Grosse température à l’Antipode ce jeudi 10 novembre pour le Tout Puissant Orchestre Poly-Rythmo de Cotonou! Le savant mélange de membres fondateurs septuagénaires et de nouveaux membres venant pallier aux défections du légendaire ensemble béninois impose une implacable afropop dans une salle comble, préparée à la fête cuivrée par l’heureuse fusion mandingue du groupe Terikan.
La première surprise en rentrant dans l’Antipode ce jeudi est de quitter les rigueurs de l’automne rennais pour s’engouffrer dans une salle bien remplie et déja attrapée par la fusion mandingue et les deux balafons, percussions, cuivres d’un combo dominé par les chants efficaces d’un couple de chanteurs faisant honneur à leurs belles références. On se rappelle alors que ce genre de plateau n’est pas si commun ces derniers mois, et l’on se prend à rêver qu’un beau succès pourrait encourager les programmateurs rennais à rééditer l’expérience. Bon, le Poly-rythmo, c’est pas si simple, paraît-il: presque 50 ans d’existence et une première à Rennes. Sur scène, on palpe un joli plaisir communicatif entre les musiciens: Terikan a bien préparé la piste, le poly-rythmo peut s’emparer d’un joli parterre.
Le Poly vient défendre ici sa dernière production, « madjafalao », belle galette d’afropop variée, parsemée de « vaudou music », selon les propres mots de son chanteur et maître de cérémonie, Vincent Ahehehinnou, l’un des seuls membres déja là en 1969, avec le bassiste aux lunettes Gustave Bentho et le saxo Pierre Loko. Le truc des Poly-rythmo, on l’aura compris, c’est l’éclectisme, comme se plaît à le rappeler celui qui apparaît comme le nouveau chef de l’orchestre, après la mort de Mélomé Clément: « Vous voulez quoi? de l’afrobeat? de la soul? du latino? »… Du latino, le poly sait en faire, il suffit de jeter une oreille dans une des innombrables galettes du combo dans les années 70, quand le Bénin et Cuba entretenaient des relations politiques privilégiées, et que les disques de rumba cubaine ou de salsa inondaient les nights clubs de Cotonou. Alors, oui, l’orchestre engage un ancien morceau gorgé de claviers syncopés, mais n’insiste pas: ce soir, c’est plutôt l’afropop de leur dernier disque qui l’emporte…
Le Poly égrène les titres récents, « Wangnigni » ou le morceau-titre de l’album: efficace, les grincheux demandeurs de titres anciens et plus funk dans mon genre en restent coi. On s’amuse gaiement sur scène, bassiste et guitariste lancent des belles arabesques, les dictons en langue fon ou en français s’accompagnent de belles mélopées cuivrées. Bon, dans mon coin on a pas bien compris les deux blagues de toto, mais au vu des rires dans l’assemblée, ça n’était visiblement pas le cas de tout le monde. Et puis comme tout vient à qui sait attendre (en voilà un autre, de dicton), voilà que le poly engage un morceau plus afrobeat de leur collection: « Africa Lonlon ». Quelques longues et heureuses minutes de groove, Ahehehinnou en profite pour présenter tout le monde, ça ressemble bien à un triomphe. Le bassiste Gustave Bentho, qui en a vu d’autres, un peu planqué derrière, se marre. Le Poly est bien vivant, Vive le Poly!
Photos: David Loyer