Le centre des congrès : coûte que coûte !

Au cours du conseil métropolitain du 27 septembre, la délibération n°4 portait sur le résultat d’exploitation du Centre des Congrès, pour l’année 2017 et sur la prévision du budget d’exploitation pour 2018. Les comptes faisant les bons amis, on s’est dit qu’on allait y jeter un œil.

_______

Matraquage : (Nom masculin) Répétition constante d’un slogan ou d’un message publicitaire.

Entre la presse écrite, la radio, les affiches grands formats et les campagnes de promotions web 2.0, l’exposition de la collection Pinault « tout-le-monde-DEBOUT!-là-bas » qui s’est tenue dans l’antre du centre des congrès a pu compter sur une force de frappe publicitaire de grande envergure. Ouest-France n’a d’ailleurs pas hésité à écrire de nombreux ′publireportages′ sur l’événement allant parfois jusqu’à publier 1 article par jour courant juin. Dernièrement, c’est le chiffre de la fréquentation qui a été maintes fois salué, commenté, retweetté dans les médias locaux. Dans cette immense bouillie d’autosatisfaction, point de place à la critique. Circulez, il n’y a rien à dire!

Dommage. Il aurait été intéressant d’analyser l’état du marché de l’art contemporain tant chéri par les riches industriels. Cette lente privatisation, qui transforme une partie de la création artistique en un produit marchand avec comme seuls critères de valeur la spéculation et le vecteur d’attractivité, n’a pas pour unique raison la philanthropie. Investir dans l’art est bon pour l’image d’un groupe et lucratif en matière d’investissement grâce à de larges avantages fiscaux depuis la loi Aillagon de 2003 sur le mécénat(3). « Promouvoir l’art et la création artistique grâce à des aides publiques est une chose tout à fait concevablePromouvoir un marché extrêmement restreint et non concurrentiel avec des fonds publics pour que leurs quelques bénéficiaires influent ainsi sur les prix, en est une autre.(4) » explique le collectif MetaMorphosis. Rappelons que la maison de vente aux enchères Christie’s a été racheté par le milliardaire rennais en 1998, ce qui lui permet d’avoir des informations stratégiques, de maîtriser les ventes des œuvres qu’il achète mais également les ventes de celles qu’il revend ce qui peut s’apparenter à un délit d’initiés comme l’écrit le Mensuel de Rennes (Numéro Janvier 2018). « A la Bourse, le délit d’initiés est puni. En art, c’est une vertu. » renchérit Harry Bellet du MondeOn regrette, enfin, le manque de curiosité de nos quotidiens sur l’origine de la fortune de l’ancien marchand de bois breton alors qu’un règlement de compte se tenait sur la place publique. Ouvertement, le porte-parole du gouvernement d’Edouard Philippe a accusé François Pinault de n’avoir  « pas payé d’impôts pendant longtemps. »

Mise à jour 09/10/2018 : Cash Investigation s’est penché sur la méthode d’optimisation fiscale du groupe Kering (Gucci, Yves Saint Laurent, Balenciaga…), propriété de la famille Pinault. L’émission décortique les montages financiers mis en place par le numéro deux français du luxe pour éviter de payer des impôts notamment en Italie et en France.

Mais au diable les esprits chagrins ! Devant cette immense joie collective à la limite de l’adoration, nous ne pouvons qu’applaudir et accepter cet état de fait. En même temps, avec un budget de comm’ dédié à l’évènement de 200 000€, il aurait été étonnant que l’exposition soit un échec (NDLR : même si, on l’avoue volontiers, ça nous aurait bien fait marrer ! #mauvaisesprit)

Exposition « Debout ! » : 200.000€ pour rayonner !

Tout ce déballage médiatique ne doit pas éclipser le résultat 2018 de l’excédent brut d’exploitation (EBE) mesurant la participation nette de Rennes Métropole au fonctionnement du Couvent des Jacobins, discuté au cours du conseil métropolitain du 27 septembre. Malgré une augmentation du chiffre d’affaire, le rapport indique que celui-ci reste déficitaire de 732 000€. Les élu·e·s PG-France Insoumise ont renouvelé leur inquiétude et leur profond  désaccord « sur le fait que ces dépenses soient supportées de facto par la collectivité » puisqu’elles « ne sont pas des dépenses liées à l’intérêt général mais à l’exploitation d’une entité aux objectifs à caractère privé. » On se souvient ici des tarifs prohibitifs de la location des salles et de l’auditorium « tellement élevés que les structures locales ou associations  ne peuvent s’offrir la moindre salle de réunion afin d’y organiser leurs événements(1). » Seuls des festivals comme POLITIKOS(2) grassement subventionnés peuvent investir les lieux ou des expos d’art contemporain.

L’avenir est-il plus radieux ? Rien n’est moins sûr… En plus d’une facture des travaux bien alourdie (106 millions d’euros(*) réglés à hauteur de 75% par Rennes Métropole(*)), d’un surcoût de 225 000€ dus à la livraison tardive du bâtiment, la simulation du total cumulé de l’EBE pour les années 2018 à 2025, date de fin de la délégation de service public, donne un trou béant de plus de 4 millions d’euros. « Si malgré les actions et les efforts de Destination Rennes, les résultats budgétaires du Centre des Congrès restent négatifs, il est anormal que la collectivité doive en supporter le coût. » insistent les élu·e·s du PG-France Insoumise. Mais au final, les bons comptes faisant les bons amis et si déficit il y a, c’est toi, plus moi, plus eux, plus toutes celles et tous ceux qui habitent la Métropole qui devront mettre la main à la poche. Et sans déduction fiscale ! Alors, toujours debout ? Là-bas ?

________________________________________

(1) Centre des congrès : adaptons les tarifs pour les associations du territoire

(2) Festival Politikos : ça nous coûte « un pognon de dingue ! »

(3) La défiscalisation a permis aux Galeries Lafayette de créer un nouveau lieu consacré à l’art contemporain à Paris

(4) Art, mécénat, défiscalisation, blanchiment et corruption

___

Le futur centre des congrès déjà sous perfusion budgétaire !

L’art contemporain, une escroquerie qui nous coute cher

Pourquoi le marche de l’art resiste-t-il à la crise?

 

 


1 commentaires sur “Le centre des congrès : coûte que coûte !

  1. Frodon

    Financièrement c’est sociolo-appéresque, ligne j’féc’quej’veuxaveclathunedezotres, mais politiquement c’est pô grave, réservoir de votes en cours de remplissage dans les piscines de la ville via l’offre Burkini

Laisser un commentaire

* Champs obligatoires