[Route du Rock 2024] – Ca commence aujourd’hui !

Comme toujours, les articles avant, après et pendant la Route du Rock sont écrits à trois mains par Yann, Mr B. et Isa

La Route du Rock – Crédit Photo Nicolas Joubard

Après l’apéritif folk à la Nouvelle Vague hier, la Route du Rock commence véritablement ce jeudi 15 août, avec un programme particulièrement alléchant. Sur le papier, ça respire d’ores et déjà la classe et la sueur. Revue en détail de la programmation au Fort St Père jusqu’au (quasi) bout de la nuit.

 

Enola, hargne australienne

Enola – Photo : Ian Laidlow

Sur la scène des Remparts, en ouverture de la journée, vous pourrez découvrir Enola. Derrière ce prénom solo se cache en réalité le projet de Ruby Marshall (chant /composition) entre guitares post punk et shoegaze qui pourrait bien faire carton plein.

Auparavant en solo sous le nom d’Enola Gay, Ruby Marshall, marqué.e par les performances live de Shame ou Iddles a décidé d’étoffer le projet en s’adjoignant les qualités du guitariste Josh Pendergrast, de la bassiste Maya Alexandra et du batteur James Tyrrell. Le projet, devenu moins electro, mais davantage grunge, post-punk et shoegaze a donc changé de nom. Avec une poignée de singles (It’s not love en mai, Strange Comfort et Metal Body en 2022) et un ep (All is forgiven en 2022) dans sa besace, l’artiste venu.e de Naarm/Melbourne, particulièrement sensible au vol des territoires autochtones, chante avec une urgence contenue dans la voix qui si on en croit ces quelques enregistrements, ne peine pas à faire mouche.

Entre hargne et déchirements, sa présence scénique comme celle de ses comparses (si l’on en croit les échos qu’on a pu lire), devraient lancer le festival sur les chapeaux de roues au Fort St Père. C’est en tout cas tout le mal qu’on leur/se souhaite.

Enola, scène des Remparts – 18h30

Kae Tempest, le flow sous les étoiles

Kae Tempest – Photo Presse DR

On poursuivra avec Kae Tempest, qui, on ne vous le cache pas, est l’une des raisons pour laquelle on se précipitera au Fort ce jeudi 15 août. Certes, on l’a déjà vu.e sur scène. Mais justement. Qui n’a pas pris les déflagrations poétiques de son flow directement en plein cœur aux TransMusicales en 2014 ou plus récemment sur la tournée accompagnant la sortie de son quatrième album studio The line is a curve (2022) n’imagine pas la tornade de vulnérabilité inébranlable qu’il.elle risque de se prendre direct entre les côtes.

Enfant prodige venu.e d’un quartier bien pourri de Londres, poète.sse (on compte déjà 6 recueils à son actif, dont l’un a déjà reçu le prestigieux prix Ted Hugues outre Manche), figure du spoken word anglo-saxon, rappeur.euse, slameur.euse, romancièr.e (The Bricks that built the houses, 2016 –Ecoute la ville tomber), dramaturge, musicien.ne, Kae Tempest est depuis toujours multiple, tout.e autant nourri.e de Beckett que de hip hop US, de mythologie grecque que du Wu Tang, de Yeats que de Tupac ou Tirésias.

Après les trois missiles à déflagrations multiples The book of traps and lessons (2O19), Let them eat chaos (2O16) et Everybody Down (2014), dont les fulgurances poétiques âpres et douces en même temps, nous ont tour à tour mis chaos, l’artiste non binaire a sorti The line is a curve une nouvelle fois aidé.e des fidèles Dan Carey et Rick Rubin. Des sonorités différentes (synthés dépouillés et minimalistes ici, sons électroniques qui ondulent et groovent là, cuivres lointains, guitare acoustique, batterie et basse plus loin), un album ouvert au partage et aux collaborations (Kevin Abstract de Brockhampton, Grian Chatten de Fontaines D.C., Lianne La Havas, Confucius MC), qui traite d’isolement et d’anxiété mais apparaît définitivement plus apaisé et lumineux. En même temps chaud et intime. Intègre et ouvert. Puissant et fragile. Et que le flow précis de Kae, dans un souffle continu, sans silence, envoie direct en plein cœurs. Un concert à ne pas manquer. Définitivement.

