertons beaucoup sur les décisions importantes et formons une équipe réduite mais efficace. En vérité, nous sommes plus de deux à gérer Ladylike Lily si on considère le travail de la distribution, la promo nationale, la promo locale. C’est devenu une aventure collective alors que j’étais seule à l’origine. La petite « auto prod » s’est transformée en du « fait-maison » bien professionnalisé. Cela me convient bien.

► Ce côté « auto-prod » n’est pas un peu pesant à la longue pour tes épaules ? 

Au début, ne connaissant absolument rien du monde de la musique, j’avais surtout peur que les choses m’échappent  et j’étais toujours sur mes gardes lorsqu’une personne du milieu professionnel me contactait. Aujourd’hui, j’ai une vision beaucoup plus claire sur ce que peut m’apporter un label. Je me sens prête à passer la main car suis un peu fatiguée de manager LLL toute seule. Je sens maintenant les limites de tout faire soi-même. Aujourd’hui, j’ai plus conscience de ce que pourrait m’apporter un label ou un manager. Jusqu’à présent, je n’avais pas bien ciblé tout ça, il m’a fallu un peu de temps pour comprendre. On verra ce qui se présente pour la suite, je fais aussi un peu confiance à l’avenir. En tout cas, je pense avoir assez donné et surtout compris ce qui m’entoure pour me sentir prête à laisser la main à quelqu’un. Et puis, je culpabilise de passer autant de temps à faire des choses qui ne concernent pas l’artistique.

► Tu sens que le temps te manque à un mois de la sortie de ton EP et de la date à l‘Antipode, par exemple ?

Disons qu’aujourd’hui, nous n’avons même pas encore fini de travailler le live : j’ai une idée précise de ce que je veux pour la scène mais je n’ai pas réussi à tout mettre en place. Ça prend beaucoup de temps, il y a des nouvelles machines, des nouveaux sons. Je me prends la tête actuellement sur un mode d’emploi de 90 pages pour faire fonctionner une MPC (rires…). Il faut aussi que l’on prépare dans le même temps les sessions acoustiques pour les médias nationaux… Ce sont des étapes importantes à ne pas louper, et donc à anticiper.

En parallèle, je commence une formation de cours de chant individuel. Je n’ai jamais pris le temps de comprendre comment fonctionne le chant et comment utiliser ma voix sans me blesser. Je veux approfondir cet aspect et pouvoir enchaîner les concerts en tournée sans être fragilisée. En ce moment, je suis obligée de tout désapprendre pour réapprendre à chanter, c’est un passage déstabilisant mais qui va me permettre de faire beaucoup plus de choses ensuite.

► C’est limite « casse gueule » de tout réapprendre comme ça, non (rires…) ? 

Oui, ça l’est complètement, mais il faut accepter de se remettre en question pour progresser ensuite.

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► Jouer à l’antipode, ici, à Rennes, est sans doute une pression supplémentaire, en plus c’est déjà  complet ! Vous avez déjà tourné dans cette formule ?

Oui, sachant que nous n’avons fait que deux dates et volontairement loin de chez nous. Le concert  à l’Antipode est à domicile, donc plus impressionnant pour nous surtout avec la configuration « places assises ». Mais j’aime beaucoup ce cadre-là, les gens sont souvent très réceptifs, parfois dans un silence presque religieux. Il faut savoir faire confiance aux programmateurs qui composent la soirée en étant le plus cohérent possible. Et puis, cette date est importante aussi parce que l’on a besoin de gagner en confiance avec Stéphane sur ce tout nouveau live. Il y a des nouveaux morceaux, et pour ceux qui sont plus anciens, on a tout réarrangé (oui, j’aime bien me mettre en péril aussi). Malgré l’appréhension, je suis quand même confiante car notre toute première date s’était déjà très bien passée, on avait déjà réussi à prendre du plaisir sur scène.

► En live justement, on peut s’attendre à quoi sans dévoiler tout le show?

Il y a toujours un côté intimiste car ma musique est comme ça, mais il y a plus d’énergie aussi du fait des rythmiques / machines qu’on a mis en place. Ça « castagne » un peu plus, mais ça correspond tout à fait à ce dont j’ai besoin en ce moment. Sur scène, j’aimerai pouvoir prévoir deux lieux différents  entre ma guitare et les claviers et Stéphane sera à mes côtés. Quoi qu’il en soit, même si on prévoit un décor, éventuellement une créa-lumière, je veux conserver un côté humain, proche des gens car j’en ai toujours eu besoin.

