On s’est laissé surprendre à chanter à tue-tête au bout de seulement dix minutes de cette onzième édition des Agités du Vocal à l’Amaryllis. Une formule intuitive, naturelle et complètement réjouissante, menée avec brio par le guitariste Damien Le Bellour. Ce dernier est capable de restituer musicalement la bagatelle de 140 chansons, avec un enthousiasme communicatif et une bonne dose d’humour. Un public conquis dès les premières notes pour une ambiance souriante qui monte crescendo. Mais les Agités du Vocal, qu’est-ce que c’est ? Damien Le Bellour nous explique ce qui fait vibrer l’Amaryllis le mardi soir, deux fois par mois : « une chorale improvisée et éphémère » qui ne nous a pas laissés indifférents. Rencontre.
Alter1fo : Si tu devais expliquer en quelques mots le fonctionnement des Agités du Vocal, que dirais-tu ?
Damien Le Bellour : C’est tous les 15 jours le mardi soir à l’Amaryllis. Le principe des agités est de rassembler des gens qui ne chantent pas forcément tous les jours. On leur propose des carnets de chant (environ 140 chansons), de la chanson française classique, Brel, Brassens, Ferré à la chanson des années 80, les trucs un peu plus rigolos, en passant par la nouvelle scène française. On propose ce mix aux gens : ils choisissent une chanson, m’en donnent le numéro, je la joue à la guitare, et tout le monde chante ! C’est une chorale improvisée et éphémère.
Qui est à l’origine des Agités ?
Je suis allé dans un bar qui s’appelle le cinquante à Paris dans le dixième, rue de Lancry, qui propose ce système tous les dimanches soirs, un peu plus tôt de 18h à 21h. C’est un vieux briscard de 50 ans qui fait ça, et l’évènement existe depuis neuf ans. C’est exactement le même principe, des carnets de chant et un type à la guitare. J’ai passé une excellente soirée dans ce bar, j’ai rigolé, j’ai chanté. Les gens se rencontraient, c’était très convivial. Je me suis dit, pourquoi pas à Rennes ? Je remercie d’ailleurs le cinquante, j’y retournerai en pélérinage pour leur offrir un cadeau (rires).
As-tu rencontré des difficultés pour trouver un lieu pour ce projet ?
Non, parce que j’avais déjà fait des concerts à l’Amaryllis en tant que musicien au sein d’un groupe. Ce sont des personnes que je connais, qui sont ouverts pour découvrir des choses nouvelles. Je suis arrivé en expliquant ce projet : ils ont été un peu dubitatifs au départ. On s’est donné trois soirées d’essai pour voir comment ça se passait. Et ce soir, c’était la onzième édition !
Ca a marché assez rapidement ?
Oui, l’idée de base a fonctionné très vite, même s’il y avait moins de monde qu’actuellement. Mais dans le principe, ça a fonctionné tout de suite. Tu donnes le carnet de chants et les personnes s’approprient le fonctionnement en quelques minutes.
Ce qui nous a amusé ce soir, c’est qu’il y a une « battle » entre les tables, les gens essaient de défendre leurs chansons favorites…
Oui, ça participe à l’ambiance, j’aime beaucoup ce joyeux bordel entre la 23, la 46 et la 73, ça fait partie du folklore, ça gueule de partout ! (rires) Ca crée une émulation entre les gens, mais quand la chanson est choisie, tout le monde la chante, et accepte la chanson qui est finalement choisie.
Tu as commencé avec combien de chansons ?
J’ai commencé avec 70 chansons. Ca a été un gros boulot de préparation : j’ai ramené l’idée de Paris en février 2012, et ça ne s’est concrétisé qu’en octobre. J’ai eu six mois de travail de recherche de chansons sur internet, notamment pour les mettre à la bonne tonalité pour que tout le monde puisse chanter, filles et garçons. J’essaie quand même de garder la tonalité d’origine, en adaptant un peu si besoin. Un gros boulot aussi de recherche de partitions, d’écoute des chansons : on se rend compte que sur pas mal de titres, on connait les refrains mais pas les couplets. C’était très intéressant aussi de redécouvrir des textes, même si dans David & Jonathan : j’étais comme un goéland dans une île de sentiments (rires). Tout ce travail n’est pas si évident : ça semble facile dans la soirée, mais toutes les rythmiques sont différentes. J’ai fait une soirée test avec des copains sur 70 morceaux, j’ai eu un retour critique, notamment sur le choix des chansons. Aujourd’hui j’ai 140 chansons : je garde ce nombre mais je change une dizaine de titres régulièrement.
Comment se fait le choix des chansons ?
