Tiercé gagnant à l’Antipode MJC : BRNS, La Terre Tremble !!!, Peter Kernel & Their Wicked Orchestra

En ces premiers jours refroidis de novembre, l’Antipode MJC a décidé de nous réchauffer l’âme et les sens en nous proposant non pas un, mais trois chouettes groupes le même soir. Amoureux de concerts donnés avec intégrité et intensité, fervents amateurs de bifurcations soniques et de mélodies addictives, ne manquez pas Peter Kernel & Their Wicked Orchestra, La Terre Tremble !!! et BRNS ce vendredi 10 novembre. On vous promet d’ores et déjà une soirée de haute qualité. Présentation.

Peter Kernel & their Wicked Orchestra

Le retour sur Rennes des épatants Peter Kernel nous met déjà les artères en ébullition, d’autant que le duo/couple suisso-canadien (comme quoi tout arrive) composé d’Aris Bassetti (guitare, voix, design graphique) et de Barbara Lehnhoff (basse, voix, réalisatrice des clips et également Camilla Sparksss en projet electro solo) revient dans une formule particulièrement étonnante et excitante : en partageant la scène avec le Wicked Orchestra.

Nous étions complétement passés à côté (comme beaucoup) du premier album du duo, How To Perform A Funeral, sorti en 2008 sur leur propre label. Par contre, sa seconde galette, White Death & Black Heart sortie cette fois chez African Tape a fait (comme beaucoup) partie de nos disques favoris de 2011 et continue de revenir régulièrement sur nos platines. Non seulement, l’album arborait une superbe pochette ambiguë à tête de chat, mais surtout contenait douze pépites d’art-punk abrasif et irrésistible, dont on pensait qu’Unwound ou les Pixies avaient jeté la formule au fond d’un lac. A l’époque déjà, nous avions pu constater de visu la valeur du groupe sur scène, lors de la mémorable soirée d’anniversaire Kfuel au Jardin Moderne en avril 2012. Accompagné d’un batteur, le couple nous avait fait une très belle démonstration de punk-rock simple, direct et irrésistible et avait livré un set fougueux,  sexy, entre private jokes sur leurs origines, chamailleries et french-kiss.

Début 2015, le groupe nous a une fois de plus soufflés avec son troisième album : Thrill Addict, sorti cette fois chez On The Camper Records. En plus de confirmer haut la main les qualités hors pair de composition du duo, le disque soufflait le chaud et le froid avec une malice irrésistible. Entre rythmiques chauffées à blanc, riffs épurés mais élégants et mélancolie profonde, l’album ne choisissait pas et se payait l’exploit d’être à la fois limpide, audacieux et profondément touchant. Le concert qu’ils ont donné en décembre dernier dans un Bar’Hic en ébullition et ruisselant de sueur, confirmant là encore les talents des musiciens pour successivement vous briser le cœur et vous électrifier les sens. Simplicité, présence désarmante, fougue, malice, prestation intense et ping pong scénique blagueur du couple : Peter Kernel avait fini de nous coller le tournis.

On risque d’en être une nouvelle fois pour nos frais à l’Antipode ce vendredi soir (et c’est tant mieux !), car le duo, avant de sortir son nouvel album en mars 2018, a décidé de revisiter ses anciens titres en acoustique -mais aussi de présenter les nouveaux-, accompagné par quatre musiciens (piano, harpe, violon, violoncelle et harmonium). D’où Peter Kernel & Their Wicked Orchestra. Et autant dire que les premières versions qu’on en a entendues nous ont bien collé les poils. On ne s’avance donc pas trop en se (vous) promettant une belle claque.

BRNS

Dans la même soirée, on retrouvera également un groupe qui nous a chaque fois emballés lors de ses précédentes venues sur la scène de l’Antipode (en 2012, on croit, avec Breton et l’année suivante dans la programmation des Embellies ; on les aura -pour notre part- loupés en 2014 – comme quoi, c’est vraiment une histoire d’amour avec l’Antipode !) : entendez le groupe belge de BRNS (prononcez Brains). Avec deux sets particulièrement bien troussés, les quatre garçons (alors) avaient fait montre d’une belle puissance scénique, et de tout autant d’idées fertiles pour les oreilles.

Véritable tornade pop, les quatre musiciens ont en effet un véritable don pour les morceaux catchy qui vous attrapent l’oreille et la secouent dans une multitude de directions. Après Wounded (long maxi de 7 titres ou mini album ?) sorti au printemps 2013, truffé de rythmiques un peu tribales, de ruptures inventives ou autres chœurs habités, leur véritable premier album, Patine (2014, PIAS) a bien enfoncé le clou : à coups de petites trouvailles soniques, de bidouille pop et de débrouillardise indie, BRNS s’y révélait table étoilée pour la confection de mille-feuilles sonores. La sortie de leur nouvel album cette année, l’-apparemment- plus direct Sugar High (chez Yotanka family cette fois-ci) vient encore confirmer tout le bien qu’on pensait du quatuor. Sous la houlette de Tommy Desmedt (Girls in Hawaii), le groupe a pris le temps de se poser. Et tout en gardant sa marque de fabrique -une pop accidentée qui ne renie jamais la mélodie- continue de chercher, de creuser son sillon avec une belle opiniâtreté. On est donc d’autant plus curieux d’entendre de quelle manière les Bruxellois vont transposer ces nouveaux titres en live.