Pour l’Antipode, ça reste une première partie donc j’ai prévu un duo « guitare/guitare ». On sortira la grosse « artillerie » pour la date du Jardin Moderne avec les machines, d’ici là on aura le temps de finir de préparer le live, et on aura un bout de tournée dans les pattes.

► Tu ouvriras pour Emily Loizeau et je sais que tu apprécies beaucoup son travail…

C’est un petit clin d’œil puisqu’à l’époque où je me suis installée à Rennes, j’écoutais beaucoup de musique française et j’étais très admirative de son travail. Cette fille a la classe, elle a produit elle-même son disque, elle sait où elle va et elle est très créative. Je la trouve très intègre artistiquement, elle trace sa route, j’apprécie beaucoup ce genre de personne.

► Tu arrives à discuter avec les artistes dont tu partages la scène ou cela est difficile à cause de vos plannings respectifs chargés ? 

Cela dépend, on a pas toujours le temps de se voir en fonction du timing de la soirée. J’ai gardé des bons contacts avec certains, et vu naître des affinités. A force de recroiser les gens, on finit par tisser du lien, c’est normal. C’est le cas, par exemple, avec Mesparrow avec qui je me suis liée d’amitié, et puis, je suis toujours contente de pouvoir recroiser les groupes de copains sur la route.

1450346_677643762275490_1469896590_nLe milieu musical étant assez masculin dans l’ensemble, ça doit faire du bien de vous retrouver un peu « entre filles ». D’ailleurs, n’est-ce pas plutôt handicapant d’être une jeune et jolie chanteuse dans ce milieu, niveau crédibilité par exemple ?  

Oui, c’est vrai que ce n’est pas toujours évident de s’imposer lorsqu’on est la seule fille. Je suis parfois embêtée  avec le fameux clichée de la « chanteuse-diva ». Il m’est arrivé d’être prise de haut par des techniciens avant d’avoir commencé à m’installer, juste parce que je suis une fille et que je chante. C’est d’autant plus injuste que je me sens avant tout musicienne et que mon premier instrument est la guitare. Maintenant, ce n’est pas bien grave, ça peut toujours forger le caractère. A force, j’ai aussi appris à prendre de la distance avec la manière dont les gens me jugent. Plus globalement, je sais pertinemment que ceux qui font des choses sont forcement critiqués.

► Et comment gères-tu justement les critiques sur ton travail, tu y es sensible ?

Au début, j’étais très épidermique en lisant une mauvaise critique mais j’ai appris à m’en défaire et j’ai bien intégré le fait qu’on ne peut pas plaire à tout le monde. Certains articles m’ont fait du mal, surtout lorsque tu sens que la personne qui l’a rédigé n’a pas compris ce que tu voulais dire à travers ta musique. Nous avons tous une approche différente la musique. Si la mienne peut faire du bien à certaines personnes, tant mieux c’est déjà pas mal. Bien qu’évidemment, à la base tu as envie de convaincre le plus grand nombre.

► Cette envie « de bien faire » peut expliquer l’énorme stress que tu as eu lors de ta date avec Syd Matters où tu as été jusqu’à demander au public de se retourner pour ton premier morceau. Comment gères-tu le stress dorénavant ?

Pour cette date, je n’arrivais même plus à bouger mes doigts ! Maintenant, je suis moins stressée du fait d’avoir beaucoup joué et tourné depuis l’album. Et puis, j’ai surtout bien intégré le fait que les gens venaient pour passer du bon temps. Mais c’est vrai que tu as tellement envie de bien faire que tu te mets une pression monstre alors que le stress ne sert à rien sauf à foutre en l’air tes capacités. Par contre je suis toujours extrêmement nerveuse, mais on ne change pas un caractère si facilement , même avec les tournées. Bon, par contre, il y aura ma maman à l’Antipode, je pense que ça me fera toujours stresser, quoi qu’il arrive !

► Ça doit te faire plaisir de voir tes parents te soutenir ?

Oui, surtout que la musique tient une place importante dans leur vie à tous les deux. C’est agréable d’être soutenue, surtout qu’ils aiment ma musique. Maintenant que c’est devenu viable, ils sont vraiment contents pour moi. On se voit peu à cause de nos activités respectives, mais je sais qu’ils surveillent ça de loin.

► Tu disais vouloir convaincre le plus grand nombre mais cela ne t’empêche pas de prendre des risques ou de dérouter ton public. Par exemple, l’esthétique du premier clip de cet EP est très … coloré ?