Au départ, j’ai pris les grands noms de la chanson française, et j’ai sélectionné les 5 morceaux les plus écoutés pour chaque artiste, à l’aide d’une plateforme d’écoute musicale. Puis ça s’est étoffé, d’abord en testant auprès des gens : il y a des titres très écoutés mais inchantables ! Ça s’est étoffé avec les demandes du public. Le tiers du répertoire est composé par les propositions du public, après avoir fait circuler des petits papiers. J’ai aussi essayé d’insérer quelques titres en anglais, et je suis toujours à l’affut de nouveaux titres.
Il y a aussi des morceaux que je propose et qui ne sont pas demandés, donc je les retire. Le plus important est d’avoir quelque chose de dynamique.
Lorsque tu as plusieurs propositions, tu orientes plutôt le choix en fonction du moment de la soirée ?
Non, parce que j’adore ce côté « dans l’instant ». Les gens ont une liste de chansons avec un numéro : moi je n’ai pas de listes dans mon classeur : je suis obligé de tourner les pages pour découvrir le morceau (à part sur quelques titres qui reviennent souvent) : j’ai toujours la surprise et j’adore ça.
On a remarqué que les gens choisissent au départ des choses plutôt cool, et qu’ils se lâchent au fur et à mesure sur des trucs improbables.
C’est vrai. Toutes les soirées sont différentes, mais il y a des temps, comme la première heure, pendant laquelle les gens vont chanter les chansons qu’ils aiment. Et ensuite, tu as des chansons plus intuitives (rires) et ça devient surréaliste ! Des gens qui détestent Johnny et qui chantent à tue-tête Que je t’aime.
Il y a aussi ceux qui entrent dans le bar et qui se disent « tiens, c’est soirée scout », et qui chantent 10 minutes plus tard !
Tu as quand même des publics très différents qui se côtoient et qui se mettent à chanter la même chose.
J’adore cette convivialité : j’ai déjà du plaisir à chanter les chansons, mais surtout à voir des publics différents, de tous âges chanter ensemble. Tu vois que la chanson est quelque chose d’universel. Ce qui est chouette, c’est que les gens ont grandi avec ça et c’est un moyen de communication et de communion entre les gens. Tout le monde connait donc tout le monde participe et est acteur : tu as des liens qui se créent entre des gens de 25 et de 50 ans, parce qu’ils prennent le même plaisir à chanter. C’est ce qui plait dans les Agités je pense.
Certaines personnes viennent à l’Amaryllis pour prendre un verre sans forcément savoir qu’il y a cet événement. Comment gères-tu ça ?
J’ai choisi ce bar parce qu’il y avait deux salles, et je ne veux pas prendre en otage les gens sur le chant. Ils ont toujours le choix d’aller dans la salle à l’étage. Il y a des personnes qui montent et qui ne chantent pas de la soirée : ils sont venus là pour être peinards et c’est cool de leur laisser cette liberté là. Je ne voulais pas un lieu où il n’y ait que ça.
Est-ce que tu envisages de faire évoluer la formule ? On a pensé à l’ajout ponctuel de musiciens…
L’idée est effectivement d’étendre à d’autres musiciens. Garder l’idée du boeuf vocal sur lequel les gens se rencontrent par l’intermédiaire du chant, et faire la même chose avec des musiciens. Il y a eu un super moment il y a quinze jours. Deux femmes rentrent dans le bar pour boire un verre, et je vois qu’elles ont des instruments : et sur Couleur Café, elles ont sorti une flûte traversière et une clarinette, c’était génial, ça participe à la convivialité générale. Elles m’ont aussi accompagné sur Salut à Toi des Béruriers Noirs. On a gardé contact, elles sont les bienvenues ! L’idée est d’inviter d’autres musiciens pour enrichir le projet. Il y a notamment une pianiste qui va venir boeufer sur une quinzaine de chansons. En conservant l’idée de soirées spéciales. Mais tous les musiciens sont les bienvenus, c’est le côté irlandais de la formule.
Et pour finir, pourquoi ce nom Les Agités du Vocal ?
C’est le jeu de mot avec Les Agités du Bocal, je voulais quelque chose qui évoque la chorale mais aussi la folie qui peut se dégager de ça. J’ai proposé ça à Nolwenn que je remercie, et qui a fait le visuel de l’évènement : elle s’en est inspirée pour dessiner des petits poissons dans un bocal. On sent que le titre fonctionne bien, parce que les gens viennent aux « Agités » !
Merci Damien !
Merci à vous !
Les Agités du Vocal, un mardi soir sur deux, à partir de 20h30 à l’Amaryllis.
Pour connaître les dates des Agités du Vocal : Page Facebook des Agités du Vocal
La douzième édition aura lieu ce mardi 09 avril !
Coucou c’est a kel heure par contre