Kfuel à 20 ans : ode à l’éternel amateurisme

Depuis 1994, l’association Kfuel organise sur Rennes, avec une passion intacte et à la force du poignet, des concerts atypiques et ruant joyeusement dans les brancards. Depuis 1994, elle participe à rendre la vie musicale rennaise un peu moins consensuelle, un peu plus aventureuse… bref un peu moins chiante. Retour sur cette chouette aventure avec Gwen et Xavier, deux des membres fondateurs de la belle équipe.

20ansKfuelafficheAlter1fo : Pour commencer, quand et comment êtes vous arrivés dans l’association ?

Xavier : Ben, il y a 20 ans.

Gwen : Il y a 20 ans aussi. Tu as le canal historique sous la main. On avait été contacté par Mister R et Docteur K, des gens qui faisaient une émission de radio sur Canal B qui s’appelait Backslide. En même temps, ils étaient dans une association qui s’appelait Noise The Noise. Ils voulaient la quitter et former une autre asso. Xavier faisaient un fanzine qui s’appelait Sonik, moi je participais à Kill Yr Idols, ils nous ont proposé de les rejoindre pour former cette asso pour faire venir des groupes.

Xavier : Il y avait aussi deux ou trois autres personnes de plus.

Gwen : Hélène (Mistress Bomb H) est arrivée juste après.

Xavier : On était sept/huit au départ et au final, on a toujours été sept/huit.

Gwen : On est arrivé là, parce qu’il y avait un bar qui s’ouvrait, qui s’appelait les Tontons Flingueurs. On nous avait dit qu’on aurait la possibilité d’y faire ce qu’on voulait alors…

Xavier : …on y a fait ce qu’on a voulu.

EnablersKfuelQu’est ce qui a changé (et pas du tout changé) en 20 ans dans l’asso ?

Gwen : Certains ont perdu plus de cheveux que d’autres. (Rires)

Xavier : A part ça, je ne vois pas ce qui a changé. (Rires)

Gwen : L’asso a quand même beaucoup évolué au niveau des gens. Xavier a fait un long break.

Xavier : J’y ai été jusqu’en 2004 et je suis revenu en 2013. Je dois être le seul de ceux qui sont partis qui soit revenu. Tous les autres sont partis définitivement. Même si je n’ai pas eu l’impression de les avoir vraiment quittés puisque j’assistais à tous leurs concerts et que je buvais leurs bières. Mon départ n’a donc pas trop changé le truc. En tout, je ne sais pas combien de personnes a pu drainer Kfuel

Gwen : Une trentaine en tout.

Sur 20 ans, ce n’est pas tant que ça en fait.

Xavier : Il y a le noyau dur : Gwen, moi jusqu’en 2004 et Mistress Bomb H. Aujourd’hui il y a Lester Brome en plus. Il est arrivé en 2006.

Gwen : Il est arrivé sur la pointe des pieds. Avant de prendre de plus en plus de place (Rires).

Gwen : Finalement à part les lieux où on organise les concerts qui ont changé au fil des fermetures, ça n’a pas trop changé. On n’a toujours pas de salariés. On n’a pas d’emploi dans l’association.

Xavier : On a essayé une fois d’avoir des subventions. On a eu 500 francs après avoir rempli un dossier qui nous a demandé trois mois de boulot (rires). Du coup, on a dit plus jamais et on est très bien comme ça. On ne doit rien à personne et ça nous va bien.

Gwen : Les bars ont changé. Les groupes aussi, il y en a pas mal qui n’existent plus, d’autres se reforment.

Xavier : Par contre, on est toujours aussi dépendant des lieux.

Gwen : Les 20 ans de Kfuel, c’est un peu 20 ans d’histoire des bars rock à Rennes.

ThaliaZedekKfuelEffectivement, votre histoire est ponctuée de lieux emblématiques. Il y a d’abord eu la période Tontons Flingueurs…

Gwen : On y a commencé en même temps que les autres assos mais quand ils ont fermé, il y a eu un gros moment de flottement. Je n’ai jamais connu un tel ennui à Rennes. Il n’y avait rien en dehors de l’Ubu. On a essayé au Muséum café mais ça n’a pas fonctionné. On avait fait Unwound et hélas pour eux ça c’est très mal passé.

