Dj Netik est sûrement l’un des artistes rennais les plus connus sur la scène nationale et même internationale. Champion du monde DMC (voir le détail plus bas), Netik est un technicien des platines. Mais loin de se cantonner au turntablism, le dj rennais est ouvert à toutes les collaborations et ne reste pas enfermé dans un style. Il souhaite faire évoluer sa musique avant tout, ses qualités techniques n’étant qu’un outil de plus pour proposer des dj sets qui gagnent en dynamisme ou épaissir ses productions.
Il participera au concert de soutien au collectif et label lyonnais Jarring Effects à Rennes le 14 avril (pour en savoir plus sur ce concert, n’hésitez pas à lire l‘interview de Jarring Effects réalisée à l’occasion de ce concert de soutien). Cette soirée en deux temps, proposera tout d’abord un concert à la Cité avec Organik, Uzul vs Oddateee, Kaly Live Dub et Dj Netik donc, et s’achèvera par un after à l’Ubu avec Soufgarde, Tony Oheix, Niveau Zero, Dragongaz et Zôl. On avait interviewé DJ Netik il y a quelques mois dans le cadre de notre focus sur la scène rennaise. Alter1fo vous propose de retrouver plusieurs extraits de cette interview à l’occasion de ce concert du musicien rennais.
Alter1fo : Tu as gagné les championnats du monde DMC (Disco Mix Club), catégorie Battle for supremacy en 2001 et 2002, le championnat d’Europe All Star Beat Down et ITF (International Turntable Federation), catégorie « scratch » en 2002 et surtout tu as remporté le titre de DMC World DJ Champion en 2006. Quand on lit ça, ça impressionne ! Est-ce que le titre de 2006 a changé des choses concernant les propositions de dates, de collaborations ? Ou est-ce que ça a eu le même influence que les titres de 2001-2002 ?
DJ Netik : En 2001 et 2002, après avoir remporté les titres, j’ étais déçu du peu d’ intérêt que ça suscitait… Dans le réseau de la musique en général, les programmateurs, tourneurs etc, ça m’a quand même permis de tourner plus… Mais je m’ attendais à un vrai décollage, ce qui n’ a pas été le cas. En même temps ça m’a aussi permis de réaliser que la discipline du scratch et du turntablism existe à travers un petit milieu et que ça n’intéresse pas forcément les gens qui n’ont pas cette culture.
En 2006, j’ai remporté le titre du 6minutes, c’est la catégorie la plus populaire, c’est un peu comme si c’était en gagnant ce titre qu’on était vraiment « champion du monde… » (rires). C’est le titre le plus connu dans l’esprit des gens, surtout des professionnels de la musique, du coup ça buzze beaucoup plus et personnellement ça a débloqué beaucoup de choses pour moi. C’est un peu comme si j’avais eu mon diplôme. J’ai donc été grave sollicité au niveau des bookings, j’ai trouvé un bon tourneur et enchaîné plein de dates. Une vraie reconnaissance qui m’a fait du bien! Après, ça n’ a pas changé le fait que le scratch n’intéresse pas tout le monde en soirée, surtout quand tu es booké dans des clubs, etc… Ca m’a donc fait beaucoup évoluer et j’ ai décidé de mélanger mon style de technicien dans des dj sets de soirées.
Pour le titre de DMC World Champion en 2006, tu avais vraiment cherché quelque chose de novateur, en travaillant notamment avec Le Jad. Est ce que tu pourrais nous expliquer cela plus en détail ?
En fait, ce qui se passait pour moi, c’est que j’avais vraiment envie de me représenter en compétition à cette époque, et justement pour ce titre prestigieux du 6minutes. Je ne voulais pas arrêter les compétitions sans avoir tenté ça.
Mais les idées et l’inspiration ne venaient pas, je voulais revenir avec du lourd car le niveau était élevé à cette période notamment avec Rafik et les autres allemands. Je cherchais des routines mais je n’arrivais pas à me renouveler… Du coup, j’avais perdu confiance, je ne me sentais plus vraiment à la hauteur et je ne trouvais rien de frais… C’est là que la rencontre avec LeJad est arrivée… Vraiment à pic, j’ ai envie de dire.
Jad de son côté travaillait déjà depuis un moment pour des scratcheurs, notamment Ordoeuvre. On s’est parlé sur internet et j’ai vite vu qu’il savait de quoi il parlait en matière de scratch et de musique. On parlait beaucoup de turntablism et de ce qui se passait en compèt’ … On se parlait régulièrement, il me faisait écouter ses beats, il me demandait ce que j’en pensais, etc… Je lui ai fait part de mon envie de revenir et de mon état d’esprit du moment, du fait que je ne trouvais pas de nouvelles routines et que j’étais frustré. Lui, de son côté avait déjà cette ambition de produire un show de A à Z pour un dj, et il m a proposé de tenter l’expérience avec moi. On a donc décidé de faire un essai, pour voir. Il est venu chez moi avec un beat jungle hard core et une banque son qui est devenue par la suite la routine d’intro de mon show. Au début, on tâtonnait un peu mais les choses ont vite pris forme… Il composait des beats et préparait des banques sons, et moi j’essayais de trouver de bonnes routines avec. On avançait comme ça, main dans la main, lui à la production et aux edits et moi, aux platines.
C’était très intéressant comme manière de travailler, ça me motivait et en plus ça présageait quelque chose d’original : d’une part, le fait d’avoir tout produit par avance, de ne pas utiliser trop de musiques qui existaient déja et d’autre part, le choix de la couleur musicale volontairement hard core et écrasante. J’étais réputé pour ma musicalité et mon style assez funky à l’époque et là, j’avais l’opportunité de surprendre à 100%. On voulait faire un truc étonnant et je pense qu’on a réussi.