Oui, très surprenant pour la plupart des gens qui suivent LLL depuis le début. Ça m’amuse de pouvoir proposer plusieurs identités visuelles. C’est la première fois que j’en propose une un peu décalée, qui sort de l’esthétique habituelle. On a passé un très bon moment en tournant ce clip, et c’est toujours un temps que j’apprécie (les tournages en général). J’ai demandé à Anna Le Reun qui est costumière de fabriquer sur mesure cet habit de lapin. Il faut aller découvrir son travail avec Ouistich, l’expo sous l’eau dans les piscines à Rennes (ndlr : lire l’article d’alter1fo sur cette expo : ici). Encore une fille super créative que j’ai rencontrée en tournée.

► En parlant de clip, comment gères-tu d’ailleurs ton rapport à l’image ?

L’image, c’est la toute première signature. Un visuel peut susciter l’envie d’aller découvrir quelqu’un en concert comme il peut faire fuir les gens. Il faut en avoir conscience. L’image que je renvoie change naturellement  car elle accompagne mes envies et ce que je vis à un moment précis. Je ne veux pas m’enfermer dans une esthétique trop posée, un peu mignonne, naïve comme c’était le cas au tout début. Évidement, j’ai changé en quatre en ans, ce serait mentir aux gens puisque ce ne serait pas vraiment moi.

Et tu arrives à toujours contrôler ta propre image ?

Ce n’est pas toujours faisable, il y a déjà eu des ratés et des choses qui m’ont échappées. C’est comme ça, je ne reste pas sur un échec.

C’est d’autant plus difficile lorsqu’on doit faire confiance à un/des réalisateurs. Par exemple, pour le clip du morceau « Who’s next », j’avais été contactée par les réalisateurs Vincent Scotet et Maxime Leturcq dont j’avais adoré le travail d’animation sur le clip d’ « I Come From Pop« . Lorsqu’ils m’ont contactée pour faire un clip, ils avaient en tête de faire une vidéo et non de l’animation, mais je ne savais pas du tout à quoi tout ça allait ressembler alors j’ai du me fier à mon intuition. On a beaucoup discuté et échangé à distance pour se mettre d’accord. Au final, je suis très heureuse d’avoir bossé avec eux. Lors du tournage d’ailleurs, je ne voyais pas forcement les images qui venaient d’être filmées.  De toute manière, tout était écrit, je ne pouvais pas intervenir là dessus, et puis je leur faisais confiance. Je suis certaine que j’ai bien fait, je suis fière de ce clip, et c’était une super expérience (une grosse équipe quand même, on était 21 sur le tournage). C’est normal d’avoir besoin de maîtriser une image, surtout lorsqu’il s’agit de la tienne .

► D’ailleurs, tu n’apparais jamais sur la pochette de tes disques ?

Ce n’est pas absolument indispensable. Les gens me voient déjà sur scène, et pas mal dans les clips. Je ne suis pas certaine que ce sera éternellement le cas. On verra, selon les idées, les envies. L’important est que le visuel fasse transparaître ce qui se passe musicalement. Ça a l’air tout bête comme ça, mais c’est un exercice assez complexe.

► Pour finir, le futur pour toi sera la scène, j’ai compris que tu avais hâte de repartir…

Oui , ça commence à me manquer sérieusement. Après m’être enfermée pour écrire, puis pour enregistrer, j’ai besoin ressentir de nouveau la grosse fatigue de tournée. J’ai besoin de partir loin de chez moi, à la rencontre des gens… La scène est une expérience super énergisante. Je suis très sensible à la manifestation du public. C’est aussi ce qui fait que même si tu es crevé, tu as quand même envie d’y retourner. Parfois, tu retrouves des gens avec qui tu as apprécié de travailler ou tu retrouves des personnes qui sont venues t’écouter d’une année sur l’autre. Ça fait vraiment plaisir de voir des gens heureux d’avoir vécu un concert. J’aime beaucoup ces repères humains lorsque je suis loin de chez moi. C’est rassurant et tu finis par te sentir à la maison un peu partout.

Capture► Justement, tu préfères la scène ou composer ou ce sont deux choses différentes ?

A la base, ce que je préfère c’est l’état de création. Cette sensation d’euphorie face à quelque chose de complètement nouveau. Lorsque j’écris, j’ai besoin d’être vraiment toute seule, je pars pendant deux mois et je ne vois plus personne, c’est mon petit côté autiste. J’aime ensuite quand vient le moment du studio, quand tout ça se concrétise. J’ai travaillé pour la troisième fois avec Damien Tillaut. C’est lui qui a enregistré tous les disques de LLL. Du fait de se connaître si bien, on finit par être assez efficace en studio. Il y a des automatismes qui se sont mis en place à force de bosser ensemble. On se connaît par cœur et on n’a pas forcément besoin de se parler  parce qu’on sait où l’autre veut aller. On a tendance à être sous pression dans ce genre de moment car on a toujours une échéance à respecter pour la sortie d’un disque. C’est à ce moment qu’interviennent les fous rires nerveux. Damien est assez doué dans cette discipline .