Xavier : On a failli se battre avec le patron à la fin. (Rires)

Gwen : On lui a quand même cassé ses bouteilles et sa vitrine et on a fini chez Ramon et Pedro. Après on a investi le Jardin Moderne et on a fait que c’est devenu une salle de concert. On a fait des concerts dans les locaux de répét’, le café culturel ou même le centre de doc. Ca nous a bien dépanné. Ensuite, on a eu vent d’un bar qui faisait des concerts de jazz du côté de Maurepas. On a donc été les premiers à faire des dates dans le truc et après Bruno (Perrin) a acheté le bar et c’est devenu le Mondo Bizarro. Ensuite on a eu la rencontre avec Gilles et la période à La Bascule.

Xavier : A part ça on n’a pas beaucoup changé. On reste toujours très amateur, très bordélique, très Do It Yourself. C’est toujours un peu à l’arrache. On n’est pas les rois de la promo. Internet a changé un peu les choses pour les contacts avec les groupes ou les tourneurs. Sinon dans notre fonctionnement, c’est toujours pas de subventions et c’est toujours dans l’amateurisme.

Gwen : Nous restons donc très indépendants. Nos visuels ont toujours été faits par des gens de l’asso. Au tout début, c’était fait par Mister H (le chanteur de Møller Plesset). Peu après, ça a été Hélène (Mistress Bomb H) et désormais depuis quelques années, on a la chance d’avoir au sein de l’asso Eric Mahé qui nous fait des visuels avec une cohérence et une qualité incroyable.

Il a rassemblé ses travaux dans un petit recueil cousu main et l’ensemble est effectivement très impressionnant.
Sinon, du côté de votre public comment ça a bougé?

Gwen : Il y en quelques-uns qui n’ont pas bougé. (rires) Notamment un des mecs qui était au tout début et qui s’est mis à la vidéo ces derniers temps, l’ami Appolosmouse (dont on vous conseille fortement la visite de son incroyable compte Youtube regorgeant de captations d’une qualité hors du commun). Il y en a d’autres qui étaient là depuis les débuts mais sinon ça a quand même évolué. Souvent sur des cycles de 5/6 ans. En dehors des gens qui décident d’y vivre, les gens sont à Rennes sur 5/6 ans avant de partir ailleurs.

Xavier : Après pour une ville étudiante, on n’a quand même pas un public très estudiantin. Il y a bien quelques jeunes qui viennent de temps en temps mais on a un public plus âgé, sans doute chômeur ou smicard. C’est un peu dommage vu le potentiel qu’il y a sur Rennes.

Gwen : Les groupes qu’on programme touchent juste les étudiants les plus pointus en musique. On ne passe pas non plus de groupes garage. Une asso comme Super Drakkar faisait jouer pas mal de groupes de ce revival, dans le style Thee Oh Sees et leurs soirées étaient pleines d’étudiants. On était un peu à côté de ça et ça joue un peu aussi. Les gens qui écoutent du noise rock et les lecteurs de New Noise, ont plutôt la trentaine, voire plus.

A votre avis qu’est-ce qui fait que vous n’arrivez pas à sortir de cette étiquette « musique noisy assez dure / expérimentale» alors que votre programmation est assez variée en fait ?

Xavier : ça c’est une fausse réputation qu’on a.

Gwen : C’est une réputation qui est colportée par les mêmes personnes qu’il y a 20 ans. Les mêmes personnes qui pensent qu’il n’y a plus rien eu de valable à Rennes depuis Marquis de Sade.

Xavier : C’est toujours ceux qui en connaissent le moins qui en parlent le mieux. Alors que du côté de nos affiches, on a aussi bien fait Neurosis que du jazz avec Roof, Zeni Geva (groupe japonais bien barré), des trucs plus emo comme Engine Down, The Flying Luttenbachers ou The Ex. C’est vrai qu’il y a un fil rouge « rock » au sens large, noise, bruyant mais en même temps, c’est tellement large comme famille que nous, on a l’impression de faire des choses très différentes.

harponKfuelEn plus vous avez choisi l’appellation « musiques indociles (en terrain contrasté) » qui renvoie plus à l’attitude qu’à un style musical.

