En pleine semaine de festival Mythos (le festival des arts de la parole de Rennes) et du Forum Libé, le collectif Jarring Effects est sur Rennes avec un concert de soutien. Mais pourquoi un concert de soutien ? Ils ont répondu à nos questions…
Alter1fo : Peux-tu nous rappeler qui vous êtes et nous raconter la genèse de Jarring Effects. Comment en êtes-vous venus à l’idée de monter un label ?
Jarring Effects : Nous sommes un collectif basé à Lyon. Jarring Effects compte 6 salariés sans compter les intermittents et les bénévoles qui gravitent autour de notre structure.
Nous nous occupons d’un label, d’un studio, du festival annuel Riddim Collision et d’une petite agence de booking. Nous défendons beaucoup d’esthétiques musicales avec un gros penchant pour le dub, le hip hop et les musiques hybrides. Nous allons fêter cette année notre centième référence.
Liberté et collaborations artistiques, recherches esthétiques, prises de risques et approche pluridisciplinaire sont les valeurs que le label essaie de développer depuis maintenant quinze ans.
L’aventure a commencé dans le milieu des années 90 sur les pentes de la Croix Rousse à Lyon où quelques groupes répétaient dans un local. Peu à peu un collectif de musiciens et de techniciens s’est constitué et tout ce petit monde a voulu aller plus loin en se structurant au travers d’une association. On a alors commencé par organiser des concerts et des soirées puis on a lancé l’activité label. Jarring Effects a alors vu le jour et le premier maxi d’High Tone « Bot Bud Season » est sorti.
Vous êtes un label ouvert, qui n’a pas peur de l’éclectisme. Quelles sont les influences que vous revendiquez ? Y a-t-il des labels que vous prenez en exemple ?
Notre catalogue est en effet très ouvert en terme d’esthétiques musicales. Outre le dub qui a contribué à la reconnaissance du label, on a aussi une grosse passion pour le hip hop et les musiques électroniques dark. Nos influences vont de Cannibal OX à King Tubby en passant par Sonic Youth et Gangstarr. Des labels comme Roir, XL, Warp, Wordsound, Ipecac, Neurot ou Planet MU sont des structures pour lesquelles on a un profond respect.
Comment choisissez-vous les artistes et les projets que vous décidez de sortir sur Jarring Effects ? Recevez-vous des démos, ou bien est-ce plutôt une histoire de rencontre, ou bien un peu des deux à la fois ?
En fait il y a pas véritablement de Directeur Artistique chez Jarring Effects. Les signatures d’artistes se font de manière collégiale. Du coup, la décision de sortir tel ou tel artiste peut parfois prendre du temps. Pour autant, comme nous avons à peu près tous les mêmes sensibilités musicales, on trouve vite un terrain d’entente.
On reçoit bien sûr beaucoup de démos et nous sommes largement sollicités par de jeunes groupes. Pour autant les signatures via la réception de démos restent marginales, la plupart de nos choix de sorties s’opèrent plutôt via notre réseau, le hasard des rencontres et notre festival Riddim Collision.
Par le passé, vous vous êtes déjà investis dans des actions caritatives. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agissait ?
Depuis ses débuts, Jarring Effects a toujours été engagé. En 2003 nous avons par exemple participé à la manifestation Anti G8 à Annemasse (74) en apportant un soutien technique aux manifestants.
En 2002, l’association grenobloise Drugi Most a établi une coopération entre Jarring Effects et le MIFOC (Comité d’Organisation du Festival Interculturel de Mostar / Bosnie Herzégovine). Nous avons alors publié la compilation « How do you Sleep ? » afin de récolter des fonds pour soutenir les projets mis en place par cette structure. Cette coopération s’est alors concrétisée par l’organisation du premier Festival de musiques en Bosnie-Herzégovine à Mostar, réunissant des groupes de France et d’ex-Yougoslavie. Ce festival s’est déroulé du 03 au 05 octobre 2002.
Vous faites une soirée de soutien à Rennes, pourquoi ? Peux-tu nous parler du line-up pour le 14 avril à Rennes ?
Nous avons décidé d’organiser des concerts de soutien car les finances du collectif sont bien mal en point depuis quelques années. Plusieurs raisons ont conduit à cette situation. Un mode de fonctionnement communautaire ne regardant pas à la dépense, un marché du disque en chute de 50%, des rémunérations issues du numérique inexistantes (une écoute sur Deezer est rémunérée en millième de centimes), des artistes à l’empreinte artistique forte et non consensuelle, difficile à promouvoir en tour (contrats de vente de faibles montants).
Ajoutez à cela des artistes présents sur le disque mais absents sur le Booking en France (donc pas d’effet levier pour promouvoir les nouveaux), des choix basés sur la passion et non sur une rentabilité ferme, une masse salariale en constante augmentation (fin des emplois aidés), sans oublier la perte d’un procès avec un distributeur et des dommages et intérêts à payer. Si bien que tous ces facteurs ont remis en question la capacité du collectif à défendre les cultures émergentes et d’entrevoir un avenir serein.
Comme pour chaque concert de soutien, nous mobilisons bien sûr les groupes du label mais aussi les artistes proches du collectif qui ont été sensibles à notre appel. Pour cette soirée à Rennes, on a donc fait appel aux « locaux » (Organik, DJ Netik), à notre ami normand Tony Oheix, à notre vieux copain Niveau Zero et bien sûr aux artistes du label comme Zôl, Kaly Live Dub, Oddateee & Uzul ou Dragongaz (Interlope). La soirée va se dérouler en deux temps, d’abord à la Cité pour ensuite se terminer à l’UBU. Quant au line up, il est à l’image de nos sensibilités artistiques alliant dub, hip hop, et musiques électroniques.
Peut-on soutenir le Jarring Effects autrement ?
En achetant nos disques bien sûr, en allant voir nos artistes en concerts ou visiter la page de dons que nous avons mis en ligne sur notre site : jarringeffect.net
Enfin, après cette soirée de soutien, quels sont vos projets éventuels en cours ou à venir ? On a notamment entendu parler de la 100ème sortie de Jarring Effects. Tu peux nous en dire plus ?
On a en effet plusieurs gros projets sur le feu. Le troisième album de Picore qui sortira en octobre. Le groupe revient d’ailleurs tout juste de New York où il a mixé son album chez Dälek.
Sinon on prépare notre centième référence qui devrait voir le jour en octobre. C’est un gros chantier puisque l’on souhaite proposer un beau coffret avec beaucoup d’invités, des collaborations inédites, des exclus et des remixes. On vous en dira plus très prochainement. Pour finir, on prépare la treizième édition de notre festival Riddim Collision qui se tiendra du 07 au 15 octobre à Lyon et on continue d’alimenter tous les quinze jours le JFX Dubstore qui est une plateforme de vente en ligne initiés par RFHF, le batteur de High Tone.
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Le site de Jarring Effects : http://www.jarringeffects.net/fr/