La Chambre régionale des comptes (CRC) de Bretagne a publié le 3 novembre 2020 son rapport d’observations définitives sur le contrôle des comptes de la société Keolis Rennes (Ille-et-Vilaine) à partir de l’exercice 2015. Pour rappel, Keolis Rennes, filiale à 100 % du groupe Keolis, entreprise spécialisée dans les transports en commun, exploite pour le compte de Rennes Métropole deux services de transport public de voyageurs : le réseau « STAR bus+métro », depuis le 1er janvier 1999, et le service « STAR, le vélo », depuis le 22 juin 2009, dans le cadre d’un marché public distinct, puis à partir de 2018 dans un contrat unique avec le reste du réseau STAR. Son réseau est notamment constitué d’une ligne de métro, de 28 lignes de bus reliant les communes de la métropole à Rennes, de six lignes à haut niveau de service, les lignes de bus couvrant plus de 2 000 kilomètres.
On en publie quelques extraits bien ciblés.
Une rentabilité financière excessive
Avec un résultat de 1,9 M€ en 2018 pour un capital social engagé de 6,2 M€, la rentabilité des capitaux investis par Keolis est de 30 % et même supérieure à 50 % en intégrant le transfert d’une partie du CICE à son actionnaire unique. Ce niveau, qui tient à la construction même du contrat, est très supérieur à la rentabilité financière moyenne des entreprises du secteur qui est de 8 % selon l’INSEE. [page n°39]
Keolis Rennes a pu ainsi réaliser des bénéfices à hauteur de 3,2 M€ en 2018, alors que les capitaux engagés par son actionnaire ne sont que de 6,2 M€, assurant ainsi une rentabilité financière excessive pour une entreprise intervenant dans le secteur public local. [page n°4]
NDLR : du coup, on a du mal à comprendre l’installation précipitée des portillons dans le métro…
La clientèle du réseau STAR
Dans son ensemble, la clientèle de la STAR ne reflète qu’imparfaitement la population rennaise avec une surreprésentation des populations jeunes ou défavorisées. [page n°16]
Le réseau rennais, contraint par la ville archipel, est certes étoffé mais il offre une fréquence et une densité moindre que des métropoles comparables. […] Dès lors, les caractéristiques du réseau peuvent expliquer que la composition de la clientèle se caractérise par une surreprésentation des catégories qui n’ont « pas d’autres choix ». [page n°21]
Une politique tarifaire peu incitative
Les tarifs pratiqués sont supérieurs à la moyenne des réseaux comparables, en particulier pour les abonnements, le prix du ticket unitaire étant comparable et n’ayant pas évolué sur la période. [page n°20]
Avec le prix d’un abonnement mensuel supérieur à l’achat de billets par 30 ou 50 en formules, les tarifs des abonnements pratiqués apparaissent peu attractifs pour un voyageur qui n’effectuerait qu’un aller-retour non pris en charge partiellement par son employeur. [page n°20]
Des hausses de tarifs irrégulières et supérieures à l’inflation
Le programme d’évolution tarifaire inscrit dans la convention de DSP 2018 fixait la hausse moyenne pondérée (HMP) des tarifs en 2018 à + 0,08 % au-delà de l’inflation de l’année n-1. Le taux d’inflation mesuré à 1 % pour l’année 2017, la hausse moyenne pondérée contractuelle appliquée au 1er juillet était donc de +1,08 %. Sur la période 2015-2018, la hausse des tarifs était de 6,1 % en cumulé, niveau supérieur à l’inflation mesurée à 3,1 % sur la même période. Plus largement, sur la période 2013-2017, l’évolution des différentes formules d’indexation a amené à une augmentation de 12,8 % des tarifs alors que l’inflation n’était que de 2,7 %. L’engagement de recettes prévu par la nouvelle DSP prévoit une augmentation moyenne de 0,6 % de croissance des tarifs hors inflation entre 2018 et 2024. [page n°25]
Les conditions contestables de location/vente de vélos à assistance électrique
Rennes Métropole attribue ainsi à la seule société Keolis Rennes une aide afin de vendre des vélos à un tarif inférieur à d’éventuels concurrents présents sur le marché. Cette pratique présente un risque au regard du droit de la concurrence qui ne paraît ni anticipé ni provisionné. [page n°40]
La fraude
Le taux de fraude enquêté est de 9,15 % en 2018. (une enquête réalisée par l’Ifop pour l’UTP a démontré qu’en moyenne, le taux de fraude dans les transports en commun est de 8,9% en France, ndlr). Keolis Rennes a réduit en 2018 plus fortement, en proportion, ses contrôles dans les bus, alors que le taux de fraude constaté par les contrôleurs de titres dans les bus reste plus élevé que dans le métro. [page n°31]
NDLR : bis répétita, du coup, on a du mal à comprendre (encore plus) l’installation précipitée des portillons dans le métro… autant les mettre à l’entrée des bus pour être à minima logique.
Les risques liés à la mise en circulation de bus électriques
La distance moyenne pouvant être parcourue par un bus électrique varie de 176 à 244 kilomètres sans utiliser la recharge au terminus et de 179 à 264 kilomètres avec rechargement au terminus. Cependant l’autonomie est descendue à 144 kilomètres avec la consommation enregistrée en novembre 2018. Les jours où l’autonomie a été la plus faible, au mois d’octobre 2018, la capacité des batteries ne permettait pas d’exploiter normalement tous les bus de la ligne 12 (uniquement 3 sur 8). La diminution de l’autonomie est essentiellement liée à la diminution des températures et à la consommation croissante du chauffage électrique. [page n°38]
Ainsi, Keolis Rennes évoque en 2018 une « évolution sensible du nombre de départs manqués pour cause d’absence de bus de réserve et de pannes en lignes. Cette évolution traduit la tension rencontrée sur le parc à partir de la fin de l’été 2018. De fait le manque de fiabilité des bus électriques (seuls 2 partiellement disponibles sur les 7 initialement prévus), le vieillissement du parc (pas de renouvellement de véhicules en 2018) et la nécessité de procéder à des doublages de ligne depuis la rentrée de septembre expliquent cette dégradation ». [page n°38]
*******Le rapport complet : https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-10/BRR2020-22.pdf
« J’peux pas, j’ai portillons » : pour le retrait des portillons dans le métro de Rennes
[03 Décembre 2018] – Un jour, une photo : Le STAR invente le « vivre ensemble dans la suspicion »