Xavier : Alors justement, je ne suis pas du tout d’accord avec ce terme là et je voudrais qu’on le change dès ce soir. (Rires)

Tu as trouvé mieux ?

Xavier : Non, mais je m’insurge en faux. Ce qui ne me plaît pas c’est la sonorité du mot. Je trouve que ça fait tarlouze. (Rires)

Gwen : Alors cet aspect là, j’assume carrément… (Rires) Sinon indociles, c’est un terme comme ça. Quand on a fait The Kift, on nous a dit qu’on faisait de la chanson et sur le même plateau on faisait un truc electro-breakcore avec Melt Banana. On a dit « ça c’est de l’indocilité, on n’est jamais là où on nous attend. » mais en même temps ce n’est pas tout à fait vrai non plus.

Xavier : On va chercher un autre nom pour les 20 prochaines années. Je vais y réfléchir.

Pour quand Gwen fera un break. En 20 ans, vous avez réussi l’exploit de devenir une référence, tout en restant complètement à part. Comment on réussit ça ?

Xavier : Mouais, alors je n’ai pas du tout cette impression là ou alors pour quelques personnes. Je me demande même si on n’est pas plus connu à l’extérieur dans le réseau des scènes indépendantes qu’à Rennes même.

C’est plutôt ça que je voulais dire en fait.

Xavier : J’ai un peu de mal à voir l’impact qu’on peut avoir. Je me rappelle une anecdote quand on avait fait Gorge Trio il y a quelques années (groupe américain composé de membres de Collosamite, Deerhoof, The Flying Luttenbachers, Natural Dreamers). A l’époque j’arrosais pas mal de mails les Etats-Unis pour contacter les groupes aussi bien pour la radio, pour des chroniques (sur l’excellent webzine Perte et fracas). Quand ils étaient venus en France, ils avaient tourné avec Djudd, le groupe dans lequel jouait Gwen et ils avaient pas mal discuté. Il nous avaient dit qu’aux Etats-Unis tout le monde connaissait Kfuel. Alors, tout le monde, c’était bien sûr tous les labels indépendants.

Gwen : Tous les groupes de Skingraft et Amphetamine Reptile nous connaissaient. C’est normal puisqu’on les faisait jouer et qu’on se bougeait pas mal pour les contacter. Ça c’est un peu perdu dans les années 2000 et puis c’est revenu avec Internet et les playlists des émissions de radio.

Xavier : Quand je suis parti en fait. (Rires)

HawksKfuelQuels sont vos meilleurs souvenirs de concerts ou de rencontres sur ces 20 ans ?

Xavier : La plupart ne sont pas racontables, parce c’était avant ou après les concerts. Déjà, il n’y en a pas de mauvais je trouve. C’est déjà bien. En 20 ans, il n’y en a même pas eu cinq.

Gwen : Ce n’est même pas la peine de les citer d’ailleurs.

Xavier : Il n’y a rien eu de violent. Ce sont les rapports avec les groupes qui ont parfois été difficiles. Dans un groupe ça arrive forcément qu’il y ait un ou deux connards et que ça ne se passe pas bien, mais rien de rédhibitoire non plus.

Gwen : C’est aussi pour ça qu’on a continué. On n’a jamais eu de grosses galères. Aucun des groupes ne nous a arnaqués ou volés.

Xavier : Il y a toujours eu des bons contacts avec les groupes français ou étrangers qu’on a faits même si on ne les a plus jamais revus après. On en a refait aussi pas mal d’autres. Justement le 22 octobre, on retrouvera VAZ, qui sont déjà venus ainsi que leur groupe d’avant Hammerhead. Tous ces groupes avec qui on a gardé des liens, c’est des bons souvenirs.

Gwen : Il y a aussi The Ex. A chaque fois qu’on les recroise, on discute avec eux même le personnel d’origine est de moins en moins présent.

Xavier : U.S. Mapple aussi. On avait été les voir à Nantes à l’Olympic.