Pour finir, je n’ai franchement pas de moment privilégié, chaque étape est essentielle et j’apprécie chacune d’entre elle. J’essaye d’en profiter un maximum, et je n’oublie jamais que c’est quand même un sacré privilège de passer sa vie à créer des choses.

► C’est une jolie conclusion ! Merci beaucoup pour ta gentillesse et disponibilité. A très vite sur scène !

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Crédit photos : © Loïg Nguyen // Crédit visuel : ©Joanna Lorho.

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Retour de Stéphane Fromentin sur le projet de Ladylike Lily

ladylike 04 - Embellies 2013 UBU

► Bonjour Stéphane,  tu collabores avec Ladylike Lily depuis un an à peu près. Il semble que tu as pris part aux compos de ce nouvel EP « Blueland ». Peux-tu nous expliquer comment s’est déroulé le process de création de ces morceaux ?

Le projet Ladylike Lily n’est pas mon projet, c’est celui d’Orianne. Alors, oui, je collabore avec elle, mais les compositions viennent toujours d’elle. Pour la création de ce « 4 titres », ainsi que celle du live en duo, je me suis contenté d’apporter ma touche, mes notes, mon son. Orianne m’a juste laissé prendre la place que je voulais dans ses compositions, quitte à quelque fois modifier la structure ou la mélodie originale pour pouvoir mettre en avant une de mes lignes de guitare… Donc, prendre part à la composition est un bien grand mot. Disons que c’est la première fois que j’arrive au moment de la création d’un morceau de Ladylike Lily : ça fait un an que je joue avec Ladylike Lily, mais les morceaux préexistaient. Là, je suis présent à la source…

►  Tu pars en duo avec LadyLike Lily : est-ce plus flippant d’être seulement deux que d’être en groupe ? Comment appréhendes-tu cette configuration ?

Je l’appréhende très bien! Orianne est une chouette personne! Et en plus, on sera 3, puisque nous serons accompagnés de notre ingénieur du son!

► Vous avez déjà donné deux concerts, a priori cela s’est bien passé du point de vue de Ladylike Lily, tu confirmes ? Et qu’est-ce que tu retiens de ces deux dates ?

Je confirme… très bien passé! Ce que j’en retiens? C’est qu’il y avait encore du travail pour arriver à quelque chose de fin comme je l’entends (et je ne parle que de mes sensations), mais qu’en l’état, c’était de toutes façons plus qu’honorable!!! C’est justement ce travail que nous sommes en train de faire en ce moment…

►  Les Rennais(e)s te connaissent également à travers tes autres projets « We only said », « Trunks », « Psykick Lyrikah» : comment s’opère ce grand écart entre une musique assez rock, noise, parfois « rap » et le coté plus « intimiste » de Ladylike Lily ? Tu as peur de t’ennuyer ou de  t’enfermer dans un style musical ou es-tu instable musicalement (rires…) ?

Nan! je ne m’ennuie jamais! Je suis un oisif né!

Par contre, pour ce qui est de la musique, et la façon que j’ai de la pratiquer, j’ai toujours fonctionné de la sorte.  J’ai toujours eu d’un côté de « jolies » choses, souvent en duo avec une chanteuse (SUPERSAGE , il y 10 ans avec Liz Bastard, CABINE, il y a 5 ans avec Julie Seiller puis Thomas Poli, Lætitia Sheriff pour une création musicale sur un spectacle de danse, etc…). Comme si, quelque part, pour pouvoir faire la musique disons « intense » comme celle que je fais avec Trunks, Chien Vert ou Ruby Red Gun, il fallait que je compense avec des choses plus « petites »… une sorte d’équilibre. Mais ce grand écart n’existe qu’aux yeux des autres.

Moi, je fais la même chose! de la guitare! des mélodies! du son! Je raconte une histoire, avec un début, un milieu et une fin, c’est juste l’histoire qui change…

Et, étant donné que je viens d’abord du théâtre, la narration est ce qui m’importe le plus… D’ailleurs, jouer dans des groupes ne représente que la moitié de mon travail de musicien. L’autre partie de mon boulot, et peut-être celle à laquelle j’attache le plus d’importance, est la composition pour le théâtre, justement… la danse et le cinéma… Mon grand écart à moi est plus là! Parce que le format chanson est beaucoup plus simple à appréhender qu’un morceau de 20 minutes au service d’un texte, d’un metteur en scène et de comédiens… Plus simple, parce que plus intuitif, et beaucoup plus codé, quand il s’agit de pop, de rock, etc…

► Du coup, est ce que tu écoutes vraiment de tout musicalement ou tu mets toujours un style musicale précis dans ta platine ?

