Après avoir commencé par une faute d’orthographe histoire de déjà dynamiter les frontières de la normalité dont il se réclamait un peu, le vaillant et indispensable label local Les Disques Normal est à l’honneur en ce mois de mai. Nés en 2006 et avec aujourd’hui quasi 70 références sous divers formats (vinyles, cd, download) à son beau catalogue, les Disques Normal fêtent leur quinze années d’existence en deux temps : une expo des pochettes d’une grande partie des disques du label (agrémentées de quelques unes de nos photos des groupes en live) au Jardin Moderne et deux soirées de concerts avec pas moins de 8 groupes du label à l’affiche les 20 et 21 mai, toujours au Jardin Moderne. Pour préparer dignement cette célébration, nous vous proposons quotidiennement jusqu’à la date fatidique une interview de chacun des groupes. Rencontre aujourd’hui avec Frédéric Parquet d’A Movement Of Return qui nous parle de liberté et de son dernier album aux deux visages.
Quinze années déjà que le petit mais vaillant label local Les Disques Normal dessine et défend sa vision indépendante et sensible de la musique. En une décennie et demie et plus de soixante dix disques, la petite bande a bâti un ensemble à la fois hautement cohérent et pourtant délicieusement aventureux. De la folk intimiste de Jocari à la pop orchestrale du premier album de Mermonte en passant par le garage dandy de Lady Jane, le rock indomptable de Fat Supper, l’americana classieuse de Santa Cruz, le hip hop oblique de Yes Basketball! ou encore l’indie rock à vif d’Arianna Monteverdi… on ne compte plus les disques du label qui figurent désormais parmi nos galettes favorites. Nous sommes donc plus qu’heureux de participer aux célébrations des quinze premières années de cette belle aventure. Pour cela nous sommes allés à la rencontre des huit formations invitées sur les deux soirées de célébration.
Nous causons aujourd’hui avec Frédéric Parquet, le maitre d’œuvre d’A Movement Of Return. Vous avez peut-être déjà pu apprécier son sens de la compo et son art des brumes de guitares dans son projet précédent Mechanism For People. Ce fidèle du label les Disques Normal et ses acolytes reviennent avec un très beau double album Safe Harbor découpé en deux parties Lightness et Darkness.
Alter1fo : Half Sin Half Life (janvier 2015) et Completion (mai 2018), les deux premiers albums d’A Movement Of Return sont sortis dans la collection Microcircuit du regretté label Monopsone (qui proposait deux disques pour le prix d’un, pour promouvoir des artistes émergents). Peux-tu nous parler de cette aventure ?
Frédéric Parquet : C’est juste le premier album qui était dans la collection Microcircuit. Le second album est sorti normalement chez Monopsone. En fait, j’étais sur Les Disques Normal avant avec ma précédente formation qu s’appelait Mechanism For People. J’avais cessé cette aventure et j’étais reparti sur un projet solo. Je suis entré en contact avec Stéphane Merveille qui faisait les pochettes pour Monopsone. Je lui ai fait écouté mes démos. Il m’a dit qu’il fallait que je fasse un album et il l’a ensuite proposé au label pour lancer Microcircuit. Il y en a eu quatre autres après. Pour le deuxième album j’ai continué sur le label. Le premier disque était déjà en co-production avec Les Disques Normal. Monopsone s’occupait de la partie physique et Les Disques Normal de la partie digitale.
Comment s’est passé la rencontre avec Les Disques Normal ?
C’est très très très ancien. C’était même du temps de Myspace ! La webradio Asso de gens normal avec Jean-Charles Dron et Martial Hardy m’avait contacté pour mon groupe Mechanism For People pour me demander l’autorisation de passer certains de mes titres. De fil en aiguille, on a eu l’envie… une envie partagée… de sortir quelque chose chez eux. Il y a eu un premier EP qui s’appelait The Others Turn To Shadow (en juin 2008) qui a pas mal marché et qui est même épuisé. Un album a suivi (Never Reach For The Stars en juin 2011) mais c’était avec Martial tout seul puisque Jean-Charles avait quitté l’aventure. Ça fait donc très longtemps que je connais Martial.
Qu’est-ce qui te plaît sur ce label ?
La liberté. La liberté totale. Chez Monopsone, c’était un peu plus cadré. Il y avait des exigences, notamment sur le visuel. Ce n’est pas que Martial n’a pas d’exigence mais il laisse plus les choses se faire. Après, si ça ne lui plaît pas, il le dit. Il y a aussi une forme de partage très aisé sur ce label.
Est-ce que Martial a un défaut ?
Je le connais depuis longtemps mais je ne l’ai vu qu’une seule fois. Je n’aurais donc pas la prétention de lui trouver des défauts.
La soirée des 15 ans ne sera donc que la deuxième fois que tu le vois !
Exactement. Ça fait partie des personnes que tu vois une fois et après tout se fait par téléphone, de manière simple, en confiance.
Quand on t’a demandé de citer un des disques du label qu’il faut absolument découvrir, tu nous as tout de suite répondu l’album intimacy ruins de Jocari. Pourquoi cette évidence ?