Gwen : Alors eux, ils ont carrément volé des drapeaux à la mairie de Rennes. (Rires)

Xavier : A l’époque, ils jouaient dans Shorty. On avait fait un super concert. Ils étaient inconnus et on avait fait 130 personnes aux Tontons Flingueurs. On avait tous halluciné. Ils étaient même revenus sur Rennes sur leur day off après un concert à Bordeaux. On avait fait ensuite U.S. Mapple avec Melt Banana en 1996. Bien des années après, ils étaient donc revenus jouer à Nantes et il y avait très peu de monde. On devait être 40 ou 50. On avait fait le déplacement et on était au premier rang. Vu comment c’était clairsemé, il y avait un fossé entre la scène et le public. A un moment donné, le chanteur nous a dit en anglais « La prochaine chanson est pour vous. » en nous montrant du doigt tous les deux alors qu’on ne l’avait pas vu depuis 3 ou 4 ans voire plus.

Gwen : On avait tous grossi, lui y compris (Rires).

Xavier : On n’avait pas eu de contact depuis cette époque là et il se souvenait de nos tronches ce qui était assez fendard.

Gwen : Dans les bons souvenirs, il y a aussi Engine Down qui venait du milieu « emo » et de le scène Do It Yourself. On était pendant une des deux guerres d’Irak ou juste après les attentats du 11 septembre et quand on a commencé à discuter avec eux on s’est aperçu qu’ils étaient pro-Bush. C’était la première fois que je rencontrais ce genre d’opinion chez des Américains et on a discuté, sans s’énerver, une bonne partie de la nuit. En général, les gens qu’on reçoit sont soit anars, soit apolitiques, soit plutôt de gauche et c’était la première fois que je rencontrais des personnes de droite, avec des idées conservatrices. Ça nous aura permis de confronter nos idées.

Xavier : Il y a aussi des grands moments avec des groupes comme Zeni Geva et son chanteur Kazuyuki K. Null et son étiquette de Kronenbourg collé sur le front. Plainfield, ça a été aussi un moment assez énorme. Moonshake aussi dans un Tontons Flingueurs blindé avec plus de 200 personnes. La première rencontre avec Oxbow et Eugene Robinson.

Gwen : Le chanteur de Moonshake (David Callahan) s’en souvenait tellement bien qu’il nous a dit oui pour venir à nos 20 ans (avec son groupe précédent The Wolfhounds) mais il avait oublié de demander aux autres membres du groupe s’ils étaient dispos. (Rires) Des rencontres chouettes, il y en a eu plein. Steel Pole Bath Tub, Xavier et moi, on était super fan de ce groupe, on n’aurait jamais pensé pouvoir organiser un concert d’eux un jour et ça c’est fait. Plus récemment, il y a eu Total Victory. On ne les connaissait pas. On n’avait échangé que par email. Comme ils sentaient que c’était grâce à nous qu’ils avaient pu tourner et que ça marchait, la rencontre et le concert ont été terribles.

Xavier : Les groupes voient tellement qu’on n’est pas des professionnels que forcément on ne peut qu’aimer la musique.(Rires) Ça ne peut être que ça. Comme ils sentent bien qu’on ne fait pas ça pour l’argent, ils ne se prennent pas la tête et ça se passe bien.

Vous animez aussi chaque jeudi Kérozène sur Canal B. Qu’est-ce que l’émission de radio apporte à l’asso et inversement ?

Xavier : Une mauvaise qualité de sang. (Rire)

Gwen : L’émission était là avant l’asso sous le nom Backslide, donc ça a toujours été le fer de lance de la programmation des concerts. D’abord, on cherche des groupes pour passer à la radio et après quand on aime vraiment bien, on se dit qu’il va falloir qu’on essaye de le faire venir. Comme on est sur le registre de la découverte, on arrive à contacter les groupes à leur tout début, avant qu’ils ne soient trop gros et trop chers.

Le turn-over sur l’émission est assez spectaculaire. Quand un album passe deux fois chez vous, c’est vraiment qu’il est super bon. (Rires)

Gwen : Pour la saison à venir, il faudrait peut être que je me calme un peu la dessus.