Car les BRNS sont aussi un sacré groupe de scène. Lors de leur seconde venue à Rennes, les quatre garçons (Timothée Philippe derrière les fûts qui assure aussi le chant lead, Antoine Meersseman, aux claviers ou à la basse qui chante également, Diego Leyder à la guitare et aux chœurs et César Laloux, aux percussions, claviers, chœurs, clochettes colorées, aujourd’hui remplacé en live par Lucie Marsaud -qu’on a vu aux côtés d’Arch Woodman-) nous avaient particulièrement bluffés, n’hésitant pas à entamer leur set avec des arrangements plus bruitistes (pédales qui triturent la guitare d’effets, cordes grattées, stridences qui répondent aux accords plaqués sur le clavier…), montrant bien vite préférer les aspérités lo-fi et l’énergie organique à la pop lisse.

Des petits arrangements, de ci, de là, des sursauts rythmiques inattendus et surtout un batteur aussi charismatique qu’énergique, champion ès coups de roulements et de grosse caisse massive : la pop des Belges était éclatée à grands coups de tom basse martelé. Pourtant, après une première partie rêche, et cela, sans rien perdre de son énergie débridée, le groupe s’était fait plus mélodique sur la fin du set. Ou plus exactement ne dissimulait plus ses mille-feuilles sonores sous des stridulations électriques flirtant avec de légères dissonances. On y avait gagné une perception des arrangements affinée, de ces petites touches qui font la différence (des cloches à point nommé, de petites notes aiguës à la guitare ici, un ajout de percussions par là) et la conviction que BRNS, sans jamais renier harmonie et mélodie, éclate sa pop avec un talent certain.

La Terre Tremble !!!

Troisième raison impérative de vous rendre à cette soirée : les épatants Renno-Clermontois de La Terre Tremble !!! viendront défendre sur scène leur excellent nouvel album Fauxbourdon. S’il y a bien une qualité que l’on peut associer au trio, c’est celle de réussir à être à la fois totalement cohérent et perpétuellement en remise en cause. Ce qui n’est pas pour nous déplaire. Depuis leur premier album en 2007, Julien Chevalier, Benoît Lauby et Paul Loiseau ne cessent en effet d’explorer la matière sonore avec une réjouissante obstination. On ne boude pas l’idée d’aller ré-entendre leur tout nouveau set qu’on a pu découvrir au printemps.

Nous les avions découverts en 2009 juste avant la sortie de leur second disque Travail. On avait rencontré le trio en 2010 pour un premier focus sur la scène rennaise [là]. On y avait découvert, plutôt emballé, un groupe qui s’interrogeait sur la notion d’originalité en musique, sur l’illusion de créer du neuf ou sur la nécessité parfois de passer par des cadres qui se révèlent libérateurs. Les mêmes gars qui n’hésitaient pas à poser avec saucisse, côtelette ou cuisse de poulet en guise d’instrument pour une photo de presse. On les avait retrouvé ensuite en 2013 pour les interroger longuement sur leur excellent troisième album Salvage Blues (Murailles Music). Plus fluide, mais tout aussi accidenté que les précédents, cet album faisait montre d’une éclatante réussite. On était déjà très fan de cette musique qui peut tout autant jouer sur la répétition hypnotisante que sur des virages inattendus qui, sans prévenir, catapultent les morceaux dans des directions latéralement différentes. Mais avec ce nouvel album, on a eu l’impression que la musique de La Terre Tremble !!! avait encore gagné en épaisseur. Que cette musique pourtant déjà tout en relief, avait trouvé un moyen, non pas d’estomper ses contours, mais plutôt de les souligner. Et y avait ainsi gagné en fluidité.

Et voilà que les lascars sont revenus avec Fauxbourdon, sorti le 3 mars à nouveau chez Murailles Music, qui nous a donné la nette impression que le groupe avait, de nouveau, franchi une étape avec cette quatrième galette. D’apparence plus apaisé, le disque se révèle vite d’une richesse assez stupéfiante. Si le groupe n’a rien perdu de sa délicate étrangeté, il brasse avec une finesse remarquable les registres les plus variés sans jamais que l’on ne décroche du fil d’Ariane (tortueux) qu’il nous invite à suivre dans ce splendide labyrinthe. Et si nous avions maintes fois apprécié les qualités scéniques du trio, nous avons été particulièrement bluffé par la facture de leur nouveau live. Vu la subtile complexité de leur quatrième album tant sur la qualité d’écriture que sur la finesse sonore, le passage au live était un vrai défi. Et le résultat est époustouflant. Si la batterie garde sa place au cœur du dispositif, les guitares sont désormais en retrait et les synthés prennent la part du lion sans qu’ils n’envahissent pour autant tout l’espace sonore. On est fasciné par cette capacité à remettre aussi profondément en question ses habitudes de scène. L’énergie du groupe reste palpable mais elle est juste domptée ce qu’il faut pour qu’elle ne prenne pas le dessus. Les morceaux y gagnent une profusion de détails, une finesse du jeu rythmique et d’utilisation des synthés, le plus chouette restant la qualité de l’interprétation des harmonies vocales. Cette soirée à l’Antipode risque donc bel et bien de jouer tiercé gagnant.


L’Antipode MJC présente La Terre Tremble !!!, BRNS et Peter Kernel & their Wicked Orchestra en concert le vendredi 10 novembre à 20h à l’Antipode MJC (2, rue André Trasbot – Rennes).

Tarifs : Sortir ! : 5 € / Membres ADMIT : 14€ / Prévente : 16€ / Sur place : 19€

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