Pop is not dead, clament haut et fort les corsaires de la Route du Rock. La preuve en est cette année encore avec trois générations de popeux qui risquent bien de retourner le Fort st Père. Et même d’y tourner un clip ! Présentation.
Honneur aux anciens, on commence par Spiritualized et leurs 7 albums de pop cabossée un peu psychée au compteur. Formé en 1990 sur les cendres encore fumantes de Spacemen3, Spiritualized est surtout le projet de Jason Pierce, compositeur, musicien et chanteur. En 22 ans, bien sûr, le line-up du groupe anglais a souvent changé mais son leader, contre vents et marées, continue de mener la barque. Contre vents et marées, parce que l’homme dont on murmure à demi-mots les excès passés, a bien failli ne pas revoir le rivage. Pneumonie et maladie du foie l’auraient par deux fois envoyé au tapis. Peu importe, l’homme s’est relevé, toujours. Et si, récemment encore, il suivait une chimiothérapie expérimentale alors qu’il enregistrait son denier opus Sweet Heart Sweet Light (2012), Jason Pierce revient pourtant musicalement à sa meilleure forme depuis des lustres. Ou tout au moins sa meilleure forme depuis 1997. C’est en effet de cette époque que date Ladies and Gentlemen we are floating in space, 3ème album du groupe, qui marqua son époque et fut unanimement salué (même si parfois après coup !) comme un grand chef d’oeuvre de pop psychédélique dépressif. Confession à coeur ouvert d’un homme éprouvé par une rupture amoureuse qui ne peut trouver sa rédemption que dans les drogues, cet album délaisse les riffs répétitifs chers à Spacemen 3 et affiche clairement sa différence. Jason Pierce y injecte les choeurs du London Community Gospel Choir, une sorte de transe blues vaudou et un peu de crasse rock à la Rolling Stones. Et depuis ? Des disques en demi-teinte, parfois inspiré par les expériences de la maladie et de la mort comme sur Songs in A&E, album de pop malade et effondrée, mais dont d’aucuns s’accordent à dire qu’ils n’ont pas les splendeurs d’antan. Jusqu’à ce dernier, Sweet Heart Sweet Light donc, qui semble remettre les pendules à l’heure. Soul psychédélique mêlant orchestration épique et confessions intimes, ce dernier album est à la fois lumineux et désepéré. I got no reason to believe in anything, chante Jason Pierce sur des orchestrations luxuriantes. Nul doute que le bonhomme blessé et cabossé devrait émouvoir le public du Fort St Père.
Spiritualized – Fort St Père – Vendredi 10 août – 23h20
On change quasi de génération, avec le groupe suivant, The Walkmen, qui s’est formé une dizaine d’années après Spiritualized. Et de l’autre côté de l’Atlantique. Une autre manière de voir (et de faire) la pop. Un peu à la manière de leurs voisins de The National, avec une insolence classe et une apparente désinvolture. Mais qui creuse profond, à la manière de la voix d’Hamilton Leithauser, son chanteur guitariste, qui vous ramone le coeur dans l’estomac d’un refrain urgent. Une voix fissurée et solide à la fois, une voix qui sait crier, pour de vrai, et vous écharder la gorge. Une voix qui s’envole sur une piste de décollage de mélodies troussées avec talent, des chansons pop tout à la fois exigeantes et évidentes. On peut le dire, les Walkmen sont un peu de ces groupes qui vous font froncer les sourcils les yeux un peu humides et battre le cœur plus vite à la faveur d’un refrain habité et d’un pont tout en virage mélodique. On pourrait vous raconter que ce sont des copains de lycée, qu’ils ont une passion pour le son ou le matériel vintage à tel point qu’ils ont monté leur propre studio (aujourd’hui revendu) à Harlem – et c’est sûrement pour ça que leurs enregistrements semblent à la fois recherchés et avoir la chaleur de la première prise-. On pourrait également vous dire qu’ils ont commencé à écrire un roman ensemble, John’s Journey ou bien qu’ils ont déjà sorti une grosse poignée d’albums (plusieurs chez le très bon Talitres), dont le sublime Bows + Arrows (2004), à la fois noisy et tout en délicatesse et son single The Rat, totalement imparable ou encore le très réussi You& Me (2008). On pourrait encore vous dire que leurs deux derniers disques (Lisbon, 2011 et le dernier Heaven, 2012), en apparence plus calmes, ne se déparent pour autant pas de cette tension sous-jacente qui affleure sous l’élégance de leurs mélodies raffinées. On oublierait alors peut être l’essentiel. Que vous risquez, comme devant The National dans le Fort St Père, d’avoir les yeux humides et la tripe qui se retourne. Qu’il faudra encore peut être, avoir l’air de rien. Et juste dire ensuite d’un ton assuré : « ouais pas mal » , alors que vous en serez encore tout retournés. C’est en tout le cas tout le mal qu’on vous souhaite.