Xavier : Quand on a commencé l’émission, il y avait beaucoup moins de turnover. On a fait l’émission tous les deux pendant 7 ans au départ. Il n’y avait pas encore Internet, donc moins de disques, moins de choses à proposer. On passait donc plus d’albums plus de deux fois. Avec Internet aujourd’hui, l’accès est tellement facile que c’est plus simple de passer plein de morceaux différents chaque semaine.

AndAlsoTheTreeKfuelQu’est ce qui a changé (et pas du tout changé) en 20 ans dans l’organisation de concerts sur Rennes ? A part les lieux.

Xavier : Basiquement rien n’a changé. Notre fonctionnement est toujours aussi amateur.

Gwen : Il faut toujours qu’on reste à l’affût. Il y a des périodes où c’est plus ou moins compliqué. Là, sur Rennes en ce moment il y a de moins en moins de bars. L’an dernier entre la fermeture du Sympatic et de La Bascule, notre panel de possibilités s’est un peu réduit. On sent aussi que le couperet n’est pas loin pour le Bar’Hic. On a aussi le Terminus, on aimerait bien y faire un concert, mais ça peut être fini du jour au lendemain.

Xavier : C’est ça Rennes ville rock. Tous les bars ferment.

Avec en plus la Cité qui ne fera des concerts qu’en après-midi, pas très Rock’nRoll tout ça.

Gwen : Bah la Cité, ça a toujours été loin de nous. Ça ne nous a jamais vraiment intéressé d’organiser quelque chose là-bas. Donc oui, il faut toujours rester à l’affût de ce qui peut se passer et éventuellement parfois solliciter ou aller à la rencontre de nouveaux bars pour leur dire que s’ils veulent faire des concerts on peut leur amener du monde.

Xavier : Autrement, on est aussi plus sollicité directement par les groupes.

Dans vos 20 ans, vous avez aussi à un moment tenté l’aventure de la distribution de disques, comment ça s’est fait ?

Xavier : Ça c’est mon héritage. (Rires) On a commencé vers fin 90. Comme on passe des groupes dont les disques sont difficilement trouvables en France, il y avait des gens intéressés par ce qu’on passait à la radio et ils ne savaient pas où acheter les disques. On s’est donc dit qu’on allait créer une distro. Elle a toujours été assez modeste mais ça marchait quand même assez bien. Quand je suis parti en 2004, ça c’est plus ou moins arrêté. Il fallait prendre le temps de contacter les distributeurs, les labels ou les groupes. Je traitais différemment avec les uns ou les autres. Il faut stocker tous les disques, amener la distro à chaque concert. Il y avait de la vente par correspondance. Il fallait donc faire les colis et les amener à la poste. C’était donc beaucoup de temps, mais ça m’intéressait de distribuer des disques. Notre credo, ça a toujours été de faire découvrir des disques, que ce soit par l’émission de radio, en faisant des concerts de groupes pas très connus, en faisant des webzines… la distro ça rentrait dans ce cadre là.

Gwen : Au début des années 2000, on avait eu en distro des exemplaires du premier album de Liars ou de !!!. On ne les avait pas en 50 exemplaires mais c’est marrant de voir à quel point ils sont devenus énormes aujourd’hui.

Xavier : Notre objectif, ça a toujours été de faire découvrir des groupes qui sinon ne seraient appréciés que de 20 personnes. Pour moi, un des buts principaux de Kfuel est de médiatiser des groupes qu’on aime.

Gwen : Et si ça marche tant mieux pour eux. Ça nous prouve de temps en temps qu’on ne s’est pas trompé et qu’on a mis notre petite pièce dans l’édifice. Aujourd’hui, il y a notre copain Thierry Tanguy qui s’occupe de T-d-T-b. Tout ce dont on parle à Kérozène ou sur Perte et Fracas, il se débrouille à un moment pour en avoir et c’est là qu’on peut en acheter en France en tout cas.

Xavier : Maintenant, il y a beaucoup de distro directe sur Internet. Les frais de port des Etats-Unis sont toujours super chers mais il y a quand même beaucoup plus de facilités.

PoinoKfuelDe quelles autres assos rennaises vous sentez-vous proches dans l’esprit ?

Xavier : Les Trans pour moi (Rires).

