Qu’écouter en bouquinant peinard dans le hamac cet été? De la Bossa-Nova, pardi! Pas celle pour ascenseurs, réenregistrée au kilomètre en version allégée au vibraphone, mais l’enregistrement sacré, cultissime et perdu des « Afro-Sambas » de 1966 du guitariste Baden Powell et du poète Vinicius de Moraes, ressorti en France ce Printemps par les soins du label Cherry Red Records. Enregistré dans des conditions ubuesques en 1966, le disque avait depuis été réenregistré par le guitariste, déchargé de son émotion et sans Vinicius, décédé. L’affaire est entendue, courez vous procurer ce disque et faîtes vous rembourser par la sécu.
Objet de culte, indisponible en France dans son état originel, la suite de 8 chansons qui constituent les « Afro-Sambas » sont pourtant la plus belle contribution apportée par ces deux compères, pourtant pas avares en créations. Le premier, Vinicius de Moraes, est le fameux diplomate-poète ayant tout écrit, ou presque, pendant les premières années bossa nova (dont les textes de la chanson la plus reprise au monde, Garota de Ipanema). Le second, malgré son nom stupide de scout, reste le guitariste le plus inventif qu’ait connu le Brésil d’après-guerre. Alors qu’en 1966, l’essence de la Bossa Nova, en exil aux Etats-Unis est en phase de d’affadissement avancé , les deux cariocas s’enferment dans une cave inondée (sic), avec tout ce que Rio peut compter de cigarettes et de bouteilles de cachaça, avec l’idée de coucher sur bandes l’inspiration née de leur récente découverte commune du patrimoine afro-bahianais, né des syncrétismes afro-européens. Les rites du candomblé, par exemple, associant réminiscences chrétiennes et anciens rites d’Afrique noire, les obséda au point de désirer en associer des éléments (Baden Powell imitant à la guitare l’étrange Berimbau, qui accompagne la capoeira, par exemple) à leurs créations. Depuis lors, on ne compte plus les documentaires filmés sur les rites du Candomblé ou les nouveaux clubs de Capoeira dans nos contrées, mais en 1966 c’étaient pour nos deux musiciens une réelle découverte.
Dans le cerveau du génial Vinicius, le projet ne doit pas être une vaine tentative de perfection en termes d’enregistrement et de technique musicale, mais le témoignage d’une réunion inspirée, joyeuse et spontanée. Pour ce faire, l’ancien ambassadeur avait donc fait appel aux proches, les chœurs féminins du quarteto em cy (qui devaient bientôt devenir célèbres), associées à ce qu’il a appelé la chorale de l’amitié, les compagnes et les amies des musiciens. Baden Powell, qui venait d’étudier le chant grégorien, a donc profité de la présence de ces dames pour immortaliser son idée du moment: utiliser des chants féminins inspirés à la fois du répertoire sacré européen et des vocalises des cérémonies païennes de Salvador. Les textes inspirés de Vinicius et les arpèges inventifs de Baden couronnaient alors les 8 compositions, rehaussées parfois des accords de musiciens amis invités.
Ressortait alors de l’écoute de cet enregistrement la réalité de cette spontanéité joyeuse et inspirée, et la très piètre qualité sonore de l’ensemble y participait. Malheureusement, après la mort de Vinicius en 1980, Baden Powell a cru bon de réenregistrer l’ensemble avec une nouvelle chorale et du nouveau matériel. C’est ce dernier enregistrement qui était disponible en France sous le nom « Os Afro-sambas », et malgré le culte développé autour du disque originel, ce n’est qu’en 2008 que ressortent finalement en France ces trésors de 1966, au même moment que la réédition plus médiatisée de la bande originale de « Orfeu Negro » par Universal France, qui avait lancé la Bossa Nova en 1958. Le label y a ajouté judicieusement l’un des meilleurs disques de Baden Powell, dans lequel figurent les dernières « Afro-sambas », A Vontade.
Lâchez le bouquin, repassez le disque, il vaut mieux qu’une écoute distraite.
Je ne comprends pas bien votre phrase :"Le second, malgré son nom stupide de scout, reste le guitariste le plus inventif qu’ait connu le Brésil "
De par cette phrase, vous insultez sa famille et lui même qui a choisit, en toute connaissance de cause, son nom de scène, et qui a donné ce nom de Baden à son fils…
Sur ce coup là, la stupidité est de votre coté… du fait de ne pas passé outre des apriori infondé… un nombre certain d’artistes ont fait leur premier pas autour d’un feu de camp…
Autant pour moi, "malgré son curieux nom" aurait été plus judicieux, je vous l’accorde. En découvrant Baden Powell, beaucoup doivent se demander pourquoi un guitariste brésilien est homonyme du créateur du scoutisme, non? Loin de moi toute idée de me moquer des scouts dans cet article, ce serait un poil gratuit, j’ai même chopé moi-même "la trace de loup".
Lionel tu es le "SINÉ" d’alter1fo ….