Ce mois d’avril rennais commence très fort avec notamment une soirée hautement explosive organisée par les experts artificiers de l’association Kfuel vendredi 7 avril à l’Elaboratoire. Y seront réunis les flamboyants barjots de Terminal Cheesecake, le torride duo La Jungle et le rugissant Monstromery pour une triplette de concerts qui a tout pour rester dans les annales.
Mais quelle bonne idée a eu l’association Kfuel d’organiser le retour sur Rennes des mythiques Terminal Cheesecake à l’Elaboratoire. L’esprit punk et bricolo du lieu devrait parfaitement convenir à la belle sauvagerie de ces grands malades qui prouvent, une fois de plus, que les Anglais sont toujours leaders mondiaux en matière de dingueries distinguées.
Groupe inconnu de la plupart mais mythique pour une poignée d’amateurs de musique underground de chez underground, les Anglais azimutés (pléonasme) de Terminal Cheesecake auront été à la fin des années 80 parmi les pionniers d’un mélange détonnant de noise-rock, d’indus et de musique électronique hallucinogène qui allait déferler sur la perfide Albion. Composé principalement de Gary Boniface au chant, de Russell Smith à la guitare (ex membre d’A.R. Kane et de /M/A/R/R/S, oui ceux de Pump Up The Volume!), Gordon Watson à la seconde guitare et Mick Parkin et John Jobbagy à la section rythmique. Le groupe va se faire remarquer grâce à ses fabuleuses pochettes et ses prestations scéniques sulfureuses. Moins connu que Skullflower ou Godflesh, la bande va poursuivre son chemin en signant après deux albums sur Pathological, l’excellent défunt label de Kevin Martin (God, Techno Animal, The Bug) avant de partir vers des terres de plus en plus electro et dub. Ils se séparent en 1995 mais décident à la surprise générale de se reformer en 2013 avec Neil Francis (de Gnod) remplaçant Boniface derrière le micro et en recrutant Dave Cochrane (God, Ice, The Bug, Jesu, Head Of David… et oui rien que ça) à la basse. Leur prestation en avril 2014 à la 10ème édition du Sonic Protest (festival dévolu « aux défricheurs de musiques et autres explorateurs du sonore » proposant 25 soirées dans 15 villes dont Bruxelles et Rotterdam) avait mis pas mal de monde à genoux avec une noise psychédélique dévastatrice. Leur concert d’octobre 2014 au Jardin Moderne à l’occasion des 20 ans de l’asso Kfuel fut un hallucinant et mémorable bordel; un grand feu d’artifice noisy, bordélique et bigarré tenu de main de maître par une section rythmique ahurissante et mené par un frontman aussi improbable qu’halluciné (imaginez un zébulon filiforme, sous acides depuis 1984, avec des lunettes noires, un sombrero arc-en-ciel et la coupe de Mireille Mathieu).
Autant dire que le cadre de l’Elaboratoire fournira l’écrin parfait pour les délires de la bande et que l’occasion de voir ou revoir ce jouissif boxon est totalement inloupable sans mot du médecin.
Autre formation qui risque bien de vous coller une fièvre de tous les diables, le groupe La Jungle vient lui de Belgique. Ce duo guitare/batterie arrive avec deux albums de transe noisy redoutablement hypnotique (La Jungle et II) et une réputation scénique de feu. Leur musique obsessive, épurée et directe se déploie autour de rythmes kraut à souhait. Ces longues spirales obstinées et enfiévrées devraient autant vous faire tourner la tête qu’enflammer vos guiboles. Préparez donc vos petits corps à jouer aux derviches noisy jusqu’à épuisement et extase.
Enfin vous pourrez également retrouver ce soir-là une autre très belle bête. Monstromery a d’abord été le projet solo de Benjamin Ledauphin (du groupe Montgomery). Nous l’avions interviewé en 2014, au tout début du projet, et il nous avait déclaré y chercher « Quelque chose de plus radical et instinctif. C’est une continuité de Montgomery au final. La suite.« Nous avions pu apprécier l’aventure sur scène lors de la soirée inaugurale des Embellies 2014 au 6par4 et lors de la même édition pour la carte blanche laissée à Lætitia Shériff au Jardin Moderne.
Nous avions retrouvé la créature pour l’édition 2016 des Embellies. Une seconde tête lui avait poussé avec la présence de Yoann Buffeteau à la batterie et aux claviers (Benjamin jouant de la guitare et chantant). Ils avaient jailli lors de concerts sauvages dont on ne connaissait ni le lieu, ni la date à l’avance et nous avaient épatés avec des sets fiévreux et alambiqués.
Le premier album du duo Monstromery est finalement sorti à la fin de l’année 2016 chez Patchrock / Phantomatik / L’Autre Distribution. Il a été enregistré et mixé par Thomas Poli. Ce n’est sûrement pas un hasard si sa pochette n’est pas sans évoquer quelques Bandes Originales de film asiatiques étranges et fantastiques. On voyage beaucoup en effet à l’écoute de cette odyssée houleuse parsemée de rythmiques telluriques, de riffs ténébreux et de synthés aquatiques. Un voyage musical qui, après un départ enjôleur, nous plonge vers un fracas apocalyptique et survolté avant de progressivement nous ramener vers des rivages plus apaisés où les voix se font progressivement moins monstrueuses. Une sacrée ballade, riche en rebondissements, en aplombs vertigineux et en abysses spectaculaires qu’on avait découvert en live à la Chapelle de l’Hôtel Dieu en février dernier grâce à Des Pies Chicaillent. On peut donc vous dire avec certitude que cette odyssée à deux vaut tout particulièrement le détour.
Vendredi 7 avril 2017 – L’Elabo, 48 Bd Villebois Mareuil, Rennes (à côté du robot) – 21h – 8 euros
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