Gwen : Actuellement en 2014, il y a Musiq’Alambic, Interzones, Tendresse et Passion, Etre assis ou danser… il y en quand même pas mal sur Rennes. Sinon, on reste dans le même état d’esprit que les gens de Mass Prod, Banana Juice. De toutes façons, on est proche de toutes les associations qui ne demandent pas de la thune à la ville de Rennes. (Rires) C’est la limite. On a toujours pensé, et on le pense de plus en plus, que c’est une drôle d’idée de demander de l’argent public pour organiser un concert. Pour nous, on peut demander des sous pour des lieux, comme le Jardin Moderne, l’Antipode ou l’Ubu. Il y a besoin d’argent pour payer les techniciens etc mais demander en plus des subventions pour organiser un concert, c’est déjà que tu ne crois pas au groupe et c’est faire payer deux fois. C’est faire une économie qui est dans une bulle. Tout ce business de la culture, on est vraiment contre ça.

Pour vos 20 ans, vous faites les choses en grand avec trois belles soirées pleines de groupes inratables. Parmi ceux qui ne sont pas très connus mais chéris des aficionados, il y aura Terminal Cheesecake. Vous pouvez nous parler un peu de ce groupe ?

Xavier : Ils sont encore plus vieux que nous (Rires).

Gwen : Quand j’ai commencé à m’intéresser au noise-rock, ça faisait partie des groupes mythiques. Rien que le nom déjà me parlait. Ils avaient des pochettes bizarres. Il avait fallu aller en Angleterre pour trouver leurs disques à l’époque. Ils avaient une aura un peu sulfureuse. Ils viennent de toute cette scène noise-indus anglaise qui a donné des groupes comme Godflesh, Head of David. Toute une mouvance un peu obscure mais qui était fascinante avec leur attitude froide, un peu hautaine et des sons puissants. Ils y mélangeaient les influences de la première vague electro anglaise. Après Terminal Cheesecake s’est mis à y mettre du dub, de l’ambient. A l’époque c’était donc une référence, mais très underground. C’était moins connu que des groupes comme Silverfish ou Therapy alors qu’ils ont puisé plein d’idées dans Terminal cheesecake.

C’est amusant de voir plusieurs papiers qui ressortent aujourd’hui sur ce groupe dont une excellente interview de Lelo J Batista pour Noisey.

Xavier : Ils se sont reformés il y a deux ans. Ils ont joué au Sonic Protest à Paris. Ils ont aussi joué à Lyon et on eu des retours vraiment dithyrambiques ce qui nous a motivé pour les contacter et les faire. On attend de voir ce que ça va donner mais ça a l’air de sacrément pulser.

Gwen : Les vidéos qu’on a pu voir sur Youtube sont très prometteuses, même pour du Youtube. Ils jouent très forts. C’est plus psyché que noise mais ça a l’air vraiment très bien.

Xavier : Il y a en plus un VJ qui projette des images derrière.

Gwen : Peut-être que ce sera LE concert psyché de l’année pour Kfuel. (Rires)

Un autre groupe que vous conseillez particulièrement ?

Gwen : Il ne faudra pas louper Bâteleuse le dimanche soir. Ce sera le dernier soir mais pour moi ce sera forcément la révélation de nos 20 ans et que tout le monde parlera de ce groupe dans 20 ans encore. Ils ont très peu fait de concerts. On avait fait Katawumpus, leur autre groupe, mais ça n’avait pas été la foule. Il faut dire que c’était le lendemain de la grosse soirée avec Mermonte et Lisabö pour les 15 ans de l’émission de radio.

Xavier : Sinon dans la catégorie « noise canal historique », il y aura Pord. Je les ai vus aux 10 ans de Rejuvenation à Paris et c’était le meilleur concert du festival pour moi. Leur nouvel album est énorme et pour tous ceux qui aiment le noise-rock typique, c’est à ne pas rater.

Gwen : Le vendredi, il y aura aussi Hands Up Who Wants To Die dont le nouveau disque est vraiment bien, moins noise-rock à la Amphetamine Reptile qu’à leurs débuts mais plus swamp-rock. On espère juste qu’ils ne vont pas boire comme des irlandais.

