Collectif Covid long 35 : « Nous exigeons une meilleure reconnaissance et prise en charge du Covid long »

Régulièrement, le Covid revient à la une des médias nationaux quand un variant refait parler de lui. Le reste du temps, on pourrait presque croire qu’une pandémie mondiale ayant provoqué la mort de près de 7 millions de personnes n’a jamais existé. Fini les messages de prévention, le port du masque dans les lieux clos ou mal aérés ! Aux oubliettes le dépistage massif en cas de fièvre, ou de fortes fatigues ! Sous le tapis les principaux indicateurs de suivi épidémiologique… Pourtant, de nombreuses personnes continuent à être infectées par le coronavirus et, plusieurs mois après, de souffrir de symptômes invalidants. On parle alors de Covid long.
Une enquête de Santé publique France estime qu’environ 2 millions de Français·es (entre 4 % et 5% de la population générale, NDLR) sont déjà concerné·e·s. Or à ce jour, il n’existe à ce jour aucun traitement curatif. Et si une loi a bien été votée en janvier 2022 pour une meilleure reconnaissance de la pathologie, les décrets d’application se font toujours attendre. C’est donc la double peine ! Non seulement les personnes voient leur état physique et mental se détériorer, mais elles ne reçoivent aucune aide financière officielle pour y faire face.
Entretien avec Élise, à l’initiative du collectif départemental « Covid Long 35 »

Covid-Schnelltest
Covid-Schnelltest – Focal FotoSuivre – Ein Schnelltest für Covid. //FLICKR//

ALTER1FO : Bonjour Élise, même si les symptômes du Covid long sont variés et vécus différemment selon les personnes, certains sont-ils plus récurrents que d’autres ?

(Élise) : Parmi les symptômes les plus fréquemment observés, on note les malaises post-effort : vertiges, palpitations, grosses fatigues… Même pour des tâches aussi simples que la marche ! Il m’est arrivé personnellement de devoir rester alité pendant plus d’une journée après une promenade, ou après avoir effectué des tâches ménagères.

On constate également des difficultés respiratoires, et de nombreux problèmes neurologiques, tels que des difficultés de concentration, et des pertes de mémoire. Désormais, nous le savons par expérience, nous sommes contraints d’alterner entre périodes d’activité physique ou intellectuelle et des phases de repos.

Comment diagnostique-t-on le Covid long ? On pense notamment aux personnes qui ont contracté le virus au début de la pandémie sans le savoir alors qu’aucun test n’existait prouvant l’infection.

La reconnaissance est effectivement plus compliquée pour ces personnes-là, et même actuellement, car on ne teste plus systématiquement ! Le Covid long fait référence à l’apparition persistante de symptômes qui affectent significativement la qualité de vie du patient·e et qui perdurent pendant au moins deux mois. Il existe toute une série de tests permettant d’exclure d’autres pathologies (respiratoire, cardiaque…) et qui permet alors de conclure au Covid long.

Quelle est la raison qui vous a poussé à créer le collectif ?

Avec l’aide d’une personne hospitalisée comme moi en hôpital de jour à Pontchaillou, nous avons envisagé la création d’un espace propice à l’échange, à l’écoute et au partage. Le collectif vise à combattre l’isolement en offrant un soutien basé sur le partage de nos différentes expériences. Cette démarche s’est réalisée en collaboration avec les professionnels de santé, médicaux et paramédicaux qui, face à la détresse des patients, se retrouvaient souvent démunis. Notre principal objectif est d’obtenir une reconnaissance accrue de la maladie.

Au commencement de cette aventure, nous n’étions qu’un petit nombre, pas plus de 4 ! Aujourd’hui, nous sommes proches d’un groupe de 80 personnes. Nous collaborons étroitement avec l’association nationale basée à Paris, Après J20. Il était d’ailleurs prévu que notre collectif devienne une délégation régionale, mais compte tenu de l’engagement que cela requiert, nous ne sommes pas encore en mesure d’accepter, car les symptômes du Covid long sont trop handicapants.