Comme tout le monde, je n’aime pas trop  ramener du travail à la maison. Alors, de la musique, au final, j’en écoute très peu… Juste parce que j’aime aussi beaucoup le silence. Mais, quand c’est le cas, je mets beaucoup plus facilement sur ma platine de la musique expérimentale, des chants baroques ou de la noise musique que le reste… Encore une fois, c’est l’histoire qui m’intéresse, et les outils qu’ont trouvé les musiciens pour nous la raconter… Après, si c’est bien fait, dans le sens où ça me parle, et bien j’écoute! Sinon, un beau chant d’oiseau me convient mieux…

► A chaque formation, en tant que guitariste, tu joues avec la même guitare… Peux-tu nous expliquer comment tu l’as eue et son histoire ? Elle est aussi polyvalente que ça pour te permettre de jouer avec tous tes groupes ou est-ce du fait de ton pedalboard ?

AHHH! ma guitare! C’est un piano! Aussi polyvalente qu’un piano! Il s’agit d’une KRAMER DMZ 3000. Une guitare américaine avec un manche en aluminium qui date de 1978. Le principe de ces guitares était justement de récupérer le principe de sustain d’un piano. La tension est tellement forte qu’une note peut sonner pendant 5 minutes, pour de vrai! Ensuite, de part ce même manche en aluminium, elle possède une attaque incroyable.

Donc, une grosse attaque (pour la noise) et un gros sustain (pour la pop)… Il ne reste plus qu’à dompter l’engin et son poids! (pas loin de 8kg) Les pédales que j’utilise ne sont là que pour sculpter le son. Je n’ai rien qui le transforme véritablement : je n’ai qu’un tremolo, un EQ, une reverb et un delay… Pas besoin de disto avec cette guitare! Une bonne main droite suffit à faire crisser l’ampli!

Et pour la petite histoire, cette guitare, je la tiens de Régis Gautier, guitariste de MOLLER PLESSET.

Il y a une dizaine d’années, RUBY RED GUN était assis sur le strapontin de la noise rennaise, et plus particulièrement du math rock, mené de mains de maître par les MOLLER. Nous avons partagé quelques scènes ensemble et surtout, nous sommes amis! A l’époque, je jouais sur une copie très mal faite et très fausse d’une télécaster.  Elle convenait parfaitement à ce style de musique. La justesse ne faisant pas partie de mon vocabulaire de musicien! (on peut très bien jouer faux, mais être juste!!!).

Puis, j’ai commencé à jouer avec LAETITIA SHERIIF et GAEL DESBOIS sur une création pour un spectacle de danse. Moi, je ne m’en rendais pas compte parce que j’aime beaucoup ça, mais la fausseté de ma guitare dérangeait un peu… A la fin d’un petit concert avec Laetitia, Régis Gautier est venu me proposer de me revendre cette KRAMER  puisqu’elle ne lui convenait pas : il l’avait juste achetée comme ça, au bénéfice d’une excellente occase sur internet… Revendue le même prix. La CLASSE Mr Gautier!!! Chose que j’ai un peu faite à reculons, étant donné sa couleur. On ne peut plus jaune! Pas une goutte d’autre couleur que ce jaune primaire!

Mais devant le vertige du son que me proposait cet engin, je me suis  laissé faire!

Et maintenant, je ne changerai de guitare pour rien au monde! Ce jaune est même devenu un peu ma signature, quand j’y pense…

Et pour la deuxième petite histoire, lorsque nous avons repris il y a peu de temps les répétitions avec RUBY RED GUN pour notre premier concert depuis 7 ans (le 24 février au Mondo Bizarro, comme ça, c’est dit!), j’ai évidemment commencé à travailler avec ma Kramer… Et bah rien n’y a fait! La musique de Ruby Red Gun, c’est mieux avec ma copie de télécaster super fausse!!! Alors, soit!

 ► Merci beaucoup !

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▬▬▬[ Concert Antipode // le 26 février : Emilie Loizeau et Ladylike Lily // COMPLET //
▬▬▬[ Concert Jardin Moderne // le 04 Avril avec en première partie Every Man as your voice //
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