Ça a pris 6 mois de travail et j’ ai remporté à la quasi unanimité : 13 voix sur 15, ce qui n’arrive presque jamais aux Dmc…. Je suis très fier de cette victoire et de ce taff et je pense que Jad l’est aussi.
On pourrait opposer le turntablism et sa virtuosité technique au mix-dj. Et pourtant, quand on écoute ce que tu fais, on sent vraiment que la technique est au service de l’efficacité sur le dancefloor. Qu’on n’est pas dans une virtuosité un peu stérile, mais que tout ça nourrit ton envie de faire danser le public. Est ce que c’est quelque chose que tu revendiques ?
En fait, en dehors des compétitions, le turntablism ou le scratch existent sous différentes formes, ça va du scratch pur à la Q.bert, à des voies plus « musicales » comme Kid Koala, au dancefloor à la Birdy Nam Nam ou des shows techniques à la Kentaro… Moi j’ai choisi de disséminer la technique dans des sets dj de soirées. Si je le revendique, je n’en sais rien, mais j’essaie de le développer en tout cas. Sans trop en faire, j’utilise le scratch pour dynamiser mes sets. J’aime bien faire danser les gens : c’est plus amusant que de faire de la démo pure. J’essaie donc de trouver ce point d’équilibre avec la technique dans mon mix.
Tu mixes essentiellement électro, dubstep, drum’n bass. Quels sont les artistes qui t’influencent dans ce domaine ?
Il y en a un tas ! Pour l’électro, j’aime bien le style à la Jack Beats en ce moment, avec toujours le côté vénère saturé, mais aussi des bass lines plus rondes et des mélodies plus riches. En drum’n bass, il y a trop d artistes à citer mais comme ça, de tête je dirais : Camo & Krooked, Sub Focus, Noisia, Sigma, ShockOne, Tantrum desire, Spor… qui tabassent bien en ce moment. En Dubstep, c’est pareil, il y en a trop ! Dans le dubstep, j’aime ce qui groove et aussi les trucs bien gras sans tomber dans le pur hardcore hyper dark, j’aime rarement les sons d’influence ragga ou pur dub. Ça va des vieux tracks de Rusko à Reso, Bar9, 16bits… Je suis un gros fan de Nero, plus récemment Flux Pavillon… Tout ce qui groove ! J’aime quand il y a de la couleur, pas juste des beats lourds et des wobbles lancinantes…
En tout cas, dans tous les styles de musiques électroniques que j’aime, je pense que j’ai ce goût qu’ont en général les djs qui viennent du hip hop ; enfin, je constate souvent ça. Les trucs qui ont un côté boom bap bien lourd qui fait bouger la tête, ce côté gras un peu funky qu’on aime. Et en parlant de ça d’ailleurs, en ce moment les Anglais font un style de son qu’ils ont appelé « Drumstep » , les sons rythmiques viennent des styles drum’n bass et les basses sonnent comme du dubstep, mais c’est le tempo qui change, le tout groove à une vitesse plutot hip hop, genre 90 bpm. Ça, ça me parle, on revient à des tempos de hip hop avec la puissance de la drum’n bass.
Si tu devais citer trois disques sans lesquels tu ne pourrais vivre ?
Aucun ! (rires) Enfin, si je ne devais en garder que 3, ce serait des disques de practice genre super seal… Par contre, je ne pourrais pas vivre sans mon ordi pour faire de la prod’.
Le truc incroyable, quand on regarde toutes les collaborations que tu as pu faire, c’est la diversité des artistes avec lesquels tu as pu travailler. Productions pour des artistes Hip-Hop ou slam, plus drum’n bass avec Pat Panik ou Elisa Do Brasil mais aussi concerts avec Erik Truffaz, tournée avec un groupe de jazz, Electric Barbarians entre 2000 et 2002… Bref, un univers très varié. Pourrais-tu nous en dire un peu plus à propos de ces collaborations ? Qu’est-ce que cela t’a apporté ? Est ce que c’est quelque chose que tu continues de rechercher, cette rencontre des familles musicales ?
Toutes mes collaborations m’ont apporté du kiff et m’ont appris beaucoup. Que ce soit musicalement avec les Jazzmen, ou sur la culture dj avec Pat Panik, c’est toujours intéressant. C’est aussi le fait qu’en tant que turntablist/scratcher, tu peux intégrer la platine dans tout, au même titre qu’un instrument.
En ce moment, je me concentre sur mes prods perso et c’est moi qui invite des artistes… C’est ça qui change un peu par rapport à avant ou c’est moi qui me greffait dans d’autres formations… Mais je reste toujours ouvert à ça, je n’ai pas envie de faire la même chose musicalement toute ma carrière…
Retrouver l’interview intégrale de DJ Netik
Retrouvez l’interview de Jarring Effects à l’occasion de cette soirée de soutien.
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DJ Netik en concert au concert de soutien à Jarring Effects à la Cité le 14 avril avec Organik, Uzul vs Oddateee, Kaly Live Dub – de 19 H00 à 01H00 (10, 00 € en prévente -hors frais de loc- /13,00 € sur place)
After à l’Ubu avec Soufgarde, Tony Oheix, Niveau Zero, Dragongaz et Zô – de 23H00 à 05H00 (10, 00 € en prévente -hors frais de loc-/ 13,00 € sur place)
Myspace de DJ Netik : www.myspace.com/djnetik
Le site de Jarring Effects : http://www.jarringeffects.net/fr/