Covid Testing. Long walk to freedom
Christopher Michel – Covid Testing. Long walk to freedom

Malgré qu’il touche plus de deux millions d’individus, le Covid long demeure encore largement méconnu. Vous le confirmez ? 

Franchement, j’ai été confronté à plusieurs urgences hospitalières en raison de cette maladie et j’observe que le Covid long n’est pas encore bien connu. Ce constat peut sembler étonnant, mais il est justement à l’origine de notre collectif. Notre mission vise à obtenir une reconnaissance officielle de notre maladie afin d’améliorer considérablement la qualité des soins médicaux, de prévenir toute forme de maltraitance médicale, d’optimiser la coordination des traitements en Bretagne, et surtout d’intensifier les efforts de recherche à son égard. Cette maladie, dont l’impact est extrêmement invalidant, a souvent été mal interprétée, puisqu’on la rangeait dans la catégorie des maladies psychosomatiques.

D’ailleurs, en comparaison avec nos homologues européens, la recherche sur le Covid long en France se révèle presque inexistante. Certaines personnes choisissent de se rendre en Suisse, par exemple, en raison des options thérapeutiques qui y sont offertes. 

Pourtant, une loi visant à la création d’une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques du covid-19 a été promulguée en 2022. Cela va dans le bon sens, non ?

Oui, malheureusement son décret d’application demeure en suspens. Cette situation contribue à maintenir la maladie dans l’ombre, la rendant ainsi moins visible pour le grand public.

Êtes-vous également en contact avec d’autres associations engagées dans la sensibilisation de maladie mal connue en France ?

Nous collaborons étroitement avec l’association « après-J20 » ainsi qu’avec l’organisation « Millions Missing ».

Cette dernière œuvre activement pour la reconnaissance de l’Encéphalomyélite Myalgique en France et pour l’avancement des travaux de recherche dans ce domaine. Il est établi que la moitié des cas de covid long sont également touchés par cette pathologie chronique invalidante. À noter qu’un rassemblement est programmé le 30 septembre à Rennes pour sensibiliser à ces enjeux.

Le rassemblement pour la visibilité de l’EM aura lieu PLACE HOCHE à Rennes à partir de 14h30 le samedi 30 septembre.

Avant de nous quitter, même si on ose imaginer vos difficultés, on a envie de vous demander comment allez vous ?

Malgré mes efforts pour rester positive, il est extrêmement difficile de prévoir ce qui va se passer du jour au lendemain. Impossible de planifier quoique ce soit pour l’instant : des symptômes inédits surgissent sans prévenir. Même en adoptant une hygiène de vie impeccable, notre immunité semble défaillante, nous rendant vulnérables aux moindres infections. On me dit « d’apprendre à vivre avec ». 

Mes deux filles peinent à accepter cette réalité, et me réclament souvent la « maman d’autrefois ». C’est une situation difficile à vivre, car j’étais autrefois très disponible, toujours prête à partager de nombreuses activités avec elles. Aujourd’hui, ces moments privilégiés ne se déroulent plus en ma compagnie. 

Le Covid long altère profondément la qualité de vie. Il nous contraint à faire le deuil de notre vie d’avant. Notre condition se détériore inexorablement, touchant aussi bien les aspects biologiques que sociaux, professionnels et financiers, engendrant une véritable catastrophe (il n’existe pas d’affection de longue durée spécifique pour les symptômes persistants de Covid-19, NDLR) Certaines personnes ont tragiquement mis fin à leurs jours, soulignant ainsi l’urgence de mettre en application les mesures prévues par la loi de 2022.

Merci Élise !

Le collectif Covid long 35 se retrouve chaque mois dans un café de Rennes. Contact : covidlong.breizh@gmail.com

Établissements prenant en charge des patients atteints de covid long en Bretagne
Établissements prenant en charge des patients atteints de covid long en Bretagne

1 commentaire sur “Collectif Covid long 35 : « Nous exigeons une meilleure reconnaissance et prise en charge du Covid long »

  1. sara

    Bravo pour cet article Elise, la voix des millions d’oubliés de l’encéphalomyélite myalgique et du covid long.

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