[critique] Alien : Covenant

Cinq années après Prometheus, Ridley Scott reprend les commandes d’une saga qu’il a initiée en 1979. Le prequel à demi-avoué d’Alien n’arrivait jamais à remonter aux racines d’une mythologie développée sur quatre films. Les ingénieurs, êtres démiurges, n’étaient pas assez travaillés pour être à la hauteur des questions posées depuis tant d’années. Avec Alien : Covenant, Ridley Scott prolonge des réflexions menées dans Prometheus. Il se moque éperdument des xénomorphes et toute son attention semble concentrée sur le personnage de David, interprété par Michael Fassbender. 

Résultat de recherche d'images pour "david alien covenant"

 L’œil de David ouvre le film. On pense à l’ouverture de Blade Runner lorsque l’on découvre la première cité industrielle dans le reflet d’un œil. Il possède une double référence qui mêle le regard du spectateur à celui du personnage qui découvre le monde. David, un robot créé par l’homme, joue une partition de Wagner sous l’oeil de Peter Weyland (Guy Pearce). Pour les connaisseurs de l’univers d’Alien, la Weyland Company représente tout ce qu’il y a de plus cynique. Ce sont eux qui veulent à tout prix protéger la base infestée par les xénomorphes dans Aliens, le retour pour mener des recherches sur eux.

 Après ce prologue intrigant, nous découvrons les personnages principaux à bord du vaisseau Covenant. Une quinzaine de scientifiques sont envoyés pour découvrir une planète potentiellement intéressante pour installer une colonie. À cette équipe s’ajoutent 2 000 colons en hibernations et 1 000 embryons humains. Après la réception d’un message de détresse, le capitaine du vaisseau décide de faire une halte sur une planète pour voir de quoi il en retourne. Des spores infectent deux des scientifiques et la partie peut enfin commencer. Ridley Scott ne tente pas de retrouver l’effroi qu’a pu susciter Alien, le huitième passager et tend davantage vers l’horreur pure. Le film ne lésine pas sur les effets gores et, par les effets spéciaux numériques, multiplie par dix la violence impulsée par les xénomorphes. Mais le récit du film ne semble pas se dérouler de ce côté-là…

 Ridley Scott semble porter toute son attention sur le personnage de David qui contient en lui toutes les interrogations philosophiques du réalisateur anglais. En effet, de qui sommes-nous la créature? Il n’est pas anodin de voir les capitaines de vaisseaux habités par la foi depuis Prometheus. Plusieurs personnages d’Alien : Covenant poursuivent cette quête ontologique. David (l’autre, serait-on tenté de dire) ne se venge-t-il pas sur une population qui a ce pouvoir de créer et qui est immédiatement reliée, pour lui, au rapport qu’il entretient avec les hommes. Ce pacte de rébellion contre les créateurs, il le propose à un autre personnage qui le refuse. C’est peut-être ce qui le rapproche de Blade Runner où le personnage de Rutger Hauer mène une fronde contre l’Homme créateur face au personnage d’Harrison Ford qui semble accepter une possible ascendance.

 Le film connaît ses plus beaux moments lorsqu’il s’éloigne de la saga Alien. Le thème de la mort qui est présent depuis toujours dans la filmographie de Ridley Scott semble poussé dans ses retranchements depuis le décès du frère du réalisateur, Tony Scott. Il pare cette thématique d’un mysticisme surprenant qui va déstabiliser le public habitué à des formules répétées ad nauseam dans les blockbusters contemporains. Il ne faut pas cependant nier le côté bancal de la dernière production de Ridley Scott qui se noie dans un dernier acte peu intéressant qui tente laborieusement de rattacher les wagons au premier film de la série. Pour apprécier le film, il faut accepter d’entrer dans un autre parcours que celui tracé par les quatre premiers épisodes et, en ce sens, il aurait été plus logique de le définir comme une suite à Prometheus. Dernier défaut, des réactions invraisemblables des personnages qui montrent un désintérêt total de la part de Ridley Scott pour une grande partie de l’équipage. Les scientifiques ne sont définies que dans leur rapport amoureux à l’autre.

 Ridley Scott est définitivement parti dans l’espace. Malgré toutes les critiques que l’on peut faire au film (son scénario et des scènes ridicules comme celle de la douche), il possède une certaine richesse par les références littéraires et cinématographiques qui l’habitent. Il faut faire le deuil d’un nouvel épisode dans la lignée des autres films de la série. De la part de Ridley Scott dont on avait perdu toute attache depuis…disons…très longtemps, Alien : Covenant apparaît comme l’une de ses expérimentations les plus passionnantes des années 2000.

1 commentaire sur “[critique] Alien : Covenant

Laisser un commentaire

* Champs obligatoires