Xavier : On espère surtout que les gens n’iront pas qu’à la grosse soirée du samedi.

Gwen : Il faut venir vendredi découvrir Gordini. Ils sont en train de répéter à fond parce qu’ils ont les chocottes. (Rires)

Xavier : J’avais raté Pylone quand ils étaient venus à la Bascule et j’ai donc hâte de voir ça.

MiniaZavoutKfuelQui est ce que vous aimeriez inviter pour vos 25 ou 30 ans ?

Gwen : Les Wolfhounds ? (Rires)

Xavier : Il y a plein de groupes qu’on aimerait faire mais ils n’existent plus.

Avec toutes les reformations qu’il y a en ce moment, tout est possible.

Gwen : Le clin d’œil, ça pourrait être Big Black puisque c’est d’une de leurs chansons qu’on a pris le nom Kérozène.

Xavier : A un moment il était question que Shorty se reforme. Il avait failli revenir avec Big’N mais c’est le chanteur Al Johnson qui n’est pas trop chaud. Ils ont quand même commencé à répéter et ils le travaillent au corps donc on ne sait jamais ? Ce serait vraiment excellent de pouvoir les refaire. C’était notre deuxième concert en 1994. Ce serait un beau symbole.
Il y a aussi des groupes qu’on n’a jamais fait, qui n’existent plus, mais qui sont hyper importants comme Dazzling Killmen ou Craw qui rejouent encore un peu. Sinon ce n’est pas non plus les envies qui manquent dans les groupes actuels.

Gwen : On pourrait aussi faire un plateau néo-zélandais. Native Cats et Sharpie Crows, j’aimerais bien voir ça sur scène un jour.

Xavier : Ou encore les australiens de Ivy St ou Yes, I’m leaving dont le nouvel album qui sort bientôt est vraiment excellent.

Gwen : Tous ces groupes là, à part nous et New Noise, il n’y a pas grand monde à défendre leur musique. Bon, vu la distance il faudra sans doute faire dans les alliances ou monter un dossier de subvention. (Rires)

Xavier : Il y a aussi toute la clique des groupes finlandais comme Throat ou Baxter Stockman.

Gwen : Ouais mais cette fois on leur imposera de jouer sans bouchons d’oreilles. (Ils avaient fait exploser le limiteur de son du Bar’Hic en avril dernier).
J’aimerais bien aussi revoir Swans à Rennes.

Nous aussi. Surtout qu’ils sont devenus LA référence en matière de live et que le dernier album a mis tout le monde d’accord. C’est étonnant que personne ne les ait fait jouer dans le coin.

Gwen : Ben non, nous on a les Gérards à Rennes. (Rires) Brossard a fait Swans une fois à l’Ubu il y a longtemps, mais ça ne l’intéresse plus. Christophe Brault a toujours dit que c’était le concert le plus fort qu’il ait jamais vu de sa vie.

Pour finir, d’autres concerts sont déjà prévus ?

Gwen : Il y a Vaz, le 22 octobre et ensuite on va prendre une pause.

Il n’y a pas le retour de Total Victory ?

Gwen : Ce ne sera pas un concert Kfuel mais un concert Kerviniou (le label de Lester Brome).

Xavier : On s’est beaucoup concentrés sur les 20 ans donc on va souffler un peu, sauf s’il y a une proposition incontournable bien sûr. Donc rien de prévu mais de toutes façons, on n’a jamais eu des prévisions à long terme. On a six mois de prévisions au grand maximum.

20 ans de Kfuel : Petit florilège des 4 dernières années dans l’objectif d’alter1fo.

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Plus d’1fos sur le site de Kfuel

préventes de la soirée au Jardin et pass 2 soirs.

Retrouvez tous nos articles sur les 20 ans de Kfuel dans notre dossier.

1 commentaires sur “Kfuel à 20 ans : ode à l’éternel amateurisme

  1. Sabkfuel

    Plus précisément, K-Fuel, c’est entre huit et douze personnes en fonction des saisons et c’est aussi grâce à tous les membres passés que l’équipe actuelle peut fêter les vingt ans, qu’ils en soient remerciés. Ce sera également un plaisir de les (re)voir à l’occasion de cet anniversaire.

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