Ce qui me plaît dans ce disque, c’est d’être dérouté. C’est le genre de musique que je n’avais jamais pris le temps d’écouter et ça m’a touché. J’ai aussi entendu une interview de lui (Fabien Larvaron) dans laquelle il expliquait comment c’est construit. C’est beaucoup plus complexe que ça en a l’air. Les harmonies, les arrangements sont assez subtils. Ça m’a amené à d’écouter d’autre chose dans ce style pour retrouver cette voix, cette sensibilité.
On conseille tout aussi chaudement ce très bel album. Avec quels autres groupes du label te sens-tu des affinités ?
De loin en fait, car on ne s’est jamais rencontré. J’ai croisé Jullian Angel lors d’un concert à l’espace B à Paris. Tycho Brahé également, mais uniquement par message.
Quelle formule du groupe est prévue pour le concert anniversaire ?
C’est la formule qu’on a adopté depuis quelques années déjà. Il y a un batteur, deux guitares et des machines. Tout ce qu’il y a sur l’album, on l’embarque sur scène. Ça fait pas mal de machines sur scène parce qu’on ne travaille pas sur ordinateur. Ce n’est que du hardware. On essaye de restituer le son de l’album, en l’arrangeant un peu mais on reste le plus fidèle possible à l’orchestration. On devrait peut-être épuré plus mais c’est comme ça. C’est dur à mixer sur scène. On a énormément de voix. Quand on déboule avec nos vingt-quatre fois, l’ingé-son fait de grands yeux. On nous conseille d’épurer mais je n’y arrive pas.
Le troisième album de A Movement Of Return s’appelle Safe Harbor (sorti en janvier 2022). Il a la particularité de sortir en deux disques une première partie Lightness et une seconde Darkness. Comment est venue cette dichotomie ?
C’est venue de plusieurs facteurs. Il y a la durée sur laquelle on a conçu l’album qui s’est étalée sur presque deux ans. Les quatre ou cinq premiers titres que j’avais faits étaient dans une veine plus ouverte. On reste dans le rock électro avec influence shoegaze mais avec une petite touche dream pop. J’ai ensuite fait d’autres titres après un concert à Orléans où on avait joué en ouverture des Young Gods. J’ai pris une claque en les voyant sur scène. Il ne sont plus tout jeunes mais c’était assez fantastique au niveau du visuel, de l’ambiance et surtout de comment ils vivaient leur musique. J’ai donc fait d’autres morceaux à l’issue de ce concert et cette expérience se ressent. La teinte est différente. Il y a plus de machine. C’est plus introspectif. Quand je me suis rendu compte de ça, j’aurais pu le mélanger au sein d’un album mais j’ai préféré garder cette double face. Ça a plu à Stéphane Merveille, qui fait les pochettes. On voulait d’abord faire un vinyle sans Face A / Face B mais ce n’était pas possible dans un délai raisonnable avec un tirage d’une centaine d’exemplaire. On a donc eu l’idée de faire deux EP en séparant clairement les deux aspects pour aller au bout du concept.
Est-ce que la frontière était vraiment très nette entre tous les morceaux où est-ce qu’il y a eu des hésitations ?
Ce n’était pas si nette que ça. D’ailleurs sur le disque Lightness, on a essayé d’y aller progressivement et le dernier titre fait la jonction avec le suivant. Ce n’est donc pas le jour et la nuit. Il y a quelques titres un peu plus enlevés. Après, il y a quand même une unité dans tout ça.
Les très beaux visuels de Stéphane Merveille participent beaucoup à la réussite de l’ensemble.
C’est une longue histoire ces pochettes. L’idée d’une mariée perdue dans la nature date de pas mal de temps. J’avais aussi envie de faire une vidéo sur ce principe. On est allé dans la Creuse dans un bel endroit qui s’appelle Fresselines. On avait fait un premier jet de photos et Stéphane en a refait une autre. Il a effacé un peu les fonds pour donner un peu de mystère mais elles sont prises en pleine nature.
Comment ça va s’articuler ces deux disques en live ?
En live, on mélange tout. On ne garde pas le concept sur scène. On joue essentiellement le dernier album et deux anciens titres qui nous tiennent à cœur. Ça prouve que la distinction entre les deux disques n’est pas si marquée que ça au final.
Vous avez d’autres projets en cours ?
On va surtout défendre ce disque. On n’a pas fait beaucoup de promo forcément. Je crois qu’il faut vraiment que les gens voient l’objet. Il est vraiment beau. On cherche aussi des dates donc s’il y a des assos rennaises qui sont intéressées, on est preneur.
Tycho Brahe, Jullian Angel, Blue Haired Girl et Arianna Monteverdi joueront vendredi 20 mai 2022
Fiascø, A Movement Of Return, Les Marquises et The Missing Season joueront samedi 21 mai 2022
de 14h à 19h – Tarif 1 jour : 12 € en prévente ou 15 € sur place
Pass 2 jours : 20 € uniquement en prévente
Le Jardin Moderne, 11 rue du Manoir de Servigné, Rennes
Bus n°11 (arrêt Jardin Moderne)
Bus n°9 (arrêt Cleunay)
lignes n°54, 55, 56 (arrêt Berthault)
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