C’est un rendez-vous que l’on apprécie, et un évènement phare pour le Club de la Presse de Bretagne. Chaque année désormais, l’exposition nomade Report’Images met en avant les clichés de presse dans diverses villes de la région bretonne, offrant ainsi une reconnaissance bien méritée au travail des photographes qui contribuent à enrichir l’information, et à lui conférer une perspective singulière.

Pour cette cinquième édition, les noms des huit photographes viennent d’être dévoilés : découvrir la liste ici ! Parmi elles et eux, la Vannetaise Juliette Pavy exposera son reportage intitulé « Spiralkampagnen, Stérilisation forcée des femmes du Groenland ». On a eu envie d’en savoir un peu plus…

Interview

ALTER1FO : Entre 1966 et 1970, près de 4 500 femmes inuites ont subi la pose non désirée, souvent à leur insu, d’un stérilet. Pouvez-vous nous raconter comment vous avez découvert cette histoire et ce qui vous a poussé à la documenter ?

Juliette PAVY (Photojournaliste / Collectif Hors Format) : L’Arctique est une région à laquelle je m’intéresse depuis une dizaine d’années. J’ai décidé fin 2022 de partir réaliser différents reportages au Groenland. À ce moment-là, j’ai lu une brève de PQR concernant la stérilisation forcée des femmes à l’époque de la colonisation danoise et j’ai décidé d’approfondir ce sujet.

Le premier témoignage d’une victime, celui de Naja, m’a laissé sans voix. Elle m’a reçu chez elle dans sa maison et me racontait qu’elle a eu une spirale de force à l’âge de 13 ans sans que ses parents soient informés. C’était très douloureux, ça lui faisait comme des coups de couteau à l’intérieur d’elle. C’est  ensuite elle qui m’a aidé à rencontrer d’autres victimes. Par ailleurs, les traducteurs avec qui j’ai travaillé sur place ont joué un rôle vraiment essentiel dans la transmission de la parole des victimes.

Cette histoire m’a permis de comprendre un peu mieux la société Groenlandaise et la période de la colonisation Danoise à laquelle je me suis intéressée.

Par mes photographies, je souhaite donner une voix à celles qui ont été réduites au silence pendant près d’un demi-siècle. En documentant cette histoire et en la rendant accessible à un large public, j’espère également susciter une prise de conscience sur les violences faites aux femmes inuites et sur les répercussions sociales et psychologiques de toute stérilisation forcée.

Ce serait la rencontre avec Aviaja, la gynécologue qui m’a montré une photo d’une radiographie du stérilet utilisé à l’époque. C’était glaçant de voir cette spirale apparaître sur la radio. Le mot « Spiralkampagnen » a alors pris tout son sens.

Ce reportage est pour moi le premier d’un travail dans la région Arctique où je me rends régulièrement depuis.

J’ai commencé ce reportage en 2022 et je le continue encore aujourd’hui. J’ai prévu d’y retourner pour suivre l’enquête en cours qui doit se terminer à la fin de l’année 2024.

Je photographie depuis très jeune, à l’âge de 8 ans j’adorais raconter mes vacances à l’aide d’un appareil photo jetable puis petit à petit, la photographie a pris de plus en plus de place dans ma vie.

En 2018, alors étudiante en biologie, j’ai réalisé ma première commande pour la presse puis une première exposition. Je suis diplômée en 2020 de la filière photojournalisme de l’EMI CFD sous la direction de Guillaume Herbaut et Julien Daniel. La photographie est pour moi un moyen de raconter des histoires. Lorsqu’un sujet m’intéresse au quotidien. L’appareil photo me permet de satisfaire ma curiosité, d’aller voir les choses de plus près, d’apporter mon témoignage et de transmettre ces histoires.

Plutôt numérique et couleur pour des questions de confort lors du travail de commande pour la presse, mais je reste ouverte à différents médiums, tout dépend du propos.

Une photo qui suscite de l’émotion tout en amenant une information.

Je suis très heureuse de pouvoir exposer dans la région où j’ai grandi, mais surtout de pouvoir donner une visibilité à ces femmes qui m’ont confié leur histoire.