Le barnum est monté devant l’entrée du Centre Hospitalier Guillaume-Régnier et les banderoles revendicatives sont accrochées aux grilles. Depuis le 07 novembre, une partie des salarié.e.s du CHGR a entamé un mouvement de grève, à l’initiative du syndicat Sud-Santé. Ils⋅elles dénoncent la dégradation des conditions d’accueil et de prise en charge des patient⋅e⋅s. « Les contraintes budgétaires, leitmotiv de tous les services publics, depuis des années, ont détruit tout ce qui faisait la force de cet établissement : le travail en équipe, la solidarité, le respect. Tout ceci a volé en éclat, au profit de la rentabilité […] Les conditions de travail n’ont jamais été aussi déplorable : sous-effectifs, rappels à domicile, changement de planning de dernières minutes, pressions de l’encadrement pour revenir au travail… » peut-on lire sur la page du syndicat.
L’Hôpital psychiatrique est aujourd’hui le parent (très) pauvre de la santé et Rennes ne fait pas figure d’exception. A Cadillac, à Bourges, à Amiens ou à Allonnes pour ne citer que ces villes, des mouvements identiques du personnel ont récemment eu lieu ! A l’heure des comptes d’apothicaire dictés par une politique d’austérité, les choix s’orientent généralement vers une diminution des moyens (fermeture de lits, suppression de postes…) Toujours faire plus avec moins !
Répétons-le, l’hôpital ne peut se gérer comme une entreprise ou une société de services. Pourtant, notre système pourri actuel arrive à nous faire accepter l’idée selon laquelle ″faire des économies sur le dos des plus vulnérables″ serait totalement implicite. Les conséquences sont malheureusement désastreuses et désorganisent les services pour ne pas dire les asphyxient. Pour preuve, un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté publié l’année dernière observe une régression dangereuse en matière de soins dans les unités psychiatriques !
Les salarié.e.s du CHGR se battent donc pour pouvoir prodiguer des soins de qualité et ainsi recréer « un lieu de travail sécurisé. » C’était aussi une des revendications mise en avant lors de la grève des urgences du CHU de Pontchaillou : des effectifs et des lits supplémentaires. Ni plus, ni moins ! (relire notre article ici).
A Rennes, cette nouvelle grève s’ajoute à la longue liste vertigineuse des actions déjà menées depuis plusieurs années pour alerter sur la situation (voir ci dessous). Mais y a-t-il un pilote dans l’hôpital ?
- En 2008, les syndicats dénoncent déjà les conditions de plus en plus difficile d’accueil des patients. Des exemples sont donnés : 30 patients pour 25 lits le 27 janvier, des admissions retardées ou même refusées faute de place ;
- En février 2010, une grosse mobilisation se tient pour manifester contre l’idée de la Direction de créer des emplois en les finançant par des baisses de salaires sur l’ensemble des salariés ;
- En mars 2010, l’intersyndicale SUD, CGT, CFDT appelle les salarié.e.s du CHGR à se rassembler à l’occasion du Comité technique d’établissement ;
- En 2012, Nathalie Appéré, alors adjointe au maire de Rennes et présidente du Conseil de surveillance du CHGR dénonce les « conditions d’accueil inacceptables au centre hospitalier Guillaume-Régnier » ;
- En avril 2014, une nouvelle mobilisation se tient contre les mesures d’austérité ;
- En Mai 2014, plus de 300 salarié.e.s s’invitent au conseil de surveillance du CHGR pour protester contre le plan de restructuration de l’établissement ; « Il n’y a pas de soins sans soignants, il n’y a pas de bientraitance des usagers sans bientraitance du personnel » déclare alors à l’époque Mme Charlotte Marchandise-Franquet, maire adjointe à la ville de Rennes ;
- En juin 2014, une centaine de salarié.e.s envahissent l’Agence Régionale de Santé pour s’opposer aux mesures budgétaires ;
- En octobre 2014, la CFDT en appelle au préfet, vu l’impossibilité de dialogue social, pour trouver une issue au conflit ;
- En novembre 2014, plus de 400 grévistes envahissent de nouveau le Conseil de Surveillance pour exiger le retrait des mesures d’économies publiées en été par le directeur(e) ;
- En Juillet 2015, la chambre régionale des comptes pointe du doigt l’état du patrimoine du centre hospitalier qui pose un réel problème de « sécurité » ;
- En 2015, l’intersyndicale appelle à la grève et à un rassemblement des salarié.e.s pour s’opposer aux mesures d’économies ;
- En novembre 2015, première journée d’action avec la mise en place d’un barrage filtrant pour dénoncer la dégradation des conditions de soins ;
- En 2016, la loi Hôpital Patient Santé Territoire, dite loi Bachelot, introduit les appels à projet mettant en concurrence des établissements de santé publics ou privés ainsi que ceux du médico-social et permettant – en douce – de privatiser des secteurs entiers du service public, selon Sud-Sante ;
- En juin 2017, nouvelle mobilisation des agents de l’hôpital Guillaume Régnier devant la mairie.
Dès ce lundi matin, les salarié.e.s réinstallent leur barnum pour la 3ième semaine consécutive de grève. Des AG auront lieu tous les jours afin de voir quelle suite donner au mouvement.
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