Kae Tempest, Scène du Fort – 19h20

Nation of Language parle synth-pop

Nation of Language – Photo : Shervin Lainez

On traversera ensuite l’Atlantique pour un trio fan de synth pop, Nation of Language. La scène des Remparts rassemblera ainsi Ian Richard Devaney (chant lead, synthés), Aidan Noell (synthés, choeurs) et Alex MacKay (basse), tous trois adeptes de sonorités synthétiques version eighties de la force. Notamment dans les effets qui accompagnent la voix de son chanteur Ian Devaney, froide et romantique telle celle de la cold wave versant Marc Seberg, Orchestral Manoeuvre in the Dark (dont le single Electricity a servi de point de départ incandescent à l’aventure Nation Of Language), les premiers Simple Minds ou Depeche Mode.

En trois albums Introduction, Presence (auto-produit, 2020 -la légende raconte que l’habituelle liste de mariage de Devaney et Noell a été remplacée par un financement participatif à l’enregistrement de l’album), A Way Forward (PIAS, 2021) puis Strange Disciple (PIAS, 2023), le trio a su imposer sa marque faite de rythmiques mid-tempo rêches comme des coups de cravache électrique, de danse mélancolique, de pop romantique et d’arrangements synthétiques de plus en plus minimalistes qui devraient faire doucement danser le Fort.

Nation of Language, scène des Remparts – 20h25

Slowdive, madeleine shoegaze

On retrouvera ensuite une madeleine nineties sur la scène du Fort. Figure du début des années 90 (qui avait pourtant peiné à s’attirer à l’époque de ses sorties, la reconnaissance d’une grande frange de la critique musicale – mais, les années passant, nombre d’artistes ont clamé l’influence qu’avaient pu avoir les compositions de Slowdive sur leurs propres univers), Slowdive a su revenir en force, ou plutôt avec la délicatesse qu’on lui connait en 2014.

D’abord en live, avec un retour sur scène sacrément gagnant (leur prestation à la Route du Rock avait été impeccable avant l’entrée en scène de Portishead). Puis avec la sortie de deux nouveaux albums, longtemps après ses trois premiers longs formats parus entre 1991 et 1995 (Just for a Day puis Souvlaki produit par le sieur Eno en personne et enfin Pygmalion), Slowdive en 2017 puis Everything is alive en 2023, tous deux plus qu’honorables.

Avec son shoegaze délicat et mélodique, la bande de Neil Halstead aime noyer ses mélodies dans des vagues de reverb, tout en soignant toujours le travail des textures, les harmonies limpides et les voix aériennes. Leur prestation sur la scène du Fort il y a dix ans, nous avait laissé fort belle impression. Nul doute que cette année encore, le sourire lumineux de Rachel Goswell l’éclairera à nouveau dans le crépuscule tombant sur le Fort.

Slowdive, Scène du Fort – 21h20

The Kills ressuscités ?

The Kills – Photo : Myles Hendrik

Oui, La Route du Rock aime The Kills (et peut être réciproquement) puisque ce ne sera pas moins que la quatrième venue du duo composé d’Alison Mosshart aka VV et Jamie Hince aka Hotel sur la scène du Fort. Si la dernière fois, en 2011, c’était sous des trombes d’eau, on s’en souvient, le duo, qui a bien souvent occupé la scène médiatique pour autre chose que sa musique, avait réussi à nous faire oublier l’eau ruisselant sur (voire sous) nos ponchos.

Après cinq albums qui avaient su trouver un large public, Keep On Your Mean Side (2003), No Wow (2005), Midnight Boom (2008), Blood Pressures (2011), puis Ash & Ice (2016) en mêlant blues crasseux, rock garage et énergie punk en retenue et en imposant un style à base de compos lo-fi, d’une guitare aux riffs lourds et poisseux, et d’une boîte à rythmes minimaliste, le duo n’avait pas donné de nouvelles discographiques pendant 7 ans… jusqu’à l’an dernier.