The Walkmen – Fort St Père – Dimanche 12 août – 1h00
On finit avec les plus jeunes de l’étape, Breton. Qui eux aussi, se sont formés une dizaine d’années après les précédents (2009). On retraverse l’Atlantique, direction une nouvelle fois l’Outre-Manche. Et autant le dire tout de suite, ce ne sont pas les moins bons. Pop par leur évidence mélodique, les jeunes Anglais ont pourtant mélangé plein d’influences dans la marmite : basse dubstep, rythmique hip hop, electronica, post-punk, indie pop, envolées de cordes, et on en passe, … Et c’est une réussite : sorte d’avant pop vénéneuse et enlevée, la musique de Breton est bien loin d’être indigeste. Installés dans une ancienne banque dans le nord de Londres (rebaptisée bretonLABS), ils ont démarré leur carrière en bricolant (ce n’est pas péjoratif) des vidéos qu’ils mettaient en musique eux-mêmes. Ils sont entre autre repérés grâce à 3 eps en édition limitée et leur signature chez Fat Cat. Nous avons eu la chance, nous, (petits) Bretons, d’entendre parmi les premiers en France ces (grands) Breton, aux Trans édition 2011. Capuches vissées sur la tête, vidéos projetées derrière eux (et donc réalisées par eux-mêmes) et kaléidoscope musical mêlant, au hasard, rythmiques guitaristiques à la Foals, ou bien dubstep et électro, images urbaines et mélodies pop, les cinq Londoniens avaient convaincu pas mal de monde. Depuis, les cinq jeunes gens ont fait du chemin : leur premier album, Other’s People Problems est sorti cette année, et a rencontré une grosse reconnaissance publique et critique. Et si l’on en croit les différentes chroniques, Breton s’est forgé une réputation scénique grandissante. On se fait donc déjà une joie de les retrouver sur scène. D’autant que les Breton nous promettent deux cerises sur le gâteau spéciales pour la Route du Rock sur leur facebook : ils joueront pour la première fois en live ‘The Well’, un titre extrait de leur ep Sharing Notes, mais surtout attendent des festivaliers une participation inédite pour un nouveau projet… »Nous allons filmer une partie de la vidéo de notre prochain single à la Route du Rock samedi. Qui veut y participer ? Nous avons une bonne idée à partager mais sans vous rien n’est possible!!! » expliquent les cinq Londoniens. Les consignes, se rendre samedi à 20h30 sur la « place des remparts » , si possible avec un sweat noir (les 5 premiers gagneront un t-shirt, ça risque d’être l’émeute)… Et le leader du groupe londonien a même la gentillesse de donner un numéro de portable pour le joindre si on ne trouve pas… Ne t’inquiète pas Roman, la Route du Rock, c’est pas si grand… Et il risque bien d’y avoir plein de monde. Avis aux amateurs, donc, tenez vous prêts !
Breton – Fort St Père – Samedi 11 août – 2h25
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