Impossible de ne pas les voir. A quelques mètres du mémorial dédié aux 32 résistants dont 9 républicains espagnols, emprisonnés à la prison Jacques Cartier puis fusillés le 8 juin 1944, on érige des barrières métalliques au teint gris blafard. « On a un peu l’impression d’être emprisonnés » peste une jeune femme(1) travaillant dans le quartier.
Les propriétaires des appartements situés près de la place du Maréchal Juin ont décidé de faire clôturer les espaces privatifs autour de leurs immeubles. Les travaux ont débuté cet été. Restreindre la liberté de circulation est leur réponse face au climat d’insécurité grandissant et à la montée des incivilités. Des riverains tempèrent cependant(1) et indiquent que « le problème principal est lié aux déchets laissés par celles et ceux qui profitent de l’espace vert pour pique-niquer. » Mais peu importe… Les maux quotidiens semblent avoir eu raison de l’inaccessible vœu pieux du « vivre-ensemble ». Le passage, autorisé au public depuis les années 1970, ne sera donc plus accessible qu’en journée, à l’heure de la promenade entre 8 et 21 heures. Et tant pis pour les lève-tôt qui empruntent régulièrement ce raccourci pour se diriger vers la gare.
Ce n’est pas la première fois à Rennes que des grilles métalliques sont installées pour sécuriser des lieux privés ou publics. Les toutes dernières se situent sur les ailes est et ouest des arcades du Palais du Commerce, place de la République. Selon le site Rennes-Info-Autrement(3), des propriétaires de la rue Tronjolly souhaitent même copier leurs voisins en interdisant l’accès à leur petit jardin. Mais pas de méprise, aucune barrière n’est infranchissable. On se souvient encore de l’intrusion des 4 fêtards dans la préfecture Martenot d’où ils étaient repartis avec un portrait d’Emmanuel Macron(4). Avec un taux d’alcoolémie avancé, une grille même en fer forgé peut vite se transformer en un défi à surmonter.
Dans un article d’anticipation paru il y a presque 10 ans dans la revue Place Publique(2), l’historien Gauthier Aubert imaginait le centre-ville de Rennes dans les années 2040 en ces termes : « vélos et voiturettes électriques de location sont les seuls véhicules autorisés, et d’ailleurs, les voitures à essence, devenus signes distinctifs de modestie sociale, sont interdites sur ces grandes artères (ainsi que dans le centre). L’ambiance est d’autant plus aseptisée que la vidéosurveillance embarquée sur drones veille jour et nuit au calme recherché par les habitants, qui ont plébiscité ces résidences fermées par des grilles à reconnaissance olfactive ». Alors, visionnaire ?
#RENNES Carte postale un peu insolite de la dalle du Colombier. Ca a l’air sexy comme ça. La ville de l’an 2000, comme on disait ! pic.twitter.com/oAjO7g3Ys5
— Histoire de Rennes (@Histoire2Rennes) 20 avril 2017
(1) Rennes. Face aux nuisances, les riverains grillagent le square
(2) Rennes 2040 : Vivez en excellence à Brocelianda©