Avec la sortie de God Games à l’automne, le duo, flamboyant certes, mais qui par le passé avait pu parfois tomber dans une certaine facilité, se montre bien plus inspiré qu’on aurait pu le craindre. Avec la production de Paul Epworth au goût du jour, qui arrive à trouver un équilibre entre rugosité et appétences plus variées (chœurs gospel, accents trip hop, balade quasi piano voix), en 12 titres, le duo parvient à se réinventer et ranime l’envie de découvrir les effets de cette partielle mue en live.

The Kills, Scène du Fort – 23h00

Backxwash, émerger de la noirceur

Backxwash – Photo : Mechant Vaporwave

On changera de style mais toujours la hargne chevillée au corps avec la canado-zambienne Backxwash qui ramone profond du fond de la gorge avec son rap percutant à l’extrême qui devrait bien vite mettre tout le monde d’accord devant la scène des Remparts après les Kills.

Ashanti Mutinta, de son vrai nom, aime les productions uppercut qui collent la glotte loin dans le larynx, émergeant, jaillissant même, de stridences métal, indus et horrorcore. Avec des albums de haute volée, notamment God Has Nothing to Do With This Leave Him Out Of It qui a obtenu le prix Polaris en 2020, pour lequel son trap initial se teintait sérieusement d’indus – mais pas que, ce serait réducteur- premier volet d’une trilogie poursuivie avec I Lie Here Buried With My Rings And My Dresses (2021), album de souffrance queer et de dépression aussi envoûtant que cathartique, et qui se clôt avec le dernier mouvement en date, His Happiness Shall Come First Even Though We Are Suffering (2022) élargissant encore une fois sa palette musicale, l’artiste installée à Montréal exprimait sa douleur de manière directe et viscérale.

Son plus récent single, Wake up, sorti en avril dernier, passant de notes de piano/batterie aux accents jazz, plongées dans un magma indus à un chœur soul aérien sur lequel son flow toujours impérial touche juste prouve que Backxwash ne s’interdit rien. Et c’est tant mieux. Ca pourrait être une des très grosses claques de cette Route du Rock. Du moins pour nous.

Backxwash, Scène des Remparts – 00h15

Soulwax, dancefloor belge

Si on croit bien en un retour gagnant pour danser jusqu’au bout de la nuit, c’est bien celui de Soulwax. En 2017, le groupe fondé par les frères Stephen et David Dewaele avait retourné tout le Fort (d’ailleurs si on est complètement honnête, les deux frangins sont aussi venus à la Route du Rock en avec leur autre projet 2 many djs, peinant cela dit à nous convaincre quasi 20 ans après le set qui avait mis le feu aux TransMusicales) et promettent un retour en fanfare (même sans sortie récente d’album sur lequel s’appuyer).

Sur ce live, a priori, Soulwax propose à nouveau un gros dispositif scénique, tout en claviers, tables de mixages analogiques, batteries et spots lumineux, revisitant d’anciens morceaux et en dévoilant quelques nouveaux titres.

Scénographie au cordeau pour une efficacité redoutable, si l’on en croit les quelques images qu’on a pu glaner ça et là, fort à parier que le show des Belges devrait propulser le Fort la tête dans les étoiles.

Soulwax, Scène du Fort – 1h10

Let’s Dance : after jusqu’au bout de la nuit

Si cette année, la Route du Rock n’aura pas eu l’autorisation de continuer de proposer ses afters dansants dans les douves ainsi que l’expliquait François Floret à Ouest France, la programmation continue de faire la part belle aux fins de soirée dansantes et festives. L’after du jeudi verra donc le co-fondateur du Made Festival Jabba 2.3 en dj set à quatre mains avec la nantaise Mystery Kid pour une sélection entre dark disco, indie dance et new wave (on cite) qui devrait emmener les plus résistants jusqu’aux premières lueurs.

 

Retrouvez tous nos articles avant, pendant et après la Route du Rock 2024 ici

 


La Route du Rock Collection Eté aura lieu du 14 au 17 août 2024 à St Malo et au Fort de St Père

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